CONSEIL RÉGIONAL ORDRE DES MÉDECINS
Provence Alpes Côte d'Azur

Commentaires du code de déontologie  -  Documentation - Conseil Régional Ordre des Médecins - Provence Alpes-Côte d'Azur - ORDRE NATIONAL DES MEDECINS

Documentation

Commentaires du code de déontologie


    Introduction aux commentaires du code de déontologie (art 1)

  • Introduction aux commentaires du code

    INTRODUCTION AUX COMMENTAIRES DU CODE
     

    C'est en 1825 que le mot "déontologie" apparaît pour la première fois en langue française, dans la traduction de l'ouvrage du philosophe utilitariste anglais Jeremy Bentham intitulée "l'Essai sur la nomenclature et la classification des principales branches d'Art et Science".

    Il a formé ce terme à partir des racines grecques « logos » : discours et « déontos » ; ce qu’il faut faire. Il s’agit de dire « si telle ou telle action doit ou ne doit pas être faite ».

    Vingt ans plus tard, le Dr Max Simon publie le premier ouvrage de Déontologie médicale (voir note [1]) dont la parution coïncide avec le Congrès médical qui, rassemblant pour la première fois plus de 1000 médecins français à Paris, est l'occasion d'une prise de conscience et de la naissance du corps médical.

    Aujourd'hui la déontologie rassemble les éléments d'un discours sur les devoirs. C’est ce qui le distingue d’un recueil de principes éthiques, dont la non application n’encourt pas d’autres sanctions que morales.

    La déontologie médicale concerne le médecin qui exerce une profession - au sens strict du terme, qui suppose une certaine autonomie de pratique et de régulation - à laquelle les lois françaises donnent depuis près de deux siècles un monopole dans le domaine de la santé. Elle sert de référence aux instances juridictionnelles de l'Ordre des médecins, mais d'abord de guide aux médecins dans leur pratique quotidienne, au service des patients.

    Le code de déontologie médicale n'est pas seulement établi par la profession. Si celle-ci, représentée en l'occurrence par l'Ordre national des médecins, est chargée de l'élaborer, le texte qui en découle est soumis à l'administration, au Conseil d'Etat et finalement au gouvernement, chacun ayant la charge de vérifier sa conformité avec les lois et autres règlements régissant la société où exercent les médecins et la possibilité d'y apporter des modifications. Enfin, le code est publié au Journal Officiel sous la signature du Premier ministre.

    Le code de déontologie précise ainsi des dispositions réglementaires concernant un exercice professionnel. Elles sont subordonnées à d'autres textes plus importants, notamment la Constitution et les lois ; elles doivent être compatibles avec d'autres décrets et commandent d'autres textes de moindre portée, en particulier les arrêtés. Comme les autres citoyens, les médecins sont soumis aux lois - concernant par exemple le respect de la vie ou le secret professionnel - mais le bon fonctionnement de leur corps professionnel est favorisé par des règles propres.

    Le présent code de déontologie (voir note [2]) est la cinquième version, après le premier code de 1947 (voir note [3]), une deuxième version de 1955 (voir note [4]), la troisième de 1979 (voir note [5]) et la quatrième de 1995 (voir note [6]).

    Bien qu'étoffé au fil des versions successives (79 articles dans le code de 1947, 112 dans celui-ci), le code de déontologie médicale reste relativement concis, sans pouvoir entrer dans les détails ni envisager tous les cas particuliers et sans naturellement apporter explications ou justifications qui améliorent sa compréhension. C'est l'objet de ces commentaires.

    Les médecins militaires, qui ne sont pas tenus de s’inscrire à l'Ordre des médecins, disposent  de règles de déontologie propres (voir note [7]) largement inspirées du code s'appliquant aux civils mais tenant compte de leur pratique dans le cadre de l'institution militaire. Les autres professions médicales (chirurgiens-dentistes, sages-femmes), ou de santé (infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues) qui disposent également d'un Ordre, ont leur propre code de déontologie (voir note [8]).

    L'institution de l'Ordre des médecins, confirmée par l'ordonnance du 26 septembre 1945, a conduit à la rédaction du premier code de déontologie médicale, publié le 28 juin 1947. Celui-ci n'a que peu innové, reprenant des principes traditionnels régissant la pratique médicale. Les nouveaux médecins prêtent le serment médical, reprenant le  serment d’Hippocrate, ce dernier ayant déjà établi, il y a près de vingt-cinq siècles, des règles toujours valables : probité et dévouement du médecin qui doit préserver la vie, ne pas nuire, respecter les personnes malades, leurs intérêts, leur vie privée et le secret médical, être juste.

    Le code d’Hammourabi (1752 av. J.C.) renferme les premières dispositions sur la responsabilité du médecin, vues davantage sous l’angle pénal que sous l’angle moral (salaires, sanctions).

    Ces principes sont retrouvés, à quelques différences près, dans le Serment médical d’Assaph, médecin juif du VIIème siècle,

    Au XIIème siècle, un médecin de Cordoue, Maïmonide, reprend ces principes dans une "prière", qui mérite d'être également connue, où il ajoute la compétence et l'amour de la science, en en reconnaissant les limites et en exprimant le souci de la faire progresser.

    Depuis Montaigne, l'individu s'est émancipé et il prime aujourd'hui la collectivité, du moins en France et dans un nombre croissant de pays : le médecin a pour mission de soigner une personne avant d'avoir à défendre la santé publique.

     Le code de 1995 accentue l'affirmation des droits des  patients, la nécessité de les informer et de les protéger. Il prend en compte l'élargissement du rôle du médecin, au-delà des soins traditionnels qui faisaient parler de "ministère" dans le code de 1947, pour promouvoir la santé publique ; il reconnaît sa fonction de conseil, il insiste sur sa compétence et son entretien dans un contexte d'exercice moins libéral ou plus réglementé.

    L’actualisation du code répond à divers soucis de forme et de fond :

    - celui d'améliorer la rédaction des articles, en éliminant quelques obscurités ou redondances, et d'en remanier parfois l'ordre, pour mettre en relief les principes fondamentaux de la déontologie avant de les développer dans le cadre des différents modes d'exercice, ainsi que pour rapprocher les articles ayant un objet voisin ;

    - celui d'intégrer apports de la jurisprudence et références aux législations nouvelles;

    - celui de faire sa place au progrès scientifique et technique, notamment au développement de l'informatique ;

    - celui de tenir compte de l'évolution des pratiques professionnelles dans des domaines tels que la médecine de groupe, la médecine d'urgence, l'exercice salarié, la télémédecine ;

    - celui de faire écho aux grands débats éthiques : dons d'organes et de produits issus du corps humain, recherche sur la personne humaine, essais thérapeutiques,  fin de vie, assistance médicale à la procréation, tests génétiques.

    Des principes généraux se dégagent d'une rédaction qui  doit tenir compte de nombreux facteurs, sans pouvoir toujours respecter la simplicité souhaitable.

    1 - Le premier répond à la primauté de la personne (voir note [9]). Il est affirmé dès l'article 2, de deux manières. Tout d'abord le médecin est au service de "l'individu" avant d'être à celui de "la santé publique". Les deux termes se suivent, ils seront souvent associés et la distinction ne doit pas être exagérée. Cependant leur ordre n'est pas indifférent. Il distingue en effet la France d'autres pays, notamment de tradition anglo-saxonne. Par exemple le premier code de l'American Medical Association (1847) affirmait : "Le premier objectif de la profession médicale est de rendre service à l'humanité, en respectant pleinement la dignité de l'homme et les droits des patients." S'il y a conflit entre les intérêts de l'humanité et ceux de la personne, il importe de savoir lesquels a priori vont passer en premier. Cet ordre doit être d'autant plus souligné que la réflexion européenne évolue en suivant plutôt l'approche française, donnant la priorité à l'être humain. Ces remarques sont tempérées au cas où un individu fait peser une menace avérée sur la collectivité.

    Dans un deuxième temps, l'article 2 insiste sur le respect de la vie humaine, de la personne et de sa dignité.

    Le respect de la vie n'est pas propre au médecin mais s'applique particulièrement à lui, sans être poussé à l'absurde (acharnement thérapeutique). Il en va de même du fameux principe "Primum non nocere", car il n'y a pratiquement pas d'intervention médicale sans risque (l'effet placebo a pour contrepartie un effet nocebo) et le respecter trop scrupuleusement conduirait à l'inaction, elle-même dangereuse : ce souci doit donc être proportionné aux risques engendrés par la maladie, présente ou à venir. Toute mutilation est interdite.

    La "dignité" a été ajoutée  en 1995 ; on peut considérer qu'elle va de soi, impliquant des égards déjà soulignés par Hippocrate ; sans doute "l'autonomie" aurait-elle eu plus de signification : ce sera peut-être pour le prochain code... Le respect comporte de multiples termes, précisés à diverses reprises tout au long du code.

    Une de ses manifestations les plus importantes tient dans le secret médical, affirmé dès Hippocrate, inscrit dans le code pénal (1810) et devenu le secret professionnel dans le code pénal, entré en vigueur en 1994. Son importance persistante est attestée par l'avancement du premier article le concernant (en 1979, article 11, désormais article 4). Il est indispensable à l'exercice médical qui impose une confiance réciproque entre les deux participants du "colloque singulier" (expression de Georges Duhamel, 1935) ou de la "rencontre singulière" (expression de Paul Ricoeur , 1996) : cette confiance est nécessaire à la confidence, le patient doit pouvoir confier les choses les plus intimes qui le concerne, ou le médecin y accéder - ce qui est indispensable à la qualité des soins - pourvu que l'un et l'autre sachent que rien n'en filtrera en dehors d'eux. C'est un secret partagé d'abord, naturellement, entre patient et médecin, puis éventuellement, selon les nécessités, avec pertinence et sans excès, avec d'autres soignants concourant au diagnostic ou au traitement.

    Ce respect persiste  après la mort du patient, en cas d'autopsie ou de prélèvement d'organe, comme pour le secret médical.

    2 - Le deuxième principe, propre à la médecine française et qui conforte la primauté de la personne, est un principe de liberté. Il fonde l'exercice dit libéral de la médecine mais joue aussi pour des médecins d'autre exercice, la distinction n'étant pas si tranchée entre les uns et les autres (les premiers ne jouissent pas d'une liberté absolue, les second n'en sont pas privés).

    Cette liberté concerne d'abord le patient. Il est libre de choisir son médecin, sous réserve de sa compétence, beaucoup plus que dans d'autres pays. Il est libre d'accepter ou de refuser ce que lui propose le praticien, ce qui fonde le "consentement éclairé". Son consentement n'autorise pas pour autant le praticien à se livrer à des actes illégitimes. L'exercice de cette liberté est accru par un net renforcement de l'information du patient, une information "loyale, claire et appropriée". Elle est inscrite parmi les devoirs du médecin et précisée par la loi dans des cas particuliers comme la recherche sur la personne humaine, l'interruption volontaire de grossesse, l'assistance médicale à la procréation ou la tenue de registres épidémiologiques... Hors situation d'urgence où l'obligation de porter secours prime, le patient doit donner son consentement pour tout ce qui le concerne : examens, consultations, hospitalisations, soins de toute nature, comme pour ce qui concerne son dossier médical (constitution, transmission, etc.). Cet agrément ne disparaît pas en fin de vie, même s'il est difficile de recueillir alors l'avis du patient ou de tenir compte d'avis antérieurement exprimés à un médecin ou transmis par des proches.

    La liberté du médecin équilibre celle du patient. Il a l'obligation de porter secours à une personne en péril qui l'appelle ou lui est signalée. Il se doit de faire preuve de moralité, de probité, de dévouement, principes qui honorent sa profession. Il dispose d'une liberté de prescription tenant compte des données acquises de la science ainsi que des ressources disponibles pour la santé publique. Enfin, il peut faire valoir une clause de conscience pour refuser des soins qui lui sont demandés à trois conditions : en dehors d'une situation d'urgence, en en informant le patient et en favorisant la continuité des soins, par relais avec un autre médecin, choisi par le patient.

    Cette double liberté fonde le contrat de soins habituels, contrat tacite ou implicite plus souvent qu'écrit ou explicite, mais qui n'en a pas moins une valeur reconnue.

    3 - Une troisième catégorie de principes concerne les qualités exigibles du médecin, du fait de la mission qui lui est confiée par la société. Il est personnellement responsable de ses actes avec, en corollaire, la nécessité de préserver son indépendance professionnelle. Cette indépendance, assurée dans l’intérêt des patients, est la clef de voûte de l'exercice médical, qui ne saurait dépendre d'influences personnelles ou matérielles ou de liens vis-à-vis d'employeurs, d'organismes payeurs, de partenaires industriels ou même humanitaires, etc. Cette responsabilité s'étend aux personnes et collaborateurs travaillant sous son autorité. Elle se partage partiellement lors de travail en équipe ou en réseau.

    Pour répondre à sa mission, le médecin doit être compétent. Cette compétence résulte des études qu'il a faites, parfois d'une formation complémentaire acquise et reconnue par les commissions de qualifications gérées par l'Ordre, de son exercice habituel qui peut conduire à développer certaines aptitudes tandis que d'autres s'estompent. Restant posée dans son principe, la compétence générale que donnait le titre de docteur en médecine  connaît de fait de sérieuses limitations. Elle est entretenue par un développement professionnel permanent, un perfectionnement régulier pour tenir compte des innovations scientifiques et techniques comme de nouveaux modes d'exercice. La pratique professionnelle est appréciée par une évaluation dont le besoin se fait de plus en plus sentir et qui a toute raison de devenir périodique. Cette compétence est soumise à des installations et à des moyens matériels dont le médecin dispose selon sa pratique. Le médecin doit être aussi disponible, pour répondre à la demande du patient quelle qu'en soit la nature (écoute, examen, conseil, soin), porter secours en cas d'urgence, assurer la permanence des soins..

    Il doit exercer sans discrimination vis-à-vis de quiconque, visant même à rétablir une certaine équité quand sont concernées des personnes en difficulté, mineures, majeures vulnérables, privées de liberté, victimes de sévices  ou de conflits sociaux ou guerriers.

    4 - Enfin ces principes, pour être appliqués, appellent un certain nombre de règles, précisées pour un exercice individuel ou des échanges de toutes sortes avec d'autres médecins ou d'autres professionnels de santé. La solidarité entre médecins, déjà énoncée dans le serment d'Hippocrate, est normale au sein d'une collectivité : c'est la confraternité. Dans le détail, ces règles varient un peu selon le mode d'exercice, comme cela est précisé dans le titre IV du présent code.

    Ces indications générales mettent en évidence une évolution dans la continuité. Les grands principes demeurent. Certains changements n'en sont pas moins conséquents ; ils sont dus à l'évolution de la médecine - des connaissances qui la fondent et de ses conditions d'exercice - comme à celle de la société dans laquelle elle se pratique et qu'elle est censée servir.

     

    ([1]) M. Simon, « Déontologie médicale ou des devoirs et des droits des médecins dans l'état actuel de la civilisation », Paris Baillière, 1845

    ([2]) Décret n° 2004-802 du 29 juillet 2004 relatif aux parties IV et V (dispositions réglementaires) du code de la santé publique et modifiant certaines dispositions de ce code (J.O. du 8 août 2004), qui a codifié le code de déontologie médicale aux articles R.4127-1 à R.4127-112 du code de la santé publique

    ([3]) Règlement d'administration publique n° 47-1169 du 27 juin 1947 (J.O. du 28 juin 1947)

    ([4]) Décret n° 55-1591 du 28 novembre 1955 (J.O. du 6 décembre 1955)

    ([5]) Décret n° 79-506 du 28 juin 1979 (J.O. du 30 juin 1979)

    ([6]) Décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995 (J.O. du 8 septembre 1995)

    ([7]) Décret n° 2008-967 du 16 septembre 2008 fixant les règles de déontologie propres aux praticiens des armées

    ([8]) Chirurgiens-dentistes : articles R4127-201 à R.4127-285 du code de la santé publique ; sages-femmes : articles R.4127-301 à R.4127-367 ; infirmiers : articles R.4312-1 à R.4312-49 ; masseurs-kinésithérapeutes : articles R.4321-51 à R.4321-145 ; pédicures-podologues : articles R.4322-31 à R.4322-96

    ([9]) "La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l'être humain dès le commencement de sa vie". (Article 16 du code civil / loi n° 94-653 du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain.)

  • Article 1 - Champ d'application du code

    Article 1 (article R.4127-1 du code de la santé publique)


    Les dispositions du présent code s'imposent aux médecins inscrits au tableau de l'Ordre, à tout médecin exécutant un acte professionnel dans les conditions prévues à l' article L.4112-7 du code de la santé publique ou par une convention internationale, ainsi qu'aux étudiants en médecine effectuant un remplacement ou assistant un médecin dans le cas prévu à l' article 88 

    Conformément à l' article L.4122-1 du code de la santé publique, l'Ordre des médecins est chargé de veiller au respect de ces dispositions.

    Les infractions à ces dispositions relèvent de la juridiction disciplinaire de l'Ordre.

  • Devoirs généraux des médecins (art 2 à 31)

  • Article 2 - Respect de la vie et de la dignité de la personne

    Article 2 (article R.4127-2 du code de la santé publique)

    Le médecin, au service de l'individu et de la santé publique, exerce sa mission dans le respect de la vie humaine, de la personne et de sa dignité.
    Le respect dû à la personne ne cesse pas de s'imposer après la mort.

    L'essentiel de l'éthique médicale est condensé dans cet article qui fait ressortir les obligations morales du médecin.

    Le praticien doit honorer le contrat moral qui le lie à un patient, répondre en conscience à une confiance et accomplir un devoir qui lui est propre. La société lui a confié un rôle privilégié : donner des soins aux personnes malades, mais aussi, être le défenseur de leurs droits, des personnes fragiles ou vulnérables (mineurs, majeurs protégés, personnes âgées handicapées ou exclues des soins …), lutter contre les sévices quels qu'ils soient et quelles que soient les circonstances. Il doit être un acteur vigilant et engagé dans la politique de santé publique, qu'il s'agisse de la prévention, de l'épidémiologie ou de l'éducation à la santé. Toutefois, le médecin doit se garder, dans cette action de santé publique, des effets pervers d'une prévention collective autoritaire.

    1 - L'exercice de la médecine est un service

    L'acte médical est un acte humanitaire. Ainsi que le propose l'Association Médicale Mondiale, depuis 1948, dans le serment de Genève, le médecin est "au service de l'humanité". Ce service fait la grandeur de la médecine.

    Il consiste à appliquer toutes les connaissances scientifiques et les moyens techniques adaptés afin de prévenir la maladie, de prodiguer des soins et de soulager la souffrance.

    L'exercice de la médecine comporte une double exigence : morale, car cette activité implique altruisme et dévouement, et scientifique, car elle impose, comme un devoir, la compétence. Celle-ci est acquise par une formation, initiale et continue, de haut niveau.

    Les progrès de la science médicale ont donné une nouvelle dimension à la mission du médecin. Au "pouvoir médical" sans réelle efficacité thérapeutique a succédé la toute-puissance du "savoir" comme l'exprime Jean Bernard (voir note 1). Grâce notamment aux techniques de réanimation, à la maîtrise de la reproduction,  à la transplantation, au génie génétique, l'homme a déplacé les frontières de la vie, celles de la naissance et de la mort.

    2 - Service de l'individu

    L'individu passe, en France, avant la collectivité.

    Cette primauté de l'être humain par rapport à la société est réaffirmée dans la convention sur les droits de l'homme et la biomédecine (voir note 2) en ces termes : “ l’intérêt et le bien de l’être humain doivent prévaloir sur le seul intérêt de la société ou de la science ”.

    La déclaration universelle des Droits de l'Homme de 1948 pose en principe que "tous les êtres humains naissent et demeurent libres et égaux en dignité et en droits". Parmi ces droits irrécusables se situe le droit aux soins (et non le droit à la santé, confusion fréquente).

    La loi interdit toute discrimination dans l’accès aux soins (voir note 3).

    Le médecin est responsable de la personne qui se confie à lui. Son indépendance professionnelle (article 5) doit le soustraire à toute pression ou injonction, à toute influence ou à tout sentiment qui pourrait porter préjudice au patient.

    3 - Service de la santé publique

    L'acte de soins individuel ne suffit pas, il faut également prendre en compte l'intérêt général. Chaque décision assumée par le médecin pour une personne prise en charge, concerne aussi la collectivité.

    Plutôt que de définir la santé publique, il convient de parler d'un "esprit" de santé publique qui consiste à situer un problème de santé dans son ensemble, c'est-à-dire l'Homme dans son environnement social et professionnel.

    Tout médecin doit être conscient que certains actes, simples en apparence, sont, en fait, importants en termes de santé publique :

    - par exemple, le certificat de décès, sur lequel le médecin indique la cause de la mort, est le document de base des données épidémiologiques ; remplir un certificat de décès est donc un acte sérieux, indispensable à la santé publique et non une banale formalité administrative ;

    - autre cas particulier, le paradoxe de la prévention : une mesure appliquée à beaucoup profite seulement à quelques-uns, tout en apportant de grands bénéfices à la communauté (c'est le cas des vaccinations, du port de la ceinture de sécurité, par exemple).

    Les pouvoirs publics doivent pouvoir compter sur les médecins pour appliquer des mesures sanitaires à l'ensemble de la population telles que les vaccinations, le dépistage, les actions éducatives pour la santé, ainsi que pour le bon fonctionnement des lois sociales qui comprend les problèmes d'économie de santé (article 12 - voir note 4).

    4 - Individu et collectivité

    "Le médecin doit concilier l'intérêt individuel et l'intérêt collectif : il doit respecter à la fois un homme et l'Homme. Les deux devoirs sont inséparables, même s'ils apparaissent parfois antagonistes. À nous de tenter de les unir et de réussir cette union" (voir note 5).

    Le secret médical en est un des exemples des plus démonstratifs. En effet, le secret médical est, à la fois, d'intérêt privé, puisque le médecin doit protéger l'intimité de la personne qui se confie à lui, et d'intérêt public car c’est une condition nécessaire à l’exercice de la médecine (article 4). 

    Citons aussi les contraintes socio-économiques : peut-on considérer que l'intérêt collectif puisse s'imposer au détriment de l'intérêt individuel ? Une politique de santé peut-elle décider, par exemple, quels seront les patients susceptibles de bénéficier des moyens mis en œuvre par la collectivité et quels autres en seront exclus ?...

    Le rapport n° 57 du Comité Consultatif National d’Ethique “ Progrès techniques, santé et modèle de société : la dimension éthique des choix collectifs ” a apporté par ses constatations et recommandations une contribution intéressante dans ce domaine (voir note 6).

    5 - Respect de la vie humaine

    Le respect de la vie humaine est un principe fondamental non seulement de la médecine, mais de notre civilisation.

    Risque thérapeutique

    La médecine a évolué : des techniques plus audacieuses, des thérapeutiques plus actives ont augmenté les risques de complications. Plus efficace, la médecine est devenue aussi plus dangereuse. Le médecin doit éviter de faire courir au patient des risques injustifiés (article 40).

    L'imprudence thérapeutique médicale ou chirurgicale est sanctionnable. Cependant la prise de risque est un facteur de progrès, mais à certaines conditions : que ce risque soit identifié, évalué par le médecin, proportionné à la gravité de la maladie, annoncé avec loyauté au patient, afin que celui-ci donne un consentement éclairé.

    Il s'agit de décisions difficiles, laissées à la conscience et à la compétence de celui qui soigne, dont il doit pouvoir se justifier. Le médecin est aidé par les enseignements reçus, sa formation, les principes de la technique et la valeur de son expérience.

    Diagnostic prénatal

    L'évolution des techniques de biologie et d'imagerie a mis à la disposition du médecin des informations particulièrement intéressantes sur la vie embryonnaire et sur l'enfant à naître. Ces explorations permettent de mettre en évidence des anomalies fœtales incompatibles avec la vie, ou dont l'enfant sera porteur à la naissance et durant toute son existence. Le diagnostic prénatal est un acte dont l'objet est positif puisque, dans la majorité des cas, il permet au médecin de rassurer les parents ou peut ouvrir des possibilités thérapeutiques. Dans les autres  situations - anomalies graves, incurables - la conduite à tenir est plus difficile à définir. L'information complète du couple concerné, sans hâte, intelligible, est importante. Dans ces situations difficiles, l'engagement personnel du médecin est essentiel. Il doit apporter son expérience, son sens des responsabilités, son esprit d'humanisme, sa rigueur morale et scientifique. La concertation au sein d'une équipe, le recours à d'autres avis, sont souvent nécessaires sinon indispensables pour ne pas s'enfermer dans une réflexion exclusivement personnelle (articles 70, 32 et 33). Situation exemplaire de l'application de l'éthique, il n'existe pas de solution standard mais une solution adaptée à chaque cas.

       Limites morales de la réanimation

    Le respect de la vie humaine a pu conduire à des excès. Le bon sens indique et toutes les autorités morales ont reconnu que "respect de la vie" ne veut pas dire prolongation à tout prix de la vie humaine dans un cas désespéré. 

    L'acharnement thérapeutique (article 37) doit être dénoncé : quand tout est indiscutablement perdu, il est critiquable de maintenir en vie artificiellement, avec des techniques qui peuvent être douloureuses ou pénibles, un mourant sans espoir de survie, alors qu'il est indispensable de traiter la douleur et d'apporter un soutien psychologique et moral.

    Cette question qui est souvent traitée sans nuances, à l'occasion d'un exemple spectaculaire, est en réalité très difficile. Il s'agit des limites de la réanimation.

    La prolongation ou la cessation des soins dans les comas prolongés fournit la matière d'une littérature très abondante, mais confuse, car on a confondu souvent "coma dépassé" (la mort cérébrale) et "coma prolongé".

    La réanimation médicale, qui a transformé le pronostic des états graves, (soins cardiaques intensifs, réhydratation judicieuse, respiration assistée, nutrition parentérale, etc.) n'aurait jamais été possible sans l'obstination des réanimateurs. Il faut, devant les états les plus graves, lutter avec tous les moyens possibles tant qu'il existe un espoir, si faible soit-il, mais il est déraisonnable de poursuivre une lutte acharnée, surtout si les moyens employés sont pénibles pour le patient, lorsqu'il n'y a plus aucun espoir (voir note 7).

    Dans certains cas, le médecin devra prendre en considération, pour arrêter sa ligne de conduite, la qualité de la vie réservée au patient - grandement déterminée par l'avis de ce dernier - à l'issue de l'action thérapeutique : prolongation artificielle de la vie chez certains incurables comme chez certains nouveau-nés, trachéotomie pour assistance respiratoire prolongée d'une personne atteinte d'une neuropathie irréversible, ablation d'une tumeur maligne cérébrale qui laisserait la personne gravement handicapée.

    Ainsi, même cette règle morale majeure qui nous gouverne, le respect de la vie humaine, ne doit pas être suivie sans discernement, avec une obstination excessive. Déjà chez Hippocrate, la dignité de la personne passe avant la préservation de la vie à tout prix. L'éthique médicale ne se laisse jamais emprisonner dans des formules simplistes ou dans des réponses stéréotypées. Elle exige le jugement nuancé, le choix critique bien pesé, de celui qui assume la responsabilité des soins.

    Suicide

    Le sens de l'activité médicale est de ramener à la vie ceux qui sont en danger. Le cas du sujet suicidaire n'est pas une exception. Le médecin se doit de le ramener à la vie par ses soins, même malgré lui.

    Le médecin ne peut d'aucune manière se faire le complice d'un suicide.

    6 - Respect de la personne et de sa dignité

    Respecter la personne, son intégrité physique et mentale, son intimité et sa dignité représente une valeur essentielle de notre société et un devoir primordial du médecin (voir note 8).

    Le médecin exprime ce respect en soignant avec la même conscience toutes les personnes malades, sans discrimination d'origine, de convictions politiques ou religieuses, de condition sociale, quels que soient les sentiments qu'ils lui inspirent et quelles que soient les circonstances, en temps de guerre comme en temps de paix (article 7).

    Ces recommandations revêtent beaucoup d'importance. Dans un passé récent, l'infection par le VIH l’a rappelé. Comme d'autres infections transmissibles ou contagieuses lors des siècles passés, le sida a suscité les mêmes réactions irrationnelles et attitudes d'exclusion vis-à-vis de patients ou de groupes de personnes considérées comme vecteurs de la maladie.

    Les recherches sur le génome humain et leurs applications ouvrent d’immenses perspectives d’amélioration de la santé des individus mais elles doivent en même temps respecter pleinement la dignité, la liberté et les droits de l’homme ainsi que l’interdiction de toute forme de discrimination fondée sur les caractéristiques génétiques (voir note 9).

    Ce respect de la personne exige que le médecin honore le contrat moral qui le lie au patient, en le considérant, dans toutes ses “ prérogatives ” d’être humain, c’est-à-dire, en évitant de le traiter en inférieur, en mineur, à plus forte raison en objet d’expérimentation. Ce respect impose l’obligation du secret professionnel, droit du patient et devoir absolu du médecin. Le patient doit être certain qu’il ne sera pas trahi par celui auquel il a donné sa confiance (article 4).

    De la même logique découlant de l’accès des praticiens à l’intimité de la personne, dérive l’interdit des relations sexuelles entre médecins et patients (voir note 10), dont on connaît les effets dévastateurs sur ces derniers.

    Ce respect implique d’autres impératifs : le patient doit avoir la liberté de choisir son médecin (article 6) ; il peut exiger de lui, toutes les informations utiles concernant son état de santé, l’évolution de sa maladie, les examens et les traitements qui lui sont proposés (article 35). Cette information, loyale et compréhensible, est un autre devoir du médecin et répond à la nécessité d’obtenir le consentement libre et éclairé du patient (article 36).

    Le médecin doit respecter la dignité du patient. Mais comment définir la dignité humaine ? C’est elle qui fonde dans notre civilisation l’interdit absolu de l’esclavage, de la torture et de tout traitement dégradant qui détruirait l’humanité de l’être. La dignité peut être définie comme l’image de soi-même dans le regard des autres ; et toute relation humaine de qualité est fondée sur une estime réciproque. “ La dignité humaine n’est pas un droit, une propriété, ni même un attribut individuel à reconnaître ou à revendiquer, elle est peut-être ce qui nous permet de participer à la communauté humaine ” ( voir note 11).

    Respecter la dignité d’un patient, c’est reconnaître sa singularité, le soigner avec considération et dévouement, lui apporter le soutien psychologique qui lui est nécessaire ; c’est aussi savoir l’accompagner au terme de sa vie.

    7 - Respect après la mort

    Le respect dû à la personne se perpétue après sa mort :

    • d’une part, s’impose un respect de la dépouille mortelle qui sera manipulée dignement, particulièrement en cas d’autopsie ou si un prélèvement est fait pour transplantation. Le code de la santé publique précise dans son article L.1232-5 : “ Les médecins ayant procédé à un prélèvement ou à une autopsie médicale sur une personne décédée sont tenus de s’assurer de la meilleure restauration possible du corps ”. À plus forte raison, s’interdira-t-on des manipulations ayant motivé un arrêt d’Assemblée du Conseil d’Etat, rendu le 2 juillet 1993 (req. n° 124960) affirmant que “ les principes déontologiques fondamentaux relatifs au respect de la personne humaine, qui s’imposent au médecin dans ses rapports avec son patient, ne cessent pas de s’appliquer avec la mort de celui-ci ”;
       
    • d'autre part, il faut respecter sa mémoire : à ce titre, le secret médical ne s'éteint pas avec la mort du patient. Le médecin continuera à respecter l'intimité de la personne qu'il a traitée vis-à-vis de la famille ou de proches (article 4) et s'interdira toute indiscrétion lors d'une communication scientifique ou d'un enseignement, à plus forte raison toute révélation publique pour un personnage connu.
       


     (1) "L'homme changé par l'homme". Paris : Buchet-Chastel, 1975

    (2) Convention pour la protection des droits de l'homme et de la dignité de l'être humain à l'égard des applications de la biologie et de la médecine - Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine - Conseil de l'Europe, Oviedo – 4 avril 1997

    (3) Article L.1110-3 du code de la santé publique : « Aucune personne ne peut faire l’objet de discriminations dans l’accès à la prévention, ou aux soins »

    (5) L. RENE - Séance inaugurale du 3ème congrès d'éthique médicale, 1991 - Les actes p. 16.

    (6) Cahier du CCNE n° 16 - Juillet 1999

    (7) Les limitations et arrêts de thérapeutique(s) actives(s) en réanimation adulte. Recommandations de la Société de Réanimation de Langue Française (Juin 2002, réactualisées en septembre 2009).

    (8) Article 16 du code civil : « La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l'être humain dès le commencement de sa vie ».

    Article L.1110-2 du code de la santé publique : « La personne malade a droit au respect de sa dignité »

    (9) L’article 2 de la Déclaration Universelle sur le génome humain et les Droits de l’Homme, adoptée le 11 novembre 1997 par l’UNESCO précise :

    « a) chaque individu a droit au respect de sa dignité et de ses droits, quelles que soient ses caractéristiques génétiques.

    b) cette dignité impose de ne pas réduire les individus à leurs caractéristiques génétiques et de respecter le caractère unique de chacun et leur diversité. »

    (10) Serment d’Hippocrate : « Dans quelque maison que j’entre, j’y entrerai pour l’utilité des malades, me préservant de tout méfait volontaire ou corrupteur et surtout de la séduction des femmes et des garçons, libres ou esclaves. »

    (11) I. MARIN, « La dignité humaine, un consensus ? » la revue Esprit, Fév.1991.

  • Article 3 - Principes de moralité et de probité

    Article 3 (article R.4127-3 du code de la santé publique)

    Le médecin doit, en toutes circonstances, respecter les principes de moralité, de probité et de dévouement indispensables à l'exercice de la médecine.

     Il a paru nécessaire d'énoncer ces principes en tête du présent code, peut-être en raison d'un certain discrédit jeté sur "la morale", en général et pas seulement en médecine.

    Si la moralité renvoie aux mœurs d’une société, celle du médecin a une dimension propre à l’exercice de la profession de médecin. Les éléments les plus importants dans un pays démocratique en sont les lois qui s'imposent à tous. Les médecins y sont soumis et s'en trouvent protégés. Cependant la profession médicale a une position prééminente, dans le domaine des soins : cela justifie en contrepartie des règles supplémentaires précisées dans le présent code. Les mœurs évoluent en fonction des mentalités mais aussi, de plus en plus, d'une réflexion éthique qui n'est pas réservée à une profession ou à un ensemble de professions et déborde les frontières.

    Ces principes généraux évoluent vers une défense accrue des individus, mais peuvent entrer en conflit avec des morales personnelles (voir note 1). La morale collective et professionnelle prime la conscience individuelle à laquelle on se référait naguère volontiers ; celle-ci ne se trouve pas niée, ni même dévalorisée, mais elle s'efface derrière le respect d'autrui : un médecin ne saurait appliquer et imposer ses propres convictions à ceux qu'il soigne, surtout si elles diffèrent des leurs.

    Cependant l'inverse va de soi : un patient ne peut obtenir d'un médecin des services que le second réprouverait. La loi du 17 janvier 1975 (voir note 2) a ainsi institué - à propos de l'interruption volontaire de grossesse, mais de portée générale - la "clause de conscience" qui permet à un médecin de refuser ses soins, sous certaines conditions. Le médecin est aussi solidaire de ses confrères et doit s'abstenir de tout acte de nature à déconsidérer la profession (article 31).

    La probité est un principe ancien qui a accompagné le développement de l'humanité. Le médecin ne peut offrir au patient que des services légitimes, il ne peut le faire bénéficier d'avantages illégitimes au prix de fausses déclarations, réprimées pour tous par le code pénal (article 441-8) et aussi prohibées, pour les médecins, par le présent code (articles 24, 28).

    Les relations professionnelles de médecin à patient se distinguent des relations de personne à personne soumises aux règles générales d'honnêteté ; il ne saurait y avoir confusion entre les unes et les autres. La distinction s'impose aussi pour un médecin susceptible d'avoir plusieurs fonctions ; elles ne sauraient se confondre vis-à-vis d'un même patient pour lequel un praticien ne peut, par exemple, jouer à la fois les rôles de médecin traitant et de médecin expert. Enfin le médecin ne peut cumuler des fonctions susceptibles d'entamer son indépendance professionnelle ou de le faire bénéficier d'avantages indus (articles 26, 27).

    Comme la moralité et la probité, le dévouement va de soi vis-à-vis de personnes en difficulté et qui n'ont d'autres ressources que de s'adresser au médecin à qui elles reconnaissent par là un rôle important. Ce dévouement est le corollaire de la mission de service donnée au médecin (article 2). Il peut imposer certains sacrifices mais demande principalement une disponibilité (article 9) pour aider autrui. Cette disposition relève de l'altruisme qui, avant d'être dévouement et générosité, est attention portée à autrui. Cette attention entraîne une reconnaissance de cet autre, qui est semblable mais aussi différent dans son altérité, singulier. Son âge, son sexe, sa profession, sa situation, ses convictions diffèrent, sans que le médecin ait à porter de jugement sur ces qualités, même s'il a à les connaître pour soigner, sans qu'elles puissent influencer la qualité de son intervention (article 7). Ce dévouement n'est pas pour autant sans limites : le médecin a aussi des intérêts personnels respectables, qui ne peuvent être systématiquement sacrifiés, et il peut faire valoir la clause de conscience pour refuser ses soins (article 18 et 47).


    (1) Article L.4123-1 du code de la santé publique : « En aucun cas, il (l’Ordre) n'a à connaître des actes, des attitudes, des opinions politiques ou religieuses des membres de l'ordre ».

    (2) Loi n° 75-17 du 17 janvier 1975 relative à l'interruption volontaire de la grossesse (J.O. 18 janvier 1975), article L.2212-8 du code de la santé publique

  • Article 4 - Secret professionnel

    Article 4 (article R.4127-4 du code de la santé publique)

    Le secret professionnel, institué dans l'intérêt des patients, s'impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi.

    Le secret couvre tout ce qui est venu à la connaissance du médecin dans l'exercice de sa profession, c'est-à-dire non seulement ce qui lui a été confié, mais aussi ce qu'il a vu, entendu ou compris.

    De très ancienne tradition, le secret médical reste un des piliers de l'exercice de la médecine contemporaine (voir note [1]). En effet, « il n’y a pas de soins sans confidences, de confidences sans confiance, de confiance sans secret » (voir note [2]). Le médecin ne doit rien révéler de ce qu’il a connu ou appris sur son patient.

    Le secret professionnel du médecin ou secret médical – les deux termes sont employés indifféremment - est à la fois d'intérêt privé et d'intérêt public :

    • D'intérêt privé : le médecin doit garantir le secret à la personne qui se confie à lui; elle doit être assurée de ne pas être trahie. Sa confiance doit être sans faille, si elle a à donner une information intime utile au médecin et aux soins. Respecter le secret est un comportement imposé par la nature des informations dont la divulgation à des tiers pourrait porter atteinte à la réputation, à la considération ou à l'intimité de la personne qui s'est confiée au médecin ; le droit au respect de l'intimité est inscrit dans la déclaration universelle des Droits de l'Homme.
    • D'intérêt public : l'intérêt général veut que chacun puisse être convenablement soigné et ait la garantie de pouvoir se confier à un médecin, même s'il est dans une situation sociale irrégulière/marginale, pour bénéficier de ses soins, sans craindre d'être trahi ou dénoncé.


    Le secret est un devoir du médecin.

    Le code de déontologie formule la règle du secret médical, dès son article 4 pour en montrer l'importance. Il le fait de façon beaucoup plus explicite que le code pénal et sur le seul terrain de l'exercice de la médecine. L'article 4 en pose le principe et en définit la substance. Ses conséquences sont développées à l'article 72 en ce qui concerne les personnes qui assistent le médecin, aux articles 73 et 104 en ce qui concerne les documents médicaux.

    Le secret n’est pas opposable au patient. Au contraire, le médecin lui doit toute l’information nécessaire sur son état, les actes et soins proposés ou dispensés (article 35). Si le médecin est amené à retenir une information vis-à-vis du patient, usant ainsi de la faculté que lui ouvre l’article 35, c’est pour le protéger d’une révélation traumatisante et non au nom du secret médical.

    1 - Le secret professionnel s'impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi

    Chronologiquement, c’est d’abord le code pénal qui, en sanctionnant toute violation du secret auquel sont astreints certains professionnels – au premier rang desquels les médecins – donne un support légal à cette obligation. Elle figure aujourd’hui sous l’article 226-13 du code pénal.

    Les codes de déontologie médicale successifs viendront en préciser la définition avant que n’intervienne l’article L.1110-4 du code de la santé, introduit par la loi n°2002-303 du 4 mars 2002 qui consacre un droit du patient.

    A – LA LOI

    • Code de la santé publique - Article L.1110-4 :

    « Toute personne prise en charge par un professionnel, un établissement, un réseau de santé ou tout autre organisme participant à la prévention et aux soins a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations la concernant.

    Excepté dans les cas de dérogation, expressément prévus par la loi, ce secret couvre l’ensemble des informations concernant la personne venues à la connaissance du professionnel de santé, de tout membre du personnel de ces établissements ou organismes et de toute autre personne en relation de par ses activités avec ces établissements ou organismes. Il s’impose à tout professionnel de santé ainsi qu’à tous les professionnels intervenant dans le système de santé.

    Deux ou plusieurs professionnels de santé peuvent toutefois sauf opposition de la personne dûment avertie, échanger des informations relatives à une même personne prise en charge, afin d’assurer la continuité des soins ou de déterminer la meilleure prise en charge sanitaire possible. Lorsque la personne est prise en charge par une équipe de soins  dans un établissement de santé, les informations la concernant  sont réputées confiées par le malade à l’ensemble de l’équipe.

    Les informations concernant une personne prise en charge par un professionnel de santé au sein d’une maison ou d’un centre de santé sont réputées confiées par la personne aux autres professionnels de santé de la structure qui la prennent en charge, sous réserve :

    1° du recueil de son consentement exprès, par tout moyen, y compris sous forme dématérialisée. Ce consentement est valable tant qu’il n’a pas été retiré selon les mêmes formes ;

    2° de l’adhésion des professionnels concernés au projet de santé mentionné aux articles L.6323-1 et L.6323-3.

    La personne, dûment informée, peut refuser à tout moment que soient communiquées des informations la concernant à un ou plusieurs professionnels de santé.

    Afin de garantir la confidentialité des informations médicales mentionnées aux alinéas précédents, leur conservation sur support informatique, comme leur transmission par voie électronique entre professionnels sont soumises à des règles définies par décret en Conseil d’Etat pris après avis public et motivé de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. Ce décret détermine les cas où l’utilisation de la carte professionnelle  de santé mentionnée au dernier alinéa de l’article L.161-33 du code de sécurité sociale est obligatoire. La carte de professionnel de santé et les dispositifs équivalents agréés sont utilisés par les professionnels de santé, les établissements de santé, les réseaux de santé ou tout autre organisme participant à la prévention et aux soins.

    Le fait d’obtenir ou de tenter d’obtenir la communication de ces informations en violation du présent article est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

    En cas de diagnostic ou de pronostic grave, le secret médical ne s’oppose pas à ce que la famille, les proches de la personne malade ou la personne de confiance définie à l’article L.1111-6 reçoivent les informations nécessaires destinées à leur permettre d’apporter un soutien direct à celles-ci sauf opposition de sa part. Seul un médecin est habilité à délivrer, ou à faire délivrer sous sa responsabilité, ces informations.

    Le secret ne fait pas obstacle à ce que les informations concernant une personne décédée soient délivrées à ses ayants droit, dans la mesure où elles leur sont nécessaires pour leur permettre de connaître les causes de la mort, de défendre la mémoire du défunt, ou de faire valoir leurs droits, sauf volonté contraire exprimée par la personne avant son décès. »

    On note que cet article (alinéa 2) donne une définition large du secret professionnel : il couvre l’ensemble des informations sur la personne venues à la connaissance du professionnel de santé, non seulement en ce qui concerne son état de santé mais aussi son identité, ce qu’il a confié ou ce que le médecin a compris à son propos.

    L’alinéa 3 précise la notion de secret partagé et en fixe les limites. La règle générale est que le partage n’intervient qu’entre professionnels de santé, pour la prise en charge et la continuité des soins et sauf opposition de la personne dûment avertie. Elle connaît deux variantes, l’une concernant les établissements de santé publics et privés, l’autre des maisons ou centres de santé dont les professionnels qui y exercent ont adhéré au projet de santé mentionné aux articles L.6323-1 et L.6323-3.

    Dans les établissements de santé, le consentement du patient au partage des données le concernant au sein de l’équipe qui le prend en charge est présumé acquis (3ème alinéa, 2ème phrase). Dans les maisons ou centres de santé, les informations sont réputées confiées par le patient aux autres professionnels de la structure qui le prennent en charge, sous réserve de son consentement exprès et de l’adhésion des professionnels concernés au projet de santé mentionné aux articles L.6323-1 et L.6323-3 (voir note [3]). La personne, dûment informée, peut refuser à tout moment que soient communiquées des informations la concernant à un ou plusieurs professionnels de santé (alinéas 4 à 7 introduits par l’article 2 de la loi n° 2011-940 du 10 août 2011).

    Il n’y a aucune justification, déontologique ou médicale, à ce que les droits des patients au respect du secret des informations les concernant fassent l’objet de régimes différents selon le cadre d’exercice du professionnel de santé auquel ils s’adressent.

    Le Conseil national a fait connaître son opposition à ces distinctions.

    L’alinéa 9 punit par ailleurs d’amende et d’emprisonnement, non seulement celui qui a trahi le secret mais aussi celui qui obtient ou tente d’obtenir des renseignements en violation de la règle.

    Enfin, si les ayants droit se voient reconnaître sous certaines conditions l’accès aux éléments du dossier d’une personne décédée (dernier alinéa) ce n’est que dans la limite de ce qui leur est nécessaire pour connaître les causes de la mort, défendre la mémoire du défunt, faire valoir des droits, et sous réserve que le patient n’y ait pas fait opposition de son vivant (CE - 26 septembre 2005, Conseil national de l’Ordre des médecins, req. n°270234).  

    • Code pénal - Article 226-13 :

    «La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. »

    Le code pénal ne fait pas référence aux médecins. Il traite du secret professionnel en général et non de façon spécifique du secret médical.

    Cependant, il serait faux de croire que le médecin peut partager les informations qu’il détient à raison de son activité professionnelle avec un autre professionnel, lui-même tenu au secret dans les termes de l’article 226-13 du code pénal. Le secret médical est le secret professionnel du médecin, comme le secret notarial est celui du notaire.

    Même entre médecins, le secret ne se partage pas dès lors qu’ils ne participent pas à la prise en charge d’un même patient.

    • Code de la sécurité sociale

    Le code de la sécurité sociale rappelle lui aussi que le secret professionnel est au nombre des grands principes de la médecine en France. L'article L.162-2  est ainsi libellé :

    « Dans l'intérêt des assurés sociaux et de la santé publique, le respect de la liberté d'exercice et de l'indépendance professionnelle et morale des médecins est assuré conformément aux principes déontologiques fondamentaux que sont le libre choix, la liberté de prescription, le secret professionnel, le paiement direct des honoraires par le malade, la liberté d'installation... ». 

    B-  JURISPRUDENCE

    La jurisprudence (voir note [4]), tant judiciaire qu'administrative, renchérit encore sur ces dispositions en proclamant que le secret médical revêt un caractère général et absolu. La Cour de Cassation l'a affirmé la première, dès le XIX° siècle (1885 - arrêt Watelet) et surtout dans un arrêt de la chambre criminelle du 8 mai 1947 (Degraene) : «L'obligation du secret professionnel s'impose aux médecins comme un devoir de leur état. Elle est générale et absolue et il n'appartient à personne de les en affranchir».

    Cette portée générale et absolue du secret médical est reconnue également, avec toutefois quelques nuances, dans les arrêts de la chambre civile de la Cour de Cassation, dans ceux du Conseil d'Etat (arrêt d'assemblée du 12 avril 1957 - Deve) et même dans les avis de la Section sociale du Conseil d'Etat (6 février 1951 - 2 juin 1953).

    De ce caractère général et absolu du secret médical, les jurisprudences de ces deux cours souveraines tirent des conséquences importantes. Ainsi, il a été admis que :

    •  le patient ne peut délier le médecin de son obligation de secret ;
    •  cette obligation ne cesse pas après la mort du patient ;
    •  le secret s'impose même devant le juge ;
    •  le secret s'impose à l'égard d'autres médecins dès lors qu'ils ne concourent pas à un acte de soins ;
    •  le secret s'impose à l'égard de personnes elles-mêmes tenues au secret professionnel (agents des services fiscaux) ;
    •  le secret couvre non seulement l'état de santé du patient mais également son nom : le médecin ne peut faire connaître à des tiers le nom des personnes qui ont (eu) recours à ses services.

    Il ne peut donc être dérogé au secret médical que par la loi. Cela explique l'annulation par le Conseil d'Etat de plusieurs décrets ou circulaires organisant des procédures portant atteinte au secret médical. Mais ces dérogations législatives peuvent ne pas être toujours formelles ou explicites. Une atteinte au secret médical peut être jugée légale si elle est la conséquence nécessaire d'une disposition législative (CE 8 février 1989 - Conseil national de l'Ordre des médecins et autres, req. n°54494).

    C -  DEROGATIONS LEGALES

    Elles sont justifiées par la nécessité d'établir une communication maîtrisée d'informations médicales (pour leur détail, voir annexe p.40). Seule une loi peut les instituer.

    Le médecin est obligé :

    • de déclarer les naissances ;
    • de déclarer les décès ;
    • de déclarer au médecin de l’ARS les maladies contagieuses dont la liste est fixée par voie réglementaire.
    • d'indiquer le nom du patient et les symptômes présentés sur les certificats d’admission en soins psychiatriques ;
    • d'établir, pour les accidents du travail et les maladies professionnelles, des certificats détaillés décrivant les lésions et leurs conséquences ;
    •  de fournir, à leur demande, aux administrations concernées des renseignements concernant les dossiers des pensions militaires et civiles d’invalidité ou de retraite ;
    • de transmettre à la CRCI ou à l’expert qu’elle désigne, au fonds d’indemnisation, les documents qu’il détient sur les victimes d’un dommage (accidents médicaux, VIH, amiante…) ;
    • de communiquer à l’Institut de veille sanitaire les informations nécessaires à la sécurité, veille et alerte sanitaires.
    • de communiquer, lorsqu'il exerce dans un établissement de santé, au médecin responsable de l'information médicale, les données médicales nominatives nécessaires à l'évaluation de l'activité.

    Le médecin est autorisé :

    • à signaler au procureur de la République (avec l'accord des victimes adultes) des sévices constatés dans son exercice et qui permettent de présumer de violences physiques, sexuelles ou psychiques ;
    • à transmettre au président du Conseil général toute information préoccupante sur un mineur en danger ou risquant de l’être (voir note [5]) ;
    • à communiquer les données à caractère personnel qu’il détient strictement nécessaires à l’exercice de leur mission, aux médecins conseils du service du contrôle médical, aux médecins inspecteurs de l’inspection générale des affaires sociales, aux médecins inspecteurs de la santé, aux médecins inspecteurs de l’ARS, aux médecins experts de la Haute Autorité de Santé, aux inspecteurs médecins de la radioprotection ;
    • à transmettre les données nominatives qu'il détient dans le cadre d'un traitement automatisé de données autorisé ;
    • à informer les autorités administratives du caractère dangereux des patients connus pour détenir une arme ou qui ont manifesté l’intention d’en acquérir une.

    Ces dérogations légales prescrivent ou autorisent seulement une certaine révélation (maladie contagieuse désignée par un numéro, symptômes d'un état mental dangereux, etc.) et pas n'importe quelle indiscrétion, à n'importe qui, de n'importe quelle manière. Il faut s'en tenir à une information «nécessaire, pertinente et non excessive». L'obligation du secret demeure pour tout ce qui n'est pas expressément visé par le texte.

    2- Le secret couvre tout ce qui est parvenu à la connaissance du médecin dans l'exercice de sa profession

    Le texte du code pénal parle d'une «information à caractère secret» ce qui pourrait faire penser que le médecin n'a de secret à garder que lorsqu'il a reçu d'intimes confidences.

    L’article L.1110-4 pour sa part précise : «  ce secret couvre l’ensemble des informations concernant la personne venues à la connaissance du professionnel de santé, … »

    Le secret s’impose pour tout ce que le médecin a pu voir, entendre ou même deviner ou déduire. Même les constatations « négatives » doivent être tues. Il n’y a donc pas de différence entre le « renseignement administratif » (nom, adresse…) et « médical » (diagnostic, traitement…), entre la confidence et le renseignement « anodin ». On attend du médecin une discrétion totale (même sur ce qu’il peut avoir appris en dehors des soins qu’il donne).

    Dans une décision du 24 septembre 2014 n°11888 de la chambre disciplinaire nationale, confirmée par le Conseil d’Etat (CE, 17/06/2015, n°385924), il a été jugé que le secret médical s’étend à toute information de caractère personnel confiée par un patient ou vue, entendue ou comprise par le praticien dans le cadre de son exercice.

    Dès lors qu’un médecin reçoit des informations personnelles de caractère médical de la part d’une personne qui s’est adressée à lui en tant que médecin, même s’il n'est pas son médecin traitant (Au sens usuel du terme et non le médecin traitant mentionné à l'article L.162-5-3 du code de la sécurité sociale), celles-ci sont réputées avoir été données dans le cadre de l'exercice professionnel : « ni les relations amicales anciennes nouées par le passé entre Mme B… et le Dr C, ni les circonstances dans lesquelles il a été amené à recueillir ses confidences avant la consultation de son épouse dans leur cabinet médical commun, ne sont détachables de l’exercice de sa part de la profession médicale ; que, même s’il n’a procédé à aucun examen de la patiente et n’assurait pas son suivi médical comme médecin traitant, les faits qui lui ont été confiés lors de cet entretien étaient couverts par le secret professionnel et ne devaient, alors même qu’il ne justifiait d’aucune dérogation légale en la matière, être divulgués à un tiers ». En révélant ces informations à un tiers, le médecin a méconnu l'obligation de secret instituée par les dispositions des articles L. 1110-4 et R. 4127-4 du code de la santé publique.

    Toute personne doit avoir la certitude absolue qu’elle peut, même après sa mort, se fier à la discrétion du médecin.

    Ainsi le secret professionnel est la «pierre angulaire de la morale médicale» (voir note [6]).

    3- Le secret professionnel est institué dans l'intérêt des patients

    L'adjonction «institué dans l'intérêt des patients», voulue par le Conseil d'Etat, est importante. Elle coïncide avec une évolution de la jurisprudence et l'assouplissement dans certains cas de la doctrine traditionnelle du «secret absolu».

    Le secret médical a été institué dans l'intérêt des patients, mais ce n'est pas sa seule raison d'être puisque, nous l'avons indiqué, il a un intérêt public. Il compte autant par sa virtualité que par son existence, il est fait pour les personnes malades présentes comme pour les personnes malades futures ou potentielles.

    Rien n'autorise le médecin à livrer des renseignements hors des dérogations légales. Même entre médecins, la discrétion est de règle. La notion de «secret partagé» reste limitée aux membres de l'équipe soignante - qui doivent partager certaines informations pour assurer des soins corrects - dans l'intérêt du patient (expressément mentionné par l’article L.1110-4, al. 3 du code de la santé publique qui définit la notion de secret partagé) ainsi qu'aux médecins des régimes obligatoires de protection sociale (article 50).

    Il ne s'agit pas là d'un réflexe corporatiste. La rigueur des dispositions actuellement en vigueur et le caractère impératif des règles déontologiques sont destinés à protéger le patient, non le médecin. Le respect du secret médical est un devoir du médecin et non un droit.

    Faire tomber en désuétude cette conduite séculaire du médecin serait mépriser l'un des droits fondamentaux de l'homme : tous les patients doivent être assurés que leur confiance ne sera pas trahie lorsqu'ils livrent à leur médecin une information les concernant ou mettant en cause des tiers.

    Les médecins sont confrontés à des sollicitations et situations diverses où ils doivent apprécier ce qu’ils peuvent dire ou au contraire, taire. Les plus courantes sont évoquées ci-dessous.

    Il leur est recommandé s’ils sont embarrassés sur la réponse à apporter, de prendre conseil auprès des instances ordinales.

    3-1. Secret, famille et entourage

    Le secret s’impose vis à vis de la famille et de l’entourage, mais en cas de diagnostic ou de pronostic grave, il ne « s’oppose pas à ce que la famille, les proches, ou la personne de confiance définie à l’article L.1111-6 reçoivent les informations nécessaires destinées à leur permettre d’apporter un soutien direct à celle-ci, sauf opposition de sa part » (article L.1110-4, avant dernier alinéa du code de la santé publique).

    De même après le décès : «  Le secret ne fait pas obstacle à ce que les informations concernant une personne décédée soient délivrées à ses ayants droit, dans la mesure où elles leur sont nécessaires pour leur permettre de connaître les causes de la mort, de défendre la mémoire du défunt, ou de faire valoir leurs droits, sauf volonté contraire exprimée par la personne avant son décès. » (article L.1110-4, dernier alinéa du code de la santé publique).

    Seules les informations « nécessaires » peuvent être révélées dans l’un et l’autre cas (CE 26 septembre 2005, Conseil national de l’Ordre des médecins, req. n°270234). D’autre part, si les ayants droit ont accès au dossier d’une personne décédée, il faut que la demande soit explicitement motivée et que ce droit s’exerce dans une des trois intentions citées : connaître les causes de la mort, défendre la mémoire du défunt ou faire valoir des droits. Le patient, de son vivant, peut avoir fait opposition à cet accès. Sa volonté doit être respectée.

    Le secret est également dû aux mineurs.

    Les mineurs viennent souvent se confier aux médecins et, comme les adultes, ils ont droit au respect et à la discrétion. Il est important, surtout à l’adolescence, qu’un mineur puisse trouver en son médecin un confident qui n’ira pas révéler à ses parents les secrets qui lui sont confiés. Mais lorsque l’intérêt du mineur l’exige, ou qu’une décision importante est à prendre, le médecin doit tout faire pour le persuader de tenir ses parents au courant, en sachant garder le secret sur ce qu’il n’est pas nécessaire de révéler.

    Cependant, en dérogation au principe très général de l’autorité parentale, le médecin est tenu au secret professionnel vis-à-vis des parents d’un mineur, qui s’oppose expressément à la consultation des titulaires de l’autorité parentale :

    « Toutefois, le médecin doit dans un premier temps s’efforcer d’obtenir le consentement du mineur à cette consultation. Dans le cas où le mineur maintient son opposition, le médecin peut mettre en œuvre le traitement ou l’intervention. Dans ce cas, le mineur se fait accompagner d’une personne majeure de son choix. » (Article L.1111-5 du code de la santé publique)

    L'infection due au VIH a provoqué une controverse quant au caractère intangible de la notion du secret professionnel. Elle est fondée sur le constat du conflit entre le droit des personnes infectées à la confidentialité et le droit de leurs partenaires d'être avertis du danger qui les menace directement.

    Le Conseil national de l'Ordre des médecins (Bulletin de l'Ordre, décembre 1992) et la Commission de réflexion sur le secret professionnel (1994) ont formulé les recommandations suivantes :

    • dès lors qu'elle est faite à un proche ou à un tiers par la personne séropositive, mise en face de ses responsabilités, la révélation ne pose pas de problème juridique en matière de secret ;
    • lors de cette révélation au partenaire, par celui qui est séropositif, le médecin peut, selon la déontologie traditionnelle, assister à l'entretien à la demande des intéressés et leur donner les éclaircissements et conseils utiles en la circonstance ;
    • la loi n'autorise pas le médecin à révéler au partenaire du patient séropositif le danger que lui fait courir le comportement de ce dernier si celui-ci s'oppose obstinément à toute révélation ; il lui faudrait d'ailleurs une certaine naïveté pour prétendre connaître le ou les partenaires exposés.

    La commission René (voir note [7]) sur le secret professionnel a conclu en ces termes :

    «Aucune dérogation, implicite ou même explicite, n'autorise le médecin à rompre le silence qui s'impose à lui et les conditions d'application de la notion de non-assistance à personne en danger ne sont pas réunies. Il revient alors au praticien, après avoir tout fait pour convaincre le patient et son entourage, du danger que fait courir son état de santé, et, si possible, après avoir pris l'avis de confrères compétents, d'évaluer la situation et de prendre, en conscience, sa décision et d'assumer les conséquences d'une liberté qu'il revendique ; les juges apprécieront en fonction de ces cas d'espèces... Les dangers sont certains. Mais les conséquences de la révélation doivent être aussi lucidement mesurées. En présence de ce dilemme, et même avec l'aval de confrères expérimentés, c'est d'abord sa responsabilité personnelle, tant morale que juridique, qu'engage le médecin en prévenant lui-même le partenaire de son patient

    3- 2. Secret, police et justice

    a. Réquisitions

    Pour rapporter la preuve d’une infraction ou l’implication de la personne poursuivie, les officiers de police judiciaire (OPJ) vont, sur autorisation et sous le contrôle du procureur de la République ou sur commission rogatoire du juge d’instruction, procéder à un certain nombre d’investigations. Ils peuvent alors requérir le concours des médecins.

    Le terme « réquisition » et le caractère contraignant qu’il suppose est source de confusion pour les médecins. Schématiquement, on peut distinguer selon l’objet de la réquisition :

    1/ S’il y a lieu de procéder à des constatations, examens techniques ou scientifiques–par exemple examen de garde à vue, prise de sang en vue de la vérification de l’alcoolémie,… - qui ne peuvent être différés, l’OPJ a recours à toute personne qualifiée (articles 60 et 77-1 du code de procédure pénale – voir notes [8] et [9]).

    Sous peine d’amende (voir note [10]), le médecin est tenu de déférer à la réquisition. Il remet son rapport à l’autorité requérante.

    Il peut néanmoins récuser son concours en cas d’inaptitude physique, technique ou lorsqu’il est le médecin traitant de la personne à examiner.

    Pour éviter tout malentendu sur le secret médical, il doit prévenir la personne de la qualité en laquelle il l’examine et de la nature de sa mission.

    Le certificat rédigé, après examen, ne doit faire état que des conclusions. Par exemple : « l’état de santé est compatible (ou non) avec la garde à vue ; il y a lieu (ou non) de poursuivre un traitement médical pendant celle-ci, de procéder à de nouveaux examens ou à une hospitalisation… »

    2/ La réquisition a pour objet d’obtenir le témoignage du médecin sur des faits qu’il a connus dans son activité professionnelle : date de consultation, adresse du patient, objet de la consultation, nature des traitements,… et plus généralement ce qui a trait au patient pris en charge.

    La réquisition n’a pas pour effet de délier le médecin de son obligation au secret professionnel et quelle que soit la nature du renseignement demandé (« administratif » ou purement médical), il ne peut que refuser de répondre à la réquisition.

    Il n’encourt ce faisant aucune sanction.

    3/ La réquisition a pour objet la remise de documents et listes. Depuis la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice et la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, le procureur de la République ou l’OPJ, sur autorisation de celui-ci (enquête préliminaire, article 77-1-1 du code de procédure pénale) ou sous son contrôle (enquête de flagrance article 60-1 du même code) « peut requérir de toute personne, de tout établissement ou organisme privé ou public, de toute administration qui sont susceptibles de détenir des documents intéressant l’enquête, y compris ceux issus d’un système informatique ou d’un traitement de données nominatives, de lui remettre ces documents, notamment sous forme numérique, sans que puisse lui être opposé, sans motif légitime, l’obligation au secret professionnel. Lorsque la réquisition concerne des personnes mentionnées aux articles 56-1 à 56-3 (avocat, journaliste, médecin), la remise des documents ne peut intervenir qu’avec leur accord. »

    Ces articles font donc dépendre la remise de documents couverts par le secret médical de l’accord du médecin, ce qui apparaît incompatible avec la conception traditionnelle du secret professionnel général et absolu en matière médicale.

    Les dispositions des articles 77-1-1 et 60-1 sont de plus en plus souvent invoquées par les OPJ pour obtenir sans saisie les documents détenus par les médecins.

    Il faut conseiller aux médecins requis dans cette situation de refuser leur accord. Ce refus ne peut être sanctionné. La procédure de saisie sera alors mise en œuvre dans les conditions habituelles (présence d’un conseiller ordinal, mise sous scellés fermés des documents saisis) éventuellement opérée par le magistrat lui-même.

    b. Saisies et perquisitions

    Le code de procédure pénale prévoit que «le juge d'instruction procède conformément à la loi, à tous les actes d'information qu'il juge utiles à la manifestation de la vérité» (voir note [11]). Il peut procéder à la saisie d'objets ou de documents relatifs aux faits incriminés et «doit provoquer toutes mesures utiles pour que soit assuré le respect du secret professionnel et des droits de la défense».

    Conformément à l’article 56–3 «les perquisitions dans le cabinet d'un médecin... sont effectuées par un magistrat et en présence de la personne responsable de l'Ordre... ou son représentant».

    Il est admis lorsque la saisie du dossier a lieu sans perquisition que le magistrat qui l’ordonne (juge d’instruction, procureur de la République) mandate à cet effet un officier de police judiciaire. La présence du représentant ordinal reste obligatoire.

    c. Témoignages en justice

    Ce que le médecin a pu connaître à l'occasion des soins donnés ne peut lui être demandé en témoignage devant la justice. Interrogé ou cité comme témoin sur des faits connus de lui dans l'exercice de sa profession, il doit se présenter, prêter serment et refuser de témoigner en invoquant le secret professionnel.

    L’accord ou la demande du patient ne saurait le délier du secret (voir note [12]).

    En revanche, le médecin peut signaler et témoigner dans des affaires de sévices à mineurs (maltraitances, incestes, viols, attentats à la pudeur, etc.) ou personnes vulnérables qu’il a constatés.

    Enfin, bien qu'il n'y soit pas tenu, un médecin peut estimer devoir témoigner en justice si son témoignage peut empêcher de condamner un innocent (article 434-11 du code pénal). Par ailleurs sa profession ne lui interdit pas de témoigner à titre de simple citoyen, indépendamment de tout élément recueilli au cours de son exercice professionnel.

    d- Expertises

    Comme le médecin requis, l'expert, missionné par un juge, doit prévenir la personne qu'il examine de sa qualité et de sa mission.

    Il rendra compte dans son rapport au juge de ses constatations médicales. Il ne peut révéler à personne (en dehors de l'autorité qui l'a nommé) ce qu'il a constaté ou a pu apprendre ou comprendre à l'occasion de sa mission.

    e. Certificats produits en justice

    En principe, aucun certificat concernant un patient ne peut être remis à un tiers (article 76) : le médecin ne peut satisfaire aux demandes de renseignements ou de certificats qui lui sont adressées par un juge, par un avocat ou par la police.

    Dans certains cas, un prévenu ou son avocat peuvent vouloir obtenir, afin de les produire devant un tribunal, une attestation prouvant par exemple un traitement pour troubles psychiatriques ou pour maladie susceptible d'entraîner des séquelles pouvant atténuer sa responsabilité ; le médecin pourra, s'il l'estime utile, attester que l'intéressé a été effectivement soigné par lui, mais il ne devra donner aucun détail. Il appartient au juge, s'il en voit la nécessité lorsque le prévenu évoque un état pathologique, de le soumettre à l'examen médical d'un expert.

    Lorsqu'un médecin est sollicité pour délivrer un certificat dans le cas de coups et blessures, il doit décrire objectivement ce qu'il a constaté et dresser un bilan complet et descriptif des lésions observées. Il doit se garder de tout commentaire, notamment de faire allusion à des faits ou à des circonstances dont il n'a pas été témoin.

    Il doit remettre le certificat en main propre à l'intéressé et l'indiquer sur le certificat.

    f. Procès en responsabilité

    Lorsqu'un médecin est poursuivi en justice par un patient ou sa famille, dans une action en responsabilité, il peut porter à la connaissance du juge certains faits médicaux ou certains documents utiles à la manifestation de la vérité et à sa défense.

    Il ne peut s'abriter derrière le secret professionnel pour masquer d'éventuelles fautes.

    Le juge peut diligenter une enquête en désignant un médecin expert. Le médecin concerné peut répondre aux questions de l'expert, dans le cadre limité du litige.

     3- 3. Secret et médecine de contrôle

    La prise en charge par l’assurance maladie des dépenses de santé exposées par les assurés sociaux implique la communication d’informations nominatives plus ou moins révélatrices de l’état de santé de l’assuré :

    • la feuille d’assurance maladie avec l’indication des actes effectués, notamment le code de l’acte et de la pathologie, l’ordonnance ;
    • le certificat d’arrêt de travail pour la maladie dont le premier volet fait mention des motifs médicaux justifiant l’arrêt (voir note [13]) ;
    • les déclarations d’accident du travail et de maladie professionnelle font l’objet de certificats nominatifs et descriptifs. Ils sont transmis aux caisses d’assurance maladie par le médecin qui les a établis pour ce qui est des accidents du travail, par l’intermédiaire du patient pour ce qui est des maladies professionnelles.

    Seuls les praticiens-conseils et les personnels placés sous leur responsabilité peuvent avoir à connaître de ces données nominatives lorsqu’elles sont associées au code d’une pathologie diagnostiquée ou au motif de l’arrêt de travail.

    Est également reconnu, au nom du principe du «secret partagé», dans le cadre d'une consultation médico-sociale, l'échange de renseignements entre le médecin consulté par le patient et le médecin-conseil, lui-même tenu au secret (article 50).

    Le médecin traitant fournit certaines indications sur la pathologie de l'assuré social concerné et le médecin-conseil apporte sa compétence médico-sociale (possibilité de prestations spéciales, rééducation fonctionnelle, entente préalable...).

    L'échange de renseignements n'est autorisé qu'aux conditions suivantes :

    • le patient doit avoir donné son accord ;
    • les renseignements doivent être communiqués, non au service de contrôle, mais à un médecin-conseil nommément désigné, sous pli confidentiel ;
    • le médecin-traitant ne confie que les données indispensables au médecin-conseil pour que celui-ci puisse prendre sa décision ;
    • le médecin traitant reste juge de l'opportunité et de l'étendue des informations échangées.

    Plus généralement, la loi (article L. 315-1, V du code de la sécurité sociale) reconnaît aux praticiens-conseils du service de contrôle médical un droit d’accès aux données de santé à caractère personnel si elles sont strictement nécessaires à l’exercice de leurs missions et dans le respect du secret médical.

    3- 4. Secret et commissions médico-sociales

    Le traitement des situations individuelles soumises à ces commissions nécessite des informations médicales communiquées tant par l'intéressé que par son médecin traitant.

    Le respect des droits de la personne au respect de son intimité et du secret professionnel n'est pas toujours bien assuré à cette occasion.

    Il convient de rappeler les règles qui permettent un équilibre entre les droits de la personne et le besoin de la commission qui, selon le cas, va rendre un avis ou prendre une décision motivée.

    Les renseignements médicaux qui accompagnent la demande doivent être adressés au secrétariat de la commission, sous pli confidentiel, cacheté, à l’attention du médecin du comité ou de la commission. Le traitement des données relatives à la santé doit être strictement réservé au médecin ou aux personnes qu’il habilite à cet effet.

    Les avis et décisions rendus ne doivent pas révéler la pathologie dont souffre le demandeur. Si la personne est invitée à se présenter devant la commission, elle doit être informée qu’elle n’a pas à dévoiler sa pathologie ni à y être incitée.

    Les documents médicaux communiqués doivent être conservés dans des conditions préservant leur confidentialité.

    3-5. Secret et compagnies d'assurances

    Il n'y a pas ici de «secret partagé». Le médecin traitant d'une personne malade ou blessée ne doit donner aucun renseignement à une compagnie d'assurances. Il doit refuser de répondre à une compagnie d'assurances qui lui demanderait un diagnostic de maladie ou d'autres indications médicales (voir note [14]).

    De même, la demande par une compagnie d'assurances au médecin traitant de la cause d'un décès, est illégale.

    Un léger assouplissement de la jurisprudence existe cependant : il est admis que lorsqu'il s'agit de la seule preuve possible permettant aux ayants droit de faire valoir leurs droits (par exemple, le paiement d'un capital décès), le médecin traitant peut leur délivrer un certificat médical indiquant, suffisamment, sans qu'il soit besoin de préciser quelle fut la maladie, que la mort a une cause naturelle, étrangère aux risques exclus par la police d’assurance dont il a eu connaissance.

    La situation est toute différente lorsqu'une personne se présente chez un médecin en vue d'un examen médical «de santé» pour une compagnie d'assurances. Ce médecin ne peut pas être le médecin traitant. La personne demande un compte-rendu de son état et non des soins ; et elle admet que les résultats de l'examen soient révélés au médecin désigné par la compagnie. Le médecin peut accepter une telle mission, en s'assurant cependant que les renseignements donnés sont destinés au seul médecin de la compagnie, et en agissant avec prudence dans le cas où il constaterait, lors de l'examen, une affection de pronostic grave.

    De même, lorsqu'un médecin (qui ne peut être le médecin traitant, voir article 100) est chargé par une compagnie d'assurances d'examiner une personne blessée ou malade et de rendre compte de son état, il peut le faire, mais comme un médecin contrôleur ; il doit prévenir la personne qu'il l'examine pour la compagnie d'assurances ; il doit envoyer son rapport au médecin de cette compagnie, lui-même tenu au secret, à charge pour ce dernier d'en assurer la confidentialité, notamment vis-à-vis de l'assureur. Ce rapport doit se limiter à la description objective des symptômes et éviter toute indiscrétion débordant sa mission. Le médecin de la compagnie d'assurances doit « traduire » les données médicales en termes techniques qu'il transmettra seuls à l'administration de la compagnie. Une Cour d'appel a retenu à juste titre que le rapport du médecin d'une compagnie d'assurances, établi après interrogation du médecin traitant de l'assuré et fondé sur la lettre de ce dernier, procédait d'une violation du secret médical, le médecin d'assurances ne pouvant révéler à son mandant des renseignements qu'il aurait reçus du médecin traitant de l'assuré, tenu lui-même au secret médical (Cass. Civ. 1ère - 6 janvier 1998 n° 95-19902 et 96-16721; dans le même sens Cass. Civ. 1ère, 12 janvier 1999 n° 96-20580).

    La loi du 4 mars 2002 donne à la personne libre accès à son dossier ; cela ne signifie pas que le médecin traitant puisse répondre aux demandes de renseignements des médecins d’assurances. La personne en possession de son dossier après l’avoir régulièrement réclamé peut en disposer. Le médecin doit attirer son attention sur les risques que peut impliquer cette communication. La jurisprudence dira si les renseignements obtenus dans ces conditions par une compagnie d’assurance tombent sous le coup de l’alinéa 5 de l’article L.1110-4 du code de la santé publique :

    « Le fait d’obtenir ou de tenter d’obtenir la communication de ces informations en violation du présent article est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ».

    3-6. Secret et environnement professionnel

    a - Secret et contrats

    L'exercice de la profession médicale conduit bien souvent les médecins à passer des contrats qui sont communiqués à l'Ordre pour vérification de leur contenu déontologique. Parmi les stipulations qui leur sont alors imposées figure l'obligation de rappeler le principe du secret professionnel et d'en fixer les modalités d'application (CE Laudet, 9 juin 1967, req. n° 68156).

    C'est une des clauses essentielles qui doit figurer dans les contrats, et l'Ordre veille à ce que les parties les y introduisent si elles font défaut dans ceux qui lui sont soumis.

    b – Secret,  et technologies de l’information et de la communication

    La protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données nominatives est assurée par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. Son article 34 impose que des dispositions soient prises pour assurer la sécurité des traitements et des informations, ainsi que la garantie des secrets protégés par la loi (voir note [15]). Des sanctions pénales sont prévues en cas de non-respect de ces dispositions.

    L’article L.1110-4, alinéa 4 du code de la santé publique ajoute qu’«  Afin de garantir la confidentialité des informations médicales… leur conservation sur support informatique comme leur transmission par voie électronique entre professionnels sont soumises à des règles définies par décret en Conseil d’Etat…. » (voir note [16]).

    L’accès du patient à son dossier informatisé doit se faire dans des conditions telles que les données auxquelles il a droit lui soient accessibles et elles seules.

    Les techniques de l’information et de la communication (TIC) font désormais partie intégrante de l’environnement professionnel des médecins. Elles participent à la qualité des soins, en améliorant la tenue des dossiers médicaux, en facilitant l’échange et le partage des données utiles à la décision. Elles s’appliquent dans le respect des droits des patients : information et droit de s’opposer au partage, droit d’accès aux données partagées, droit de choisir les professionnels autorisés à partager ces données, droit à l’oubli. Elles offrent enfin une meilleure protection des données, notamment par la traçabilité des accès.

    Le Conseil national de l’Ordre des médecins a élaboré à cette fin des recommandations (voir note [17]).

    c. Secret médical à l'hôpital

    L'exercice médical à l'hôpital ne modifie en rien le sens profond attribué au secret professionnel (voir note [18]). Néanmoins, les missions de service public qu'il faut détailler soulèvent des difficultés particulières qui sont préoccupantes. Certes, si tout a été prévu en théorie pour le respect du secret et la protection des données nominatives, on peut regretter de trop nombreuses violations du secret qui peuvent engager la responsabilité de l’établissement (voir note [19]) et de leurs auteurs. Elles tiennent à une certaine spécificité du service public et à son organisation :

    • le pluralisme des services et des prestations, l'exercice de plus en plus fréquent de la pluridisciplinarité ;
    • la nécessaire circulation des informations d'un service à l'autre ;
    • la collégialité indispensable à l'enseignement, à la recherche et à la pratique des soins ;
    • la gestion de l'information à des fins d’analyse de l’activité et des coûts ;
    • les contrôles opérés par les médecins membres de l'inspection générale des affaires sociales, les médecins inspecteurs de la santé publique, les inspecteurs de l’ARS ayant la qualité de médecin (article L.1112-1 du code de la santé publique) et les médecins-conseils des organismes d'assurance maladie (article L.315-1 du code de la sécurité sociale).
    • l'intervention importante d'agents administratifs pour le fonctionnement quotidien de l'hôpital (questionnaire d'admission, bordereau statistique de toutes les activités, etc.).

    En pratique tout s'articule pour le médecin autour de deux éléments essentiels : l'information du patient et la tenue du dossier médical.

    Cette énumération amène à se poser un certain nombre d'interrogations inspirées par la pratique quotidienne. Il suffit de suivre le patient dans son cheminement au cours d'une hospitalisation.

    1°) L'admission comporte des demandes concernant le motif de l'hospitalisation et sa nécessaire orientation vers un service spécialisé dont l'intitulé porte souvent le nom d'une pathologie ou d'un groupe de pathologies.

    2°) L'interrogatoire du patient pratiqué, tant par le personnel hospitalier que médical, peut se dérouler dans des conditions de confidentialité discutables. Le patient lui-même révèle quelquefois des informations susceptibles de porter atteinte au secret le concernant.

    3°) L'examen clinique et la prise de décision médicale peuvent se dérouler en présence de plusieurs personnes (élèves de toutes catégories, médecins ou non-médecins en cours de formation) dont l'intérêt est, certes, de participer à des délibérations et qui sont tenues de respecter le secret de ce qu'elles ont vu et entendu ;

      Il est de la responsabilité des chefs d’unité, de pôle, de département de faire respecter cette règle au quotidien.

    4°) La circulation du patient dans les différents services d'explorations fonctionnelles nécessite la rédaction obligatoire d'un document introductif portant généralement la mention du diagnostic et les questions posées lors de l'investigation.

      Le stockage des résultats d’imagerie médicale sur un serveur accessible à l’ensemble des services conduit à des révélations indues à d’autres professionnels de santé que ceux qui ont en charge le patient.

    5°) La manipulation des dossiers pour l'enseignement ou la recherche reste en principe anonyme, mais l'utilisateur peut avoir involontairement connaissance du nom et de l'adresse d'un patient, du diagnostic et des modalités du traitement.

    6°) La collecte des informations par le département de l'information médicale (DIM) (voir note [20]) est en principe couverte par le secret. Toutefois les travaux de la commission des systèmes d'information sur les établissements de santé (CSIES) ont montré qu'il n'était pas possible d'éliminer totalement le risque d'identification du séjour d'une personne dans le fichier comprenant l'ensemble des séjours d'un établissement, l'identification pouvant résulter du rapprochement d'informations connues par ailleurs sur la personne avec les données administratives contenues dans le fichier. La loi n° 99-641 du 27 juillet 1999, qui a complété la loi Informatique et Libertés d’un chapitre sur le traitement des données personnelles de santé à des fins d’évaluation ou d’analyse des activités de soins et de prévention, tend à remédier à cette situation.

    7°) Dans les aires de traitement, que sont les blocs opératoires, les centres de traitements spécialisés (chimiothérapie, radiothérapie, etc.), tout le personnel se trouve en présence des révélations les plus détaillées et parfois les plus graves.

    Deux réflexions essentielles s'imposent :

    • une formation devrait être dispensée au personnel. Il n'existe pas de texte particulier dans ce domaine ; il ne s'agit pas toujours d'une préoccupation majeure des directeurs d'hôpitaux ou des chefs de services ; la responsabilité du personnel doit devenir un sujet de réflexion ; les doyens sont encouragés à indiquer les règles de base aux étudiants qui commencent leurs études de médecine ;
    • la confidentialité est d'autant plus difficile à respecter que le nombre des soignants intervenant est plus important.

    L’article L.1110-4 du code de la santé publique permet dans son alinéa 3 des échanges d’informations entre professionnels de santé participant aux soins, sauf opposition de la personne dûment avertie. Il prévoit aussi que dans l’établissement de santé « les informations la concernant sont réputées confiées à l’ensemble de l’équipe de soins » cette équipe de soins doit être entendue au sens strict du terme et exclut le personnel administratif.

    Maîtriser un secret «collectif» est une entreprise délicate qui exige le concours et la discrétion de tous. Le médecin doit en rappeler les exigences en permanence.

    La distinction parfois proposée entre informations « banales » et informations « confidentielles » n'est  en rien justifiée au regard de la définition du secret médical donnée tant par l’article L.1110-4 du code de la santé publique que de l’article 4 du code de déontologie médicale.

    3-7. Secret médical et établissements pénitentiaires

    L’article 45 de la loi pénitentiaire n°2009-1436 du 24 novembre 2009 rappelle que « L'administration pénitentiaire respecte le droit au secret médical des personnes détenues ainsi que le secret de la consultation, dans le respect des troisième et quatrième alinéas de l'article L. 6141-5 du code de la santé publique » (note [21]).

    Conclusion

    1. Garanti en France par le code de la santé publique et le code pénal, le secret médical est un droit du patient (intérêt privé) mais aussi un devoir de tout médecin (intérêt public). Le secret médical est absolu, opposable à tous les tiers, portant sur tout ce dont le médecin a eu connaissance à l'occasion des soins.
    2.  Le secret n'est pas la «propriété du malade». Il n'est pas non plus la «propriété du médecin» et encore moins celle du corps médical. Le secret n'appartient à personne, le médecin n'en est que le dépositaire et ne peut se permettre aucune divulgation en dehors des cas où la loi l'oblige, l'autorise ou le laisse libre de donner certains renseignements
    3. Le principe du secret professionnel est parfois en conflit avec d'autres principes et d'autres intérêts. L'étendue et le caractère absolu du secret médical sont mis en cause quand il constitue un obstacle à la manifestation de la vérité dans certaines affaires judiciaires, qu'il rend plus difficile l'application des lois sociales ou bien entrave la juste évaluation d'un dommage par une compagnie d'assurances.
    4. Certaines difficultés peuvent être résolues par la remise d'un certificat par le médecin à l'intéressé. Mais le patient n'a pas toujours une parfaite connaissance de ce dont il va autoriser la révélation et il n'est pas admissible qu’il soit mis en demeure de délier le médecin du secret.
    5. On soutient parfois que c'est l'intérêt du patient qui peut dicter la conduite du médecin. Cependant, il ne peut s'agir que d'intérêt légitime et le médecin ne doit pas se laisser entraîner dans une complicité de revendications illégitimes.
    6.  Certes, le respect du secret médical ne doit pas être poussé jusqu'à l'absurde. Le médecin ne doit pas refuser des explications à la famille. Dans certains cas, son silence porterait préjudice au patient.

    Le médecin rencontre des cas de conscience car il s'agit là d'un domaine difficile où la diversité des cas concrets et la variété des situations ne permettent pas toujours de donner une réponse assurée.

    Le médecin, après avoir pris conseil auprès de son Ordre, devra tenter de résoudre ces situations en conscience, sachant que toute transgression engage sa responsabilité et qu’il devra s’en justifier.

    S'il a une hésitation, il fera prévaloir la conception rigoureuse du secret professionnel car, une fois le secret révélé, il est trop tard pour revenir en arrière.

    Annexe de l'article 4

    DEROGATIONS AU SECRET PROFESSIONNEL

    1 - DEROGATION LEGALES

    Certaines ont un caractère obligatoire, d'autres permettent aux médecins de faire état des informations qu'ils détiennent sans encourir les sanctions prévues à l’article 226-13 du code pénal.

    A -  Dérogations obligatoires

    a) Déclaration des naissances (article 56 du code civil)

    Le médecin est tenu de déclarer à l'officier d'état civil la naissance d'un enfant à laquelle il a assisté, si cette déclaration n'est pas faite par le père (absent, décédé ou inconnu).

    Le médecin n'est pas obligé dans cette déclaration de révéler le nom de la mère.

    Lorsqu'un enfant est décédé avant que sa naissance ait été déclarée à l'état civil, l'officier de l'état civil établit un acte de naissance et un acte de décès sur production d'un certificat médical indiquant que l'enfant est né vivant et viable et précisant les jour et heure de sa naissance et de son décès (article 79-1 du code civil).

    En l’absence de certificat médical attestant que l’enfant est né vivant et viable, l’officier de l’état civil établit un acte d’enfant sans vie sur production d’un certificat attestant de l’accouchement de la mère (formulaire Cerfa n°13773*01 annexé à l’arrêté du 20 août 2008–JO du 22 août 2008).

    Il est recommandé au praticien de le renseigner en double original afin d’en conserver l’ensemble en tant qu’original dans le dossier médical de la mère et de remettre systématiquement la partie inférieure du second original aux parents, en prenant soin de mentionner dans le dossier l’auteur et la date de remise.

    Il sera précisé aux parents, lors de la remise du document que la déclaration éventuelle de l’enfant sans vie à l’état civil repose sur une démarche volontaire et qu’elle n’est soumise à aucun délai. Les parents peuvent prendre le temps de la réflexion nécessaire et n’ont pas à décider de déclarer l’enfant sans vie dès l’accouchement.

    b) Déclaration des décès (article L.2223-42 du code général des collectivités territoriales)

    «L'autorisation de fermeture du cercueil ne peut être délivrée qu'au vu d'un certificat, établi par un médecin, attestant le décès.

    Ce certificat, rédigé sur un modèle établi par le ministère chargé de la santé, précise la ou les causes du décès, aux fins de transmission à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale et aux organismes dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. Ce même décret fixe les modalités de cette transmission, notamment les conditions propres à garantir sa confidentialité».

     Le certificat comporte deux parties, l'une nominative signalant le décès, l'autre anonyme comportant le diagnostic. En cas de mort violente ou suspecte, le médecin cochera sur l'imprimé du certificat de décès la case «obstacle médico-légal». Le permis d'inhumer ne pourra être délivré que par l'autorité judiciaire après enquête.

    Deux nouveaux modèles de certificat de décès ont été créés :

    •  le certificat de décès néonatal, concernant les enfant nés vivants et décédés avant 28 jours, obligatoire depuis le 1er avril 1997,
    • le certificat de décès après 27 jours, obligatoire depuis le 1er janvier 1998.
       

    c) Déclaration des maladies contagieuses (article L.3113-1 du code de la santé publique)

    « Font l'objet d'une transmission obligatoire de données individuelles à l'autorité sanitaire par les médecins et les responsables des services et laboratoires d'analyse de biologie médicale publics et privés :

    1.  Les maladies qui nécessitent une intervention urgente locale, nationale ou internationale ;
    2.  Les maladies dont la surveillance est nécessaire à la conduite et à l'évaluation de la politique de santé publique ».

    Les articles D.3113-6 et D.3113-7 du code de la santé publique pris après avis du Haut Conseil de la santé publique dressent la liste des maladies à déclaration obligatoires.

    La transmission des informations s’effectue selon deux modalités :

    1. la procédure de signalement (article R.3113-4 du code de la santé publique).

    Le signalement des maladies à déclaration obligatoire par les médecins et les biologistes qui les suspectent ou les diagnostiquent au médecin inspecteur de l’ARS est une procédure d’urgence et d’alerte qui s’effectue sans délai et par tout moyen approprié (téléphone, télécopie). Le modèle des fiches de déclaration peut être téléchargé sur le site internet de l’Institut de veille sanitaire (www.invs.sante.fr).

    Les maladies qui justifient une intervention urgente à savoir toutes les maladies à déclaration obligatoire à l’exception de l’infection par le VIH, de l’infection aiguë symptomatique par le virus de l’hépatite B du tétanos et  des mésothéliomes sont à signaler. La procédure de signalement permet au médecin de l’ARS de réagir rapidement et de mettre en place les mesures de prévention individuelle et collective autour des cas, et le cas échéant, de déclencher des investigations pour identifier l’origine de la contamination et agir pour la réduire.

    Dans ce cadre, les données transmises par les déclarants peuvent être nominatives. Ces données nominatives ne doivent pas être conservées au-delà du temps nécessaire à l’investigation et à l’intervention.

    1. la procédure de notification anonymisée (article R.3113-2 du code de la santé publique)

    Elle concerne toutes les maladies à déclaration obligatoire et est entourée de garanties pour la protection de l’anonymat et la protection des données, autorisées par la CNIL (délibération n°02-082 du 19 novembre 2002).

    Les données d’identification de la personne sont codées :

    • soit à la source, par le biologiste ou le médecin déclarant pour l’infection par le VIH, pour l’infection aiguë symptomatique par le virus de l’hépatite B, pour le tétanos et  pour les mésothéliomes,
    • soit par le médecin de l’ARS qui reçoit la notification pour les autres maladies à déclaration obligatoire.
       

    Un code d’anonymat à 16 caractères est établi par codage informatique irréversible de l’initiale du nom, du prénom, de la date de naissance et du sexe de la personne. Toutes les fiches de notification qui sont transmises à l’InVS portent ce code.

    Une seconde anonymisation est effectuée par l’InVS au moment de la saisie des fiches dans les bases de données nationales des maladies à déclaration obligatoire. Cette seconde anonymisation établit un index à partir du premier code d’anonymat et d’une clé secrète détenue par l’InVS. Elle rompt définitivement la possibilité de faire le lien entre la personne et les données la concernant.

    La correspondance entre le code d’anonymat et l’identité de la personne est établie, selon les maladies, par le médecin déclarant ou le médecin de l’ARS, pour permettre la validation de la fiche de notification et le droit d’accès de la personne aux données les concernant. Cette correspondance est détruite six mois après la date de notification portée sur la fiche.

    Les coordonnées des déclarants figurant sur les fiches de notification ne sont pas saisies dans les bases de données nationales et sont détruites sur les fiches six mois après la date de notification.

    La transmission des fiches de notification des déclarants à l’ARS et, de celle-ci à l’InVS, se fait par voie postale, sous pli confidentiel avec la mention « secret médical ».

    Toutes les personnes qui traitent ces informations sont soumises au secret professionnel. 

    d) Admission en soins psychiatriques (article L.3212-1 à L. 3213-10 du code de la santé publique)

    • Admission en soins psychiatriques à  la demande d’un tiers (article L.3212-1)

    Elle est prononcée lorsque les troubles mentaux de la personne rendent impossible son consentement et que l’état mental de la personne impose des soins immédiats assortis, soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit  d’une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous une autre forme qu’une hospitalisation complète. Les deux critères sont cumulatifs.

    Le tiers demandeur peut être un membre de la famille ou une personne justifiant de relations avec le patient antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l’intérêt de celui-ci (dont le tuteur ou le curateur s’ils satisfont ces conditions), à l’exception des personnels soignants qui exercent dans l’établissement d’accueil.

    Deux certificats circonstanciés, attestant que les conditions prévues sont remplies et datant de moins de quinze jours sont exigés :

    • le premier doit être impérativement établi par un médecin n’exerçant pas dans l’établissement accueillant le patient ; il constate l’état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins ;
    • le deuxième, confirmant le premier, peut émaner d’un médecin exerçant  dans l’établissement accueillant le patient.

    Les médecins ne peuvent être parents ou alliés, ni entre eux, ni du directeur de l’établissement, ni de la personne ayant fait la demande, ni de la personne hospitalisée.

    En cas d’urgence, lorsqu’il existe un risque grave d’atteinte à l’intégrité de la personne malade, le directeur de l’établissement d’accueil peut, à titre exceptionnel, prononcer l’admission au vu d’un seul certificat émanant, le cas échéant, d’un médecin exerçant dans l’établissement. Dans ce cas les certificats établis après l’admission (24 h et 72 h) devront émaner de deux psychiatres distincts (article L. 3212-3.)

    • Admission en cas de péril imminent (article L. 3212-1, II-2°)

    Lorsqu’il s’avère impossible d’obtenir la demande d’un tiers et qu’il existe un péril imminent pour la santé de la personne dûment constaté, l’admission peut être prononcée au vu d’un seul certificat. Le certificat constate l’état mental de la personne, indique les caractéristiques de la maladie et la nécessité de recevoir des soins. Il est établi par un médecin extérieur à l’établissement d’accueil qui  n’est ni parent ni apparenté au patient ou au directeur de l’établissement d’accueil. Les certificats établis après l’admission (24 h et 72 h) devront émaner de deux psychiatres distincts.

    • Admission sur décision du représentant de l’Etat (article L. 3213-1)

    Elle est prononcée par arrêté du représentant de l’Etat dans le département, au vu d’un certificat médical circonstancié lorsque les troubles mentaux du patient nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public.

    Le certificat ne peut pas être rédigé par un psychiatre de l’établissement d’accueil.

    En cas de danger imminent pour la sûreté des personnes, attesté par un avis médical  ou, à défaut, par la notoriété publique, des mesures provisoires peuvent être arrêtées par le maire (à Paris, les commissaires de police) à l’égard des personnes dont le comportement révèle des troubles mentaux manifestes.

    e) Sauvegarde de justice (article 434 code civil ; article L.3211-6 du code de la santé publique)

    Article L.3211-6, 1er alinéa : « Le médecin qui constate que la personne à laquelle il donne ses soins a besoin, pour l'une des causes prévues à l'article 425 du code civil, d'être protégée dans les actes de la vie civile peut en faire la déclaration au procureur de la République du lieu de traitement. Cette déclaration a pour effet de placer le malade sous sauvegarde de justice si elle est accompagnée de l'avis conforme d'un psychiatre

    Article L.3211-6, 2ème alinéa : « Lorsqu'une personne est soignée dans un établissement de santé, le médecin est tenu, s'il constate que cette personne se trouve dans la situation prévue à l'alinéa précédent, d'en faire la déclaration au procureur de la République du lieu de traitement. Cette déclaration a pour effet de placer le malade sous sauvegarde de justice. Le représentant de l'Etat dans le département doit être informé par le procureur de la mise sous sauvegarde. »

    Cette mesure est prise pour une durée n’excédant pas un an, renouvelable une fois. Le renouvellement ne peut intervenir que par voie judiciaire.

    f) Accidents du travail et maladies professionnelles (articles L.441-6 et L.461-5 du code de la sécurité sociale)

    Le praticien qui donne des soins à la victime d'un accident du travail doit établir un certificat initial indiquant l'état de celle-ci, le siège, la nature et la localisation des lésions ainsi que les conséquences de l'accident ou ses suites éventuelles. Les deux premiers volets du formulaire CERFA sont adressés à la caisse d’assurance maladie. Le patient conserve le troisième volet et en cas d’arrêt de travail, adresse le quatrième volet à l’employeur. Un certificat détaillé doit être établi en cas de prolongation, de rechute, de guérison ou de consolidation.

    Le même formulaire est utilisé pour les maladies professionnelles.

    En vue tant de la prévention des maladies professionnelles que d’une meilleure connaissance de la pathologie professionnelle, est obligatoire, pour tout médecin qui peut en connaître l’existence, notamment les médecins du travail, la déclaration de tout symptôme d’imprégnation toxique et de toute maladie, lorsqu’ils ont un caractère professionnel (article L.461-6 du code de la sécurité sociale).

    La déclaration de maladie à caractère professionnel, contrairement à la maladie professionnelle, n’ouvre aucun droit pour le patient. Adressée, pour respecter le secret professionnel, au Médecin Inspecteur Régional du Travail et de la Main d’œuvre (MIRTMO), elle déclenche une enquête de l’inspection du travail.

    g) Pensions civiles et militaires de retraite et d’invalidité

    Article L.31 du code des pensions civiles et militaires de retraite: «La réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions sont appréciées par une commission de réforme selon des modalités fixées par un règlement d'administration publique.

    Le pouvoir de décision appartient, dans tous les cas, au ministre dont relève l'agent et au ministre des finances.

    Nonobstant toutes dispositions contraires, et notamment celles relatives au secret professionnel, tous renseignements médicaux ou pièces médicales dont la production est indispensable pour l'examen des droits définis par le présent chapitre pourront être communiqués sur leur demande aux services administratifs placés sous l'autorité des ministres auxquels appartient le pouvoir de décision et dont les agents sont eux-mêmes tenus au secret professionnel

    Les termes «pourront être communiqués» doivent s'entendre comme une obligation faite aux médecins de donner les renseignements demandés (avis du Conseil d'Etat du 19 mars 1963).

    h) Procédures d’indemnisation

    Plusieurs dispositions législatives ont prévu des procédures particulières d’indemnisation en cas de dommage survenu à un patient. Au cours de l’instruction des dossiers, le fonds d’indemnisation ou la commission concernée peut être amené à demander aux médecins qui ont pris la personne en charge, la communication de documents médicaux.

    Il en va ainsi pour :

    • Les personnes contaminées par le VIH à l’occasion d’une transfusion.

    Le fonds d’indemnisation « recherche les circonstances de la contamination et procède à toute investigation sans que puisse lui être opposé le secret professionnel. » (article L.3122-2, 4ème alinéa du code de la santé publique) ;

    • Les personnes victimes de l’amiante

    Le Fonds d’Indemnisation des Victimes de l’Amiante (FIVA) « recherche les circonstances de l’exposition à l’amiante et ses conséquences sur l’état de santé de la victime ; il procède ou fait procéder à toute investigation et expertises utiles sans que puisse lui être opposé le secret professionnel ou industriel. » (article 53, III de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 de financement de la sécurité sociale pour 2001, modifiée).

    • Les personnes victimes ou s’estimant victimes d’un dommage imputable à une activité de prévention, de diagnostic ou de soins.

    La Commission régionale de conciliation et d’indemnisation (CRCI) chargée de faciliter le règlement amiable des accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales, diligente une expertise. Elle « peut obtenir communication de tout document, y compris d’ordre médical ». (article L.1142-9 du code de la santé publique).

    « Dans le cadre de sa mission, le collège d’experts ou l’expert peut effectuer toute investigation et demander aux parties et aux tiers la communication de tout document sans que puisse lui être opposé le secret médical ou professionnel, s’agissant de professionnels de santé ou de personnels d’établissements, de services de santé ou d’autres organismes visés à l’article L.1142-1. Les experts qui ont à connaître de ces documents sont tenus au secret professionnel dans les conditions prévues aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal. » (article L.1142-12, 5ème alinéa du code de la santé publique).

    • Les victimes des essais nucléaires français

    Le Comité d’Indemnisation des Victimes d’Essais Nucléaires (CIVEN) « procède ou fait procéder à toute investigation scientifique ou médicale utile, sans que puisse lui être opposé le secret professionnel. » (article 4, II de la loi n°2010-2 du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français).

    i) Protection de la santé des sportifs et lutte contre le dopage

    Article L.232-3 du code du sport : «Le médecin qui est amené à déceler des signes évoquant une pratique de dopage :

    1° est tenu de refuser la délivrance d'un des certificats médicaux définis aux articles L.231-2, L.231-2-1 et L.231-2-2 ;

    2° informe son patient des risques qu'il court et lui propose soit de le diriger vers l'une des antennes médicales mentionnées à l'article L.232-1, soit, en liaison avec celle-ci et en fonction des nécessités, de lui prescrire des examens, un traitement ou un suivi médical ;

    3° transmet obligatoirement au médecin responsable de l'antenne médicale mentionnée à l'article L.232-1, les constatations qu'il a faites et informe son patient de cette obligation de transmission. Cette transmission est couverte par le secret médical».

    La méconnaissance de l'obligation de transmission est passible de sanction disciplinaire.

    j) Sécurité, veille et alerte sanitaires

    A la demande de l’Institut de veille sanitaire, toute personne physique et morale est tenue de lui communiquer toute information en sa possession, relative aux risques pour la santé humaine (articles L.1413-4 et L.1413-5 du code de la santé publique).

    Lorsque ces informations sont couvertes par le secret médical (articles R.1413-21, R.1413-22 et R.1413-23 du code de la santé publique), elles sont adressées à un médecin désigné pour les recevoir, sous double enveloppe, celle placée à l’intérieur devant porter la mention « secret médical ».

    Elles sont télétransmises, sous forme chiffrée, après apposition de sa signature électronique par le médecin destinataire de la demande.

    B - Permissions de la loi

    a) Sévices ou privations infligés à un mineur ou à une personne incapable de se protéger (article 226-14, 2° du code pénal).

    Cet article autorise les médecins qui en ont connaissance à dénoncer les sévices ou privations. Le rapprochement de ces dispositions avec celles de l'article 434-3 (voir note [1]) réprimant la non-dénonciation des sévices et qui exclut expressément leur application aux personnes tenues au secret professionnel montre clairement qu'il ne s'agit pas d'une obligation de dénonciation pour le médecin.

    Ce n’est pas l’objection du secret professionnel qui peut retenir le médecin. Mais la difficulté d’appréciation de la situation peut le conduire au moins temporairement, à préférer d’autres mesures (hospitalisation par exemple) que le signalement.

    Il convient de rappeler qu'en cas de constat de sévices infligés à un mineur ou à une personne vulnérable un médecin ne saurait rester passif sans encourir les peines prévues à l'article 223-6 du code pénal réprimant la non-assistance à personne en danger.

    Qui prévenir ? Le procureur de la République ou le substitut, notamment en situation d'urgence. Un modèle de signalement est disponible sur le site internet du Conseil national.

    Le médecin n’encourt aucune poursuite disciplinaire du fait d’un signalement adressé aux autorités compétentes et dans les conditions fixées à l’article 226-14 du code pénal.

    b) Protection des mineurs en danger ou risquant de l’être.

    La loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance donne un cadre légal au partage des informations préoccupantes concernant les enfants en danger ou en risque de danger, entre les professionnels chargés de la protection de l’enfance.

    Article L.226-2-2 du code de l’action sociale et des familles : « Par exception à l’article 226-13 du code pénal, les personnes soumises au secret professionnel qui mettent en œuvre la politique de protection de l’enfant définie à l’article L.112-3 ou qui lui apportent leur concours sont autorisées à partager entre elles des informations à caractère secret afin d’évaluer une situation individuelle, de déterminer et de mettre en œuvre les actions de protection dont les mineurs et leur famille peuvent bénéficier. Le partage des informations relatives à une situation individuelle est strictement limité à ce qui est nécessaire à l’accomplissement de la mission de protection de l’enfance. Le père, la mère, toute autre personne exerçant l’autorité parentale, le tuteur, l’enfant en fonction de son âge et de sa maturité sont préalablement informés, selon des modalités adaptées, sauf si cette information est contraire à l’intérêt de l’enfant. »

    La Cellule départementale de recueil, de traitement et d’évaluation de l’information préoccupante (CRIP) rassemble et analyse les informations y compris médicales qui lui parviennent et qui laissent craindre que la santé, la sécurité du mineur sont en danger ou que les conditions de son éducation, de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises.

    Les informations à caractère médical restent couvertes par le secret médical mais doivent pouvoir faire l’objet d’échanges entre médecins.

    Lorsque le danger présente un caractère de gravité et/ou d’urgence, le médecin procède à un signalement auprès du procureur de la République dans les conditions décrites plus haut.

    c) Sévices permettant de présumer de la commission de violences sur une personne majeure (article 226-14, 2° du code pénal)

    Cette déclaration ne peut être faite auprès du procureur de la République qu'avec l'accord de la victime, majeure.

    Le certificat descriptif, avec mention éventuelle de l'état psychologique, doit être remis à la victime. Il sera opportun de la diriger, si possible, vers une unité médico-judiciaire.

    d) Dangerosité pour elles-mêmes ou pour autrui des personnes connues du médecin pour être détentrices d’une arme à feu ou ayant manifesté leur intention d’en acquérir une (article 226-14, 3° du code pénal)

    Le médecin est autorisé à faire un signalement à l’autorité administrative.

    e) Evaluation et plan personnalisé de compensation du handicap

    Selon l’article L. 241-10 du code de l’action sociale et des familles, récemment modifié et par exception à l’article 226-13 du code pénal, les membres de l’équipe pluridisciplinaire de la MDPH peuvent :

    • dans la limite de leurs attributions, échanger entre eux tous éléments ou informations à caractère secret dès lors que leur transmission est strictement limitée à ceux qui sont nécessaires à l’évaluation de la situation individuelle de la personne handicapée et à l’élaboration de son plan personnalisé de compensation du handicap ;
    • communiquer aux membres de la CDAPH tous éléments ou informations à caractère secret dès lors que leur transmission est strictement limitée à ceux qui sont nécessaires à la prise de décision ;
    • échanger avec les professionnels des établissements sociaux et médico-sociaux où elle est accueillie les informations nécessaires relatives à la situation de la personne handicapée, dès lors que celle-ci ou son représentant légal dûment averti à donné son accord.

     
    f) Evaluation de l'activité des établissements de santé

    L'article L.6113-7 du code de la santé publique prévoit que pour procéder à l'analyse de leur activité, les établissements de santé mettent en œuvre des systèmes d'information qui tiennent compte notamment des pathologies et des modes de prise en charge.

    Les praticiens exerçant dans ces établissements transmettent les données médicales nominatives nécessaires à l'analyse de l'activité et à la facturation de celle-ci au médecin DIM responsable de l'information médicale pour l'établissement, dans des conditions fixées par décret (voir note [2]). Les échanges d'informations entre les établissements de santé, l'Etat et les organismes d'assurance maladie sont eux-mêmes réglementés (voir note [3]).

    g) Recherches dans le domaine de la santé

    Les traitements de données à caractère personnel ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santé sont régis par le chapitre IX de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. L'article 55 prévoit :

    «Nonobstant les règles relatives au secret professionnel, les membres des professions de santé peuvent transmettre les données à caractère personnel qu'ils détiennent dans le cadre d'un traitement de données autorisé en application de l’article 53».

    Les personnes auprès desquelles sont recueillies des données à caractère personnel ou à propos desquelles de telles données sont transmises doivent, avant le début du traitement, être individuellement informées de la nature des informations transmises, de leur destinataire, de la finalité du traitement. Elles ont un droit d’accès et de rectification. Toute personne peut s’opposer à ce que des données à caractère personnel la concernant fassent l’objet d’un traitement.

    Les données à caractère personnel doivent être codées avant leur transmission ; toutefois il peut être dérogé à ce principe pour certaines recherches (études de pharmacovigilance, protocoles de recherche réalisées dans le cadre d’études coopératives nationales et internationales, particularités de la recherche) sur autorisation motivée de la CNIL, donnée après avis du comité consultatif pour le traitement de l’information en matière de recherche dans le domaine de la santé.

    La présentation des résultats du traitement de ces données ne peut en aucun cas permettre l’identification directe ou indirecte des personnes concernées.

    h) Evaluation ou analyse des activités de soins et de prévention

    La loi n° 2004-801 du 6 août 2004 a complété la loi « Informatique et libertés » du 6 janvier 1978 d'un chapitre X relatif au traitement des données personnelles de santé à des fins d'évaluation ou d'analyse des activités de soins et de prévention.

    L'article  63 prévoit : « Les données issues des systèmes d'information visés à l'article L. 6113-7 du code de la santé publique, celles issues des dossiers médicaux détenus dans le cadre de l'exercice libéral des professions de santé, ainsi que celles issues des systèmes d'information des caisses d'assurance maladie ne peuvent être communiquées à des fins statistiques d'évaluation ou d'analyse des pratiques et des activités de soins et de prévention, que sous la forme de statistiques agrégées ou de données par patient constituées de telle sorte que les personnes concernées ne puissent être identifiées.

    Il ne peut être dérogé aux dispositions de l'alinéa précédent que sur autorisation de la Commission nationale de l'informatique et des libertés dans les conditions prévues aux articles  64 à 66. Dans ce cas, les données utilisées ne comportent ni le nom, ni le prénom des personnes, ni leur numéro d'inscription au répertoire national d'identification des personnes physiques. »

    Conformément à l'article 64, la Commission nationale de l'informatique et des libertés a pour mission notamment de s'assurer de la nécessité de recourir à des données à caractère personnel et de la pertinence du traitement au regard de la finalité déclarée d'évaluation ou d'analyse des pratiques ou des activités de soins et de prévention. Elle vérifie que les données à caractère personnel dont le traitement est envisagé ne comportent ni le nom, ni le prénom des personnes concernées, ni leur numéro d'inscription au répertoire national d'identification des personnes physiques. Elle peut interdire la communication des informations par l'organisme qui les détient si le demandeur n'apporte pas d'éléments suffisants attestant de la nécessité de disposer de certaines données parmi l'ensemble de celles dont le traitement est envisagé.

    Il est rappelé (article 66) que les personnes qui procèdent à ces traitements sont soumises au secret professionnel dans les conditions de l'article 226-13 du code pénal et que les résultats des traitements ne peuvent faire l'objet d'une communication, d'une publication ou d'une diffusion que si l'identification des personnes sur l'état desquelles les données ont été recueillies est impossible.

    i) Accès aux informations de santé nominatives

     Les médecins de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), les médecins inspecteurs de santé publique, les inspecteurs de l’ARS ayant la qualité de médecin (article L.1112-1 du code de la santé publique), les médecins-conseils des services du contrôle médical (article L.315, V du code de la sécurité sociale) et les médecins experts de la Haute Autorité de Santé (article L.1414-4 du code de la santé publique), les inspecteurs, médecins, de la radioprotection (article L.1333-19 du code de la santé publique) n’ont accès aux données de santé à caractère personnel que si elles sont strictement nécessaires à l’exercice de leur mission, dans le respect du secret médical.

     2 – JURISPRUDENCE

    La loi n°2002-303 du 4 mars 2002 a prévu que les héritiers puissent accéder aux informations médicales concernant une personne décédée, qui leur sont nécessaires pour faire valoir leurs droits  (articles L. 1110-4 et R. 1111-7 du code de la santé publique).

    Il existe par ailleurs une jurisprudence particulière et antérieure à cette loi concernant les rentes viagères et les testaments :

    a) Rentes viagères

    Selon l'article 1975 du code civil, un contrat de rente viagère est nul lorsque la personne bénéficiant de la rente meurt, dans les vingt jours de la date du contrat, de la maladie dont elle était atteinte au moment de la signature.

    Les héritiers désirant faire prononcer la nullité d'une rente viagère dans ces conditions s'adressent au médecin pour apporter la preuve de l'existence d'une affection préexistante. La Cour de Cassation (Civ., 12 février 1963) a admis que le médecin traitant du défunt pouvait sans violer le secret professionnel délivrer un certificat pour dire (sans indiquer la maladie et sans donner de détails) si l'affection ayant entraîné la mort existait à la date de la signature du contrat.

    b)Testaments

    Lorsque les héritiers contestent le testament qui les a désavantagés, et cherchent à prouver que les facultés mentales du testateur étaient altérées au moment de la signature de l'acte, ils s'adressent au médecin traitant. La Cour de cassation (Civ. 1, 26 mai 1964) a pu tenir compte du témoignage du médecin relatif aux facultés mentales du testateur.

    DEROGATIONS AU SECRET PROFESSIONNEL

    DEROGATIONS LEGALES

    JURISPRUDENCE

    Déclarations obligatoires

    Permissions de la loi

     

    - naissances
    - décès
    - maladies contagieuses
    - soins psychiatriques : sur demande d'un tiers, du représentant de l’Etat
    - sauvegarde de justice
    - accidents du travail et maladies professionnelles
    - pensions civiles et militaires de retraite
    - indemnisation de personnes  victimes d’un dommage,VIH, amiante…
    - dopage
    - sécurité, veille, alerte sanitaires

    - sévices ou privations infligés à un mineur ou à une personne incapable de se protéger
    - sévices permettant de présumer de violences sexuelles etc.
    - recherches dans le domaine de la santé
    - évaluation de l’activité des établissements de santé
    - dangerosité d’un patient détenteur d’une arme à feu.

    -rentes viagères

    - testaments


    ([1]) R. VILLEY «Histoire du secret médical » Paris : Seghers, 1986. B. HOERNI B. - BENEZECH M., « Le secret médical - Confidentialité et discrétion en médecine », Paris : Masson, 1996.

    ([2]) B. HOERNI «  Ethique et déontologie médicale », 2ème édition Masson – Juin 2000

    ([3]) Article L.6323-3 du code de la santé publique : « La maison de santé est une personne morale constituée entre des professionnels médicaux, auxiliaires médicaux ou pharmaciens.

    Ils assurent des activités de soins sans hébergement de premier recours au sens de l'article L. 1411-11 et, le cas échéant, de second recours au sens de l'article L. 1411-12 et peuvent participer à des actions de santé publique, de prévention, d'éducation pour la santé et à des actions sociales dans le cadre du projet de santé qu'ils élaborent et dans le respect d'un cahier des charges déterminé par arrêté du ministre chargé de la santé.

    Le projet de santé est compatible avec les orientations des schémas régionaux mentionnés à l'article L. 1434-2. Il est transmis pour information à l'agence régionale de santé. Ce projet de santé est signé par chacun des professionnels de santé membres de la maison de santé. Il peut également être signé par toute personne dont la participation aux actions envisagées est explicitement prévue par le projet de santé. »

    ([4]) L. RENE, Rapport de la Commission de réflexion sur le secret professionnel appliqué aux acteurs du système de soins - Mars 1994

    ([5]) I. KAHN-BENSAUDE et J.-M. FAROUDJA «La protection de l’enfance : signalement et information préoccupante », rapport adopté lors de la session du Conseil national de l’Ordre des médecins le 8 octobre 2010

    ([6]) P. VALLERY-RADOT « Médecine à l'échelle humaine ». Paris : A. Fayard, 1959

    ([7]) L. RENE, Rapport de la Commission de réflexion sur le secret professionnel appliqué aux acteurs du système de soins - Mars 1994.

    ([8]) Article 60 du code de procédure pénale :« S'il y a lieu de procéder à des constatations ou à des examens techniques ou scientifiques, l'officier de police judiciaire a recours à toutes personnes qualifiées 

    Sauf si elles sont inscrites sur une des listes prévues à l'article 157, les personnes ainsi appelées prêtent, par écrit, serment d'apporter leur concours à la justice en leur honneur et en leur conscience.

    Les personnes désignées pour procéder aux examens techniques ou scientifiques peuvent procéder à l'ouverture des scellés. Elles en dressent inventaire et en font mention dans un rapport établi conformément aux dispositions des articles 163 et 166. Elles peuvent communiquer oralement leurs conclusions aux enquêteurs en cas d'urgence.

    Sur instructions du procureur de la République, l'officier de police judiciaire donne connaissance des résultats des examens techniques et scientifiques aux personnes à l'encontre desquelles il existe des indices faisant présumer qu'elles ont commis ou tenté de commettre une infraction, ainsi qu'aux victimes. »

    ([9]) Article 77-1 du code de procédure pénale : « S'il y a lieu de procéder à des constatations ou à des examens techniques ou scientifiques, le procureur de la République ou, sur autorisation de celui-ci, l'officier de police judiciaire, a recours à toutes personnes qualifiées.

    Les dispositions des deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article 60 sont applicables. »

    ([10]) Article L.4163-7 du code de la santé publique : « Est puni de 3750 euros d'amende le fait :

    1° D'exercer la médecine, l'art dentaire ou la profession de sage-femme sans avoir fait enregistrer ou réenregistrer son diplôme en violation des dispositions de l'article L. 4113-1 ;

    2° Pour un médecin, de ne pas déférer aux réquisitions de l'autorité publique ».

    ([11]) Article 96 du code de procédure pénale : « Si la perquisition a lieu dans un domicile autre que celui de la personne mise en examen, la personne chez laquelle elle doit s'effectuer est invitée à y assister. Si cette personne est absente ou refuse d'y assister, la perquisition a lieu en présence de deux de ses parents ou alliés présents sur les lieux, ou à défaut, en présence de deux témoins.

    Le juge d'instruction doit se conformer aux dispositions des articles 57 (alinéa 2) et 59.

    Toutefois, il a l'obligation de provoquer préalablement toutes mesures utiles pour que soit assuré le respect du secret professionnel et des droits de la défense.

    Les dispositions des articles 56 et 56-1 à 56-4 sont applicables aux perquisitions effectuées par le juge d'instruction. »

    Article 97 : « Lorsqu'il y a lieu, en cours d'information, de rechercher des documents ou des données informatiques et sous réserve des nécessités de l'information et du respect, le cas échéant, de l'obligation stipulée par l'alinéa 3 de l'article précédent, le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire par lui commis a seul le droit d'en prendre connaissance avant de procéder à la saisie.

    Tous les objets, documents ou données informatiques placés sous main de justice sont immédiatement inventoriés et placés sous scellés. Cependant, si leur inventaire sur place présente des difficultés, l'officier de police judiciaire procède comme il est dit au quatrième alinéa de l'article 56.

    Il est procédé à la saisie des données informatiques nécessaires à la manifestation de la vérité en plaçant sous main de justice soit le support physique de ces données, soit une copie réalisée en présence des personnes qui assistent à la perquisition.

    Si une copie est réalisée dans le cadre de cette procédure, il peut être procédé, sur ordre du juge d'instruction, à l'effacement définitif, sur le support physique qui n'a pas été placé sous main de justice, des données informatiques dont la détention ou l'usage est illégal ou dangereux pour la sécurité des personnes ou des biens.

    Avec l'accord du juge d'instruction, l'officier de police judiciaire ne maintient que la saisie des objets, documents et données informatiques utiles à la manifestation de la vérité, ainsi que des biens dont la confiscation est prévue à l’article 131-21 du code pénal.

    Lorsque ces scellés sont fermés, ils ne peuvent être ouverts et les documents dépouillés qu'en présence de la personne, assistée de son avocat, ou eux dûment appelés. Le tiers chez lequel la saisie a été faite est également invité à assister à cette opération.… »

    ([12]) Crim. 8 avril 1998, n°97-83656

    ([13]) Lorsque le patient est un fonctionnaire, seuls les volets 2 et 3 du certificat qui ne comportent pas de mentions médicales sont transmis au service du personnel. Le volet 1, conservé par le fonctionnaire, devra être présenté à toute requête du médecin agréé par l’administration, notamment en cas de contre-visite – circulaire FPPA0300112C du 24 juillet 2003.

    ([14]) F. STEFANI «Formulaires médicaux et assurances », Rapport adopté lors de la session du Conseil national de l’Ordre des médecins de septembre 2007

    ([15]) Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, en particulier art. 38 et 40 ; Cadoux L., Vulliet-Tavernier S., Secret médical et informatique, Conseil d'État, Rapport public, 1998, Études et Documents n° 49 

    ([16]) Articles R.1110-1 à R.1110-3 du code de la santé publique

    ([1]7) Livre blancs sur l’informatisation de la santé – mai 2008 ; sur la télémédecine – janvier 2009 ; sur la dématérialisation des documents médicaux – juin 2010

     ([1]8) L. RENE, Rapport de la Commission de réflexion sur le secret professionnel appliqué aux acteurs du système de soins - Mars 1994.

    ([19]) CAA Nantes, 15 octobre 2009, G- n°09NT00165 : « Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X, hospitalisé du 23 mai au 7 juin 2006 dans le service de dermatologie du CHU de Caen, a exprimé formellement, dès son arrivée dans le service, son opposition à ce que ses parents soient informés de sa séropositivité au virus de l'immunodéficience humaine ; que si cette demande du patient a été prise en compte par l'équipe médicale, il résulte de l'instruction et n'est d'ailleurs pas contesté que le 30 mai 2006, la mère de M. X, venue rendre visite à son fils, a pu, alors qu'une infirmière dispensait des soins à celui-ci, prendre connaissance de la feuille de soins, mentionnant sa séropositivité, déposée sur un chariot laissé dans le couloir ; qu'alors même que ladite fiche aurait été placée, ainsi que le soutient le centre hospitalier, sous le cahier des soins infirmiers, il est constant que les documents médicaux confidentiels posés sur le chariot sont restés sans surveillance dans le couloir ; que la possibilité ainsi laissée par l'établissement hospitalier, aux personnes étrangères au service, d'accéder aisément à des documents médicaux couverts par le secret médical est constitutive, dans les circonstances de l'espèce, d'un défaut d'organisation du service engageant la responsabilité du CHU de Caen à l'égard de M. X »

    ([20]) Article L.6113-7 du code de la santé publique

    ([21]) Article L. 6141-5 du code de la santé publique, alinéas 3 et 4 : « Dès lors qu'il existe un risque sérieux pour la sécurité des personnes au sein des établissements mentionnés au premier alinéa du présent article, les personnels soignants intervenant au sein de ces établissements et ayant connaissance de ce risque sont tenus de le signaler dans les plus brefs délais au directeur de l'établissement en lui transmettant, dans le respect des dispositions relatives au secret médical, les informations utiles à la mise en œuvre de mesures de protection.
    Les mêmes obligations sont applicables aux personnels soignants intervenant au sein des établissements pénitentiaires ».

    ([22]) Article 434-3 du code pénal :  « Le fait, pour quiconque ayant eu connaissance de privations, de mauvais traitements ou d’atteintes sexuelles infligés à un mineur de quinze ans ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique ou d'un état de grossesse, de ne pas en informer les autorités judiciaires ou administratives est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. Sauf lorsque la loi en dispose autrement, sont exceptées des dispositions qui précèdent les personnes astreintes au secret dans les conditions prévues par l'article 226-13. »

    Comme l'indique la circulaire du 14 mai 1993 commentant les dispositions de la partie législative du nouveau code pénal et les dispositions de la loi du 16 décembre 1992 relative à son entrée en vigueur : « En excluant expressément des dispositions de l'article 434-3 les personnes tenues au secret professionnel, ce qui implique que la décision de signalement est laissée à la seule conscience de ces personnes, le législateur a notamment pensé à la situation des médecins. Il a ainsi estimé que ces derniers ne devaient pas être obligés, sous peine de sanctions pénales, de signaler des mauvais traitements, afin d'éviter que les auteurs des sévices n'hésitent à faire prodiguer à l'enfant les soins nécessaires par crainte d'être dénoncés. Il convient néanmoins de rappeler que les dispositions de l'article 223-6 du nouveau code réprimant la non-assistance à personne en péril sont applicables aux personnes soumises au secret professionnel et qu'en cas de mauvais traitements mettant en danger la vie ou l'intégrité physique d'un mineur ou d'une personne vulnérable, un médecin ne saurait rester passif sans encourir les peines prévues par cet article. La non-application de l'article 434-3 ne justifie donc pas l'absence de toute intervention de la part du médecin. Cette intervention peut revêtir diverses formes, et avoir par exemple pour objet l'hospitalisation de la victime. Mais elle peut également consister en un signalement aux autorités administratives ou judiciaires, puisque l'article 226-14 lève le secret professionnel dans cette hypothèse. »

     ([23]) Articles R.6113-1 à R.6113-11 du code de la santé publique

     ([24]) Il s'est avéré qu'il n'était pas possible d'éliminer totalement le risque d'identification d'une personne dans le fichier comprenant l'ensemble des séjours d'un établissement. En conséquence la rédaction de l'art. L.6113-8 du code de la santé publique a été modifiée: « Les établissements de santé transmettent aux agences régionales de santé, à l'Etat ou à la personne publique qu'il désigne et aux organismes d'assurance maladie les informations relatives à leurs moyens de fonctionnement, à leur activité, à leurs données sanitaires, démographiques et sociales qui sont nécessaires à l'élaboration et à la révision du projet régional de santé, à la détermination de leurs ressources, à l'évaluation de la qualité des soins, à la veille et la vigilance sanitaires, ainsi qu'au contrôle de leur activité de soins et de leur facturation.

    Les destinataires des informations mentionnées à l'alinéa précédent mettent en œuvre, sous le contrôle de l'Etat au plan national et des agences au plan régional, un système commun d'informations respectant l'anonymat des patients, ou, à défaut, ne comportant ni leur nom, ni leur prénom, ni leur numéro d'inscription au Répertoire national d'identification des personnes physiques, et dont les conditions d'élaboration et d'accessibilité aux tiers, notamment aux établissements de santé publics et privés, sont définies par voie réglementaire. (…) »

  • Article 5 - Indépendance professionnelle

    Article 5 (article R.4127-5 du code de la santé publique)

    Le médecin ne peut aliéner son indépendance professionnelle sous quelque forme que ce soit.

    Cette indépendance est acquise quand chacun de ses actes professionnels est déterminé seulement par le jugement de sa conscience et les références à ses connaissances scientifiques, avec, comme seul objectif, l'intérêt du patient.

    1 - Principe général

    Quand il s'adresse à un médecin, le patient a le droit d'être assuré qu'il trouvera en lui quelqu'un qui va l'écouter et le secourir, sans autre préoccupation que de lui rendre les services qu'il peut lui apporter.

    L'indépendance professionnelle fonde la confiance du patient. Son corollaire est la responsabilité personnelle du médecin.

    Indépendance, confiance, responsabilité, constituent les éléments essentiels du contrat tacite qui lie le patient et son médecin. Le contrat ne serait pas loyal si le médecin se disposait à agir sous d'autres influences que l'intérêt du patient (voir note [1]). Cette indépendance constitue ainsi un droit du patient. Pourtant, si l'indépendance du médecin est rarement contestée - tant il est naturel et semble évident que le médecin agisse et décide selon sa conscience pour soulager, guérir, prévenir - l'histoire apprend qu'elle fut souvent menacée, y compris en Europe, et qu'elle peut encore l'être à l'heure actuelle dans le monde.

    En France, ce droit des patients a été confirmé à maintes reprises. L'article L.162-2 du code de la sécurité sociale dispose que « dans l'intérêt des assurés sociaux et de la santé publique, le respect de la liberté d'exercice et de l'indépendance professionnelle et morale des médecins est assuré... »

    Bien qu'admise et confirmée dans son principe, l'indépendance du médecin reste cependant toujours menacée dans ses applications. Si elle constitue un élément fondamental de la morale médicale, et donc un des piliers de la déontologie ainsi qu'une condition psychologique indispensable de la confiance des patients, la recherche de leurs intérêts peut se trouver limitée par les exigences de la vie sociale.

    2 - Indépendance et connaissances médicales

    Aussi nécessaire soit-elle, cette indépendance n'est pas totale. Pour faire bénéficier le patient des meilleurs soins, le médecin doit tenir compte de l'état de la science médicale. Ses données, devenues complexes, sont de plus en plus formalisées et susceptibles d'aider le médecin dans ses décisions. Il va de soi que les indications qui en découlent ne s'imposent pas sans nuance. Ce sont des indications générales qui seront habituellement suivies. Elles peuvent cependant être inapplicables à un patient pour des raisons particulières et le médecin pourra alors s'en affranchir, de préférence en le justifiant.

    3 - Relativité de l'indépendance des médecins entre eux

    Les transformations de l'exercice en général et les modes pratiques de cet exercice multiplient les circonstances dans lesquelles s'exerce le droit des patients à l'indépendance des médecins. C'est le cas de la médecine d'équipe où "chacun des praticiens assume ses responsabilités personnelles" et "peut librement refuser de prêter son concours ou le retirer" (article 64 - voir note [2]). C'est également la situation des médecins associés dont le contrat écrit doit respecter "l'indépendance professionnelle de chacun d'eux" (article 91 al.1), obligation qui s'étend aux médecins associés ou non dans leurs rapports avec les autres professionnels de santé (article 68).

    Des conflits peuvent survenir dans des circonstances très variées. Les situations doivent toujours être abordées en fonction de l'intérêt direct et immédiat du patient. À défaut d'entente directe entre eux, les médecins doivent demander au conseil départemental une conciliation (article 56).

    4 - Indépendance et structure de soins

    Intimement liées, l'indépendance et la responsabilité ne sont pas identiques lors d’une hospitalisation en secteur privé ou public (article 8).

    En milieu privé, l'indépendance du praticien est confrontée à des facteurs financiers : limitation quantitative et surtout qualitative de certaines prescriptions en raison de leur coût, choix dans les pathologies à traiter. La plus grande menace pour l'indépendance est constituée par des contrats léonins, ce qui a justifié la rédaction de l'article 92 mettant en garde le praticien contre les dérives de rentabilité.

    À l'hôpital public, l'organisation des soins, la hiérarchisation de la responsabilité peuvent porter atteinte au principe de l'indépendance individuelle du praticien ; le travail en équipe, son caractère pluridisciplinaire y contribuent souvent. Pour ces raisons, la notion de faute de service dans la responsabilité administrative peut l'emporter sur celle d'indépendance.

    Si dans tout établissement de santé les obligations déontologiques restent identiques dans leurs principes et peuvent faire l'objet d'un recours d'ordre disciplinaire, les conséquences fautives des décisions et des actes médicaux conduisent à des procédures différentes selon l'établissement : tribunal administratif pour les établissements publics, tribunaux civils pour les établissements privés.

    Dans la pratique en réseau (voir note [3]), l'indépendance du médecin est fondamentale mais ne saurait être utopique. Elle doit tenir compte des réalités, c'est-à-dire de l'ensemble constitué structurellement par l'équipe soignante (médecins, auxiliaires médicaux et médico-sociaux) et les établissements de santé, publics ou privés. L'important est qu'aucun intérêt ne l'emporte, dans les décisions des médecins ou autres soignants, sur l'intérêt premier du patient.

    5 - Indépendance et structures administratives ou organismes privés

    Un médecin ne doit pas accepter une position subordonnée telle que sa liberté de jugement et d'action puisse se trouver amputée ou orientée. À une époque où le besoin de sécurité développe des formes nouvelles d'exercice, le corps médical doit continuer à préserver son indépendance professionnelle, sans en sacrifier une partie pour une meilleure stabilité personnelle. Dans cet esprit, l'Ordre est consulté pour avis avant la mise en application de toute convention engageant la profession et ses rapports avec les organismes de protection sociale.

    S'il existe, plus ou moins apparent, au niveau des établissements de santé, le risque de subordination reste important pour la médecine salariée. Ce mode de rémunération a tendance à se développer, y compris sous forme vacataire et pour des raisons de convenance personnelle. Mais la subordination dans la décision médicale est inadmissible. L'absence de clause garantissant l'indépendance professionnelle (clause considérée comme "essentielle" et confirmée par le Conseil d'Etat) est une cause de nullité déontologique du contrat. Dans le domaine privé comme public, tout contrat doit faire l'objet d'un examen minutieux des conditions de rupture et de leur caractère éventuellement arbitraire.

    Le médecin ne peut accepter d'être l'allié d'un employeur contre un employé ou inversement. Il ne peut subir l'influence de tiers, ni se laisser entraîner dans des combinaisons d'intérêts à l'insu du patient. S'il ne donne pas de soins, s'il fournit seulement des avis, l'indépendance de son jugement ne doit pas être compromise par un programme ou des directives. Ainsi le médecin du travail ne se prononce pas en fonction de l'employeur ni des syndicats mais dans l'intérêt de l'individu et de la collectivité des salariés qu'il examine. Cette obligation morale d'indépendance peut avoir à s'exercer dans des conditions particulièrement difficiles comme pour les soins en milieu pénitentiaire (article10 - voir note [4]).

    Le médecin doit toujours agir dans le sens dicté par l'intérêt premier du patient et ne peut pas se laisser considérer comme un agent d'exécution au service d'autres intérêts qui deviendraient prépondérants. Il s'agit là d'un état d'esprit auquel il convient de veiller sans cesse.

    6 - Indépendance, malades et entourage

    L’indépendance du médecin s’exerce aussi vis-à-vis du patient et de son entourage.

    Le médecin ne peut céder à une demande d’examen, de soins ou de prescription qui ne serait pas médicalement justifiée, ni effectuer à la demande du patient un acte qu’en conscience il réprouve (articles 8, 36, 37 et 38), ni répondre à la sollicitation d’un certificat de complaisance (article 28).

    Satisfaire une demande injustifiée compromet définitivement la valeur de la parole ou des attestations du médecin.

    La même indépendance doit apparaître dans le comportement du médecin lorsqu'il s'adresse à l'entourage, qu'il s'agisse de la famille du patient, de son conjoint en particulier, quelquefois de ses enfants adolescents (prescription contraceptive à une mineure) ou plus simplement d'amis, voire de collègues de travail.

    Un exemple fréquent est constitué par les sollicitations du médecin lors des procédures de divorce. L'article 51 est précis à cet égard.

    De même, bien ou mal intentionné, très habile parfois, un membre de la famille peut presser le médecin d'user de son autorité et de la confiance qu'il inspire pour persuader son patient de consentir à telle ou telle disposition préméditée. Il est clair que le médecin résistera à cette incitation si ce que l'on suggère est contraire à l'intérêt du patient.

    C'est ce seul intérêt qui doit guider le médecin dont les propres intérêts doivent s'effacer, car le praticien pourrait être tenté de choisir, en partie pour sa propre commodité, un traitement plutôt qu'un autre.

    7 - Indépendance du médecin et argent

    L’indépendance du médecin vis-à-vis de l'argent doit être claire : indépendance de façon directe (dessous de table) ou indirecte (commissions, ristournes, dichotomies - articles 22, 23, 24).

    La mise en application, confiée à l'Ordre, de l'article L.4113-6  du code de la santé publique fait apparaître les dangers auxquels est exposée l'indépendance du médecin dans ses relations avec les entreprises pharmaceutiques ou de techniques médicales, aussi bien dans les phases de recherche que dans les périodes d'utilisation des produits.

    Pour garantir l'indépendance du médecin, le législateur a souhaité, que sa relation avec ces entreprises soit transparente. Pour en permettre le contrôle, la convention passée entre eux doit faire l'objet d'un avis de l'Ordre. Dans cette mission de contrôle, ce qui est pris en compte - quelle que soit la nature de l'avantage consenti, en particulier dans les travaux de recherche - n'est pas le montant de la rémunération en lui-même, mais son adéquation à la charge de travail imposée. Une somme d'argent ou une prise en charge de frais disproportionnés ne peut être consentie à un médecin : cela reviendrait à le fidéliser directement ou indirectement, et ainsi à orienter ses prescriptions.

    En autorisant ces entreprises à prendre en charge des frais relatifs à des activités de recherche ou d’évaluation scientifique, la loi a, par ailleurs, précisé et même souligné que l'hospitalité (lors de congrès, colloques, journées…) doit être d'un niveau raisonnable et limitée à l'objectif professionnel et scientifique principal de la manifestation (article 24).

    En outre, sous peine de sanctions disciplinaires, les médecins qui ont des liens avec des entreprises produisant ou exploitant des produits de santé ou des organismes de conseil intervenant sur ces produits sont tenus de les faire connaître au public, lorsqu’ils s’expriment lors d’une manifestation publique ou dans la presse écrite ou audiovisuelle (voir note [5]).

    En organisant ainsi un contrôle des relations entre médecins et firmes industrielles, le législateur a confirmé et conforté l'Ordre dans sa mission déontologique et permis que des excès manifestes, même s'ils restent marginaux, ne nuisent pas à la nécessaire crédibilité de la profession.


    ([1]) J.-F. CERFON, « Conflits d’intérêt dans l’exercice médical », rapport adopté lors de la session du Conseil national de l’Ordre des médecins du 8 avril 2011, www.conseil-national.medecin.fr

    ([2]) Monographie du Conseil national concernant les relations entre les anesthésistes-réanimateurs, chirurgiens et autres spécialistes ou professionnels de santé, décembre 2001 ; Lerat - M. Déontologie et médecine d'équipe - Bulletin de l'Ordre septembre 1994

    ([3]) B. HOERNI,« Pratique médicale en réseau et déontologie », Bulletin de l'Ordre décembre 1997

    ([4]) B. HOERNI, « Aspects déontologiques de la médecine en milieu pénitentiaire », rapport adopté par le Conseil national de l'Ordre des médecins en juillet 2001, www.conseil-national.medecin.fr

    ([5]) Article L.4113-13 du code de la santé publique

  • Article 6 - Libre choix

    Article 6 (article R.4127-6 du code de la santé publique)

    Le médecin doit respecter le droit que possède toute personne de choisir librement son médecin. Il doit lui faciliter l'exercice de ce droit.

    Le libre choix est un droit du patient. Ce droit, ainsi que la liberté consentie par la loi d'en faire usage, contribue à la confiance qu'il accorde à son médecin. Et cette confiance fonde la responsabilité du praticien. Associé à l'indépendance et à la liberté de prescription, le libre choix constitue un des piliers de l'exercice médical actuel, fidèle à l'esprit et aux pratiques de la médecine traditionnelle. Aujourd'hui le changement de médecin est le plus souvent motivé par un changement de résidence.

    Déjà affirmé antérieurement (article L.162-5 du code de la sécurité sociale), ce droit a été réaffirmé dans les conventions nationales organisant les rapports entre les médecins libéraux et les caisses d'assurance maladie.

    De son côté le code de la santé publique précise que «  le droit du malade au libre choix de son praticien et de son établissement de santé est un principe fondamental de la législation sanitaire» (article L. 1110-8, 1er alinéa du code de la santé publique).

    C'est donc la loi qui reconnaît au patient le droit de choisir son médecin, et il ne s'agit nullement d'une considération déontologique. Trop souvent, le médecin est conduit à penser qu'il est le défenseur de ce droit et s'approprie cette défense. Au contraire le rappel - dans le code de déontologie médicale - de ce droit n'est là que pour faire prendre conscience au médecin qu'il doit à la fois respecter ce droit (y compris à ses dépens, matériels ou psychologiques) et en respecter l'application.

    Mais si ce principe reste fondamental, son application pose toute une série de problèmes pratiques liés d'une part à la notion d'urgence, de l'autre aux conditions de remboursement des soins par les organismes de protection sociale.

    1 - Libre choix et urgences

    La véritable urgence définit une situation où le pronostic vital ou fonctionnel est en jeu. La rapidité de la mise en œuvre des moyens destinés à y faire face implique que la notion de libre choix s'estompe et même parfois disparaît. C'est en particulier le cas des accidentés.

    Les préférences individuelles s'effacent au profit d'une organisation nécessaire qui  n’est pas toujours en mesure de satisfaire tous les désirs des blessés (ramassage et transport) ou de leur entourage (enfants, blessés inconscients, patients âgés).

    Des situations analogues s'observent à propos des systèmes de permanence des soins. Outre les rivalités entre les systèmes et le recours à différents moyens publicitaires, où les considérations d'intérêt peuvent l'emporter sur la mission de secours proprement dite, l'activité du médecin de permanence est parfois, par ses implications, une façon de fidéliser à son profit la patientèle. Or appelé en urgence, il doit limiter son action à la situation et informer le médecin traitant (article 59).

    Dans cet esprit une attention particulière est recommandée aux services chirurgicaux ou médicaux des établissements de santé, qui reçoivent en urgence des patients, afin qu'ils transmettent des informations aux médecins traitants selon les indications fournies par les patients eux-mêmes.

    2 - Libre choix et multiplicité des intervenants

    La médecine moderne donne à certains l'impression d'être un ensemble de techniques parfaitement au point et d'utiliser des méthodes si bien codifiées que les médecins seraient les exécutants interchangeables d'un programme logique. C'est évidemment trompeur car l'application d'un protocole diagnostique et thérapeutique ne peut être bénéfique que si elle est personnellement adaptée au patient à qui elle est destinée.

    Cependant le caractère de plus en plus technique des examens et des traitements - où interviennent souvent des auxiliaires médicaux chargés du fonctionnement de certains appareillages - fait courir le risque d'un exercice "déshumanisé". L'hospitalisation expose le patient - déjà séparé de son environnement (habitat, famille) et de son médecin traitant - à des rencontres trop souvent anonymes où il a l'impression de devenir un "objet".

    Les mobiles qui conduisent le public dans le choix d'un médecin sont plus ou moins judicieux : la chaleur humaine ou l'aspect extérieur du personnage, ou encore la notoriété, peuvent compter plus que sa compétence professionnelle.

    Que devient alors la notion de libre choix ? Et peut-on dire qu'il s'exerce vis-à-vis de l'anesthésiste lorsque le patient choisit un praticien dont l'exercice nécessite une anesthésie ?

    L'exercice en équipe souligne davantage la fragilité de ce principe au regard de ses applications : chirurgie traumatologique, réparation ou plus encore greffes d'organes, d'une façon plus générale équipes pluridisciplinaires (cancérologie, assistance médicale à la procréation, etc.) ou interventions à plusieurs équipes simultanées...

    Lorsque s'efface la relation directe entre le patient et son médecin habituel, le rôle de ce dernier devient difficile si chaque praticien intervenant ne s'impose pas la rigueur déontologique prévue dans le code pour ces circonstances.

    Une attention toute particulière à l’exercice de cette rigueur doit être apportée lors de l’exercice en réseau par le/les médecins, en même temps qu’une certaine exemplarité vis-à-vis de tous les intervenants dans le domaine de la santé, soumis eux-mêmes à leurs obligations déontologiques (infirmier(ères), masseurs-kinésithérapeutes).

    Ce souci de permettre en toutes circonstances au patient de choisir son praticien ne doit pas être perdu de vue dans les groupes de médecins à exercice libéral qu'il s'agisse de sociétés d'exercice (SCP, SEL), d’associations ou d’autres structures. L'absence du praticien, les conditions de son remplacement, voire son décès, l'arrivée d'un confrère dans un groupe, sont des circonstances où une vigilance déontologique doit s'exercer pour respecter le droit du patient à choisir son praticien.

    3 - Libre choix et contraintes administratives

    La démographie médicale, l’absence de desserte par les transports en commun entre certaines localités, la nouvelle organisation sanitaire mise en place par la loi n°2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’Hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires qui laisse aux Agences Régionales de Santé le soin de définir et coordonner l’offre de soins régionale sont autant de facteurs qui peuvent constituer une entrave au libre choix des patients.

    L’assurance maladie attribue un remboursement pour les actes du médecin, quel qu’il soit, choisi par le patient, mais elle ne prend en charge ni les dépassements d’honoraires ni les frais supplémentaires de déplacement lorsque le médecin ou l’établissement de santé choisi n’est pas le plus proche. Elle tient compte des différences de tarifs entre les établissements de santé.

    Le libre choix d’un praticien et d’un établissement de santé s’étend également au choix du service : « dans les disciplines qui comportent plusieurs services, les malades ont, sauf en cas d’urgence et compte tenu des possibilités en lits, le libre choix du service dans lequel ils désirent être admis.» (article R.1112-17 du code de la santé publique)

    La circulaire n° DHOS/G/2005/57 du 2 février 2005 relative à la laïcité dans les établissements de santé rappelle toutefois que ce libre choix est exercé par le patient et non par un parent, un proche ou la personne de confiance mentionnée à l’article L.1111-6 du code de la santé publique ; il doit au surplus se concilier avec diverses règles telles que l’organisation du service ou la délivrance des soins. Enfin ce libre choix du patient ne permet pas que la personne prise en charge puisse s’opposer à ce qu’un membre de l’équipe soignante procède à un acte de diagnostic ou de soins pour des motifs tirés de la religion connue ou supposée de ce dernier.

    Par ailleurs, depuis 1985 (voir note 1), la loi a confirmé le principe de la sectorisation sur lequel l'administration de la santé fonde certaines réalisations, en particulier dans le domaine psychiatrique : le lieu de résidence de l'intéressé détermine l'établissement et le médecin qui le soigneront.

    4 - Libre choix et compétence du médecin

    Le choix du patient est également conditionné par la compétence du praticien auquel il s'adresse. Pour des raisons personnelles, le patient peut souhaiter être soigné par un médecin qui lui a été recommandé ou qu'il a connu lors de la maladie d'un proche. Ce praticien peut être un spécialiste peu concerné par la maladie présentée par le patient. Il lui reviendra en général d'exposer ce fait pour laisser le patient porter son choix sur un autre spécialiste idoine.

    5 - Exercice du libre choix

    Le médecin doit accepter que le patient change de médecin, sans lui tenir rigueur d'avoir pris un autre avis que le sien ; il ne doit donc pas entraver l'exercice de ce droit. D'ailleurs, en réciprocité, le médecin "a le droit de refuser ses soins pour des raisons professionnelles ou personnelles" (article 47). Il est courant que le choix d'un praticien généraliste ou spécialiste soit différent pour les membres d'une même famille.

    Souvent le médecin lui-même perçoit chez un patient une réticence susceptible d'altérer la confiance indispensable à leur relation. Il doit alors délibérément lui proposer de recueillir un autre avis (article 60). Le doute du patient, pour diverses raisons, peut n'être que momentané et le praticien préserve ainsi la qualité de leur relation future. Et "lorsque le patient porte son choix sur un autre médecin traitant » (article 45) le praticien doit s'assurer des conditions nécessaires à la transmission des informations et documents le concernant.

    (1) Loi n° 85-1468 du 31 décembre 1985 relative à la sectorisation psychiatrique

  • Article 7 - Non discrimination

    Article 7 (article R.4127-7 du code de la santé publique)

    Le médecin doit écouter, examiner, conseiller ou soigner avec la même conscience toutes les personnes quels que soient leur origine, leurs moeurs et leur situation de famille, leur appartenance ou leur non-appartenance à une ethnie, une nation ou une religion déterminée, leur handicap ou leur état de santé, leur réputation ou les sentiments qu'il peut éprouver à leur égard.
    Il doit leur apporter son concours en toutes circonstances.
    Il ne doit jamais se départir d'une attitude correcte et attentive envers la personne examinée.

    1 - Fonctions du médecin

    Le médecin écoute. Lors d'une rencontre habituelle, cette écoute permet à un patient conscient d'exposer les raisons de sa présence, de sa consultation. Il exprime ses plaintes, ce dont il souffre, ce qui l'inquiète ou lui paraît anormal. Le médecin lui fait préciser l'histoire de la maladie et les antécédents personnels et familiaux et gagne à savoir ce que le patient attend de lui. Tout cela ne va pas toujours de soi : le praticien doit souvent aider le patient à vaincre ses réserves, à s'exprimer, à s'expliquer, à exposer des soucis intimes ou délicats, en montrant son attention et sa compréhension, en assurant sa discrétion. Dans la pratique courante cet entretien initial renseigne sur le diagnostic dans trois quarts des cas. "Ecoutez le malade, il va donner le diagnostic" disait déjà Osler en 1908, ce qui reste exact un siècle plus tard.

    Le médecin examine le patient, plus spécialement la région dont il souffre, mais aussi l'ensemble de son corps. Ce n'est pas toujours simple, chez des personnes pudiques, très couvertes ou d'hygiène douteuse. Il faut annoncer et expliquer les raisons de cet examen, d'un geste particulier comme un toucher pelvien ou rectal. Cet examen physique reste fondamental, indispensable. Il ne va pas sans précautions (éviter de faire mal, protéger contre une contamination, présence d'un tiers, etc.). Parfois dévalorisé par les examens complémentaires, il permet d'en poser judicieusement l'indication et de les choisir pour s'en trouver justement complété. Les données de l'examen clinique suivant l'entretien initial suffisent pour poser le diagnostic dans la majorité des cas et seront exposées à l'intéressé.

    Le médecin conseille plus qu'il ne décide ou n'impose. Il oriente vers des mesures préventives, recommande des mesures d'hygiène, donne des avis sur des possibilités thérapeutiques ou des démarches sociales ou professionnelles dépendant de l'état de santé ou de la maladie. Des avis lui sont de plus en plus souvent demandés, dans des domaines variés, et il doit répondre aux questions posées, sans pour autant s'insérer abusivement ou inutilement dans l'intimité des personnes (article 51).

    Enfin il soigne, démarche ancienne et principale mais qui n'est plus la seule, loin de là. Ses soins sont très variés, allant d'un pansement ou de quelques points de suture à une intervention majeure, en passant par la prescription de médicaments, l'administration de rayons X, etc. On assimile aux soins des explorations complémentaires : prise de sang, radiographie, endoscopie, etc.

     2 - Tous les patients

    Aucune personne ne peut faire l’objet de discrimination dans l’accès à la prévention et aux soins (voir note 1).

    L’obligation pour les médecins d’intervenir auprès de tous patients, quels qu’ils  soient, répond à une ancienne tradition universelle : au VIIème de notre ère, le chinois Souen Sseu-Mo recommandait au médecin de « porter secours à toute douleur de tout être animé, sans s’occuper de son rang, de sa fortune, de son âge de sa beauté, de son intelligence, de sa qualité de chinois ou de barbare, d’ami ou d’ennemi ». On la retrouve dans le serment d’Hippocrate actualisé prononcé par chaque médecin et ainsi libellé : « je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me le demandera….je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain… ».

    Le médecin doit donc prendre en charge son patient quelle que soit sa condition. Jadis, le médecin proportionnait ses honoraires aux possibilités financières des malades et de leurs familles, ce qui lui permettait d’en soigner gratuitement. De nos jours, le médecin ne peut pas abaisser ses honoraires au-dessous des barèmes officiels (article 67) mais il reste néanmoins libre de ne pas en percevoir.

    La généralisation des remboursements des soins a bouleversé, notamment sur ce point, la relation médecin-patient. L’instauration progressive d’un système complexe, diversifié et évolutif d’assurance maladie et de mutuelles permet à des patients, de bénéficier, selon les cas, de remboursements variables. Pour d’autres patients, la mise en place de dispositifs sociaux  entraine, pour les praticiens, une rémunération par tiers payant à taux fixe. Dans ces conditions, la relative liberté d’honoraires de certains médecins, ne doit pas entrainer, dans notre système économique et social, une inégalité dans l’accès aux soins. Les médecins ne peuvent, en aucun cas et même en dehors de l’urgence, refuser pour des motifs pécuniaires, de donner à un patient les soins nécessaires qui relèvent de leurs compétences et de leurs possibilités techniques. On voit que cette obligation déontologique déborde le cadre de l’obligation légale rappelée ci-dessus.

    Le médecin n’a pas à tenir compte de la nationalité, de l’origine ethnique, de la situation administrative du patient sur le territoire français, même si cela influence le remboursement et le paiement des soins. Cela est particulièrement important en un temps où migrations et voyages sont nombreux. La pratique de la médecine n’admet ni frontières, ni racisme, même en cas de conflit (infra).

    Le praticien ne doit pas se laisser influencer par la situation de famille ou les mœurs, qu'il les devine ou qu'ils soient déclarés, qu'il y adhère ou les réprouve. La libéralisation des mœurs rend certaines particularités plus apparentes et peut exposer à une discrimination dont le médecin doit se garder. Sa tolérance est même nécessaire pour permettre au patient de donner des informations intimes utiles à sa prise en charge. Cette condition est particulièrement utile pour la prise en charge des délinquants sexuels (voir note 2).

    La religion comme toute conviction du patient ne doit pas influencer l'attitude du médecin. Certaines convictions, qui peuvent interférer avec les soins (par exemple : Témoins de Jéhovah), ne doivent pas altérer le comportement du médecin.

    Aucune discrimination n'est non plus acceptable selon l'état de santé ou un handicap. Un patient contagieux, atteint de troubles cognitifs ou psychiatriques doit être aussi bien traité qu'un autre patient. Le médecin doit s'efforcer par sa considération et son estime de rétablir une égalité entre les patients, surtout quand elle ne va pas de soi, même si certains handicaps peuvent intervenir objectivement dans une décision médicale.

    Le médecin doit aussi s'efforcer de ne pas être influencé par les sentiments inspirés par les personnes rencontrées, ce qui pourrait être fâcheux. Des patients sont désagréables, difficiles à supporter. Ils ne doivent pas pour autant être plus mal soignés, même si leur comportement peut altérer la qualité des soins, leur observance. Le médecin peut faire jouer une "clause de conscience" et proposer un "divorce à l'amiable" pourvu qu'il n'y ait pas urgence, que sa position soit présentée au patient et que la continuité des soins soit assurée (articles 47, 64). C'est délicat quand le patient a un comportement dangereux. L'influence peut être à l'inverse excessivement favorable : le médecin va soigner un ami, un proche ou une personnalité avec une attention renforcée, des précautions supplémentaires, qui peuvent être aussi bien bénéfiques que nuisibles. L'objectivité nécessaire à l'action du médecin s’accommode mal de sentiments subjectifs.

    3 - En toutes circonstances

      La pratique médicale doit être égale en toutes circonstances, ce qui n'est pas simple en cas d'épidémie, de catastrophe, de conflit ou de guerre. En cas d'épidémie, la tradition médicale a toujours été de faire face, d'être présent et de soigner en évitant les risques évitables, mais sans fuir les risques inévitables. D'assez nombreux médecins ont payé de leur santé, voire de leur vie, cette ligne de conduite pour que leurs successeurs se montrent à la hauteur de leurs aînés et de la mission qui leur incombe. En temps de guerre, les médecins mettent leur point d'honneur à soigner les blessés ennemis de la même manière que ceux de leur propre camp. Cette situation reste courante, notamment dans le cadre de la "médecine humanitaire".

    4 - Respect de la personne

      Il est posé comme principe dès l'article 2. La politesse ou l'urbanité, au demeurant souhaitable lors de toute rencontre, est recommandée depuis longtemps dans la relation médecin-patient. Déjà Hippocrate préconisait des égards vis-à-vis de la personne malade, conseillait d'être sur des chaises "de hauteur égale", de ne pas dévêtir la personne examinée plus que nécessaire, en particulier en présence de tiers : proches du patient ou étudiants en médecine ; sur ce dernier point l’article L.1111-4, 7ème alinéa rappelle que : « L'examen d'une personne malade dans le cadre d'un enseignement clinique requiert son consentement préalable. Les étudiants qui reçoivent cet enseignement doivent être au préalable informés de la nécessité de respecter les droits des malades énoncés au présent titre ».

    Au Moyen-Age, il était conseillé au médecin de ne pas déplaire, de bien se tenir pour être... bien payé. Aujourd'hui, le respect d'un patient s'impose d'autant plus que, diminué, il est en position de demandeur. Il y a une inégalité irréductible entre patient et médecin ; ce n'est pas une raison pour l'accentuer ; au contraire le médecin doit un respect d'autant plus impératif qu'il va moins de soi.

    Avant d'être générosité, l'altruisme est d'abord attention portée à l'autre, à la fois semblable et différent, ne serait-ce que pour reconnaître son altérité et l'admettre. Cette reconnaissance doit éviter de se mettre à la place de l'autre, de décider ou de choisir pour lui. Au contraire le médecin doit être particulièrement attentif à sa personnalité, à ses traits particuliers, pour en tenir compte et leur laisser la priorité par rapport à ses propres options ou à celles de l'entourage. L’article 3 des Principes d’éthique médicale européenne adoptés en 1987 avec la participation de l’Ordre des médecins français, précise : "Le médecin s’interdit d’imposer au patient ses opinions personnelles, philosophiques, morales ou politiques dans l’exercice de sa profession



    (1) Article L.1110-3 du code de la santé publique : « Aucune personne ne peut faire l'objet de discriminations dans l'accès à la prévention ou aux soins.
    Un professionnel de santé ne peut refuser de soigner une personne pour l'un des motifs visés au premier alinéa de l'article 225-1 du code pénal ou au motif qu'elle est bénéficiaire de la protection complémentaire ou du droit à l'aide prévus aux articles L. 861-1 et L. 863-1 du code de la sécurité sociale, ou du droit à l'aide prévue à l'article L. 251-1 du code de l'action sociale et des familles.
    Toute personne qui s'estime victime d'un refus de soins illégitime peut saisir le directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou le président du conseil territorialement compétent de l'ordre professionnel concerné des faits qui permettent d'en présumer l'existence. Cette saisine vaut dépôt de plainte. Elle est communiquée à l'autorité qui n'en a pas été destinataire.
    (…)
    Hors le cas d'urgence et celui où le professionnel de santé manquerait à ses devoirs d'humanité, le principe énoncé au premier alinéa du présent article ne fait pas obstacle à un refus de soins fondé sur une exigence personnelle ou professionnelle essentielle et déterminante de la qualité, de la sécurité ou de l'efficacité des soins. La continuité des soins doit être assurée quelles que soient les circonstances, dans les conditions prévues par l'article L. 6315-1 du présent code.
    Les modalités d'application du présent article sont fixées par voie réglementaire. »

    (2) La loi n°98-468 du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs institue à l'encontre des auteurs d'infractions sexuelles un suivi socio-judiciaire qui peut comprendre une injonction de soins (articles L.3711-1 et suivants du code de la santé publique). Cette mesure a été étendue à certains crimes et délits.

  • Article 8 - Liberté de prescription

    Article 8 (article R.4127- 8 du code de la santé publique)

    Dans les limites fixées par la loi et compte tenu des données acquises de la science, le médecin est libre de ses prescriptions qui seront celles qu'il estime les plus appropriées en la circonstance.

    Il doit, sans négliger son devoir d'assistance morale, limiter ses prescriptions et ses actes à ce qui est nécessaire à la qualité, à la sécurité et à l'efficacité des soins.

    Il doit tenir compte des avantages, des inconvénients et des conséquences des différentes investigations et thérapeutiques possibles.

    Comme l'indépendance du médecin (article 5), sa liberté de prescrire est soumise aux "données acquises de la science". Il revient au médecin d'appliquer ces données générales à un patient particulier et cela l'amène, parfois, à nuancer la règle : il est alors souhaitable que cet écart soit argumenté par des raisons objectives.

    Si la liberté de prescription est un principe fondamental qui va de pair avec l'indépendance professionnelle et la responsabilité du médecin, cette notion a évolué, même si elle reste un élément essentiel de la confiance que porte à son médecin le patient pour que lui soit fait tout ce qui lui est nécessaire.

    Depuis quelques années sont apparues des restrictions à cette liberté de prescription. Elles tiennent à des raisons de sécurité (par ex. incompatibilités médicamenteuses). Elles tiennent surtout au développement de médicaments nouveaux - très puissants, dangereux ou réservés à des indications particulières - que leurs effets apparentent à des thérapeutiques majeures (article 40). Se sont ajoutées plus récemment des considérations économiques.

    Le code de la sécurité sociale les a prises en compte en son article L.162‑2-1 ainsi libellé : « Les médecins sont tenus, dans toutes leurs prescriptions, d'observer, dans le cadre de la législation et de la réglementation en vigueur, la plus stricte économie compatible avec l'efficacité du traitement ».

    La Haute Autorité de Santé diffuse des protocoles détaillés pour guider le médecin dans sa pratique clinique. Ces recommandations assurent au praticien une pratique de qualité en conformité avec les données médicales et éthiques. Cependant, ces protocoles ne dégagent pas les médecins de leurs responsabilités envers les patients.

    Cette protocolisation des pratiques est nécessaire, mais elle n’est pas suffisante. Le médecin soigne une personne qui a le droit d’accepter ou de refuser en tout ou partie le protocole proposé.

    1. Médicaments génériques : Les médecins sont également invités à prescrire des produits génériques. La jurisprudence européenne (note [1]) a confirmé que les autorités nationales chargées de la santé publique pouvaient favoriser la prescription par les médecins de médicaments génériques.

     L’article L.5125-23 du code de la santé publique autorise les pharmaciens à substituer à la spécialité prescrite par le médecin - sauf mention expresse indiquée sous forme exclusivement manuscrite de ce dernier pour des raisons particulières tenant au patient - une spécialité du même groupe générique (voir note 2).

    1. Conditions de prescription particulières : Certains médicaments, en raison des contraintes et risques de leur utilisation, de leur degré d’innovation ou pour d’autres motifs de santé publique sont soumis à des conditions de prescription et de délivrance particulières et classés en cinq catégories (article R.5121-77 du code de la santé publique) :
    • médicament réservé à l’usage hospitalier ;
    • médicament à prescription hospitalière ;
    • médicament à prescription initiale hospitalière ;
    • médicament à prescription réservée à certains médecins spécialistes ;
    • médicament nécessitant une surveillance particulière pendant le traitement.

    L'autorisation de mise sur le marché (AMM) établit le classement de ces médicaments, précise dans quelles indications ils peuvent être prescrits et indique la qualité des prescripteurs. Les conditions de remboursement ou de prise en charge de ces médicaments par les organismes d’assurance maladie sont établies par arrêté ministériel. De ce fait certains produits ne peuvent plus être prescrits par tout médecin, même s'ils sont justifiés par l'état du patient.

    1. Prescription hors AMM : En l’absence de médicaments appropriés à l’état du patient disposant d’une AMM ou d’une autorisation temporaire d’utilisation, des prescriptions hors AMM peuvent être effectuées (voir note 3). Le médecin doit le mentionner expressément sur l’ordonnance et en informer le patient ainsi que de l’absence d’alternative médicamenteuse appropriée, des risques et bénéfices attendus du médicament et des conditions de sa prise en charge par l’assurance maladie. Cette prescription hors AMM doit être justifiée dans le dossier médical du patient.

    2. Autorisation temporaire d’utilisation : A titre exceptionnel, l’article L.5121-12 (voir note 4) du code de la santé publique permet, sous certaines conditions, l’utilisation de médicaments non autorisés destinés à traiter des maladies graves ou rares, en l'absence d’alternative thérapeutique, lorsque la mise en œuvre du traitement ne peut pas être différée.  
       

    Dans tous les cas, le médecin doit assurer au patient les soins que nécessite son état et il pourra même en répondre devant les tribunaux. S'il n'a pas une obligation de résultat, il a une obligation de moyens. En cas d'indication d'un traitement qu'il ne peut prescrire lui-même, il devra donc adresser le patient à un confrère spécialisé, comme il le fait pour l'accomplissement de bien d'autres actes diagnostiques ou thérapeutiques qu'il ne peut réaliser lui-même.

    Si les techniques et les thérapeutiques nouvelles sont de plus en plus performantes, elles ne sont pas sans inconvénients parfois majeurs, pour le patient. Le développement professionnel aide le médecin à en connaître les avantages et les conséquences et à en tenir compte pour ne pas faire courir au patient de risques disproportionnés.

    Le développement de la vulgarisation médicale, en particulier sur Internet, conduit parfois les patients à réclamer la prescription d'un examen ou d'un traitement dont ils ont entendu vanter les mérites et dont ils croient pouvoir bénéficier. Il revient au médecin d'expliquer pourquoi l'information perçue s'applique ou non à l'intéressé. Il est bien entendu répréhensible, par une prescription de complaisance, de se faire le complice d'une malhonnêteté du patient ou d'un tiers, qui pourrait d'ailleurs être le premier à en souffrir, à le regretter, voire à le reprocher au médecin.


    ([1]) CJUE 22 avril 2010, Association of the british pharmaceutical Industry, C-62/09

    (2) Article R.5125-54 du code de la santé publique : « La mention expresse par laquelle le prescripteur exclut la possibilité de la substitution prévue au deuxième alinéa de l'article L. 5125-23 est la suivante: "Non substituable". Cette mention est portée de manière manuscrite sur l'ordonnance avant la dénomination de la spécialité prescrite. »

     (3) Article L 5121-12-1 du code de la santé publique : « I - Une spécialité pharmaceutique peut faire l'objet d'une prescription non conforme à son autorisation de mise sur le marché en l'absence d'alternative médicamenteuse appropriée disposant d'une autorisation de mise sur le marché ou d'une autorisation temporaire d'utilisation, sous réserve :

    1° Que l'indication ou les conditions d'utilisation considérées aient fait l'objet d'une recommandation temporaire d'utilisation établie par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, cette recommandation ne pouvant excéder trois ans ;

    2° Ou que le prescripteur juge indispensable, au regard des données acquises de la science, le recours à cette spécialité pour améliorer ou stabiliser l'état clinique du patient.

    II - Les recommandations temporaires d'utilisation mentionnées au I sont mises à disposition des prescripteurs.

    III - Le prescripteur informe le patient que la prescription de la spécialité pharmaceutique n'est pas conforme à son autorisation de mise sur le marché, de l'absence d'alternative médicamenteuse appropriée, des risques encourus et des contraintes et des bénéfices susceptibles d'être apportés par le médicament et porte sur l'ordonnance la mention : "Prescription hors autorisation de mise sur le marché”.

    Il informe le patient sur les conditions de prise en charge, par l'assurance maladie, de la spécialité pharmaceutique prescrite.

    Il motive sa prescription dans le dossier médical du patient (…)».

     (4) Article L.5121-12 du code de la santé publique : « I.- Les articles L. 5121-8 et L. 5121-9-1 ne font pas obstacle à l'utilisation, à titre exceptionnel, de certains médicaments destinés à traiter des maladies graves ou rares, en l'absence de traitement approprié, lorsque la mise en œuvre du traitement ne peut pas être différée et que l'une des conditions suivantes est remplie :

    1° L'efficacité et la sécurité de ces médicaments sont fortement présumées au vu des résultats d'essais thérapeutiques auxquels il a été procédé en vue d'une demande d'autorisation de mise sur le marché qui a été déposée ou que l'entreprise intéressée s'engage à déposer dans un délai déterminé;
    2° Ces médicaments, le cas échéant importés, sont prescrits, sous la responsabilité d'un médecin, à un patient nommément désigné et ne pouvant participer à une recherche biomédicale dès lors qu'ils sont susceptibles de présenter un bénéfice pour lui et que leur efficacité et leur sécurité sont présumées en l'état des connaissances scientifiques. Le médecin prescripteur doit justifier que le patient, son représentant légal ou la personne de confiance qu'il a désignée en application de l'article L. 1111-6 a reçu une information adaptée à sa situation sur l'absence d'alternative thérapeutique, les risques courus, les contraintes et le bénéfice susceptible d'être apporté par le médicament. La procédure suivie est inscrite dans le dossier médical.

    II. ― L'utilisation des médicaments mentionnés au I est autorisée, pour une durée limitée, éventuellement renouvelable par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, à la demande du titulaire des droits d'exploitation du médicament dans le cas prévu au 1° du I ou à la demande du médecin prescripteur dans le cas prévu au 2° du même I.

    (…) ».

    Conformément à l'article 41 VII de la loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011, les autorisations accordées sur le fondement des dispositions de l'article L. 5121-12 du code de la santé publique dans leur rédaction antérieure à la promulgation de la présente loi demeurent régies par ces dispositions, y compris pour leur renouvellement, pendant les trois années suivant la promulgation de la présente loi. Ces dispositions continuent également de s'appliquer, pendant la même période, aux nouvelles demandes d'autorisation mentionnées au 2° du I du même article L. 5121-12 si des autorisations de même nature ont déjà été accordées dans la même indication pour le médicament concerné.

  • Article 9 - Assistance à personne en danger

    Article 9 (article R.4127-9 du code de la santé publique)

    Tout médecin qui se trouve en présence d'un malade ou d'un blessé en péril ou, informé qu'un malade ou un blessé est en péril, doit lui porter assistance ou s'assurer qu'il reçoit les soins nécessaires.

    1 - Principes

    Il va de soi qu'en cas d'urgence un médecin doit porter secours à toute personne malade ou blessée qui l'appelle ou lui est signalée. Encore faut-il qu'il prenne conscience de l'urgence et de la gravité.

    On ne saurait commenter cet article 9 sans parler de l'article 223-6, alinéa 2 du code pénal auquel, comme tous les citoyens, les médecins sont soumis :  « Sera puni des mêmes peines (voir note 1) quiconque s'abstient volontairement de porter à une personne en péril l'assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter, soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours. »

    Ce texte a une portée générale, visant tout citoyen témoin d'un accident ou d'une détresse : c'est la traduction pénale d'une règle morale naturelle de tous les temps.

    Plus que tout autre, le médecin doit apporter ce secours. Mais l'article 223-6 devient une arme redoutable contre les médecins si on l'applique à tous les "appels d'urgence" et non plus seulement aux cas où le médecin se trouverait en présence d'une personne en péril.

    Il semble que les plaintes contre des médecins fondées sur cet article se sont faites plus nombreuses. Les sanctions judiciaires correspondent certes parfois à des négligences professionnelles coupables (abstention délibérée) mais aussi à un malheureux concours de circonstances ou à une défaillance involontaire (malentendu).

    Il est difficile cependant de porter une appréciation générale objective sur la jurisprudence intervenue dans ce domaine car tout dépend de circonstances particulières.

    Dans l'ensemble, pour que l'application de l'article 223-6 du code pénal puisse justifier une sanction pénale contre un médecin, il faut :

    • que la personne pour laquelle on appelle soit réellement en péril,
    • que le médecin en ait été clairement averti,
    • qu'il se soit abstenu volontairement,
    • qu'il ne puisse invoquer une excuse majeure (médecin occupé par un autre patient dans un état grave, un accouchement, une intervention chirurgicale ou lui-même sérieusement malade).

     

    2 - Pratique

    Les difficultés en cette matière viennent le plus souvent de malentendus, certaines personnes appelant "d'urgence" pour des malaises bénins. Les médecins sont souvent dérangés pour peu de chose. Ils s'y attendent et savent qu'on peut les tromper, dans les deux sens. Parfois, on emploie le mot "urgent" à la légère. Il y a aussi, de plus en plus souvent, une certaine désinvolture : la commodité prend le nom d'urgence. D'autres fois, ils regretteront qu'on ne leur ait pas signalé, lors de l'appel, la gravité de la situation. L'anxiété du patient, ou de son entourage, a vite fait de convaincre qu'il faut le médecin tout de suite et il faut admettre que l'appel pressé est légitime du moment que l'on a peur. Ces difficultés sont accentuées par la multiplication des communications téléphoniques, notamment en pédiatrie ou dans le cadre de la médecine ambulatoire.

    Le médecin doit apprécier s'il s'agit d'une urgence véritable ou d'une visite qui peut attendre. Apprécier la gravité au moment de l'appel est capital et dangereux, lot quotidien du médecin. S'il reçoit lui-même l'appel, il demandera des précisions qui l'éclaireront mais peuvent aussi l'induire en erreur. Si c'est une secrétaire qui reçoit l'appel, il lui échoit de rendre un compte exact de ce qui lui est dit. C'est une tâche délicate et de grande responsabilité dont la secrétaire doit être consciente, à laquelle elle doit avoir été bien préparée, avec des consignes prudentes.

    En cas de doute, le médecin se doit d'aller voir le malade ou le blessé, quelle que soit la perturbation apportée dans son travail. Si cela lui est impossible, il lui revient de prendre directement contact avec le centre 15.

    L'exercice de la médecine deviendrait impossible si le médecin devait répondre immédiatement à tout appel. S'il ne peut y répondre personnellement dans l'instant, il lui reste à "s'assurer que la personne reçoit les soins nécessaires", c'est-à-dire qu'un autre médecin peut se rendre auprès d'elle, ou que le blessé peut être transporté sans retard dans un lieu de soins. Il faut qu'il s'assure personnellement de la prise en charge du patient.

    Le téléphone l'y aide (voir note 2). L'organisation moderne des services d'urgence, de la régulation ainsi que des transports "médicalisés" apporte un progrès considérable car, en même temps que la réponse rapide, cette structure amène à pied d'œuvre les moyens techniques d'une réanimation que le médecin isolé ne pourrait assurer complètement. Les praticiens sont invités à participer à cette organisation, ils doivent être encouragés à le faire.

    Le médecin ne peut pas donner comme excuse que l'état du blessé ou du malade lui paraissait au-delà de tout recours d'après les renseignements reçus, ni que le patient était habituellement suivi par un autre médecin.

    L'article 223-6 du code pénal, selon la jurisprudence, pèse donc d’un poids particulier sur le médecin. Une négligence volontaire est inexcusable. Mais le risque est surtout celui d'une erreur d'appréciation, de la part du médecin, sur le degré de l'urgence. En médecine, l'erreur de pronostic est la plus difficile à admettre par des juges ou par l'entourage, et la plus répréhensible s'il s'agit d'une urgence.

    On ne peut que conseiller aux membres du corps médical d'apporter toute leur attention aux renseignements qui ont accompagné un appel et, s'il y a le moindre doute, de se rendre auprès de la personne que l’on a dite en danger.

    Le principe demeure que le médecin a une compétence générale que ses études ont eu pour objet de lui donner (article 70) : ainsi le spécialiste appelé pour aller voir une personne en danger dans des conditions où il se juge incompétent doit s'assurer lui-même qu'un confrère mieux choisi a pu être atteint ou que le malade ou blessé peut être transporté dans de bonnes conditions vers un établissement hospitalier. Le principe reste valable lors d'appels pour des personnes en difficulté lors d'un voyage, en train ou en avion.

    Il reste que tout médecin, quelle que soit sa fonction ou sa spécialité, doit recevoir au cours de ses études universitaires et post-universitaires une bonne formation dans le domaine de la médecine d'urgence.


    (1) cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende

    (2) B. HOERNI, « Appels téléphoniques des patients et déontologie médicale », Bulletin de l'Ordre mai 1999.

  • Article 10 - Personne privée de liberté

    Article 10 (article R.4127-10 du code de la santé publique)

    Un médecin amené à examiner une personne privée de liberté ou à lui donner des soins ne peut, directement ou indirectement, serait-ce par sa seule présence, favoriser ou cautionner une atteinte à l'intégrité physique ou mentale de cette personne ou à sa dignité.
    S'il constate que cette personne a subi des sévices ou des mauvais traitements, il doit, sous réserve de l'accord de l'intéressé, en informer l'autorité judiciaire.
    Toutefois, s'il s'agit des personnes mentionnées au deuxième alinéa de l' article 44 , l'accord des intéressés n'est pas nécessaire.

    On pourrait s'étonner qu'il ait paru nécessaire d'insérer un tel article dans le code de déontologie. Mais les exemples de pays totalitaires ne sont pas les seuls, et dans divers pays, la conscience de quelques médecins a pu être obscurcie ou déviée par des pressions politiques, bien analysées lors du procès de Nuremberg. Ces médecins ont accepté de participer par leur présence ou même leur concours technique, à des actes dégradants ; ils ont été les auxiliaires plus ou moins déguisés de tortures.

    Force est donc de proclamer qu'un détenu, quel qu'il soit, mais aussi une personne placée en garde à vue, restent des êtres humains, qu'ils ont droit au respect de leur personne. Appelé auprès d'une personne privée de liberté, le médecin, défenseur naturel de l'individu et des droits de l'homme, doit s'abstenir de toute intervention qui n'aurait pas pour but l'intérêt de sa santé. D’ailleurs, l’article 48 de la loi n°2009-1436 précise que : « Ne peuvent être demandés aux médecins et aux personnels soignants intervenant en milieu carcéral ni un acte dénué de lien avec les soins ou avec la préservation de la santé des personnes détenues, ni une expertise médicale ».

    Un médecin ne peut être dupe de ″l'humanisation de la torture par la présence d'un médecin ”. La seule attitude est un refus formel de toute participation.

    L'Association Médicale Mondiale disait dans sa déclaration de Tokyo (1975) : "Le médecin ne devra jamais assister, participer ou admettre les actes de torture..." et le serment (p. 280) prêté par le médecin mentionne : « Même sous la contrainte, je ne ferai pas usage de mes connaissances contre les lois de l’humanité ».

    Au contraire le médecin qui constate qu'une personne a été victime de sévices doit le signaler aux autorités compétentes et s'efforcer d'obtenir, s'il le juge nécessaire ou utile, l'hospitalisation de la victime.

    Le signalement à l'autorité judiciaire est subordonné à l'accord de l'intéressé, excepté pour les mineurs ou les personnes excessivement affaiblies, qui ne sont pas en état de se protéger (article 44).

    Le médecin qui intervient en établissement pénitentiaire est, comme tout médecin, indépendant dans tous ses actes. Il n'est ni policier, ni juge, il n'est jamais l'agent d'exécution de quiconque. Il décide seul en conscience de ce qu'il doit faire pour les détenus qui lui sont confiés. Il ne peut que favoriser le meilleur accès aux soins, même si celui-ci suppose des dispositions pratiques ou administratives délicates qui ont été améliorées (voir note [1]) mais ont besoin de l’être encore et surtout d’être appliquées.


    ([1]) Loi n° 94-43 du 18 janvier 1994 transférant la prise en charge sanitaire des détenus au service public hospitalier – art. L.6112-1, 12° du code de la santé publique ; Aspects déontologiques de la médecine en milieu pénitentiaire - Rapport du Conseil national de l'Ordre des médecins, juillet 2001.

  • Article 11 - Développement professionnel continu

    Article 11 (article R.4127-11 du code de la santé publique)

    Tout médecin entretient et perfectionne ses connaissances dans le respect de son obligation de développement professionnel continu

    Cet article reprend les termes de la prière de Maïmonide (XIIe siècle) : « Fais que je sois modéré en tout, mais insatiable dans mon amour de la science. Eloigne de moi, ô Dieu, l'idée que je peux tout. Donne-moi la force, la volonté et l'occasion d'élargir de plus en plus mes connaissances. Je peux aujourd'hui découvrir dans mon savoir des choses que je ne soupçonnais pas hier... ».

    1. Compétence médicale

    La déontologie exige du médecin qu'il donne des soins "conformes aux données acquises de la science" : le médecin a le devoir de s’informer des progrès de la médecine nécessaires à son activité.

    La compétence est la première exigence de la morale professionnelle. Elle suppose non seulement un savoir aussi large que possible, mais aussi une bonne adaptation à l'exercice de l'activité médicale.

    Cette obligation de compétence est devenue de plus en plus difficile à satisfaire en raison de la complexité croissante de la médecine. Malgré cela, le médecin doit toujours avoir présent à l'esprit qu'il est responsable et il doit être conscient des lacunes de son savoir, lacunes qui peuvent avoir des conséquences vitales pour ses patients. Dans cette éventualité, l’appel au concours d’un confrère fait partie du professionnalisme.

    C'est l'ensemble du savoir théorique, du savoir-faire (aptitude), et du savoir être (attitude), qui permet la pratique professionnelle adaptée à la prise en charge des patients, prise en charge pertinente dans son époque et son environnement. La compétence est donc fragile, périmée quand les connaissances sont trop anciennes, ou que la pratique est insuffisante dans un domaine donné. La compétence nécessite une évaluation régulière.

    2. Développement professionnel continu

    L'ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins avait renforcé le simple devoir déontologique qu'exprime l'article 11 du code par une obligation légale pour tout médecin de se soumettre à une formation continue ainsi qu’à une évaluation des pratiques et avait prévu un ensemble de règles et de contrôles.

    La loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires substitue à la formation continue le développement professionnel continu qui « a pour objectifs l'évaluation des pratiques professionnelles, le perfectionnement des connaissances, l'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins ainsi que la prise en compte des priorités de santé publique et de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé. Il constitue une obligation pour les médecins » (article L. 4133-1 du code de la santé publique).

    La notion globale est celle de « développement professionnel continu » qui, pour un médecin, comprend l’évaluation de ses pratiques, l’estimation de sa propre compétence, et la formation qui permet de corriger les lacunes.

    La mise en place du développement professionnel continu ne peut se comprendre que si l’on part de la conception de compétence médicale et de son actualisation nécessaire. La validation de cette compétence passe par l’évaluation des pratiques professionnelles, le développement professionnel continu permettant l’adaptation permanente de cette compétence et la pertinence des pratiques.

    Devoir déontologique, le développement professionnel continu, légalement obligatoire, fait désormais l’objet d’une vérification régulière pour l’ensemble des médecins (libéraux, hospitaliers, salariés).

    De grands principes doivent être respectés :

    •  la pertinence des actions : elles doivent concourir toutes à l'amélioration des pratiques professionnelles et doivent pouvoir être évaluées ;
    •  l'équité des exigences : tout médecin, quel que soit son mode d'exercice et l'endroit où il réside, doit pouvoir accéder à des actions de formation, variées et adaptées ;
    •  l'indépendance des formations : les formations sont financées par l’organisme gestionnaire du développement professionnel continu pour les médecins libéraux et par les employeurs pour les médecins hospitaliers et salariés.

    Les organismes qui souhaitent proposer des programmes de développement professionnel continu doivent déposer une demande d’enregistrement auprès de l’organisme gestionnaire. Une commission scientifique indépendante évalue les programmes proposés par ces organismes.

    3. Evaluation des pratiques

    Cette évaluation fait partie intégrante du développement professionnel continu.

    L’article 11 prévoit que tous les médecins participent à l'évaluation des pratiques professionnelles. L’évaluation incluse par le DPC est prévue par groupe, il est vivement recommandé que le médecin inscrive aussi sa propre pratique dans cette démarche. C'est pourquoi les acteurs actuels du DPC prévoient de faire figurer l'évaluation de la pratique comme une action faisant partie des efforts de formation permanente. Différentes techniques ont été proposées dans ce but. Ce mouvement rejoint l'évolution des objectifs des promoteurs du dispositif, qui après une première étape d'évaluation des structures hospitalières, voit ses tâches s'orienter aussi vers l'évaluation des pratiques.

    Les actions de DPC organisées par groupe de médecins, comme les groupes de pairs, multiplient les occasions d'accéder à un tel auto-examen. La survenue d'incidents dans le cadre de l'exercice professionnel doit amener le conseil départemental à proposer au médecin de se soumettre à une évaluation de sa pratique.

    En établissement de santé, s’ajoute aux évaluations individuelles, une évaluation du dispositif d’organisation de l’équipe de soins.

  • Article 12 - Concours apporté à la protection de la santé

    Article 12 (article R.4127-12 du code de la santé publique)

    Le médecin doit apporter son concours à l'action entreprise par les autorités compétentes en vue de la protection de la santé et de l'éducation sanitaire. Il participe aux actions de vigilance sanitaire.

    La collecte, l'enregistrement, le traitement et la transmission d'informations nominatives ou indirectement nominatives sont autorisés dans les conditions prévues par la loi.
     

    Le rôle et les responsabilités du médecin ne se limitent pas aux actes accomplis dans l'intérêt de personnes considérées individuellement. Celles-ci appartiennent à une collectivité pour laquelle les responsables de la santé publique peuvent proposer des mesures générales en vue de protéger ou de promouvoir la santé. Ce contact direct d’un médecin avec le public appelle de la précaution et de la prudence (articles 13, 14).

    1 - Objectifs

    Il peut s'agir :

    • de mesures préventives générales destinées à améliorer l'environnement, éviter les carences, accroître la résistance aux maladies infectieuses, etc. ;
    •  d'éducation sanitaire pour informer la population des risques encourus pour sa santé dans la vie courante ;
    • de campagnes de dépistage dont l'objectif varie selon l'âge des personnes, leur activité professionnelle ou le lieu de leur domicile.

    Education sanitaire et promotion de santé représentent une notion plus large que celle de santé publique. C'est une démarche de santé dans l’intérêt collectif, qui implique une large participation de la population elle-même, notamment des associations, des clubs, des groupements d'enfants, de sportifs, de personnes âgées, etc. ; des élus locaux ; mais aussi de l'ensemble des professionnels de santé. Personne ne peut mieux que le médecin, inséré dans un environnement urbain ou rural, mesurer l'impact des facteurs de risque pour la santé de ses concitoyens, et prodiguer grâce à son expérience professionnelle les avis et les conseils permettant d'approcher l'objectif ambitieux de l'OMS qui définit la santé comme un "état de complet bien-être physique, mental et social" (1946).

    2 - Moyens

    La connaissance de l'état de santé de la population nécessite que des informations sur la prévalence des maladies, la fréquence des handicaps, l'émergence d'une épidémie soient connues des responsables de santé publique, de manière aussi précise et rapide que possible.

    Un certain nombre de dispositions législatives ou réglementaires imposent aux médecins de communiquer aux mairies, aux agences régionales de santé, aux médecins-conseils des caisses d'assurance maladie, aux responsables de département de l'information médicale (DIM) des établissements de santé, des informations tantôt nominatives, tantôt anonymes : certificat de décès, maladies à déclaration obligatoire, résumé de synthèse clinque, etc.(voir dérogations légales au secret professionnel, article 4)

    Les études épidémiologiques, telles que les cohortes, qui font appel à des traitements automatisés, exigent la communication d'informations médicales nominatives. Des précautions particulières s’imposent pour le recueil, la transmission des données et leur traitement informatique (voir note [1]).

    La CNIL a également adopté une recommandation relative aux registres du cancer renforçant notamment les conditions d’information des personnes concernées (voir note [2]).

    Le médecin rédacteur aura le souci de l'exactitude des renseignements ainsi communiqués, de leur mode de transmission et du maintien de leur confidentialité, surtout lorsqu'ils sont nominatifs. L'anonymisation des données, dès leur collecte, se révèle la solution idéale, dans la mesure où l'identité des personnes n'est pas indispensable pour éviter les doubles comptes, assurer le suivi de la maladie ou pour contrôler l'efficacité à long terme d'une thérapeutique.

    Ce souci de préserver l'intimité des personnes par l'anonymat et la vigilance pour y contribuer, doivent être la règle habituelle, surtout lorsque le médecin participe sur une base volontaire à la réalisation de registres de maladies ou d'enquêtes épidémiologiques.


    ([1]) Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, titre IX : Traitements de données à caractère personnel ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santé

    ([2]) CNIL – délibération n°03-053 du 27 novembre 2003 portant adoption d’une recommandation relative aux traitements de données à caractère personnel mis en œuvre par les registres du cancer

  • Article 13 - Information du public

    Article 13 (article R.4127-13 du code de la santé publique)

    Lorsque le médecin participe à une action d'information du public de caractère éducatif et sanitaire, quel qu'en soit le moyen de diffusion, il doit ne faire état que de données confirmées, faire preuve de prudence et avoir le souci des répercussions de ses propos auprès du public. Il doit se garder à cette occasion de toute attitude publicitaire, soit personnelle, soit en faveur des organismes où il exerce ou auxquels il prête son concours, soit en faveur d'une cause qui ne soit pas d'intérêt général.

    Cet article et l'article 20 cherchent à remédier aux abus dont se rendent coupables certains médecins à l'occasion de leurs rapports avec les médias, leur fréquence et leur importance ne cessant de croître.

    Ce premier article concerne à la fois le fond et la forme qui doivent être respectés à l'occasion de la transmission d’informations au public.

    1 - L'information elle-même

    Il ne s'agit évidemment pas d'une information ou d'un renseignement donné par un médecin à son patient, à sa famille ou à son entourage à l'occasion d'un état pathologique ou des soins qu'il nécessite. Il ne s'agit pas non plus de renseignements ou avis émis à l'occasion de conversations privées. C'est la participation, de plus en plus fréquente et souhaitable, de médecins à des actions d'éducation sanitaire (article 12) ou leur intervention à l'occasion d'innovations médicales qui sont visées.

    Vis-à-vis du public, il est tout à fait souhaitable pour des raisons d'authentification, de présentation et d'utilisation que le médecin participe à une information de portée et de diffusion générale sur les nouvelles maladies (Alzheimer, myopathies, Creutzfeldt-Jakob...), techniques (assistance médicale à la procréation) ou thérapeutiques (vaccins, thérapies cellulaire et génique etc…).

     Mais des excès peuvent survenir dans les conditions de cette participation (présentation, commentaires, personnalisation).

    2 - La prudence

    Elle doit constituer une règle permanente, aussi bien sur le fond (données scientifiques confirmées par le milieu scientifique et non pas hypothèses, plus ou moins personnelles, sur lesquelles l'accent serait mis en soulignant un rôle individuel) que dans la forme. Il est essentiel de veiller avec un soin particulier et constant aux répercussions de ses propos auprès du public. L'âge moyen, la catégorie sociale, l'importance numérique de l'auditoire, le lieu, l'heure et surtout les médias utilisés peuvent donner un retentissement très différent à un message apparemment uniforme.

    Le médecin : "doit veiller à l'usage... de ses déclarations" (article 20) ce qui veut dire qu'il doit être prêt à s'en expliquer et à s'en justifier.

    "Il n'y a pas de plus grande confusion que celle qui assimile épidémie et contagion, risque théorique et risque pratique, et pas de plus grande responsabilité dans ce domaine que celle du corps médical, inconscient souvent du risque que comporte une information pour un auditoire non averti. Pour faire savant, le médecin peut parfois méconnaître les règles de prudence qui conviennent pour parler d'une menace qui pèse" (voir note [1]).

    Le médecin doit avoir présent à l'esprit que les métiers de communication imposent une formation et doit se garder d'un excès de confiance en ses facultés personnelles.

    3 - Les moyens de diffusion

    Le développement des techniques de l’information et de la communication et l’engouement qu’elles suscitent augmentent les risques qui existaient déjà dans les rapports des médecins avec la presse écrite en général.

    Le médecin peut être sollicité pour participer à une émission télévisée : il doit s'informer (répercussion de ses propos auprès du public) de l'identité (contradicteurs), du nombre  et souvent de la personnalité des intervenants, et principalement de la notoriété du présentateur et des intervenants de son équipe, des engagements pris concernant son temps de parole, et d'une façon générale des conditions de son intervention. Les risques de dérive sont souvent importants, l'émission de télévision pouvant être utilisée comme un "faire valoir" du présentateur dont la carrière est liée à l'audimat, à la concurrence entre chaînes et insuffisamment comme une réponse au souci normal du public d'être informé sur une question, le côté sensationnel étant privilégié aux dépens de la fonction réellement éducative.

    Si les risques sont déjà importants dans les émissions "en direct", ils se trouvent amplifiés dans les interviews dont l'émission est différée. Là, le médecin peut être véritablement pris "en otage". Ce qu'il a dit peut être découpé, présenté dans un contexte différent, voire en réponse ou en argumentation à un intervenant inconnu, lors de l'enregistrement. Et les conditions d'une rectification éventuelle ne sont pour ainsi dire jamais réunies.

    Les émissions radiophoniques sont, à cet égard, moins risquées pour le médecin : elles comportent souvent moins de participants et une intervention directe est plus facile. Par ailleurs, la multiplication des radios locales donne plus l'occasion aux praticiens de la région de s'exprimer avec davantage de garanties. Le risque se situe plutôt dans le domaine publicitaire, tant personnel qu'au profit d'un organisme (de recherche, d'éducation sanitaire, ou associations diverses) auquel il est lié (intérêts professionnels ou financiers, voire politiques).

    La presse écrite expose le médecin à des risques semblables mais lorsqu'il s'agit d'information sanitaire ou éducative, ils restent modérés, surtout lorsqu'il s'agit d'articles de presse, signés de leur auteur où sa responsabilité est facile à isoler du support médiatique, et lorsque sont réunies les conditions d'une mise au point ou d'une rectification.

    L'édition de livres, monographies, revues, la création d'un site internet (voir note [2]) à l'initiative et sous la responsabilité du médecin, n'appelle de réserves ou de sanctions que dans la mesure où elles dénotent des prises de position contre la loi, la morale ou l'intérêt général. 

    Il n'est pas réaliste de demander systématiquement l'anonymat et encore moins de le souhaiter à propos des manifestations d'information ou d'éducation au public sur les grands problèmes de santé. Au contraire, la notoriété du médecin peut donner davantage de poids au message éducatif, à condition de tenir compte des remarques ci-dessus.

    4 - L'attitude publicitaire

    Elle sera commentée plus largement avec l'article 20 ; mais dans le cadre de l'information de portée générale sur les nouvelles maladies, techniques ou thérapeutiques, l'information peut devenir une occasion de se faire connaître à son avantage, l'intention publicitaire utilisant l'information  - licite en soi - comme prétexte. Le message transmis est débordé par l'impact publicitaire.

    Ce déséquilibre peut également s'observer lorsque le médecin développe anormalement les conditions dans lesquelles il exerce (établissement hospitalier, "centre" médical) ou bien s'étend sur la composition ou le fonctionnement des organismes auxquels il participe (associations dont il n'est pas facile pour le public de distinguer l'intérêt d'ordre général, voire humanitaire, d'autres facteurs).

    Dans les différentes situations auxquelles le médecin peut se trouver exposé, ou craint de l'être, il trouvera toujours auprès de son conseil départemental - en particulier lorsqu'il s'agit de manifestation locale ou régionale - des avis appropriés à la situation et conformes aux usages. Il doit, par ailleurs, se convaincre que la présence de cet article dans le code vise essentiellement à le mettre en garde contre certains pièges et à lui permettre d'assurer son autorité et le bien-fondé de son attitude dans ses rapports avec les médias.


    ([1]) D. SICARD, « Le mythe de la contagiosité », Concours Médical 1995 ; 117 : 77.

    ([2]) J. LUCAS, « La déontologie médicale sur le web santé : recommandations du CNOM », 22 mai 2008 et Livre blanc, décembre 2011, www.conseil-national.medecin.fr

  • Article 14 - Information sur des procédés nouveaux

    Article 14 (article R.4127-14 du code de la santé publique)

    Les médecins ne doivent pas divulguer dans les milieux médicaux un procédé nouveau de diagnostic ou de traitement insuffisamment éprouvé sans accompagner leur communication des réserves qui s'imposent. Ils ne doivent pas faire une telle divulgation dans le public non médical.

    Cet article attire l'attention sur la responsabilité du médecin qui publie. Chacun peut avoir l'impression de détenir une thérapeutique nouvelle intéressante, un procédé nouveau de diagnostic ou de technique chirurgicale. Quelquefois, cette impression se trouvera démentie par des essais plus importants. Une publication ou une communication scientifique faite dans l'enthousiasme ou à la légère pourrait avoir des conséquences démesurées. Ces dérives sont devenues moins nombreuses au cours des dernières années grâce à la diffusion de méthodes de travail plus rigoureuses, en équipe, et à des conditions de publications plus strictes, après avis de comités de lecture (voir note 1).

    La deuxième phrase interdit aux médecins de s'adresser au public par la presse écrite ou parlée, pour vanter traitements ou procédés d'examen. De telles publications comportent, en effet, un risque de tromperie, si leur inexactitude est établie par la suite, et un risque de publicité (interdite au corps médical) si l'auteur signe son article ou laisse donner son nom ou son adresse (articles 19, 20).

    Est-ce à dire qu'un médecin ne peut jamais s'adresser au public ? Non, car l'éducation sanitaire entre dans la mission du médecin (article12). Il ne peut être reproché à un médecin compétent de fournir des explications scientifiques au public. Cela exige prudence et rigueur et le médecin qui le fait doit se mettre soigneusement, dans le fond et dans la forme, à l'abri de tout soupçon de publicité.


    (1) Article L.4113-13 du code de la santé publique : « Les membres des professions médicales qui ont des liens avec des entreprises et établissements produisant ou exploitant des produits de santé ou des organismes de conseil intervenant sur ces produits sont tenus de les faire connaître au public lorsqu'ils s'expriment lors d'une manifestation publique ou dans la presse écrite ou audiovisuelle sur de tels produits. Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat.

    Les manquements aux règles mentionnées à l'alinéa ci-dessus sont punis de sanctions prononcées par l'ordre professionnel compétent. »

    Article R.4113-110 du code de la santé publique : « L'information du public sur l'existence de liens directs ou indirects entre les professionnels de santé et des entreprises ou établissements mentionnés à l'article L. 4113-13 est faite, à l'occasion de la présentation de ce professionnel, soit de façon écrite lorsqu'il s'agit d'un article destiné à la presse écrite ou diffusé sur internet, soit de façon écrite ou orale au début de son intervention, lorsqu'il s'agit d'une manifestation publique ou d'une communication réalisée pour la presse audiovisuelle. »

  • Article 15 - Recherches impliquant la personne humaine

    Article 15 (article R.4127-15 du code de la santé publique)

    Le médecin ne peut participer à des recherches biomédicales sur les personnes que dans les conditions prévues par la loi ; il doit s'assurer de la régularité et de la pertinence de ces recherches ainsi que de l'objectivité de leurs conclusions.
    Le médecin traitant qui participe à une recherche biomédicale en tant qu'investigateur doit veiller à ce que la réalisation de l'étude n'altère ni la relation de confiance qui le lie au patient ni la continuité des soins.

    Les recherches impliquant la personne humaine  constituent aujourd'hui un aspect important de l'activité des médecins. Le développement de l'évaluation scientifique des moyens et des stratégies, dans les domaines aussi bien diagnostique que thérapeutique, concernent tous les champs de l'activité médicale et toutes les formes d'exercice.

    En transposant en droit français la directive 2001/20/CE sur les essais cliniques de médicaments, la loi n°2004-806 du 9 aout 2004 relative à la politique de santé publique, précisée par le décret n° 2006-477 du 26 avril 2006 et modifiée par la loi n°2012-300 du 5 mars 2012 relative aux recherches impliquant la personne humaine (voir note [1]) modifie profondément le cadre juridique de la recherche médicale sur la personne institué par la loi n°88-1138 du 20 décembre 1988 relative à la protection des personnes qui se prêtent à des recherches biomédicales.

    L'article 15 attire l'attention du médecin sur les principes qu'il se doit d'observer en ces circonstances et sur un aspect sensible de sa position en tant qu'investigateur.

    Ces commentaires visent essentiellement les recherches dites interventionnelles comportant une intervention sur la personne non justifiée par sa prise en charge habituelle et soulignent le domaine de responsabilité du médecin qui y participe. On peut en rapprocher les recherches qualifiées de non interventionnelles dans lesquelles tous les actes sont pratiqués et les produits utilisés de manière habituelle sans procédure supplémentaire ou inhabituelle de diagnostic, de traitement ou de surveillance (voir note [2]).

    1 - Conditions de la recherche

    Le premier alinéa concernant les protocoles d'étude et les conditions de leur mise en œuvre se réfère à la loi. Il n'y a rien là de surprenant. Aucune étude réalisée chez l'homme ne saurait être considérée comme acceptable sur le plan éthique si son objectif n'est pas pertinent (c'est-à-dire visant à établir une connaissance utile au patient lui-même, à la collectivité des patients, ou aux personnes en général), si le protocole n'est pas conçu de façon à pouvoir apporter une réponse claire aux questions que l'on se pose, si les moyens mis en œuvre ne sont pas appropriés, en qualité et en quantité, aux caractéristiques et aux exigences du protocole.

    Un point particulier concerne encore l'objectivité des conclusions. Les études impliquant la personne humaine  procurent à leur terme le plus souvent des données brutes, généralement numériques. Beaucoup de ces données font l'objet de comparaisons et d'analyses statistiques. Cette étape cruciale de la recherche peut constituer une entreprise délicate. Le médecin-investigateur doit conduire ce travail avec la plus grande rigueur et la plus grande objectivité, ou exercer toute sa vigilance s'il ne réalise pas lui-même le travail de mise en forme et d'exploitation des données issues d'une recherche à laquelle il a participé.

    La loi insiste particulièrement sur le consentement libre et éclairé des intéressés.

    Le consentement est en effet un principe essentiel, un pilier à la fois juridique et déontologique de la pratique de la recherche impliquant la personne humaine. Cette exigence morale et juridique s'exprime à travers de nombreux textes dont le plus ancien est le Code de Nuremberg (1947) suivi des déclarations adoptées par l'Association Médicale Mondiale à Helsinki et à Tokyo (voir note [3]).

    Les conditions formelles et juridiques du consentement sont donc inscrites dans la loi, et détaillées dans divers textes d'application et d'accompagnement, notamment le guide pour son application. Cependant les obligations du médecin ne sauraient se limiter au seul respect des dispositions d'ordre juridique et réglementaire.

    On peut dire en effet du consentement qu'il se présente sous deux aspects. D'une part, il s'agit d'un dispositif qui traduit la libre décision de la personne de participer à la recherche et qui atteste du même coup que l'investigateur - à travers lui le promoteur d'une recherche impliquant la personne humaine - a bien respecté les formes juridiques et réglementaires de l'inclusion d'une personne dans un protocole de recherche. D'autre part, il s'agit de l'aboutissement d'un processus d'information de la personne sur la nature de la recherche, ses objectifs, les contraintes voire les risques subis.

    Le principal problème déontologique que pose le consentement n'est pas le consentement lui-même, mais l'information sur laquelle il se fonde, son "éclairage".

    Au cours des recherches impliquant la personne humaine  - comme dans l'exercice quotidien de la médecine - le recueil du consentement ne traduit le respect de la personne humaine et de sa liberté de choix que si l'information donnée préalablement est appropriée, sincère, objective, pertinente, loyale, compréhensible... Toute la difficulté tient à ce que la portée pratique des exigences ainsi exprimées n'est pas la même pour tout le monde ni dans toutes les situations. On peut se poser les questions suivantes :

    • L'information peut-elle être complète, de caractère encyclopédique ? S'agit-il de submerger l'intéressé sous un flot de détails, pour ne pas encourir le reproche de lui cacher quelque chose ? Ne doit-on pas plutôt lui apporter les informations pertinentes pour la situation envisagée, présentée dans une perspective qui lui permet de bien se situer face à la question de l'agrément et du consentement qui lui est posée, sans omettre toutes les informations qui lui seraient nécessaires pour cela ?

    •  Comment reconnaître qu'une information est "compréhensible" (c'est-à-dire compréhensible par tous) ? Doit-elle être simplifiée à l'extrême (mais elle sera alors loin d'être "complète") ? Doit-on considérer que la personne qui se prête à la recherche ne possède elle-même aucune connaissance propre à guider sa décision ? Ce serait gravement méconnaître la connaissance parfois très fine qu'ont les patients de leur affection et de ses traitements... En fait, il n'existe probablement pas d'autre moyen pour le médecin-investigateur de rendre à coup sûr une information compréhensible et de s'assurer qu'elle est comprise que d'engager lui-même un dialogue avec la personne, en veillant non seulement à répondre à toutes ses préoccupations, mais aussi à éclairer certains aspects de la situation dans laquelle elle envisage de s'engager, et auxquels elle n'aurait pas pensé.
       

    Dans l'acte de "recueillir un consentement" éclairé, l'information écrite est aujourd'hui prévue par les textes. Elle a le mérite de laisser une trace, de constituer une source à laquelle peuvent se référer la personne concernée et ses proches. L'information écrite a une autre qualité : elle fait, préalablement à sa diffusion, l'objet d'un examen attentif par des tiers - en l'occurrence les membres du comité de protection des personnes ou CPP - qui peuvent juger de sa clarté, de sa pertinence, de son équilibre et faire des remarques ou des suggestions pour en améliorer le contenu et la présentation. La qualité de l'information écrite proposée aux personnes dans la recherche a fait de substantiels progrès. Cette qualité même ne doit pas conduire les médecins à une dérive inacceptable : l'information doit continuer d'être donnée et contrôlée par l'investigateur lui-même, sa compréhension doit être confirmée au cours du dialogue investigateur - patient (malade ou volontaire sain). Ce n'est qu'à ce prix que le consentement a un sens, qu'il traduit la liberté de choix de la personne, sans se restreindre à satisfaire une disposition réglementaire ou à exprimer une précaution d'ordre juridique.

    Le respect de la loi conduit à rappeler que le législatif, le réglementaire et le déontologique s'intriquent étroitement, et que la législation et la réglementation s'enrichissent chaque jour de textes dont l'inspiration éthique et déontologique est très forte, particulièrement dans le domaine biomédical. Dans ces conditions, le respect de la loi ne saurait se concevoir comme la simple application de dispositions d'ordre matériel, mais comme le respect de l'esprit des textes, particulièrement lorsqu'il s'agit d'information, de consentement, de protection des personnes.

    Une dernière précision : les recherches impliquant la personne humaine doivent être conduites sous une stricte surveillance. Cela s'impose chaque fois qu'un patient se trouve exposé à une situation vis-à-vis de laquelle on manque de recul et d'expérience, ce qui est inhérent à la recherche. L'obligation de stricte surveillance a cependant une portée plus générale. D'une part, l'inclusion dans un protocole altère la liberté de choix du médecin vis-à-vis de son patient, puisque les modalités de prise en charge lui sont imposées, et résultent souvent d'un tirage au sort : la contrepartie de la perte d'initiatives est le renforcement de la surveillance, tout particulièrement dans le cas où un patient reçoit un placebo au lieu d'un médicament présumé actif et bénéfique. D'autre part, cette surveillance particulière apparaît pour la personne qui se prête à l'essai comme la conséquence normale de la situation d'incertitude - plus ou moins marquée - à laquelle il s'expose en se prêtant à une recherche impliquant la personne humaine.

    2 - Relation médecin-patient

    Le deuxième alinéa de l'article 15 rappelle que le médecin est exposé à se comporter différemment, vis-à-vis de la même personne, selon qu'il se trouve en situation de médecin-traitant ou dans celle de médecin-investigateur. L'application d'un protocole expose à rompre la continuité d'une relation médecin-patient.

    Si le protocole, dûment expliqué, compris et accepté par le patient, doit évidemment être conduit dans toute sa rigueur, le médecin traitant, généraliste ou spécialiste, libéral ou hospitalier, qui se trouve en situation de médecin investigateur doit s'efforcer de ne rien altérer de la relation de confiance basée sur l'attention personnelle et bienveillante qui le lie au patient. A contrario, il ne doit pas utiliser cette relation de confiance pour pousser le patient à accepter de se prêter à une recherche en négligeant de respecter intégralement ses devoirs d'information et la liberté de décision de l'intéressé. Le médecin peut donc éprouver des difficultés à cumuler les deux fonctions de médecin traitant et de médecin investigateur. Si tel est le cas, il doit réfléchir à l'opportunité de ne pas assurer lui-même le rôle d'investigateur pour l'application du protocole, se limitant à prendre les dispositions nécessaires pour ne pas rompre, pendant la durée de la recherche, la continuité du contrat moral de soins qui le lie à son patient.

    Toutefois l'expérience montre que l'information renforcée, dans une recherche par rapport à la conduite courante, accroît les échanges entre patient et médecin et peut contribuer à améliorer une relation par des explications réciproques plus développées que d'ordinaire. Après de telles explications, le patient accordant sa participation à la recherche, sera plus engagé et se montrera plus coopérant que pour un traitement plus courant et plus simple.


    ([1]) Articles L.1121-1 et suivants ; R.1121-1 et suivants du code de la santé publique

    (2) Articles L.1121-1 et R.1121-3 du code de la santé publique

    3) 18ème Assemblée médicale mondiale d’Helsinki, Finlande : du 14 au 19 juin 1964,

    29e Assemblée Médicale Mondiale de Tokyo, Japon : du 6 au 10 octobre 1975

  • Article 16 - Collecte de sang et prélèvements d'organes

    Article 16 (article R.4127-16 du code de la santé publique)

    La collecte de sang ainsi que les prélèvements d'organes, de tissus, de cellules ou d'autres produits du corps humain sur la personne vivante ou décédée ne peuvent être pratiqués que dans les cas et les conditions définis par la loi.

    Les lois de bioéthique relatives l'une au respect du corps humain (voir note [1]), l'autre au don et à l'utilisation des éléments et produits du corps humain, à l'assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal (voir note [2]) ont introduit dans le code civil, le code pénal et le code de la santé publique des dispositions visant tout particulièrement :

    • au respect du corps humain et de son intégrité, même après le décès ;
    • à interdire tout commerce du corps humain, de ses composants et de ses produits ;
    • à réaffirmer l’anonymat (voir note [3]) et la gratuité du don ;
    •  à clarifier la notion de consentement des donneurs ;
    • à encadrer par la loi et ses décrets d'application les activités de prélèvement d'organes, de tissus et de cellules d'une part, de greffe d'autre part ;
    • à assurer la sécurité sanitaire des éléments et produits du corps humain prélevés et collectés à des fins thérapeutiques.
       

    De nombreuses dispositions de la loi visent à accroître l’effort d’information du public en faveur du don de sang et d’organes et à diminuer les obstacles, notamment économiques (voir note [4]) mais aussi culturels, qui entravent le prélèvement.

    Les situations très délicates du don d’organe chez des personnes en état de mort encéphalique et qui n’auraient pas fait connaître, au préalable, leurs intentions à ce sujet, devraient être résolues dans un climat de confiance et de sérénité, respectueux à la fois des souhaits du défunt, rapportés par l’entourage et compatibles avec les objectifs de santé publique en matière de prélèvements.

    Cela est d’autant plus nécessaire que les besoins thérapeutiques sont importants eu égard au petit nombre de donneurs potentiels.

    Pour prévenir ces situations difficiles, il serait bon que les médecins, comme les y incite l’article 12 du code et si leurs convictions le leur permettent, abordent ces problèmes avec leurs patients.

    1 - Le sang

    Le code de la santé publique distingue la collecte de sang selon la finalité qu’elle poursuit : utilisation à des fins thérapeutiques, à des fins de contrôles médicaux (article L.1221-8, 2°), à des fins de recherche (article L.1221-8-1).

    Le prélèvement ne peut être fait, sous peine de sanction pénale, qu’avec le consentement du donneur majeur, par un médecin ou sous sa direction et sa responsabilité. Cependant, à titre exceptionnel, un prélèvement peut être effectué sur un mineur :

    • lorsque des motifs tirés de l’urgence thérapeutique l’exigent ;
    • lorsqu’il n’a pu être trouvé de donneur majeur immunologiquement compatible.

    L’accord écrit de chacun des titulaires de l’autorité parentale est requis. Le refus du mineur fait obstacle au prélèvement.

    Depuis le 1er janvier 2000, l’Etablissement français du sang est chargé sur l’ensemble du territoire national des activités de collecte du sang, de qualification biologique du don, de préparation, de distribution et de délivrance des produits sanguins labiles (voir note [5]).

    Le sang lui-même est délivré en deux types de produits :

    • les produits stables, assimilés aux médicaments, sont distribués sous le contrôle des pharmaciens ;
    • les produits labiles demeurent sous le contrôle de l'organisation transfusionnelle et sont soumis à de bonnes pratiques (voir note [6]).
       

    La sécurité transfusionnelle a été renforcée, pour prévenir la transmission des maladies infectieuses, virales en particulier. La sélection des donneurs est organisée (voir note [7]) ; des analyses biologiques et tests de dépistage sont mis en œuvre avant la distribution, la délivrance, l’utilisation du sang, de ses composants et de ses dérivés (voir note [8]).

    L'hémovigilance (voir note [9]) a été instituée pour dépister toutes anomalies survenues chez une personne transfusée à l'occasion du don du sang. Elle est obligatoire dans les établissements de santé.

    La traçabilité de tout produit sanguin est obligatoire. Elle vise à retrouver un éventuel donneur contaminant ou les receveurs d'un produit présentant un risque postérieur au don.

    À cela, il faut ajouter la modification des indications thérapeutiques par les spécialistes des différentes disciplines dans leur pratique quotidienne : pour réduire les risques liés à la transfusion, elles ont modifié les règles biologiques de compensation chaque fois que possible.

    Le sang et ses composants peuvent être utilisés à d’autres fins que thérapeutiques, soit pour des recherches, soit pour constituer directement une collection d’échantillons biologiques humains. Les règles relatives au consentement du donneur, à la gratuité du don, aux contrôles sanitaires sont identiques à celles retenues pour la collecte à finalité thérapeutique, sans préjudice du respect des obligations propres aux recherches (voir note [10]).

    2 - Organes, tissus, cellules ou autres produits du corps humain

    Précédées par la loi n°76-1181 du 22 décembre 1976, dite « loi Caillavet » qui posait la règle du consentement présumé aux prélèvements post-mortem, les lois de bioéthiques (voir note [11]) fixent les principes généraux applicables aux prélèvements et aux greffes : consentement préalable du donneur – corollaire du principe d’inviolabilité du corps humain – gratuité, respect de l’anonymat – sous réserve du don consenti entre apparentés – équité dans la répartition et l’attribution des greffons.

    Le prélèvement et la greffe constituent une priorité nationale. L’Agence de la Biomédecine a pour mission de promouvoir le don d’organes et de tissus issus du corps humain. La loi de 2004 prévoit expressément l’information des jeunes de 16 à 25 ans sur le don d’organes et confère au médecin généraliste un rôle central dans cette information (article L.1211-3 du code de la santé publique).

    1 - Prélèvements d'organes, de tissus et de cellules

    Ils comportent deux régimes distincts selon que le prélèvement est effectué sur une personne vivante ou décédée.

    a) Sur une personne vivante

    Le prélèvement sous-entend le don d’organes ou de tissus. Il ne peut être effectué que dans l’intérêt direct du receveur. Le donneur doit avoir la qualité de père ou mère. Par dérogation, la possibilité de faire un don d’organe est ouverte au cercle élargi des personnes majeures, « apparentées » au receveur (père, mère, fils, fille, frère ou sœur, conjoint…) (voir note [12]) ainsi qu’à toute personne apportant la preuve d’une vie commune ou d’un lien affectif étroit et stable avec le receveur d’au moins deux ans.

    Le recours au don croisé d’organes qui permet de remédier à une incompatibilité entre un malade et un donneur appartenant à une même famille en trouvant une autre paire donneur-receveur d’une autre famille qui bénéficiera elle aussi de l’échange est désormais admis (voir note [13]).

    Les prélèvements d’organes sont interdits chez les personnes majeures protégées ou les mineurs. Par dérogation à cette règle, un prélèvement de moelle osseuse, assimilée à un organe, peut être effectué sur un mineur au bénéfice de son frère ou de sa sœur, de sa cousine ou son cousin germain, de son oncle ou de sa tante, de sa nièce ou de son neveu. Le refus du mineur fait obstacle au prélèvement.

    Le donneur exprime son consentement devant le président du Tribunal de grande instance – ou le magistrat désigné par lui – après avoir été informé par le comité d’experts sur les risques et les conséquences d’un tel prélèvement. Le magistrat s’assure que le consentement est libre et éclairé.

    L’autorisation du comité d’experts (voir note [14]) est obligatoire pour les donneurs admis à titre dérogatoire (cercle élargi) et facultative, sur décision du magistrat qui recueille le consentement, pour les donneurs admis par principe (le père et la mère du receveur). Pour apprécier la justification médicale et les risques de l’opération pour le donneur, le comité peut avoir accès aux informations médicales du donneur et du receveur. L’autorisation pour les donneurs admis à titre dérogatoire ne peut intervenir qu’après le recueil du consentement du donneur devant le juge.

    En cas d’urgence vitale, l’information du donneur est effectuée par le médecin qui a posé l’indication de la greffe ou tout autre praticien selon le choix du donneur. Le consentement est recueilli par tout moyen, par le Procureur de la République. Un comité désigné par l’Agence de la Biomédecine parmi les experts nommés délivre l’autorisation de prélèvement par tout moyen.

    Lorsqu’il s’agit de tissus et/ou de cellules (ou de la collecte de produits du corps humain), le prélèvement peut être effectué dans un but thérapeutique mais aussi scientifique (voir note [15]).

    b) Sur une personne décédée

    Le prélèvement d’organes sur une personne dont la mort a été dûment constatée (infra) ne peut être effectué, sauf opposition de sa part exprimée de son vivant, qu’à des fins thérapeutiques ou scientifiques (article L.1232-1 du code de la santé publique). Il en va de même du prélèvement des tissus et cellules (article. L.1241-6).

    Le refus du prélèvement peut être exprimé par tout moyen, notamment par l’inscription sur un registre national automatisé, dit Registre national des refus, dont le fonctionnement et la gestion sont assurés par l’Agence de la Biomédecine. Toute personne majeure ou mineure âgée de 13 ans au moins peut faire inscrire sur ce registre, son refus d’un prélèvement post-mortem soit à des fins thérapeutiques, soit pour rechercher les causes du décès (voir note [16]), soit à des fins scientifiques, soit pour plusieurs de ces hypothèses.

    Si le médecin n’a pas directement connaissance de la volonté du défunt, il doit s’efforcer de recueillir auprès des proches du défunt l’opposition au don d’organe, éventuellement exprimée, par la personne de son vivant, par tout moyen et il les informe de la finalité des prélèvements envisagés.

    Lorsque le donneur est un mineur ou un majeur protégé, le prélèvement ne peut être opéré qu’avec l’autorisation écrite de chacun des titulaires de l’autorité parentale ou du représentant légal.

    Le constat de la mort (voir note [17]) dans le cas de personnes présentant un arrêt cardiaque et respiratoire persistant, ne peut être établi que si les trois critères cliniques suivants sont simultanément présents :

    • absence totale de conscience et d’activité motrice spontanée ;
    • absence de tous les réflexes du tronc cérébral ;
    • absence totale de ventilation spontanée.
       

    Si la personne décédée est assistée par ventilation mécanique et conserve une fonction hémodynamique, l’absence de ventilation spontanée est vérifiée par une épreuve d’hypercapnie. De plus, en complément des trois critères cliniques ci-dessus mentionnés, il est obligatoirement recouru à des critères paracliniques (deux électroencéphalogrammes ou une angiographie cérébrale) pour attester  du caractère irréversible de la destruction encéphalique.

    Le constat de la mort est signé par un médecin (par deux médecins en cas de mort encéphalique). Ces médecins doivent faire partie d’unités fonctionnelles ou de services distincts de ceux auxquels appartiennent les médecins impliqués dans le prélèvement ou la greffe (voir note [18]).

    Les médecins qui ont effectué les prélèvements sont tenus de s’assurer de la restauration décente du corps (article L.1232-5 du code de la santé publique).

    La rémunération à l’acte des praticiens effectuant des prélèvements d’organes et/ou de tissus en vue de dons est interdite (voir note [19]).

    Les autorisations de prélèvements d’organes et/ou de tissus (pas de cellules) sont délivrées aux établissements de santé, pour une durée de cinq ans, renouvelable (voir note [20]).

    2 - Banques de tissus

    Après prélèvement, la transformation, la conservation, la distribution, la cession des tissus et des cellules sont soumises à autorisation administrative, laquelle est accordée pour une durée de cinq ans. Elle est renouvelable. Ne peuvent en bénéficier que les établissements publics de santé et les organismes à but non lucratif. Certaines activités de haute technicité concernant la transformation des prélèvements et les cultures de cellules ainsi que leur conservation, leur distribution et leur cession sont autorisées à d'autres organismes (article L.1243-1 du code de la santé publique).

    3 -  Le corps humain, ses éléments et ses produits ne peuvent être l'objet d'un négoce, y compris après le décès

    Le droit de la personne est enrichi par un droit au respect  de son corps, y compris après le décès. Le corps humain est inviolable. Le corps humain, ses éléments, ses produits ne peuvent faire l'objet d'un droit patrimonial (article 16-1 du code civil).

    Aucune convention ne peut conférer une valeur patrimoniale au corps humain, à ses éléments, à ses produits (article 16-5 du code civil).

    Les individus sont également protégés contre eux-mêmes en ce domaine et ne peuvent donc être rémunérés pour les prélèvements d'éléments de leur corps ou la collecte d'un produit de celui-ci (article16-6 du code civil). Les sanctions pénales à tout manquement sont sévères : 5 ans d’emprisonnement et  75 000 euros d'amende pour le paiement d'un organe ou d'un tissu ; sont punis des mêmes peines la rémunération d'une seule entremise visant à obtenir un organe ou un tissu, ou le fait d’importer ou d’exporter des produits humains hors des conditions prévues par la loi (article L.511-4 du code pénal).

    Toutefois, le prélèvement, le conditionnement, la distribution et l'acheminement des produits humains prélevés peuvent donner lieu à remboursement des frais occasionnés, qu'il s'agisse d'organes ou de tissus.

    4 - Sécurité sanitaire et traçabilité

    Une sélection rigoureuse des greffons est requise. Comme par le passé, elle concerne sa qualité fonctionnelle. Mais une notion nouvelle apparaît : la sécurité sanitaire.

    Son but est d'éviter de transmettre aux receveurs d'organes ou de tissus une maladie dont pourrait être porteur le donneur. Ainsi la recherche de la présence de marqueurs biologiques des maladies infectieuses, virales notamment, a-t-elle été rendue obligatoire (voir note [21]) et un échantillon des produits biologiques ayant servi à ces recherches doit être conservé. En outre, les prélèvements de tissus et de cellules (à l’exception de la cornée, de l’os cortical ou de la peau - arrêté du 24 mai 1994) sur une personne décédée ne peuvent être effectués que si celle-ci est assistée par ventilation mécanique et si elle conserve une fonction hémodynamique.

    Toutefois, pour donner aux patients un meilleur accès aux greffons, le prélèvement d’organes et de cellules chez un donneur porteur de marqueurs sérologiques des virus de l’hépatite B et de l’hépatite C est autorisé à titre expérimental dans le cadre de protocoles dérogatoires de greffe définis par  l’ANSM. Cette dérogation ne peut être mise en œuvre que dans les situations engageant le pronostic vital du receveur et en l’absence d’alternatives thérapeutiques appropriées.

    Elle impose que le risque prévisible encouru par le receveur ne soit pas hors de proportion avec le bénéfice escompté et que le consentement éclairé de celui-ci soit recueilli (article R.1211-21 du code de la santé publique).

    Afin d'assurer la plus grande sécurité possible d'utilisation, un dispositif de traçabilité a été mis en place (voir note [22]). On entend par traçabilité d'un élément ou d'un produit du corps humain (organe, tissu, cellules ou dérivés) l'ensemble des informations et des mesures prises pour suivre et retrouver rapidement l'ensemble des étapes allant de l'examen clinique du donneur à l'utilisation de cet élément ou produit du corps humain, en passant par le prélèvement, la transformation, la conservation, le transport, la distribution, la dispensation à un patient. La traçabilité permet d'établir un lien entre le donneur et le (ou les) receveur(s). Elle est établie à partir d'une codification préservant l'anonymat des personnes.

    Ces informations devront être transmises avec l'organe ou le tissu prélevé au praticien qui en fera l'implantation. De même, tout médecin ou chirurgien impliqué dans l'utilisation d'un greffon devra s'assurer que celui-ci a été prélevé, conservé et distribué conformément à la loi et en application de celle-ci.

    Tout patient qui bénéficie d'une greffe d'origine humaine doit être informé par le praticien responsable de la greffe que celle-ci est réalisée à partir d'éléments ou produits du corps humain.

    En somme, plus qu'une autre activité médicale, la pratique de transplantation :

    • conjugue intérêt individuel et intérêt collectif ;
    • nécessite le plus grand respect des personnes, vivantes ou décédées, donneurs ou receveurs ;
    •  justifie l'obtention d'un consentement quand cela est possible ;
    • impose l'indépendance des médecins et des équipes médicales impliquées ;
    • conduit enfin à sensibiliser non seulement les médecins mais l'ensemble de la population.
       

    Le Comité Consultatif National d’Ethique a émis des recommandations pour une meilleure compréhension et application de la loi (voir note [23]).


    ([1]) Loi n°94-653 du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain

    ([2]) Loi n°94-654 du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps

    ([3])  Article L.1221-1 du code de la santé publique

    ([4] ) Article L. 1221-3 du code de la santé publique

    ([5]) Article L. 1222-1 du code de la santé publique

    ([6]) Article L.1222-3 du code de la santé publique

    ([7]) Article R.1221-5 du code de la santé publique mais « Nul ne peut être exclu du don de sang en dehors de contre-indications médicales » - Article L.1211-6-1 du code de la santé publique

    ([8]) Articles D.1221-6 à D.1221-16 du code de la santé publique

    ([9]) Articles L.1221-13, R.1221-22 et suivants du code de la santé publique

    ([10]) Article L.1221-8-1 du code de la santé publique

    ([11]) Lois n° 94-654 du 29 juillet 1994, n° 2004-800 du 6 août 2004 et n° 2011-814 du 7 juillet 2011

    Voir aussi : Protocole additionnel à la Convention des Droits de l’Homme et la Biomédecine relatif à la transplantation d’organes et de tissus d’origine humaine – Strasbourg, 24 janvier 2002

    ([12]) Article L.1231-1, 2ème alinéa du code de la santé publique

    ([13]) Article L.1231-1, 3ème al. du code de la santé publique

    ([14]) Article L.1231-3 du code de la santé publique

    ([15]) Articles L.1241-1 à L.1241-7 du code de la santé publique

    ([16]) Le refus ne peut faire obstacle aux expertises, constatations et examens techniques ou scientifiques éventuellement diligentés dans le cadre d’une enquête judiciaire ou d’une mesure d’instruction – Article R.1232-6 du code de la santé publique

    ([17]) Articles R.1232-1, R.1232-2 du code de la santé publique

    ([18]) Article L.1232-4 du code de la santé publique

    ([19]) Articles L.1234-3 et L.1242-2 du code de la santé publique

    ([20]) Articles L.1233-1 et L.1242-1 ; R.1233-1 à R.1233-6, R.1242-1 à R.1242-7 du code de la santé publique

    ([21]) Articles L.1211-6, R.1211-12 à R.1211-28 du code de la santé publique

    ([22]) Articles L.1211-7 ; articles R.1211-32 et suivants du code de la santé publique

    ([23]) CCNE – Avis n° 115 ; questions d’éthique relatives au prélèvement et au don d’organes à des fins de transplantation, 15 juin 2011

  • Article 17 - Assistance médicale à la procréation

    Article 17 (article R.4127-17 du code de la santé publique)

    Le médecin ne peut pratiquer un acte d'assistance médicale à la procréation que dans les cas et les conditions prévus par la loi.

    Cet article se réfère aux lois de bioéthique révisées (voir note [1]).

    1- L'assistance médicale à la procréation s’entend des pratiques cliniques et biologiques permettant la conception in vitro, la conservation des gamètes, des tissus germinaux et des embryons, le transfert d'embryons et l'insémination artificielle (voir note [2]).

    Elle a pour objet de remédier à l'infertilité d'un couple ou d'éviter la transmission à l'enfant d'une maladie grave ou à un membre d’un couple d’une maladie particulièrement grave. Le caractère pathologique de l’infertilité doit être médicalement diagnostiqué (article L.2141-2 du code de la santé publique).

    L'homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer, mariés ou en mesure d'apporter la preuve d'une vie commune d'au moins deux ans et consentir préalablement au transfert des embryons ou à l’insémination. Font obstacle à l’insémination ou au transfert des embryons, le décès de l’un des membres du couple, le dépôt d’une requête en divorce ou en séparation de corps ou la cessation de la vie commune ainsi que la révocation par écrit du consentement de l’un des membres du couple.

    Un embryon ne peut être conçu in vitro qu'avec des gamètes provenant au moins d'un des deux membres du couple.

    L'assistance médicale à la procréation avec un tiers ne doit être pratiquée que comme ultime indication compte tenu des techniques récentes (spermatide-ovocyte).

    Les embryons surnuméraires peuvent être conservés pendant un délai de 5 ans, avec l'accord écrit du couple consulté chaque année.

    Les actes cliniques et biologiques d'assistance à la procréation doivent être effectués sous la responsabilité d'un praticien en mesure de prouver sa compétence dans ce domaine et dans un établissement ou laboratoire autorisé à les pratiquer (voir note [3]).

    La mise en œuvre de l'assistance médicale à la procréation doit être précédée d'entretiens particuliers des demandeurs avec les membres de l'équipe pluridisciplinaire.

    Les demandeurs doivent établir un dossier, assez semblable à celui établi pour les adoptions.

    Toute violation de la loi constatée dans un établissement ou dans un organisme agréé entraîne immédiatement le retrait temporaire ou définitif des autorisations prévues. De même, tout médecin pratiquant des actes non conformes aux dispositions législatives et réglementaires est passible de peines de prison et d'amendes lourdes pouvant aller jusqu’à  7 ans d’emprisonnement et 100 000 euros d'amende (article L. 2162-1 et suivants du code de la santé publique).

    Il est donc nécessaire que tout médecin pratiquant de tels actes connaisse parfaitement le contenu de la loi.

    2- La conception in vitro d'embryons ou la constitution par clonage d’embryon humain à des fins de recherche est interdite de même que la création d’embryons transgéniques ou chimériques.

    La recherche sur l’embryon, les cellules souches embryonnaires et les lignées de cellules souches est interdite.

    A titre dérogatoire, l’Agence de la Biomédecine peut autoriser des recherches sur des embryons conçus in vitro et ne faisant plus l’objet d’un projet parental si elles sont susceptibles de permettre des progrès médicaux majeurs et s’il est expressément établi qu’on ne peut parvenir autrement au résultat escompté (articleL.2151-5 du code de la santé publique).

    La loi du 7 juillet 2011 instaure une clause de conscience en vertu de laquelle « aucun chercheur, aucun ingénieur, aucun technicien ou auxiliaire de recherche quel qu’il soit, aucun médecin ou auxiliaire médical n’est tenu de participer à quelque titre que ce soit aux recherches sur des embryons humains ou des cellules souches embryonnaires » (article L.2151-7-1 du code de la santé publique).


    ([1]) Loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 relative au don et à l'utilisation des éléments et produits du corps humain, à l'assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal, révisée par la loi n°2004-800 du 6 août 2004 et la loi n°2011-814 du 7 juillet 2011 ; loi n° 94-653 du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain

    ([2]) La liste des procédés biologiques utilisés en AMP est fixée par arrêté du ministère chargé de la santé, après avis de l’Agence de la Biomédecine. La technique de vitrification des ovocytes est désormais autorisée.

    ([3]) Articles L.2142-1-1, L.2142-2 ; R.2142-1 et suivants : conditions d’autorisation et de fonctionnement des établissements de santé ; R.2142-10 et suivants : conditions d’agrément des praticiens

  • Article 18 - IVG

    Article 18 (article R.4127-18 du code de la santé publique)


    Un médecin ne peut pratiquer une interruption volontaire de grossesse que dans les cas et les conditions prévus par la loi ; il est toujours libre de s'y refuser et doit en informer l'intéressée dans les conditions et délais prévus par la loi.

    Les dispositions de la loi sur l’interruption volontaire de grossesse (IVG) restent encore assez mal connues des médecins et des femmes. L’IVG n’est ni un moyen de contraception, ni un droit à l’avortement. C’est une exception au principe du respect de la vie, réaffirmé à l’article 16 du code civil, exception justifiée par la nécessité. La loi distingue deux situations : l’interruption de grossesse pratiquée avant la fin de la douzième semaine de grossesse, en cas de détresse maternelle ; l’interruption de grossesse pour motif médical (IMG) (état pathologique maternel ou fœtal).

    1 – Interruption de grossesse demandée en situation de détresse

    La femme enceinte que son état place dans une situation de détresse peut demander à un médecin d’interrompre sa grossesse [1](voir note 1). Cette intervention ne peut être pratiquée qu’avant la fin de la douzième semaine de grossesse. La femme est seul juge de la situation de détresse.

    Le médecin doit, dès la première visite, informer la femme des méthodes médicales et chirurgicales d’interruption de grossesse, des risques et effets secondaires potentiels, lui remettre un dossier-guide et la liste des centres de conseils et planification familiale et établissements où sont pratiquées les interventions.

    A l’issue d’un délai de réflexion d’une semaine, la femme confirme par écrit sa demande.

    Lorsque la femme est mineure (voir note 2) et qu’elle désire garder le secret sur l’intervention, le médecin doit s’efforcer d’obtenir son accord pour que le représentant légal soit consulté. S’il n’y parvient pas ou que le consentement du représentant légal n’est pas obtenu, l’IVG ainsi que les actes médicaux (cela vise notamment l’anesthésie) et les soins qui lui sont liés peuvent être pratiqués à la demande de l’intéressée, assistée d’une personne majeure de son choix.

    L’IVG peut être pratiquée :

    • soit par voie chirurgicale, en établissement et sous anesthésie locale ou générale ;
    • soit par voie médicamenteuse (voir note 3), hors établissement de santé et jusqu’à la fin de la cinquième semaine de grossesse (sept semaines d’aménorrhée).
       

    Seuls les médecins qualifiés en gynécologie médicale ou obstétrique et les médecins généralistes pouvant justifier d’une pratique régulière des IVG médicamenteuses dans un établissement de santé sont habilités à pratiquer ces interventions.

    Le médecin doit avoir signé une convention avec un établissement de santé qui accueillera la patiente au cas où cela serait nécessaire.

    Le médecin s’approvisionne en médicaments nécessaires à la réalisation de l’IVG auprès d’une pharmacie d’officine. La prescription doit porter les mentions « à usage professionnel » et le nom de l’établissement avec lequel il a signé une convention, la date de celle-ci.

    2 – Interruption de grossesse pratiquée pour motif médical (IMG)

    La grossesse peut être interrompue, à toute époque lorsqu’il est attesté après consultation d’une équipe pluridisciplinaire soit que la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la mère, soit qu’il existe une forte probabilité que l’enfant à naître soit atteint d’une affection d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic (voir note 4).

    S’il existe un péril grave pour la mère, l’avis sera donné par une équipe pluridisciplinaire de quatre membres comprenant un gynécologue-obstétricien, un médecin spécialiste de l’affection dont la femme est atteinte, un médecin choisi par la mère, un assistant social ou psychologue.

    Si le risque concerne l’enfant, l’avis est donné par l’équipe d’un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal, un médecin choisi par la femme pouvant être associé à la concertation.

    Hors urgence médicale, la femme se voit proposer un délai de réflexion d’au moins une semaine avant de décider d’interrompre ou de poursuivre la grossesse.

    La femme ou le couple peut demander à être entendu.

    3 – Clause de conscience

    Un médecin n’est jamais tenu de pratiquer une interruption de grossesse. Mais il doit informer sans délai l’intéressée de son refus et lui communiquer immédiatement le nom des praticiens susceptibles de réaliser l’intervention (voir note 5).

    4 – Contraception

    En aucun cas, l’interruption volontaire de grossesse ne doit constituer un moyen de régulation des naissances (article L.2214-2 du code de la santé publique).

    Une contraception, selon la méthode choisie par la femme, sera mise en place dès que possible après la réalisation de l’IVG.


    (1) Article L.2212-1 du code de la santé publique

    (2) Article  L.2212-7 du code de la santé publique

    (3) Article R.2212-9 à R.2212-18 du code de la santé publique

     (4) Article L.2213-1 du code de la santé publique :

    « L'interruption volontaire d'une grossesse peut, à toute époque, être pratiquée si deux médecins membres d'une équipe pluridisciplinaire attestent, après que cette équipe a rendu son avis consultatif, soit que la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme, soit qu'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic.

    Lorsque l'interruption de grossesse est envisagée au motif que la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme, l'équipe pluridisciplinaire chargée d'examiner la demande de la femme comprend au moins quatre personnes qui sont un médecin qualifié en gynécologie-obstétrique membre d’un centre pluridisciplinaire prénatal, un praticien spécialiste de l’affection dont la femme est atteinte, un médecin choisi par la femme et une personne qualifiée tenue au secret professionnel qui peut être un assistant social ou un psychologue. Le médecin qualifié en gynécologie obstétrique et celui spécialiste de l’affection dont la femme est atteinte doivent exercer leur activité dans un établissement de santé.

    Lorsque l'interruption de grossesse est envisagée au motif qu'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic, l'équipe pluridisciplinaire chargée d'examiner la demande de la femme est celle d'un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal. Lorsque l'équipe du centre précité se réunit, un médecin choisi par la femme peut, à la demande de celle-ci, être associé à la concertation. Hors cas d’urgence médicale, la femme se voit proposer un délai de réflexion d’au moins une semaine avant de décider d’interrompre ou de poursuivre sa grossesse.

    Dans les deux cas, préalablement à la réunion de l'équipe pluridisciplinaire compétente, la femme concernée ou le couple peut, à sa demande, être entendu par tout ou partie des membres de ladite équipe. »

    (5) Article L.2212-8 du code de la santé publique

  • Article 19 - Interdiction de la publicité

    Article 19 (article R.4127-19 du code de la santé publique)

    La médecine ne doit pas être pratiquée comme un commerce.
    Sont interdits tous procédés directs ou indirects de publicité et notamment tout aménagement ou signalisation donnant aux locaux une apparence commerciale.

    Publicité et commerce sont indissociables et nécessitent une analyse pratique.

    1 - Exercice non commercial

    La santé n'est pas un bien marchand. L'acte médical ne peut pas être considéré comme une denrée, une marchandise échangée pour une contrepartie financière. Le médecin ne "vend" pas des ordonnances ou des soins, ou des certificats. La médecine est un service.

    Le "contrat de soins" qui est à la base de la responsabilité médicale (article 69) n'est pas une convention commerciale, ni un marché. C'est un contrat tacite, où ce qu'apporte l'un n'est pas l'équivalent de ce qu'apporte l'autre. Le médecin s'engage à donner les soins adéquats (article 32) qui ne sont pas définis par avance et qui diffèrent selon les circonstances.

    Cette notion - que l'exercice de la médecine ne peut être assimilé à une activité commerciale - a une grande importance et de nombreuses conséquences réglementaires. Elle ne renferme aucun jugement péjoratif vis-à-vis des professions commerciales qui ont leurs propres règles. Mais les missions du médecin sont d'une autre nature. S'il n'est pas immoral que le gain soit le moteur d'une entreprise commerciale, la rentabilité ne peut être l'objectif principal du médecin.

    Il n'en reste pas moins que le médecin doit trouver une juste rentabilité de son cabinet médical, nécessitant une rigueur qui évite deux écueils : la rentabilité à tout prix par un fonctionnement abusif, le déficit compromettant à terme l'ensemble de la structure de soins. S'il s'agit de gérer raisonnablement la structure de l'ensemble des moyens matériels de son cabinet (au besoin dans le cadre d'une SCM), il ne peut en aucun cas s'agir d'exploiter un appareillage - dont parfois l'originalité ou l'usage se révèle discutable - afin d'en dégager des revenus non justifiés médicalement (mais que ne manquent pas de souligner les publicités de certains journaux médicaux). Une attention analogue doit être portée par le médecin à l'utilisation de certains équipements dont l'établissement hospitalier cherche la rentabilité, voire le rendement.

    La cession d'un cabinet médical à un successeur par un médecin qui cesse d'exercer ou qui change de résidence professionnelle doit s'effectuer selon des règles strictes qui respectent le libre choix du patient. Elle n'est pas comparable à la cession d'un fonds de commerce.

    2 - Dérives commerciales de l'exercice

    a) L'application des lois médico-sociales a apporté des habitudes et des dispositions incitant à des comportements de nature mercantile :

    • le paiement comptant de chaque acte médical, conséquence de l'emploi des feuilles d’assurance maladie ;
    • la tarification des actes médicaux, chaque acte étant doté d'une "valeur marchande" ;
    • la nomenclature des actes médicaux elle-même où chaque acte est doté d’une valeur monétaire qui fait la part belle aux actes médico-techniques ou qui requièrent un appareillage au détriment des actes cliniques.

    L'influence des médias - la télévision, internet, les réseaux sociaux…- a affecté la relation médecin-patient en privilégiant le spectaculaire  (la technique, l'appareillage, l'image) par rapport à la relation, la réflexion, le conseil. Le patient réclame l'examen paraclinique, aggravant les dépenses d'assurance maladie et le médecin est tenté de limiter son activité intellectuelle. Apparaissent ainsi des pratiques médicales de plus en plus limitées et de ce fait spécialisées (endoscopie, cathétérisme, enregistrement de données). Certaines sont plus rémunératrices et font de ce fait apparaître des "créneaux" de rentabilité (médecine esthétique ou anti-âge) qui ouvrent la voie à des excès. Dans les situations de concurrence d'origine diverse, la déontologie du médecin doit se résumer, non sans difficultés, à privilégier l'intérêt du patient.

    b) Le code de déontologie a multiplié les mesures réglementaires contre une pratique commerciale de la médecine qui font l'objet d'autres articles :

    • 22, 94 : interdiction du partage clandestin d'honoraires ;
    • 23 : interdiction de tout compérage ;
    • 24 : interdiction des ristournes, commissions, avantages ;
    • 25 : interdiction de consulter dans des locaux commerciaux ;
    • 57 : interdiction de détournement de patientèle ;
    • 67, 53, 54, 55 : relatifs aux honoraires ;
    • 89 : interdisant la gérance de cabinet ;
    • 83 II, 97 : concernant la rentabilité.
       

    c ) La loi elle-même est venue confirmer l'interdiction pour les médecins de recevoir des avantages en nature ou en espèces, directement ou non, procurés par des entreprises assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits remboursés par les régimes obligatoires de sécurité sociale (art. L.4113-6 du code de la santé publique).

    Cette interdiction ne s'applique pas aux activités de recherche ou d'évaluation scientifique à la condition qu’elles soient, avant leur mise en application, soumises pour avis au conseil de l'ordre compétent et notifiées, lorsque les activités de recherche ou d'évaluation sont effectuées, même partiellement, dans un établissement de santé au responsable de l'établissement, et que les rémunérations ne soient pas calculées de manière proportionnelle au nombre de prestations ou produits prescrits, commercialisés ou assurés.

    Les infractions à ces dispositions sont passibles d'une amende de 75 000 euros et d'un emprisonnement de deux ans (article L.4163-2 du code de la santé publique).

    Ces dispositions ont eu le mérite de faire prendre conscience aux médecins du risque insidieux de perte de leur indépendance du fait de pratiques coutumières devenues au fil du temps plus conséquentes et davantage répréhensibles.

     3 - Procédés directs et indirects de publicité

    Ainsi qu'il est précisé aux articles 13, 19, 20, toute "réclame" est interdite, qu'elle émane du médecin lui-même ou des organismes auxquels il est lié directement ou indirectement, ou pour lesquels il travaille (établissements de santé, "centres", "instituts", etc.) (voir note [1]). Sa participation à l'information du public doit être mesurée (article13), et la personnalité du médecin, qui peut valoriser le message éducatif, doit s'effacer au profit de ce message sans s'accompagner de précisions sur son exercice (type, lieu, conditions).

    Sont par ailleurs interdits la distribution de tracts publicitaires, les annonces non motivées, les encarts publicitaires dans les journaux ou les annuaires. Le médecin "doit veiller à l'usage qui est fait de son nom, de sa qualité ou de ses déclarations" et "se garder de toute attitude publicitaire" (articles13 et 20).

    Le deuxième alinéa de cet article fait référence à l’aménagement (voir note [2]) et à la signalisation des locaux professionnels. Normalement le médecin peut avoir deux plaques professionnelles, l'une sur l'immeuble et l'autre à la porte du  local professionnel ; leur libellé doit respecter les obligations de l'article 81.

    Il arrive que le  local professionnel (dans une résidence, dans une cour intérieure) soit difficilement accessible sans complément d'information. Une signalisation complémentaire est autorisée sous forme de pancarte ou panonceau indiquant la direction du local à la porte duquel figure la plaque proprement dite. L'appréciation des dispositions locales peut être difficile et l'avis du conseil départemental pourra être utilement sollicité.

    Dans les lieux de vacances où une population séjourne temporairement (stations balnéaires ou de ski), ces indications se révéleront utiles mais doivent faire l'objet d'une concertation avec le conseil départemental (qu'il y ait un ou plusieurs cabinets médicaux, surtout s'il existe un groupe médical et des médecins autonomes).

    C'est dans ces mêmes contextes que pourrait être autorisée une signalisation incluse dans un panneau général d'informations aux résidents. Seul l'intérêt de la population doit être pris en compte.

    Le médecin doit également se garder de toute attitude publicitaire lorsqu’il présente son activité sur un site internet (voir note [3]). Dans un arrêt du 27 avril 2012 (CE 4e et 5e sous-section, Anthony, n°348259), le Conseil d’Etat a jugé, à propos du site internet d’un chirurgien-dentiste que si le site « peut comporter, outre les indications expressément mentionnées dans le code de la santé publique, des informations médicales à caractère objectif et à finalité scientifique, préventive ou pédagogique, il ne saurait, sans enfreindre les dispositions précitées de ce code et les principes qui les inspirent, constituer un élément de publicité et de valorisation personnelles du praticien et de son cabinet ». 

    Ainsi, un site internet qui met en avant le profil personnel du praticien, des réalisations opérées sur des patients, les soins qu'il prodigue et les spécialités dont il se recommande et excèdent de simples informations objectives constitue une présentation publicitaire du cabinet, constitutive d'un manquement aux devoirs déontologiques


    ([1]) Civ. 1ère , 5 juillet 2006, n°04-11564 : « Justifie légalement sa décision, une cour d’appel qui a constaté qu’une clinique avait eu recours à des procédés de publicité portant sur des actes médicaux et bénéficiant aux médecins exerçant en son sein puisqu’ils permettaient d’attirer la clientèle et ainsi mis en évidence le caractère déloyal du comportement de cette société à l’égard de l’ensemble des médecins soumis en vertu de l’article 19, alinéa 2, du code de déontologie médicale, à l’interdiction de tous procédés directs ou indirects de publicité. »

    ([2]) F. STEFANI, « Informations dans la salle d’attente du médecin », rapport adopté par le CNOM, session du 6 octobre 2000,

    ([3]) J. LUCAS, « La déontologie médicale sur le web santé – recommandations du CNOM », 4 juin 2008 ; « Charte de conformité ordinale applicable aux sites web des médecins », mai 2010, « Déontologie médicale sur le web : Livre blanc du CNOM », décembre 2011

  • Article 20 - Usage du nom et de la qualité de médecin

    Article 20 (article R.4127-20 du code de la santé publique)

    Le médecin doit veiller à l'usage qui est fait de son nom, de sa qualité ou de ses déclarations.
    Il ne doit pas tolérer que les organismes, publics ou privés, où il exerce ou auxquels il prête son concours utilisent à des fins publicitaires son nom ou son activité professionnelle.

    Cet article souligne le caractère personnel de la responsabilité du médecin, déjà évoqué dans les domaines différents mais voisins de la communication (article13) et de la dérive publicitaire (article 19) et repris plus loin, à propos de l'article 69.

    1 - Information individuelle publicitaire ou mensongère

    Elle apparaît dans de multiples circonstances, volontiers sous des formes apparemment anodines.

    L'information peut être exacte (cartons informant individuellement des généralistes de l'installation d'un spécialiste) mais être étendue (au public, à des associations) sans justification. Il en est de même lorsque les vacances, les absences font l'objet d'insertions dans les journaux et constituent en réalité des prétextes à faire parler de soi. Ces informations doivent être au préalable communiquées au conseil départemental de l'Ordre (article 82).

    L'information peut être exacte mais excessive en prenant une connotation publicitaire dans la forme : c'est le cas des plaques professionnelles dont les dimensions dépassent celles, traditionnelles, de 25 x 30 cm (article 81), se transforment en véritables panneaux, se multiplient sous divers prétextes ou s'accompagnent d'une signalisation abusive du local professionnel.

    Il en est de même du libellé de la plaque comme de celui des ordonnances (article 79) et de l'utilisation fréquente des titres non autorisés, car favorisant la confusion entre des diplômes faciles à acquérir et des qualifications réelles, ou se rapportant à des aspects parcellaires de l'activité. On retrouve les mêmes intentions publicitaires dans les annuaires (article 80), qu'il s'agisse de celui de France Télécom ou de tous autres destinés au public, et même de certains annuaires professionnels diffusés - quel qu'en soit le support (Internet, par exemple) - par des organismes intermédiaires (laboratoires pharmaceutiques, industriels de matériel professionnel, associations, syndicats). L'équité veut que chaque praticien soit traité de la même façon ; la publicité pour les uns a pour conséquence la discrimination des autres.

    Le nom, la qualité (qualifications, caractéristiques d'exercice, attributions, responsabilités, fonctions) ne peuvent être mentionnés sans l'accord de l'intéressé. Toute information inexacte est donc de sa responsabilité et, suivant sa nature ou son mode d'expression, devient fautive.

    L'information peut être mensongère, soit en elle-même (qualitativement ou quantitativement), soit parce qu'elle pérennise une situation ou des données qui se sont modifiées et n'ont pas été corrigées. Elle peut l'être également - le plus souvent de façon indirecte - par la présentation (document destiné à la clientèle, journal local, brochure municipale), par la globalisation à un groupe (associations professionnelles ou non, sociétés d'exercice) d'une donnée normalement limitée à un ou quelques membres. Elle peut l'être aussi par l'ambiguïté entrevue dans la rédaction des plaques ou ordonnances, ou l'usage abusif de certains termes ("centre" de ..., "collège" de..., "institut" de...).

    Il est donc indispensable que le médecin "veille à l'usage qui est fait de son nom, de sa qualité". Ce même souci doit le guider à propos de "ses déclarations" : les erreurs fautives se situent souvent dans un contexte où le médecin ne dispose pas suffisamment de moyens pour faire respecter par des tiers (organismes et établissements de santé notamment), l'obligation qui lui est faite par l'article 20.

    2 - Organismes, établissements de soins et publicité

    a) Publicité de l'organisme commercial

    Si des informations médicales de caractère général peuvent se révéler justifiées de la part d'établissements commerciaux, la publicité doit se limiter aux prestations commerciales (hôtelières, de confort).

    Dès que la publicité concerne les soins, elle interfère avec l'activité des médecins ou des professionnels de santé astreints à des règles déontologiques.

     Le médecin faisant l'objet d'une plainte ne  peut se borner à faire remarquer que la publicité  émane de l'organisme (établissement de santé,  centre de santé ou "institut" de remise en forme ou de  médecine esthétique) et non de lui.  Il ne doit pas tolérer que les organismes publics ou privés où il exerce ou auxquels il prête son concours utilisent à des fins publicitaires son nom ou son activité.

     Il y a donc intérêt  à ce que cette obligation figure dans les contrats d'exercice - dont les conseils départementaux ont la charge de surveiller le caractère déontologique - et ne pourra que recueillir l'avis favorable des membres des commissions médicales d'établissement.

    b) Prétexte commercial à la publicité plus ou moins personnalisée

    Les circonstances dans lesquelles le médecin bénéficie plus ou moins consciemment de la publicité de l'établissement ne sont pas rares :

    • Inauguration de services ou de plateaux techniques (scanner, lithotripteur, angiographie numérisée...).
    • Journées "portes ouvertes".
    • Brochures ou tracts sur les établissements. Ces publicités se font en général par l'intermédiaire des médias qui citent le nom des médecins (information), mais font volontiers état de techniques dites personnelles, avec photographies à l'appui, commentaires laudatifs dont le rédacteur n'aurait pu faire état sans le concours du médecin (publicité). Une publicité involontaire du médecin devra entraîner de sa part une protestation, éventuellement par lettre recommandée avec avis de réception, dont il pourra toujours faire état pour se justifier en cas de plainte.
    • Revues ou informations publiées sur Internet ou les réseaux sociaux par les établissements. Dans celles-ci sont habilement mélangées des informations de caractère hôtelier, des réclames à caractère évidemment commercial (prothèses auditives, matériel pour handicapés physiques, lunettes et orthèses diverses, établissements bancaires, installations hospitalières, matériel industriel sanitaire). Sont intercalés des articles médicaux concernant souvent des techniques modernes et intéressant patients et médecins, présentés comme éléments de formation médicale continue, articles impliquant plus ou moins l'activité des praticiens de l'établissement.
       

    L'appréciation du caractère publicitaire prend en compte deux données :

    • la volonté publicitaire utilisant l'information comme prétexte ;
    • la notion de proportionnalité, lorsque dans le message transmis, l'objectif publicitaire dépasse manifestement l'information elle-même.
  • Article 21 - Délivrance de médicaments

    Article 21 (article R.4127-21 du code de la santé publique)

    Il est interdit aux médecins, sauf dérogations accordées dans les conditions prévues par la loi, de distribuer à des fins lucratives des remèdes, appareils ou produits présentés comme ayant un intérêt pour la santé.
    Il leur est interdit de délivrer des médicaments non autorisés.

    Les médecins n'ont pas le droit de vendre des produits ou des appareils, à plus forte raison si leur intérêt pour la santé n'a pas été prouvé, sauf ceux qui bénéficient de l’autorisation d’exercer la propharmacie. 

    L'article L.5125-2, 1er alinéa du code de la santé publique, relatif à l'exercice de la pharmacie, s'exprime ainsi :

     « L'exploitation d'une officine est incompatible avec l'exercice d'une autre profession, notamment avec celle de médecin, sage-femme, dentiste, même si l'intéressé est pourvu des diplômes correspondants ».

    1 - Médecins propharmaciens

    L'article 21 ajoute, cependant "sauf dérogations accordées dans les conditions prévues par la loi". Cette réserve vise les médecins propharmaciens qui, dans des conditions expressément limitées, sont autorisés à délivrer, eux-mêmes, des médicaments à leurs patients.

    La dérogation est définie à l’article L.4211-3 du code de la santé publique (voir note [1]).

    2 - Médicaments non autorisés

    Ce même article 21 interdit aux médecins de délivrer des médicaments non autorisés.

    Jusqu'au XVIIIème siècle, la délivrance de remèdes secrets était chose courante. Ce n'est que sous le premier Empire qu'apparaissent les premières législations restreignant le commerce des remèdes secrets aux seuls produits reconnus exempts de nocivité par une commission de spécialistes.

    L'article L.5121-8 du code de la santé publique prévoit que : « Toute spécialité pharmaceutique ou tout autre médicament fabriqué industriellement… ainsi que tout générateur, trousse ou précurseur qui ne fait pas l'objet d'une autorisation de mise sur le marché délivrée par l’Union européenne en application du règlement (CE) n° 726/2004 du Parlement Européen et du Conseil, du 31 mars 2004, doit faire l'objet avant sa mise sur le marché ou sa distribution à titre gratuit, d'une autorisation de mise sur le marché délivrée par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. Cette autorisation peut être assortie de conditions appropriées, notamment l’obligation de réaliser des études de sécurité ou d’efficacité post-autorisation »

    Cette autorisation, délivrée pour 5 ans, est renouvelable par période quinquennale ou sans limitation de durée.

    L’interdiction posée à l’article 21 porte sur la délivrance des médicaments n'ayant pas obtenu d'autorisation officielle (voir article 8).

    Toutefois, des prescriptions hors autorisation de mise sur le marché (AMM) peuvent être effectuées en l’absence de médicaments appropriés à l’état du patient disposant d’une AMM ou d’une autorisation temporaire d’utilisation (article L. 5121-12-1 du code de la santé publique).

    Le médecin doit :

    • le mentionner expressément sur l’ordonnance ;
    • informer le patient du défaut d’AMM et de l’absence d’alternative médicamenteuse appropriée ;
    • l’informer des risques et bénéfices attendus du médicament et des conditions de sa prise en charge par l’assurance maladie.
       

    Cette prescription hors AMM doit être justifiée dans le dossier médical du patient.

    A titre exceptionnel, l’article L.5121-12 du code de la santé publique permet, sous certaines conditions, l’utilisation de médicaments non autorisés destinés à traiter des maladies graves ou rares, en l'absence d’alternative thérapeutique, lorsque la mise en œuvre du traitement ne peut pas être différée.
     


    ([1]) Article L.4211-3 du code de la santé publique: « Les médecins établis dans une commune dépourvue d'officine de pharmacie peuvent être autorisés par le directeur général de l'agence régionale de santé, qui en informe le représentant de l'Etat dans le département, à avoir chez eux un dépôt de médicaments, et à délivrer aux personnes auxquelles ils donnent leurs soins, les médicaments remboursables et non remboursables, ainsi que les dispositifs médicaux nécessaires à la poursuite du traitement qu'ils ont prescrit, selon une liste établie par le ministre chargé de la santé, après avis du Conseil national de l'ordre des médecins, et du Conseil national de l'ordre des pharmaciens. Cette autorisation ne doit être accordée que lorsque l'intérêt de la santé publique l'exige.

    Elle mentionne les localités dans lesquelles la délivrance des médicaments au domicile du malade est également autorisée.

    Elle est retirée dès qu'une officine de pharmacie est créée dans une des communes mentionnées dans l'autorisation.

    Les médecins bénéficiant d'une autorisation d'exercer la propharmacie sont soumis à toutes les obligations législatives et réglementaires incombant aux pharmaciens.

    Ils ne peuvent en aucun cas avoir une officine ouverte au public. Ils doivent ne délivrer que les médicaments prescrits par eux au cours de leur consultation. »

  • Article 22 - Dichotomie

    Article 22 (article R.4127-22 du code de la santé publique)

    Tout partage d'honoraires entre médecins est interdit sous quelque forme que ce soit, hormis les cas prévus à l' article 94 .
    L'acceptation, la sollicitation ou l'offre d'un partage d'honoraires, même non suivies d'effet, sont interdites.

    Les articles 22, 23 et 24 traitent d'implications financières répréhensibles dans la pratique médicale.

    1 - L'article 22 condamne la dichotomie, c'est-à-dire le partage clandestin des honoraires entre médecins.

    Dans les rédactions successives du code de déontologie, l'Ordre des médecins a toujours interdit la pratique de la dichotomie. Il l'affirme encore dans l'article 24 en interdisant toute commission à quelque personne que ce soit.

    La pratique de la dichotomie est inadmissible car elle restreint l'indépendance professionnelle du médecin nécessaire à l'expression du droit des patients qui ne disposeraient plus du libre choix de leur praticien.

    2 - La dichotomie se révèle sous des aspects variés allant de la ristourne au pourcentage sur les honoraires, aux cadeaux, à l'obtention d'avantages divers.

    Du fait de sa clandestinité, elle est difficile à prouver mais la dichotomie peut être suspectée à certains signes, tels que distribution d'enveloppes pré-identifiées pour tel radiologue ou tel directeur de laboratoire d'analyses médicales.

    Elle constitue dans tous les cas une concurrence déloyale et accentue l'hégémonie de certains médecins, gênant toute nouvelle installation.

    Elle est enfin à l'origine de revenus non soumis à l'impôt sur le revenu et source de fraude fiscale.

    Le médecin qui propose le partage des honoraires et celui qui l'accepte sont aussi répréhensibles l'un que l'autre.

    Même non suivie de versements, la proposition de partage doit être sanctionnée.

    3 - C'est bien la dichotomie que vise le présent article, et non la "mise en commun des honoraires" de certains cabinets de groupe ou associations de médecins, dans les cas où cette mise en commun est autorisée aux conditions fixées par l'article 94.

    Les sociétés interprofessionnelles de soins ambulatoires (SISA) constituent un cas particulier (article L. 4041 et suivants du code de la santé publique).

    Dans tous les autres cas, l'Ordre des médecins doit faire preuve d'une grande rigueur en appréciant les termes des contrats liant praticiens de même discipline et mettant leurs honoraires en commun.

  • Article 23 - Compérage

    Article 23 (article R.4127-23  du code de la santé publique)

    Tout compérage entre médecins, entre médecins et pharmaciens, auxiliaires médicaux ou toutes autres personnes physiques ou morales est interdit.

    Cet article, qui vise les médecins et les autres professionnels de santé, interdit toute entente illicite qui entacherait la liberté et l'indépendance professionnelle des médecins et porterait ainsi atteinte au libre choix des patients.

    Cet article concerne toutes les formes de compérage, notamment avec d'éventuels pourvoyeurs et "rabatteurs" de clientèle.

    Les  professionnels de santé, installés dans les mêmes locaux, qu'un médecin ont un statut de salarié du médecin ou un exercice libéral. Dans cette dernière éventualité, le médecin se doit d'éviter le risque de compérage, d'autant plus que le double statut libéral pourrait le favoriser. Cette situation devient encore plus exposée lorsqu'il s'agit de deux conjoints exerçant leur profession respective sans contrat.

    Il peut y avoir compérage sans versement d'argent, mais avec coalition d'intérêts. Le  Conseil d'Etat (note [1]) a jugé que la pratique consistant, pour un médecin, à attester et facturer, à titre habituel, l'exécution d'actes en réalité effectués par un tiers, en l'espèce un chirurgien-dentiste, constitue une pratique de "compérage" au sens des dispositions du code de déontologie médicale : « Le caractère habituel de cette activité est de nature à autoriser la qualification de compérage de celle-ci sans qu'il soit besoin de rechercher si le requérant en retirait un bénéfice ».


    ([1]) Conseil d'Etat, 22 mars 2000, n°195615

  • Article 24 - Avantages injustifiés

    Article 24 (article R.4127-24 du code de la santé publique)

     Sont interdits au médecin :

    •  tout acte de nature à procurer au patient un avantage matériel injustifié ou illicite ;
    • toute ristourne en argent ou en nature, toute commission à quelque personne que ce soit ;
    • la sollicitation ou l'acceptation d'un avantage en nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d'une façon directe ou indirecte, pour une prescription ou un acte médical quelconque.

    Cet article précise diverses interdictions faites au médecin, quant à des avantages matériels illicites que pourrait lui procurer son exercice (voir note [1]).

    1 - Si le médecin doit faire bénéficier le patient de tous les avantages sociaux auxquels celui-ci a droit (article 50), il ne peut établir des certificats ni accorder des faveurs qui le feraient bénéficier d'avantages injustifiés. La rédaction de faux certificats est d'ailleurs réprimée par le code pénal (article 441-2).

    2 - Le deuxième alinéa élargit à tout autre intervenant les interdictions déjà évoquées dans l'article précédent à propos des professions médicales et paramédicales.

    3 - Le développement du "marketing" au sein des entreprises, leurs méthodes de communication, leurs moyens de sollicitation, la concurrence des firmes dans l'information des médecins sur des "créneaux porteurs" commercialement, la concurrence entre les médecins sont autant de facteurs qui ont exposé certains à perdre leur indépendance et, à leur suite, d'autres à manquer de rigueur, de discernement, mettant en cause, souvent par défaut plus que par intention, la respectabilité du corps médical en général.

    Tout comme le fait de recevoir, la sollicitation est interdite. De même l'avantage est précisé : "en nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d'une façon directe ou indirecte."

     4 - S’agissant plus précisément des relations avec les entreprises pharmaceutiques, l’article L.4113-6, 1er alinéa du code de la santé publique interdit  pour les médecins et les étudiants en médecine de « recevoir des avantages en nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d'une façon directe ou indirecte, procurés par des entreprises assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale. Est également interdit le fait, pour ces entreprises, de proposer ou de procurer ces avantages… ».

    Toutefois, les relations entre les médecins ou les étudiants en médecine et les  entreprises pharmaceutiques, qu’il s’agisse d’avantages prévus par convention ayant pour objet des activités de recherche ou d’évaluation scientifique, de l’hospitalité offerte à l’occasion de  manifestations à caractère professionnel et scientifique, de participation au financement d’actions de formation,  sont autorisées sous certaines conditions :- nécessité de la transparence de la relation (qu'il s'agisse d’une manifestation promotionnelle ou à caractère professionnel et scientifique ou d'activités de recherche ou d’évaluation scientifique) ;

    • rédaction d'une convention ;
    • soumission préalable à l'Ordre pour avis ;
    • caractère raisonnable et accessoire de l'avantage consenti.
       

    Les infractions au premier alinéa de l’article L. 4113-6 du code de la santé publique sont passibles d'une amende de 75 000 euros et d'un emprisonnement de deux ans, et, éventuellement, d'une peine d'interdiction d'exercer la profession pendant une période pouvant atteindre dix ans (article L. 4163-2 du code de la santé publique).

    Le législateur a ainsi voulu conforter l'indépendance professionnelle des médecins en rendant transparentes leurs relations avec les industriels.

    En  associant l'Ordre des médecins à l'application de la loi, il a renforcé le sens et le domaine de la mission générale qu'il lui a confiée.


    ([1]) Article L.4113-8 du code de la santé publique :« Sauf les cas mentionnés aux articles L.4211-3 et L.5125-2, est interdit le fait, pour les praticiens mentionnés au présent livre, de recevoir, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, des intérêts ou ristournes proportionnels ou non au nombre des unités prescrites ou vendues, qu’il s’agisse de médicaments, d’appareils orthopédiques ou autres, de quelque nature qu’ils soient.

    Sont interdits la formation et le fonctionnement de sociétés dont le but manifeste est la recherche des intérêts ou ristournes définis ci-dessus, et revenant aux individus eux-mêmes ou au groupe constitué à cet effet, ainsi que l’exercice pour le même objet de la profession de pharmacien et de celles de médecin, chirurgien-dentiste ou de sage-femme.

    Est également interdit la vente de médicaments réservés d’une manière exclusive, et sous quelque forme que ce soit, aux médecins bénéficiaires de l’autorisation prévue à l’article L.4211-3. »

  • Article 25 - Locaux commerciaux

    Article 25 (article R.4127-25 du code de la santé publique)

    Il est interdit aux médecins de dispenser des consultations, prescriptions ou avis médicaux dans des locaux commerciaux ou dans tout autre lieu où sont mis en vente des médicaments, produits ou appareils qu'ils prescrivent ou qu'ils utilisent.
     

    Un risque évident de compérage explique cet article qui interdit à un médecin d'exercer son art dans des locaux commerciaux, instituts de beauté et de remise en forme, etc.

    Le développement de "centres" où sont délivrés des conseils d'hygiène, d’esthétique, de diététique ou proposée une "remise en forme", justifie la mise en garde contre une activité de médecin prescripteur ou de consultant.

    Souvent ces structures commerciales attirent le client en faisant état d'une surveillance médicale ou de conseils médicaux.

    Si l'exercice médical est prohibé dans des locaux commerciaux, un médecin peut s'installer dans des locaux dépendants d'un centre commercial. Toutefois, il doit   veiller à une parfaite indépendance et à une accessibilité permanente de son local professionnel (cabinet), même aux heures de fermeture du centre.

    De plus, le médecin devra être très vigilant quant à la signalisation de son  local professionnel ; elle doit permettre à la patientèle d'être informée, sans pour autant constituer une dérive publicitaire.

  • Article 26 - Cumul d'activités

    Article 26 (article R.4127-26 du code de la santé publique)

    Un médecin ne peut exercer une autre activité que si un tel cumul est compatible avec l'indépendance et la dignité professionnelles et n'est pas susceptible de lui permettre de tirer profit de ses prescriptions ou de ses conseils médicaux.

    Cet article précise les conditions du cumul de l'exercice médical avec une autre activité voisine du domaine de la santé, exposant à ce qu'on pourrait appeler un "autocompérage".

    1- Les professions exposant à "l’autocompérage" ne peuvent être exercées conjointement avec la médecine, par exemple :

    • fabricant ou vendeur d'appareils médicaux ;
    • opticien ;
    • ambulancier ou dirigeant d'une société d'ambulances ;
    • propriétaire ou gérant  d'un hôtel pour curistes, d'une salle de culture physique, d'un établissement de soins, d'un centre de conseils d’esthétique, d'hygiène ou de diététique, d'un centre de remise en forme, de spa, d'un cabinet de massage, d'institut de beauté, etc.
       

    2-  S’agissant de l’exercice en SEL, l’article R.4113-13 du code de la santé publique  interdit « la détention directe ou indirecte de parts ou d’actions représentant tout ou partie du capital social à toute personne physique ou morale exerçant sous quelque forme que ce soit :

    a) soit une autre profession médicale ou paramédicale ;

    b) soit la profession de pharmacien d'officine ou de vétérinaire, soit la fonction de directeur ou de directeur adjoint de laboratoire d’analyses de biologie médicale ;

    c) soit l'activité de fournisseur, distributeur ou fabricant de matériel ayant un lien avec la profession médicale et de produits pharmaceutiques, ou celle de prestataire de services dans le secteur de la médecine ».

    3 -  Concernant l’activité de dirigeant d’une société commerciale  dont  l’objet social est en rapport avec la médecine ou l'exercice médical, le Conseil d'Etat a jugé qu’un médecin, président-directeur général d'une société anonyme gestionnaire d'une maison de repos et de convalescence, qui exerce simultanément dans cet établissement une activité de médecin salarié, n'est pas placé, pour l'exercice de cette activité, dans une situation de dépendance contraire au principe rappelé par  cet article (CE 13/05/1994, req. n°123026), Le médecin, qui assure un mandat social, reste soumis à la déontologie médicale et en cas d’infraction, relève de la juridiction disciplinaire.

    4- Concernant l’activité de médecin DIM, le Conseil d’Etat a jugé qu’« il résulte des dispositions des articles L. 6113-7, R. 6113-4, R. 6113-6 et R. 6113-10 du code de la santé publique relatives au médecin responsable de l'information médicale dans les établissements de santé, combinées avec celles des articles R. 4127-5 et R. 4127-26 du même code selon lesquelles, respectivement, « le médecin ne peut aliéner son indépendance professionnelle sous quelque forme que ce soit » et « un médecin ne peut exercer une autre activité que si un tel cumul est compatible avec l'indépendance et la dignité professionnelles », que, alors même qu'aucun texte ne prévoit l'exercice à titre exclusif des fonctions de médecin responsable de l'information médicale d'un établissement de santé, l'exercice de ces fonctions est incompatible avec celles de dirigeant et associé de ce même établissement ». (CE 23/12/2011, req. n°339529).

  • Article 27 - Mandat électif

    Article 27 (article R.4127-27 du code de la santé publique)

    Il est interdit à un médecin qui remplit un mandat électif ou une fonction administrative d'en user pour accroître sa clientèle.


     

    C'est une invitation à une attitude prudente et scrupuleuse pour un médecin qui se trouve chargé d'un mandat, en particulier politique ou syndical : il ne doit pas mettre sa fonction au service de sa réussite professionnelle. Il y aurait confusion ou abus de pouvoir quant à son mandat public et risque de pression inadmissible sur les  patients.

    En sens inverse, et bien que le code ne s'exprime pas sur ce point, on peut penser qu'il n'est pas bon non plus qu'un médecin compte sur sa patientèle pour se faire élire......

  • Article 28 - Certificat de complaisance

    Article 28 (article R.4127-28 du code de la santé publique)

    La délivrance d'un rapport tendancieux ou d'un certificat de complaisance est interdite.

    La signature d'un médecin bénéficie par principe d'un grand crédit, et toute erreur ou compromission de sa part fait, notamment au corps médical entier, un tort considérable.

    En cas de fraude ou de déclaration mensongère, les sanctions encourues devant les tribunaux sont sévères comme le prévoit l’article 441-7 du code pénal (voir note [1]).

    Le médecin fautif est passible en outre de sanctions disciplinaires de la part des juridictions ordinales.

    Il faut souligner plusieurs points :

    •  Le médecin ne doit certifier que ce qu'il a lui-même constaté. Ont été sanctionnés des médecins dont les certificats avaient été rédigés sans examen du patient.
    • Si le certificat rapporte les dires de l'intéressé ou d'un tiers, le médecin doit s'exprimer sur le mode conditionnel et avec la plus grande circonspection ; le rôle du médecin est en effet d'établir des constatations médicales, non de recueillir des attestations ou des témoignages et moins encore de les reprendre à son compte.
    • Un certificat médical ne doit pas comporter d'omission volontaire dénaturant les faits. Cela suppose un examen et un interrogatoire préalables soigneux.
    • Il y a des demandes de certificat que le médecin doit rejeter. S'il est tenu de délivrer à son patient un certificat des constatations médicales qu'il est en mesure de faire, il reste libre du contenu du certificat et de son libellé qui engagent sa responsabilité.

    ([1]) Article 441-7 du code pénal : « Indépendamment des cas prévus au présent chapitre, est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende, le fait :

    1°) d'établir une attestation ou un certificat faisant état de faits matériellement inexacts ;
    2°) de falsifier une attestation ou un certificat originairement sincère ;
    3°) de faire usage d'une attestation ou d'un certificat inexact ou falsifié.

    Les peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et à 45 000 euros d'amende lorsque l'infraction est commise en vue de porter préjudice au Trésor public ou au patrimoine d'autrui. »

  • Article 29 - Fraude et abus de cotations

    Article 29 (article R.4127-29 du code de la santé publique)

    Toute fraude, abus de cotation, indication inexacte des honoraires perçus et des actes effectués sont interdits.

    Cet article vise les irrégularités commises sur les feuilles d’assurance- maladie. La jurisprudence de la section des assurances sociales montre que des sanctions, ont été prises pour des inscriptions d'actes médicaux fictifs, des erreurs volontaires dans la désignation et la cotation des actes, des inexactitudes  sur le montant des honoraires perçus. Quelles que soient les difficultés d’application de réglementations parfois complexes, ce sont des malhonnêtetés qui, toutes les fois qu'elles sont commises, nuisent à l'ensemble du corps médical.

    Sont aussi réprimées, en matière de législation sociale, les fausses attestations en vue de l'attribution d'avantages indus, par les articles L.377-5 et L.471-4 du code de la sécurité sociale (voir note [1]).
     


    ([1]) Article L.377-5 du code de la sécurité sociale : «  Le jugement prononçant une des peines prévues au présent chapitre contre un praticien peut également prononcer son exclusion des services des assurances sociales.

    Les médecins, chirurgiens, sages-femmes et pharmaciens peuvent être exclus des services de l'assurance en cas de fausse déclaration intentionnelle. S'ils sont coupables de collusion avec les assurés, ils sont passibles en outre d'une amende de 3 750 euros et d'un emprisonnement de six mois ou l'une de ces deux peines seulement, sans préjudice de plus fortes peines s'il y échet »..

    Article L.471-4 du code de la sécurité sociale :  « Est puni d'une amende de 12 000 euros et d'un emprisonnement de trois mois quiconque par menaces, don, promesse d'argent, ristourne sur les honoraires médicaux ou fournitures pharmaceutiques, aura attiré ou tenté d'attirer les victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles dans une clinique ou cabinet médical ou officine de pharmacie et aura ainsi porté atteinte à la liberté de la victime de choisir son médecin ou son pharmacien.

    Est puni des mêmes peines sans préjudice de celles prévues à l’article 441-7 du code pénal, tout médecin ayant, dans les certificats délivrés pour l'application du présent livre, sciemment dénaturé les conséquences de l'accident ou de la maladie.

    Est puni des mêmes peines sans préjudice de celles prévues aux articles 434-13 à 434-15 du code pénal, quiconque par promesses ou menaces, aura influencé ou tenté d'influencer une personne témoin d'un accident du travail à l'effet d'altérer la vérité. »

    (Les articles 434-13 à 434-15 du code pénal concernent les témoignages mensongers et la subornation de témoin).

  • Article 30 - Complicité d'exercice illégal

    Article 30 (article R.4127-30 du code de la santé publique)

    Est interdite toute facilité accordée à quiconque se livre à l'exercice illégal de la médecine.

    L'exercice illégal de la médecine est celui pratiqué par des personnes n'ayant pas un titre professionnel de médecin spécialiste reconnu comme ouvrant droit à l’exercice de la médecine, ou par des médecins non inscrits à l'Ordre ou radiés du tableau de l'Ordre.

    Ces personnes tombent sous le coup de la loi qui réprime l'exercice illégal de la médecine  (voir note [1]). Elles ne sont pas soumises à la juridiction professionnelle, mais il appartient aux autorités compétentes de faire respecter la loi.

    L’exercice illégal de la médecine est puni des sanctions prévues à l’article L.4161-5 du code de la santé (voir note [2]).

    L'activité des  professionnels de santé est définie et limitée par la réglementation qui les concerne (notamment articles R.4311-5 et suivants du code de la santé publique pour les infirmiers ; articles R.4321-1 et suivants pour les masseurs-kinésithérapeutes). Si ces limites sont dépassées, ces professionnels se rendent coupables d'exercice illégal.

    L'article 30 vise les médecins qui se rendraient complices  de personnes exerçant illégalement la médecine :

    • en leur adressant des patients, en travaillant avec eux, par exemple en participant à l'examen des patients "soignés",
    • en recevant les patients en présence d'un radiesthésiste, d'un magnétiseur ou d'un quelconque "guérisseur",
    • en allant eux-mêmes leur demander des soins.
       

    Le fait d'exercer "sous contrôle médical" ne fait pas disparaître le délit d'exercice illégal de la médecine. Le médecin qui s'y prête se rend coupable de complicité.

    Les médecins radiologues, biologistes... ne peuvent adresser des résultats médicaux à une personne exerçant illégalement la médecine.

    Dans certains pays de l'Union Européenne, des personnes dépourvues de diplôme de médecin sont autorisées à avoir une activité de soins. En l'absence d’harmonisation au niveau européen d'une activité professionnelle de soins, reconnue dans certains Etats membres, comme la profession de « heilpratiker » («guérisseur ») en Allemagne, aucune disposition en droit européen ne s'oppose à ce que la législation nationale d’un État membre réserve aux seuls titulaires de diplômes de médecin « le droit d'effectuer des diagnostics médicaux et de prescrire des traitements destinés à soigner des maladies ou à remédier à des troubles physiques ou psychiques dans un objectif de protection de la santé publique » (note [3]). 


    ([1]) Article L.4161-1 du code de la santé publique :  « Exerce illégalement la médecine :

    1° Toute personne qui prend part habituellement ou par direction suivie, même en présence d'un médecin, à l'établissement d'un diagnostic ou au traitement de maladies congénitales ou acquises, réelles ou supposées, par actes personnels, consultations verbales ou écrites ou par tous autres procédés quels qu'ils soient, ou pratique l'un des actes professionnels prévus dans une nomenclature fixée par arrêté du ministre chargé de la santé pris après avis de l'Académie nationale de médecine, sans être titulaire d'un diplôme, certificat ou autre titre mentionné à l'article L.4131-1 et exigé pour l'exercice de la profession de médecin, ou sans être bénéficiaire des dispositions spéciales mentionnées aux articles L. 4111-2 à L. 4111-4, L.4111-7, L.4112-6, L.4131-2 à L.4131-5 ;

    2° (...)

    3° Toute personne qui, munie d'un titre régulier, sort des attributions que la loi lui confère, notamment en prêtant son concours aux personnes mentionnées aux 1° et 2°, à l'effet de les soustraire aux prescriptions du présent titre ;

    4° Toute personne titulaire d'un diplôme, certificat ou tout autre titre de médecin qui exerce la médecine sans être inscrite à un tableau de l'Ordre des médecins institué conformément au chapitre II du titre 1er du présent livre ou pendant la durée de la peine d'interdiction temporaire prévue à l'article L.4124-6 à l'exception des personnes mentionnées aux articles L.4112-6 et L.4112-7 ;

    5° Tout médecin mentionné à l’article L.4112-7 qui exécute des actes professionnels sans remplir les conditions ou satisfaire aux obligations prévues audit article.

    Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux étudiants en médecine ni aux sages-femmes, ni aux pharmaciens biologistes pour l’exercice des actes de biologie médicale, ni aux infirmiers ou gardes-malades qui agissent comme aides d'un médecin ou que celui-ci place auprès de ses malades, ni aux personnes qui accomplissent dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat pris après avis de l'Académie nationale de médecine, les actes professionnels dont la liste est établie par ce même décret. »

    ([2]) Article L.4161-5 du code de la santé publique :« L'exercice illégal de la profession de médecin, de chirurgien-dentiste ou de sage-femme est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.

    Les personnes physiques encourent également les peines complémentaires suivantes :

    a) L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée, dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal ;

    b) La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit, conformément à l'article 131-21 du code pénal ;

    c) L'interdiction définitive ou pour une durée de cinq ans au plus d'exercer une ou plusieurs professions régies par le présent code ou toute autre activité professionnelle ou sociale à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, suivant les modalités prévues par l'article 131-27 du code pénal ;

    d) L'interdiction d'exercer pour une durée de cinq ans l'activité de prestataire de formation professionnelle continue au sens de l'article 6313-1 du code du travail.

    Le fait d'exercer l'une de ces activités malgré une décision judiciaire d'interdiction définitive ou temporaire est puni des mêmes peines ».

    ([3]) CJUE (cinquième chambre), 11 juillet 2002- Affaire C-294/00

  • Article 31 - Déconsidération de la profession

    Article 31 (article R.4127-31 du code de la santé publique)

    Tout médecin doit s'abstenir, même en dehors de l'exercice de sa profession, de tout acte de nature à déconsidérer celle-ci.

    Cet article est un complément et un corollaire de l'article 3.

    Il est important que le patient et plus généralement le public puisse faire confiance au corps médical et ne puisse douter de sa moralité et de son honnêteté.

    Les juridictions ordinales font une application assez fréquente de cet article :

    •  soit qu'elles qualifient directement tel ou tel agissement du praticien qui leur est déféré d'acte de nature à déconsidérer la profession médicale, justifiant la condamnation de son auteur à une sanction disciplinaire,
    •  soit qu'ayant relevé une infraction à une autre prescription plus précise du code de déontologie, elles jugent que, dans les circonstances de l'affaire, le comportement du médecin fautif a été en outre de nature à déconsidérer la profession médicale, ce qui aggrave sa responsabilité et pèse d'autant sur l'évaluation de la peine encourue.
       

    Les actes de nature à déconsidérer la profession médicale peuvent avoir été commis par un médecin aussi bien dans l'exercice de sa profession qu'en dehors de celui-ci, dans sa vie privée ou dans l'accomplissement d'autres activités, dès lors qu'ils ont été l'objet d'une certaine publicité ou qu'ils risquaient de l'être.

    Dans l'exercice de sa profession, c'est surtout dans ses rapports avec les patients que le médecin peut être amené à commettre de tels actes : manquement aux devoirs d'honnêteté, comportements ou propos scandaleux, grossièretés, attentats à la pudeur, exigences financières abusives, acte de cupidité... Mais peut être regardé aussi comme déconsidérant la profession médicale, le médecin qui se comporte en charlatan ou qui fait commerce de sa fonction.

    Hors de son exercice professionnel, le médecin se doit de garder un comportement en rapport avec la dignité de ses fonctions. Il déconsidère la profession médicale s'il se signale à l'attention du public par une intempérance notoire, une conduite en état d'ivresse, un délit de fuite, des abus de confiance ou la violation grave d'engagements contractuels, notamment s'il s'abstient systématiquement de régler ses dettes...

    Enfin, si le médecin exerce d'autres activités que la médecine, celles-ci ne doivent avoir rien d'immoral ou de suspect, notamment quant à la probité et aux bonnes mœurs.

    Chaque médecin doit se sentir personnellement responsable de la considération du corps médical.

  • Devoirs envers les patients (art 32 à 55)

  • Article 32 - Qualité des soins

    Article 32 (article R.4127-32 du code de la santé publique)

    Dès lors qu'il a accepté de répondre à une demande, le médecin s'engage à assurer personnellement au patient des soins consciencieux, dévoués et fondés sur les données acquises de la science, en faisant appel, s'il y a lieu, à l'aide de tiers compétents.

    1 - Engagement du médecin

    Le médecin n’est pas tenu, sauf urgence, de répondre à toute demande (article 47) mais s'il a accepté de soigner une personne, il est lié au patient par son engagement. C'est ce qu'on appelle en matière de responsabilité civile le "contrat de soins". L'engagement du médecin consiste, selon les termes de la Cour de Cassation (arrêt Mercier du 20 mai 1936), à donner des soins "non pas quelconques, mais consciencieux, attentifs et, réserve faite de circonstances exceptionnelles, conformes aux données acquises de la science".

    Cette théorie du "contrat de soins", généralement admise en France, exprime l'entente tacite qui s'établit entre le patient qui se confie et le médecin qui s'engage. Elle s’applique quelle que soit la situation du médecin.

    En termes de morale professionnelle, le médecin hospitalier ou salarié au même titre que le médecin libéral doit se considérer comme le médecin de chacun des patients qui lui sont confiés ou se confient à lui, plus que comme "médecin de l'établissement".

    2 - Exercice personnel

    Le médecin s'engage à assurer personnellement les soins.

    L'exercice de la médecine est personnel (article 69). Le médecin qui a accepté de soigner un patient agit en toute indépendance et engage sa responsabilité personnelle de même que le remplaçant (art.65), le médecin collaborateur (article 87) ou l’assistant du médecin (article 88).

    Mais, si le cas l'exige, le médecin s'entourera des conseils de spécialistes ou demandera l'aide de certains de ses confrères. Il peut, en accord avec le patient, adresser celui-ci à un confrère libéral ou hospitalier, de pratique privée ou publique dont l'intervention est indiquée (infra).

    3 - Qualité des soins

    Ces soins seront consciencieux et dévoués. La conscience professionnelle du médecin implique attention minutieuse, disponibilité et compétence, ainsi qu'une juste appréciation des limites de cette compétence. Elle est conscience aux deux sens du terme : perception lucide d'une situation (médecin conscient) et honnêteté du comportement (médecin consciencieux) : "Fais pour autruy ce que tu voudrois qu'on fist en ton endroict" disait Ambroise Paré.

    Le dévouement est l'attachement aux besoins de soins du patient qui commandent le comportement du médecin.

    Le médecin doit prévenir le patient ou l'entourage des symptômes qui peuvent exiger son rappel. Toute maladie à caractère évolutif doit être suivie de près.

    Les technologies de l’information et de la communication (TIC) sont utiles à cette fin. Mais le médecin doit en connaître les usages et les limites (voir note [1]).

    Ces soins sont fondés sur les données acquises de la science. C'est la principale limite à la liberté du médecin. Elle est évoquée dès l'article 8 à propos de la "liberté de prescription". Elle l'est à nouveau et a contrario par l'article 39 qui prohibe les procédés "insuffisamment éprouvés" ou "non autorisés".

    Ces "données acquises de la science" ne représentent pas pour autant des références claires, simples, indiscutables et définitives. Le propre de la science est d'être exposée à contradiction et de pouvoir évoluer. Avec la liberté d'expression et la prolifération de travaux scientifiques et de publications correspondantes, cette évolution donne parfois l'impression d'incertitude laissant la place à toute liberté d'interprétation et d'action. Il y a là une source de malentendu, de confusion et pour tout dire de désordre dont la persistance n'est pas souhaitable.

    Des efforts ont été faits et se poursuivent pour préciser les données sur lesquelles il y a accord (quitte à les revoir en cas de nouveaux progrès), celles sur lesquelles une orientation peut être dégagée sous réserve et celles qui restent franchement incertaines. Les conférences de consensus, l'Agence nationale pour le développement de l'évaluation médicale (ANDEM) et la Haute Autorité de Santé (HAS) s’efforcent d'opérer avec rigueur ces distinctions nécessaires pour doter les médecins de repères objectifs et indépendants, sous forme de protocoles, de  recommandations, de conclusions de conférences de consensus, etc.

     Pourtant,  cette science médicale ne doit pas se voir attribuer une portée absolue. Elle donne des indications générales guidant le médecin face à un patient particulier et n'impose pas qu'on les applique sans esprit critique (voir note [2]). Cela signifie qu'elles seront suivies simplement dans la plupart des cas, tandis que pour les autres patients le médecin s'en inspirera pour personnaliser une conduite à tenir en y apportant les nuances de l'art médical. Ces nuances ne sont pas le fruit d'une inspiration personnelle extemporanée, elles doivent pouvoir être justifiées sur des critères objectifs.

    Le médecin doit faire appel, s'il y a lieu, à l'aide de tiers compétents. Quelles que soient sa formation et ses modalités d'exercice, il peut avoir besoin de faire appel à d'autres médecins, à des spécialistes, à d’autres professionnels de santé, à un établissement de santé ; c'est la compétence de ceux-ci qui guidera son choix, avec l'accord du patient. Le mot "compétence" doit être entendu dans le sens du langage ordinaire : il ne s'agit pas des "compétences" officielles obtenues par un certificat d'études spéciales (CES), un diplôme d'études spécialisées (DES) ou sur avis des commissions de qualification.

    En outre, le médecin a la responsabilité de choisir ses auxiliaires et de surveiller leurs actions (article 71).


    ([1]) B. HOERNI, « Appels téléphoniques des patients et déontologie médicale », Bulletin de l'Ordre mai 1999.
    J. LUCAS, « Déontologie médicale sur le web : livre blanc du CNOM », décembre 2011, www.conseil-national.medecin.fr

    ([2]) J. DUMESNIL, « Implications éthiques d’une « protocolisation » croissante de la pratique médicale », Traité de bioéthique Tome 1, édition ERES 2010

  • Article 33 - Diagnostic

    Article 33 (article R.4127-33 du code de la santé publique)

    Le médecin doit toujours élaborer son diagnostic avec le plus grand soin, en y consacrant le temps nécessaire, en s'aidant dans toute la mesure du possible des méthodes scientifiques les mieux adaptées et, s'il y a lieu, de concours appropriés.

    La démarche diagnostique est la première étape de toute prise en charge d'un patient. Certaines constatations initiales, consciencieusement consignées, permettent à elles seules d'affirmer ou d'orienter le diagnostic étiologique. C'est donc un temps important dont la qualité conditionne toute la démarche du médecin et souvent de ceux qui y contribueront.

    Depuis l'avènement de la méthode anatomo-clinique (Morgagni, Bichat, Laennec), une "médecine de diagnostic" s'est imposée contre la "médecine des symptômes" qui consistait à indiquer un remède en regard d'un symptôme sans trop savoir ce que l'on soignait. Le diagnostic de Laennec était celui de la lésion. Avec l'évolution scientifique, il s'agit aussi du diagnostic d'une perturbation physio-pathologique ou biologique.

    La médecine demande que l'on reconnaisse la nature et l'origine du mal, pour le soigner d'une manière adéquate. Cela est particulièrement souhaitable pour les cas graves, mais, parfois, dans l'immédiat, on ne peut faire que le diagnostic d'un état, ce qui justifie momentanément la mise en œuvre d'un traitement seulement symptomatique. Il en va ainsi notamment en cas de défaillance vitale pour laquelle un traitement d'urgence peut être salvateur ; le diagnostic des lésions ou de l'affection causale est remis à plus tard par nécessité ; l'étape initiale que représente la démarche diagnostique est différée par la hiérarchie des problèmes à résoudre.

    Le diagnostic est parfois difficile ; même à l'époque actuelle les médecins les plus expérimentés peuvent être embarrassés. L'hésitation dans le diagnostic, l'absence de diagnostic initial ou l'erreur ne sont pas répréhensibles si l'examen a été bien fait et la réflexion convenable. Le médecin n'est pas non plus répréhensible s'il est obligé de donner, dans l'incertitude où il se trouve, une thérapeutique d'attente.

    Ce qui constitue une faute c'est de ne pas chercher à faire le diagnostic, avec tout le soin nécessaire, de rester dans le vague en confiant au hasard les suites, de prescrire un traitement standard sans discrimination, de ne pas adapter un protocole diagnostique ou thérapeutique aux circonstances et à la situation personnelle du patient à qui on l'applique. Un interrogatoire minutieux, comme la prise en compte des constatations antérieures, peut être d'un secours important au cours de cette étape initiale de la prise en charge du patient.

    Le recours aux investigations et examens complémentaires de toute nature ne doit pas être retardé dans la mesure où ils sont nécessaires et logiquement orientés. Ceux-ci ne peuvent pas être codifiés. Cet article recommande bien : "les méthodes scientifiques les mieux adaptées" selon les cas. Les examens inutiles doivent être évités aux patients, de même que les examens dangereux ou pénibles s'ils ne sont pas indispensables au diagnostic. Il en est de même pour les examens redondants. Un "acharnement diagnostique" est louable en principe, mais déraisonnable s'il a pour mobile la curiosité scientifique, ou si le patient ne bénéficie pas des conséquences auxquelles il conduit, notamment si l'aboutissement est seulement un traitement palliatif ne modifiant pas le pronostic.

    Tout examen entraînant une sujétion, des contraintes ou des désagréments pour le patient, son opportunité doit être discutée préalablement à la décision, en évaluant bien le bénéfice qu'on peut en attendre au regard des contraintes qu'on impose, de ce fait, au patient.

    Si le médecin est embarrassé pour établir un diagnostic, il doit faire appel à un consultant, à un spécialiste, ou prescrire la mise en observation du patient. C'est une règle de déontologie qui, dès l'Antiquité, était suggérée au médecin. Cet appel implique que le médecin choisisse soigneusement, et en vertu de leurs seules compétences, les confrères auxquels il présentera ou adressera son patient, avec l'accord de celui-ci, et cela à l'exclusion de toute considération étrangère à l'intérêt du patient dans la situation donnée.

    Les technologies de l’information et de la communication permettent de faire appel à un consultant, plus ou moins éloigné, dont la compétence est sollicitée dans une situation particulière. Il ne s'agit pas seulement de l'envoi de données à distance, pour interprétation par des experts dans le cadre du télédiagnostic ou d'aide à la décision, mais aussi des possibilités de télé-consultation et de télé-assistance offertes par la télémédecine, dès lors que le patient, pour des raisons d'éloignement ou d'isolement, ne peut bénéficier de l'intervention d'un médecin. Cette prise en charge médicale doit s’inscrire dans le cadre des règles déontologiques (voir note [1]).

    Un tiers non médecin peut être l'intermédiaire obligé du praticien, tant pour recueillir les informations cliniques nécessaires au bilan de la situation que pour exécuter des gestes qui ont pour objectif d'être vitaux dans l'immédiat ou d'éviter la survenue de complications fatales. Le médecin consultant à distance doit faire preuve de perspicacité, mettre en œuvre toute son attention et les qualités d'écoute nécessaires pour rassurer l'environnement du malade ou du blessé. Il importe qu'il soit particulièrement clair et précis dans les questions qu'il pose autant que dans les actes dont il demande l'exécution ; il doit s'assurer qu'il a été bien compris par le patient et l'entourage pour que le patient tire tout le bénéfice attendu de son intervention.


    ([1]) Télémédecine – Les préconisations du Conseil national de l’Ordre des médecins – janvier 2009 –
    J. LUCAS, « Déontologie médicale sur le web : Livre blanc du CNOM », décembre 2011, www.conseil-national.medecin.fr

  • Article 34 - Prescription

    Article 34 (article R.4127-34 du code de la santé publique)

    Le médecin doit formuler ses prescriptions avec toute la clarté indispensable, veiller à leur compréhension par le patient et son entourage et s'efforcer d'en obtenir la bonne exécution.

    A la fin de la consultation ou de la visite, le médecin va, dans le cas le plus fréquent, formuler ses prescriptions (conseils, explorations, traitement) par une ordonnance qui engage sa responsabilité. Aussi sa délivrance doit-elle être accompagnée par des explications claires et précises, nécessaires au patient et à son entourage, pour une bonne observance du traitement.

    Conformément à l’article R. 5132-3 du code de la santé publique, l’ordonnance doit indiquer lisiblement : le nom, la qualité et le cas échéant, la qualification ou le titre du prescripteur, son identifiant, son adresse, sa signature et la date à laquelle l’ordonnance a été rédigée ; la dénomination du médicament ou du produit prescrit (princeps, générique ou  dénomination commune internationale (DCI), (note [1]), sa posologie et son mode d’emploi, et, s’il s’agit d’une préparation, la formule détaillée ; soit la durée du traitement, soit le nombre d’unités de conditionnement et, le cas échéant, le nombre de renouvellements de la prescription. Elle mentionne les nom et prénoms, le sexe et l’âge du patient et si nécessaire sa taille et son poids (voir note [2]).

    Elle doit être datée du jour de sa rédaction et écrite de façon lisible afin d’éviter toute méprise sur le nom du médicament, sur les doses, sur le mode d’administration, sur la durée du traitement.

    Si la prise de médicaments ne doit pas être interrompue brusquement ou sans avis médical, cela doit être bien précisé au patient et à son entourage et inscrit sur l’ordonnance.

    Par ailleurs, le prescripteur doit apposer sa signature immédiatement sous la dernière ligne de la prescription ou rendre inutilisable l’espace laissé libre entre cette dernière ligne et sa signature par tout moyen approprié afin d’éviter les ajouts et les fraudes.

    Le médecin peut recourir à un logiciel d’aide à la prescription, certifié conformément à l’article L.161-38 du code de la sécurité sociale, par la HAS.

    Ces logiciels ne doivent pas comporter de panneaux ou bandeaux publicitaires, incitant à la prescription préférentielle de médicaments.

    La prescription de produits stupéfiants ou soumis à la réglementation des stupéfiants connaît un régime particulier (articles R.5132-5, R.5132-27 et suivants du code de la santé publique).

    Le médecin doit s’enquérir auprès du patient du traitement qu’il peut suivre par ailleurs, afin d’éviter toute incompatibilité médicamenteuse. Il doit attirer l’attention du patient sur les risques d’autoprescription (par exemple : la prise d’aspirine par un sujet soumis à un traitement anticoagulant) et l’inciter à lire la notice explicative se trouvant dans chaque boite de médicaments.

    Il doit également s’assurer auprès de son patient et de son entourage que ses prescriptions ont été bien comprises et attirer leur attention sur les contre-indications et effets secondaires. Il s’agit du respect du devoir d’information du patient figurant déjà dans d’autres dispositions du code de déontologie médicale mais qui a été renforcé par des arrêts rendus par la Cour de Cassation les 17 février, 27 mai et 7 octobre 1998 (note [3]).

    Certes la liberté du patient reste entière et le médecin ne peut l’obliger à suivre le traitement qu’il a prescrit ou les examens complémentaires qu’il a conseillés mais il doit lui en montrer le bien-fondé pour le motiver à respecter une prescription faite dans son intérêt.

    Il convient enfin de rappeler que le médecin peut exclure la possibilité de la substitution de sa prescription par une spécialité générique. L’article L.5125-23 du code de la santé publique dispose que le praticien doit porter d’une manière manuscrite sur l’ordonnance la mention « non substituable » avant la dénomination de la spécialité prescrite. Le répertoire des groupes génériques fait l’objet d’une publication au Journal Officiel par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM, ex AFSSAPS).


    ([1]) Nom international donné à chaque substance pharmaceutique par l'OMS (Organisation Mondiale de la Santé), différent du nom chimique de la molécule et généralement du nom commercial du médicament

    ([2]) Civ. 1ère, 14 octobre 2010, n°09-68471 : En l’espèce, un médecin généraliste a prescrit à un nourrisson de six semaines atteint d’une rhino-pharyngite de la catalgine 0,10 grammes. Le pharmacien a délivré de la catalgine à 0,50 g, ce qui a provoqué une intoxication salicylique. La Cour d’appel retient, sur le rapport de l’expert, la responsabilité du médecin au motif d’une part que les salicylés ne constituaient plus depuis plusieurs années au moment des faits, le médicament antithermique de référence et de première intention chez le nourrisson alors que d’autres principes actifs offraient la même efficacité et présentaient moins d’inconvénients ; d’autre part qu’en omettant sur l’ordonnance la mention, obligatoire, de l’âge et du poids de l’enfant ce qui a privé le pharmacien d’un élément de contrôle lors de la délivrance du médicament, le médecin a participé à la réalisation du dommage.

    La Cour de cassation confirme la décision en ces termes : « Le principe de la liberté de prescription médicale ne trouve application que dans le respect du droit de toute personne de recevoir les soins les plus appropriés à son âge et son état, conformes aux données acquises de la science et ne doit faire courir de risques disproportionnés par rapport au bénéfice escompté. Le médecin qui ne respecte pas les principes d’efficience et de qualité des soins offerts aux patients manque à son obligation contractuelle de moyens.

    La Cour d’appel qui retient la mention, obligatoire en toute hypothèse et notamment en pédiatrie, de l’âge et du poids du malade, correspond à un standard de qualité en ce qu’elle met le pharmacien en mesure de disposer des éléments lui permettant de contrôler la prescription, a pu en déduire que la faute commise par le médecin, en facilitant la commission d’une faute elle-même en relation directe avec le dommage, avait contribué à sa réalisation ».

    ([3]) Civ. 1ère, 17 février 1998, Bull. n° 67 -   Civ. 1, 27 mai 1998, Bull. n° 187 - Civ. 1, 7 octobre 1998  Bull. n° 287 et 291

  • Article 35 - Information du patient

    Article 35 (article R.4127-35 du code de la santé publique)
     

    Le médecin doit à la personne qu'il examine, qu'il soigne ou qu'il conseille, une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu'il lui propose. Tout au long de la maladie, il tient compte de la personnalité du patient dans ses explications et veille à leur compréhension.

    Toutefois, lorsqu’une personne demande à être tenue dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic, sa volonté doit être respectée, sauf si des tiers sont exposés à un risque de contamination.

    Un pronostic fatal ne doit être révélé qu'avec circonspection, mais les proches doivent en être prévenus, sauf exception ou si le malade a préalablement interdit cette révélation ou désigné les tiers auxquels elle doit être faite.

    1 - Devoir d'information

    Le devoir d'information du patient a toujours été reconnu et, à défaut du code, la jurisprudence de la Cour de Cassation l'avait formulé, admettant qu'il découlait, implicitement mais nécessairement, de l'obligation - posée désormais à l'article 36 suivant - d'obtenir du patient, préalablement à toute intervention ou traitement, son consentement. Celui-ci ne pouvait être donné que si le patient avait reçu sur son état et sur les soins envisagés une information : "simple, approximative, intelligible et loyale" (note [1]) lui permettant de prendre une décision en connaissance de cause.

    Ce n’est que dans le code de 1995 que ce devoir est expressément énoncé.

    Cette addition répond à une tendance générale visant à corriger l'insuffisance habituelle de l'information, telle du moins qu'elle est ressentie et signalée par les patients. En France, comme dans d'autres pays occidentaux, le premier reproche adressé aux médecins se résume par la formule : "Il ne m'a rien dit". Cela doit s'entendre souvent comme : "il ne m'a pas dit ce que j'attendais de lui" ou : "je n'ai pas compris ce qu'il m'a dit". Ce défaut d'information est la cause la plus fréquente des procédures engagées contre un médecin.

    Cette demande du corps social à plus d’autonomie et à une meilleure information a été prise en compte par la jurisprudence de la Cour de Cassation, ces dernières années. Plusieurs décisions posent en principe qu’hormis les cas d’urgence, d’impossibilité ou de refus du patient d’être informé, un médecin est tenu de lui donner une information loyale, claire et appropriée sur les risques des investigations et des soins qu’il lui propose de façon à lui permettre d’y donner un consentement ou un refus éclairé.

    Enfin la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé consacre dans le chapitre 1er «Information des usagers du système de santé et expression de leur volonté » le droit du patient à l’information et détaille les diverses situations dans lesquelles il s’exerce.

    2 – Droit à l’information

    L’importance de l’article L.1111-2 du code de la santé publique justifie que malgré sa longueur, il soit cité dans son intégralité :

    « Toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu’ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. Lorsque, postérieurement à l’exécution des investigations, traitements ou actions de prévention, des risques nouveaux sont identifiés, la personne concernée doit en être informée, sauf en cas d’impossibilité de la retrouver.

    Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l’urgence ou l’impossibilité d’informer peuvent l’en dispenser.

    Cette information est délivrée au cours d’un entretien individuel.

    La volonté d’une personne d’être tenue dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic doit être respectée, sauf lorsque des tiers sont exposés à un risque de transmission.

    Les droits des mineurs ou des majeurs sous tutelle mentionnés au présent article sont exercés, selon les cas, par les titulaires de l’autorité parentale ou par le tuteur. Ceux-ci reçoivent l’information prévue par le présent article, sous réserve des dispositions de l’article L.1111-5. Les intéressés ont le droit de recevoir eux-mêmes une information et de participer à la prise de décision les concernant, d’une manière adaptée soit à leur degré de maturité s’agissant des mineurs, soit à leurs facultés de discernement s’agissant des majeurs sous tutelle.

    Des recommandations de bonnes pratiques sur la délivrance de l’information sont établies par la Haute Autorité de Santé et homologuées par arrêté du ministre chargé de la santé.

    En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l’établissement de santé d’apporter la preuve que l’information a été délivrée à l’intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen.

    L’établissement de santé recueille auprès  du patient hospitalisé les coordonnées des professionnels de santé auprès desquels il souhaite que soient recueillies les informations nécessaires à sa prise en charge durant son séjour et que soient transmises celles utiles à la continuité des soins après sa sortie. »

    Avant tout acte médical, de soins ou de prévention, le patient doit, sauf urgence ou impossibilité, être informé de son état de santé, du contenu de l’acte envisagé, de son opportunité, des alternatives thérapeutiques existantes, de leurs avantages et inconvénients, des conséquences du refus de l’acte.

    Une information ultérieure sur des risques nouvellement identifiés est prévue ainsi que sur « un dommage imputable à une activité de prévention, de diagnostic ou de soins… au plus tard dans les quinze jours suivant la découverte du dommage » (article L.1142-4 du code de la santé publique).

    Enfin, postérieurement à l’acte médical ou au cours du traitement, le patient se voit ouvrir un droit d’accès aux informations le concernant et qui figurent dans le dossier médical.

    La loi souligne que l’information incombe à tout professionnel de santé (art. 64) dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables, référence au présent article et à la « limitation thérapeutique » à l’information qu’il permet.

    3 – Information loyale, claire et appropriée

    Ces qualificatifs, repris par des décisions de la Cour de Cassation expriment la forme sous laquelle l’information doit être donnée

    Claire, l’information donnée au patient doit lui être intelligible. Elle doit être simplifiée par rapport à un exposé spécialisé, évitant un langage trop technique et des détails superflus. Le praticien a souvent un rôle pédagogique (docteur vient du verbe latin docere qui signifie enseigner, instruire) qui suppose simplification, répétition, échange. Il peut être difficile de faire comprendre une situation complexe, il peut falloir la simplifier sans travestir la réalité, il faut s’assurer que le patient saisit ce qu’on lui explique, lui laisser poser des questions complémentaires, lui proposer de reformuler ce qu’il a compris.

    Appropriée (aux circonstances), cette information doit l’être suivant plusieurs facteurs :

    • selon la maladie et son pronostic (un médecin n’informe pas dans les mêmes conditions pour une angine banale ou pour un cancer bronchique généralisé) ;
    • selon le traitement corollaire : l’article 41 du code de déontologie médicale revient sur l’obligation du consentement en cas de mutilation envisagée, que ce soit une amputation anatomique (mastectomie) ou fonctionnelle (stérilité, impuissance) ; d’autres traitements moins importants peuvent entraîner des désagréments très mal ressentis par certains patients selon leur activité (endormissement au volant par exemple) ; quantité d’informations « mineures » sont quasi nécessaires pour la bonne marche du traitement, pour favoriser son observance, réduire sa toxicité, éviter des inquiétudes injustifiées (comme pour une coloration des urines par un médicament) – l’information s’impose pour les conséquences les plus sérieuses et les plus fréquentes mais ne se limite pas à elles ;
    • selon le moment de l’évolution d’une maladie  qui se prolonge : il y a des moments critiques, préoccupants, d’autres de rémission, de détente ; ces changements supposent une adaptation du patient, du médecin et de leur relation, en évitant des positions de principes figées qui se trouveraient à certains moments inadaptées, en porte-à-faux ;
    • selon le patient, enfin et surtout. Des troubles mentaux liés à la maladie ou à l’âge ne doivent pas a priori constituer une raison de se taire. Pour chaque personne au contraire il faut parler et expliquer, en exploitant toutes les possibilités de compréhension du patient, possibilités qui se révèlent dans leur étendue et leurs limites au cours de l’exercice. L’article 42 précise ce point pour le mineur ou le majeur protégé.
       

    Loyale est le mot-clé cité d'ailleurs en premier dans cet article 35. On ne ment pas à quelqu'un qui doit être respecté. Cette loyauté ne signifie pas une franchise brutale, crue, sans cœur. Mais toute dissimulation ou tout mensonge est exclu, sauf en fonction des restrictions que nous allons voir, dont l'application devrait devenir plus rare. L'intention de tromper ou dol, est une faute en droit général ; elle peut être la cause de nullité d'un contrat et source de responsabilité.

    Ainsi définie, l’information doit permettre au patient de prendre la décision que semble imposer sa situation. Cette formulation laisse croire qu'une décision s'impose - en fonction de la situation pathologique et des données de la médecine établies et présentées par le praticien - et que le patient n'a plus qu'à l'accepter, l'information étant seulement destinée à obtenir son acquiescement conscient. C'est effectivement ce qui se passe dans la majorité des cas : le patient n'est pas soumis à une volonté aveugle ou à une décision mystérieuse, mais se voit expliquer les raisons d'une décision qu'impose au médecin l'état de la maladie. Cependant cette séquence logique peut connaître des exceptions :

    Tout d'abord le  patient peut refuser une décision pourtant logique et comme évidente. Les raisons de ce refus peuvent tenir à des options personnelles contestables ou à des troubles mentaux. Dans ce cas le médecin devra s'efforcer de convaincre le patient d’accepter les soins, tout en évitant d'exercer sur lui des pressions. D'autres influences, un peu de temps de réflexion sont favorables à une évolution qui amènera le patient à une attitude plus raisonnable. S’il persiste cependant dans son refus et sauf urgence, son choix devra être respecté et la décision qui semblait s’imposer ne sera pas prise ou suivie d’effet.

    Mais lorsque l’acte proposé est indispensable à la survie du patient et proportionné à son état (voir note [2]), le médecin se doit d’agir en conscience pour tenter de le sauver.

    •  Une seconde situation est réalisée lorsqu'il existe une alternative thérapeutique. La science médicale laisse persister des zones de flou ou d'incertitude. Deux ou trois options semblent ou sont équivalentes pour soigner le patient convenablement du point de vue médical. Dans ce cas plusieurs solutions existent, toujours après information adéquate du patient :
       
    1.  il fait valoir une préférence personnelle qui emporte la décision ;
    2.  il laisse le médecin décider et ce dernier choisit en fonction de critères associant sa connaissance du patient et celle de l'art médical ;
       

    Dans tous les cas, si la maladie est relativement sérieuse et prolongée, l'information ne doit pas être unique, condensée au début de la prise en charge médicale et considérée comme définitive. Au contraire, elle s'impose tout au long de cette prise en charge, renforcée à certains moments cruciaux. Ces échanges prennent du temps, mais ils contribuent à une relation de bonne qualité, dans une confiance partagée.

    Une information de qualité est le préalable indispensable à un consentement éclairé. Loin d'être une vue de l'esprit, comme on en a parfois jugé, ce consentement est la pierre angulaire de la relation médecin-patient et de la pratique médicale. Il est la contrepartie logique du pouvoir exorbitant du droit commun qu'a le médecin de porter atteinte à l'intégrité d'un individu - par ses paroles, une exploration, un médicament, une intervention chirurgicale, etc. - pour le soigner.

    L’information du patient revêt une nécessité toute particulière en milieu hospitalier où le patient est en contact avec toute une équipe soignante. L'article L.1112-1  du code de la santé publique, en rappelle le principe : "dans le respect des règles déontologiques qui leur sont applicables, les praticiens des établissements assurent l'information des personnes soignées" (voir note [3]) et les articles R.1112-1 et suivants du code de la santé publique en fixent les modalités.

    L’obligation d'information entraîne des conséquences importantes dans le domaine de la responsabilité médicale.

    La responsabilité du médecin est en effet engagée s’il n’a pas donné à son patient l’information nécessaire, le privant ainsi de la possibilité de faire un choix éclairé.

    Jusqu’en 1997, une telle condamnation intervenait rarement car c’était au patient de faire la preuve que l’information nécessaire n’avait pas été apportée, preuve négative toujours difficile à apporter.

    Un revirement de jurisprudence est intervenu avec l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 25 février 1997 (arrêt Hédreul, Civ. 1, n°94-19685) qui a renversé la charge de la preuve en matière d’information du patient.

    C’est désormais au médecin et non plus au patient qu’il incombe en cas de litige d’apporter la preuve qu’il a bien informé ce dernier des risques du traitement ou de l’investigation qu’il lui propose et cette obligation porte même sur l’existence d’un risque exceptionnel si c’est un risque grave (arrêt Castagnet, Civ.1ère, 7 octobre 1998, n°97-12185 ).

    Cette jurisprudence a par la suite été confirmée par plusieurs décisions, avant d’être reprise par l’article L. 1111-2 du code de la santé publique : « Toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu’ils comportent, ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus.»…

    « Cette information est délivrée au cours d’un entretien individuel. » …

    « En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l’établissement de santé d’apporter la preuve que l’information a été délivrée à l’intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen. »

    La preuve que le médecin doit rapporter porte aussi bien sur l’existence de l’information donnée au patient que sur son contenu.

    Il doit notamment prouver que l’entretien individuel, conduit dans les conditions décrites plus haut, a eu lieu. Cette preuve peut résulter d’un faisceau d’éléments convergents. Si la mention sur le carnet de rendez-vous n’est pas à elle-seule suffisante puisqu’elle n’établit pas le contenu de l’information délivrée, l’inscription dans le dossier du patient, la lettre adressée au médecin traitant du patient à l’issue de la consultation rappelant succinctement les préconisations du médecin, leur rapport bénéfice/risques sont autant d’éléments permettant d’établir que le médecin a satisfait à son devoir d’information. La remise d’un document détaillant l’intervention et ses conséquences que le patient aura la possibilité de relire à loisir chez lui peut utilement compléter les explications orales données par le médecin.

    Un certain nombre de médecins, notamment chirurgiens, ont cru pouvoir se prémunir en faisant signer à leur patient un document intitulé « document de consentement éclairé » dans lequel le patient reconnaissait avoir reçu du médecin toute l’information souhaitée. Un tel document est dépourvu de valeur « dès lors qu’il est libellé en termes très généraux, ne contient aucune précision quant à la nature des complications et risques effectivement liés à l’arthroscopie, qui étaient prévisibles et nécessairement connus du Dr M. puisqu’il résulte du rapport d’expertise que l’épanchement sanguin post-opératoire et sa diffusion sont relativement fréquents dans ce type d’intervention.» (voir note [4]).

    Selon la jurisprudence issue de l’affaire Hédreul, le manquement du médecin à son devoir d’information donnait lieu à indemnisation lorsqu’il constituait pour le patient une perte de chance d’échapper, par une décision plus judicieuse, au risque dont il n’avait pas été informé et qui s’est réalisé. Le juge devait rechercher, en prenant en considération l’état de santé du patient ainsi que son évolution prévisible, sa personnalité, les raisons pour lesquelles des investigations ou des soins à risque lui étaient proposés ainsi que les caractéristiques de ces investigations, de ces soins et de ces risques, les effets qu’aurait pu avoir une telle information quant à son consentement ou à son refus (Civ. 1ère,. 20 juin 2000, n°98-23046) .Cependant s’il n’existait pas d’alternative et que rien ne laissait supposer que le patient pouvait refuser l’intervention, le manquement à l’obligation d’information ne pouvait donner lieu à indemnisation, pas même au titre d’un préjudice moral.

    La Cour de cassation vient d’opérer un important revirement de jurisprudence sur ce point (voir note [5]) :  « Il résulte des articles 16 (voir note [6]) et 16-3 (voir note [7]) du code civil que toute personne a le droit d’être informée, préalablement aux investigations, traitements ou actions de prévention proposés, des risques inhérents à ceux-ci et que son consentement doit être recueilli par le praticien, hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle elle n’est pas à même de consentir ; le non respect du devoir d’information qui en découle cause à celui auquel l’information était légalement due, un préjudice qu’en vertu de l’article 1382 (voir note [8]) du code civil, le juge ne peut laisser sans réparation

    En réaffirmant par référence aux articles 16 et 16-3 du code civil, le lien entre le devoir d’information et le respect de la dignité de la personne (voir note [9]) et en visant l’article 1382 du même code et non l’article 1147, la Cour de cassation consacre un droit du patient à l’information dont le non respect est, à lui seul, source d’un préjudice réparable, distinct du préjudice corporel.

    L'information des patients ne va pas de soi. Elle est exposée à de nombreuses difficultés et se heurte à de nombreux écueils. Le cadre restreint de ce commentaire ne permet pas d'en faire le recensement ni de développer les conseils visant à les résoudre ou à les éviter. On se contentera de renvoyer le lecteur à un petit ouvrage pratique dont c'est précisément l'objet (voir note [10]).

    4 - Diagnostic ou pronostic graves

    À ce devoir d'information du patient il est une exception : le respect de la volonté exprimée par la personne d’être tenue dans l'ignorance d'un diagnostic ou d'un pronostic graves.

    Toutefois, cette exception ne peut s’appliquer lorsque des tiers sont exposés à un risque de contamination. Cette précision, inspirée du cas du sida, mais qui vaut pour d'autres affections contagieuses graves s'impose en raison de la responsabilité du patient comme des intérêts de santé publique. Quel que soit en effet le traumatisme qui peut résulter d'une telle  révélation, on ne saurait la cacher au patient, en le laissant exposer ses proches ou ses relations à une regrettable contamination. Dès lors il est indispensable, et dans les meilleurs délais, de l'informer des risques qu’il fait encourir à son entourage et des précautions à prendre. Lorsqu’une anomalie génétique grave a été dépistée chez une personne qui a exprimé par écrit sa volonté d’être tenue dans l’ignorance du diagnostic, l’article L.1131-1 du code de la santé publique organise une procédure d’information des membres de la famille potentiellement concernés.

    Ces informations pourront nécessiter plusieurs entretiens.

    Les progrès de la médecine font que certains diagnostics jadis désespérants ne sont plus aujourd'hui synonymes d'incurabilité. Il n'est plus question aujourd’hui de taire un diagnostic.

    Mais il y a la façon de dire, qui compte beaucoup. Ou de laisser deviner. Une mauvaise nouvelle est en soi, source de détresse, détresse que l’on peut réduire au minimum en se montrant sensible et solidaire. Interviennent alors l’empathie et l’expérience du praticien, pour rendre service sans désespérer, pour rester proche de la vérité sans abandonner.

    Les professionnels de santé  doivent être formés à la gestion de ces situations d’annonce d’un diagnostic ou d’un pronostic grave où la communication est essentielle. L’acquisition des techniques nécessaires à cette fin devrait être généralisée au même titre que l’est la formation clinique (voir note [11]).

    5 - Pronostic fatal

    Lorsque le pronostic est fatal et que la vie est menacée à brève échéance, le patient  doit  le savoir, parce qu'il est le premier concerné ou qu'il a des dispositions à prendre en vue de sa probable disparition. D'une façon générale l'authenticité de la communication est un élément important de la confiance (voir note 11).

     Si le patient a fait part au médecin de sa volonté de rester dans l’ignorance de ce pronostic, sans s’opposer à toute révélation,  il convient de prévenir les membres de la famille, un proche ou la personne de confiance pour qu’ils apportent leur soutien à la personne malade et prennent les dispositions nécessaires (voir note 12). Le rôle du médecin est facilité lorsque le patient a précisé ses souhaits dans des "directives anticipées".

    6. Accès aux informations de santé

    La loi du 4 mars 2002 a prévu qu’au cours des soins ou postérieurement, le patient puisse avoir accès, à son choix, directement ou par l’intermédiaire d’un médecin qu’il désigne, aux informations de santé le concernant établies ou détenues par un professionnel ou établissement  de santé (voir note 13).

    Cette communication concerne les informations « qui sont formalisées ou ont fait l'objet d'échanges écrits entre professionnels de santé, notamment des résultats d'examen, comptes rendus de consultation, d'intervention, d'exploration ou d'hospitalisation, des protocoles et prescriptions thérapeutiques mis en œuvre, feuilles de surveillance, correspondances entre professionnels de santé, à l'exception des informations mentionnant qu'elles ont été recueillies auprès de tiers n'intervenant pas dans la prise en charge thérapeutique ou concernant un tel tiers » (article L.1111-7 du code de la santé publique).

    A la différence de l’article L.1111-2, cet article ne fait pas référence au « respect des règles professionnelles » qui doit entourer l’information. Cette différence est moins paradoxale qu’il n’y paraît ; en effet, au long de la prise en charge, le médecin amènera progressivement le patient à entendre une information traumatisante qui, dans la majorité des cas, devrait être connue lorsqu’il demandera l’accès à son dossier.

    Sous réserve que le patient n’y ait pas fait opposition de son vivant, ses ayants droit peuvent avoir accès à certaines informations « dans la mesure où elles leur sont nécessaires » (voir note 14). C’est souligner que le secret dû au patient n’est pas aboli par son décès, que les médecins doivent être attentifs à ne transmettre que les informations pertinentes, nécessaires et non excessives, permettant aux ayants droit de faire valoir leurs intérêts légitimes (connaître la cause du décès, défendre la mémoire du défunt, faire valoir leurs droits).


    ([1]) Civ. 1ère, 21 février 1961, Bull. 1961, I, N° 112, p. 90.

    ([2]) Conseil d'Etat, 16 août 2002, Feuillatey, n° 249552, cité sous l’article 36

    ([3]) Conseil d'Etat, 28 juillet 2011, n° 331126 : « les praticiens des établissements publics de santé ont l’obligation d’informer directement le patient des investigations pratiquées et de leurs résultats, en particulier lorsqu’elles mettent en évidence des risques pour sa santé, à moins que celui-ci n’ait expressément demandé que les informations médicales le concernant ne lui soient délivrées que par l’intermédiaire de son médecin traitant ; il appartient aux établissements publics de santé d’établir que cette information a été délivrée».

    ([4]) CA Toulouse, 25 octobre 2010, n° 10/01705

    ([5]) Civ. 1ère, 3 juin 2010, n°09-13591

    ([6]) Article 16 du code civil : « La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l'être humain dès le commencement de sa vie. »

    ([7]) Article 16-3 du code civil : « Il ne peut être porté atteinte à l'intégrité du corps humain qu'en cas de nécessité médicale pour la personne ou à titre exceptionnel dans l'intérêt thérapeutique d'autrui.

    Le consentement de l'intéressé doit être recueilli préalablement hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n'est pas à même de consentir. »

    ([8]) Article 1382 du code civil : « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

    ([9]) Civ.1ère, 9 octobre 2001 n° 00-14564 : « Un médecin ne peut être dispensé de son devoir d’information vis-à-vis de son patient, qui trouve son fondement dans l’exigence du respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine, par le seul fait qu’un risque grave ne se réalise qu’exceptionnellement » 

    ([10]) B. HOERNI, M. BENEZECH, « L’information en médecine », Paris : Masson, 1994

    ([11]) R. BUCKMAN, « S’asseoir pour parler – l’art de communiquer de mauvaises nouvelles aux malades », Guide du professionnel de santé, Masson 2007
    I. MOLEY-MASSOL, « Relation médecin-malade ; enjeux, pièges et opportunités – solutions pratiques », Le Pratique, DaTeBe Paris 2007« Améliorer le dispositif d'annonce des diagnostics graves », Séminaire du CNOM de mai 2011 et colloque de juin 2011

    (11) L. CAEYMAEX, C. JOUSSELME, « Parents et soignants en réanimation néonatale : lorsqu’informer signifie aider à penser », Traité de biomédecine, Tome III, édition Erès 2010

    (12) Article L.1110-4, avant dernier alinéa :« En cas de diagnostic ou de pronostic grave, le secret médical ne s’oppose pas à ce que la famille, les proches de la personne malade ou la personne de confiance définie à l’article L.1111-6 reçoivent les informations nécessaires destinées à leur permettre d’apporter un soutien direct à celle-ci, sauf opposition de sa part. Seul un médecin est habilité à délivrer, ou à faire délivrer sous sa responsabilité, ces informations. »

    (13) Accès aux informations personnelles de santé détenues par un professionnel ou établissement  de santé, diffusé sur le site Internet du Conseil national de l’Ordre des médecins

    (14) Conseil d'Etat, 26 septembre 2005, Conseil national de l’Ordre des médecins, n°270234

  • Article 36 - Consentement du patient

    Article 36 (article R.4127-36 du code de la santé publique)

    Le consentement de la personne examinée ou soignée doit être recherché dans tous les cas.
    Lorsque le malade, en état d'exprimer sa volonté, refuse les investigations ou le traitement proposés, le médecin doit respecter ce refus après avoir informé le malade de ses conséquences.
    Si le malade est hors d'état d'exprimer sa volonté, le médecin ne peut intervenir sans que ses proches aient été prévenus et informés, sauf urgence ou impossibilité.
    Les obligations du médecin à l'égard du patient lorsque celui-ci est un mineur ou un majeur protégé sont définies à l'
    article 42 .

    Conformément à l’article 16-3 du code civil : « Il ne peut être porté atteinte à l'intégrité du corps humain qu'en cas de nécessité médicale pour la personne ou à titre exceptionnel dans l'intérêt thérapeutique d'autrui.

     Le consentement de l'intéressé doit être recueilli préalablement hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n'est pas à même de consentir. »

    Le patient a le droit d'accepter ou de refuser ce que le médecin préconise et non lui impose. Cette liberté du patient est une exigence éthique fondamentale, corollaire du devoir d'information énoncé à l'article précédent. L'information du patient est en effet la condition préalable de son consentement, conséquence qu'il tire de cette information (article 35).

    L’article L.1111-4 du code de la santé publique précise à cet égard « Toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu'il lui fournit, les décisions concernant sa santé.

    Le médecin doit respecter la volonté de la personne après l'avoir informée des conséquences de ses choix. Si la volonté de la personne de refuser ou d'interrompre tout traitement met sa vie en danger, le médecin doit tout mettre en œuvre pour la convaincre d'accepter les soins indispensables. Il peut faire appel à un autre membre du corps médical. Dans tous les cas, le malade doit réitérer sa décision après un délai raisonnable. Celle-ci est inscrite dans son dossier médical. Le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa fin de vie en dispensant les soins visés à l'article L. 1110-10.

    Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment ».

    Les actes médicaux justifiant ce consentement doivent être entendus au sens large : en commençant par l’examen clinique habituel dont certains gestes peuvent être désagréables, comprenant des investigations complémentaires non-invasives ou non-sensibles (par exemple sérologie virale), différents traitements, la surveillance du traitement et de ses suites ; il porte également sur la participation éventuelle du patient à la formation d’étudiants ou de professionnels de santé (article L.1111-4, 7ème alinéa du code de la santé publique), à des publications qui permettraient une identification.

    Le fait d'intervenir sur un patient contre son consentement est pour un médecin une faute qui engage sa responsabilité civile et l'expose à une sanction disciplinaire.

    Si le patient est inconscient ou dans l'impossibilité de donner un consentement éclairé, il est nécessaire de consulter la famille,  les proches ou la personne de confiance (voir note [1]) qu’il a pu désigner, susceptibles de transmettre une position antérieurement exprimée par le patient. Rester inactif irait à l'encontre des prescriptions de l'article 9 du code qui fait obligation à tout médecin en présence d'un blessé ou d'une personne en péril de lui porter assistance ou de s'assurer qu'elle reçoit les soins nécessaires. Un tel comportement serait en outre de nature à entraîner des poursuites pour non-assistance à personne en danger. En cas d'urgence ou d'impossibilité persistante de joindre les proches, le médecin devra intervenir comme il le juge souhaitable.

    1 - Caractères du consentement

    Le consentement doit être "libre et éclairé".

    Le patient doit formuler son consentement après avoir reçu de la part du médecin, une information claire, compréhensible, adaptée à ses capacités de comprendre la nature des actes et prescriptions proposés, leur intérêt pour sa santé et les conséquences néfastes en cas de refus (article 35).

    Le médecin l'aide à réfléchir, lui apporte les explications qu'il souhaite, peut rectifier des erreurs d'appréciation, rappeler des données mal mémorisées. Le consentement ne représente pas tant une fin en soi que la marque d’une bonne compréhension de l’information et d'une relation de qualité avec le patient.

    Le langage médical, même simplifié, nécessite de la part du patient une capacité de perception sensorielle, une capacité de compréhension de la langue française. Il sera nécessaire de s’assurer de la bonne compréhension auprès de patients ne maîtrisant pas le français par l’intermédiaire de la famille proche ou de la personne de confiance, ainsi que pour les patients présentant un déficit des fonctions sensorielles, auditives ou visuelles, un déficit des fonctions cognitives par évolution dégénérative, par lésion encéphalique ou par la présence d’une pathologie psychiatrique.

    Le médecin doit se garder d’une attitude trop distante. Le patient qui le consulte lui accorde sa confiance. Le médecin doit l’aider à donner son consentement sans mettre le patient dans une situation organisée d’abandon, face à une décision qui peut le dépasser.

    On conseille au médecin de recueillir auprès de ses patients un consentement écrit dès qu'il s'agit d'une décision d'importance même s’il ne saurait dégager le médecin de toute responsabilité. Pour les patients mineurs, ce consentement écrit ("autorisation d'opérer") est souvent demandé aux titulaires de l’autorité parentale d'avance et systématiquement.

    Cette méthode n'est pas satisfaisante, faute d’information sur l’intervention qui se révèlerait ultérieurement nécessaire ; elle risque de dénaturer la confiance et de perturber d'emblée la relation normale entre les patients et le médecin.

    Le consentement écrit n'a d'ailleurs pas une valeur juridique absolue sauf lorsqu'il est exigé par la loi (voir paragraphe 6, ci-dessous). Cette dernière situation a montré qu'une formulation écrite pouvait intervenir, moyennant certaines précautions, sans dénaturer la relation médecin-patient, voire en la renforçant.

    Il peut être indiqué parfois, en cas de refus du patient, de lui faire consigner ce refus par écrit, ne serait-ce que pour lui signifier d'une autre manière la gravité de sa décision. Un tel document ne décharge pas le médecin de ses responsabilités mais peut  attester que le patient a bien été informé.

    2 – Capacité à consentir

    Dans deux situations, le patient se trouve juridiquement dans l’incapacité de donner son consentement aux soins qu’on lui propose et le consentement sera donné par son représentant légal. Cependant, il a le droit de recevoir une information et de participer à la décision le concernant.

    a) mineurs

    Le praticien qui donne ses soins à un mineur doit recueillir le consentement de ses représentants légaux (parents ou tuteurs), après les avoir informés sur la maladie, les actes et traitements proposés, leurs avantages et risques, les alternatives thérapeutiques, les conséquences d’une abstention ou d’un refus.

    Les parents divorcés ou séparés exercent en commun l'autorité parentale et ils doivent tous deux être prévenus et consultés pour une décision grave concernant l'enfant.

    L'article 372-2 du code civil précise néanmoins qu'"à l'égard des tiers de bonne foi, chacun des parents est réputé agir avec l'accord de l'autre, quand il fait seul un acte usuel de l'autorité parentale relativement à la personne de l'enfant".

    Lorsque les parents sont absents et ne peuvent être prévenus et si la situation est grave et urgente, le médecin prend les mesures nécessaires et donne les soins sous sa seule responsabilité (article 42).

    Mais le mineur a le droit de recevoir une information selon son degré de maturité et son consentement doit être systématiquement recherché s’il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision. Cela concerne en particulier les adolescents.

    La loi du 4 mars 2002 (voir note [2]) apporte une dérogation à cet article du code civil et autorise le médecin à se dispenser du consentement du ou des titulaires de l’autorité parentale lorsque la personne mineure a expressément demandé au médecin de garder le secret sur son état de santé vis-à-vis de ses parents et que le traitement ou l’intervention s’impose pour sauvegarder sa santé. Le médecin devra s’efforcer d’obtenir le consentement du mineur à la consultation des titulaires de l’autorité parentale ; en cas de refus, le mineur sera obligatoirement accompagné d’une personne majeure de son choix.

     

    Le médecin gardera à l’esprit la nécessité d’informer complètement le mineur sur la gravité de la décision prise d’écarter les titulaires de l’autorité parentale et s’assurera de l’identité et de la qualité de la personne majeure choisie pour accompagner le mineur.

    b) majeurs sous tutelle

    La loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 qui a réformé la protection des majeurs pose le principe d’autonomie de la personne, selon lequel le majeur protégé prend lui-même les décisions touchant à sa personne. A tout le moins elle impose le recueil, a priori, du consentement de la personne protégée par la personne en charge de sa  protection.

    Néanmoins, l’article 459 alinéa 2 du code civil permet au juge d’adapter l’exigence du consentement à la réalité de la personne et de le prendre en compte dans la mesure permise par son état. Si la personne protégée ne peut prendre une décision éclairée, le juge pourra prévoir, dès l’ouverture de la mesure de protection ou ultérieurement en fonction de l’évolution de son état de santé, que le tuteur devra la représenter dans les actes la concernant. Le juge peut ainsi décider que cette assistance ou cette représentation sera nécessaire pour l’ensemble des actes touchant à la personne ou pour certains d’entre eux seulement, ou pour une série d’actes. Il statuera au vu des éléments du dossier figurant dans le certificat circonstancié établi par un médecin, inscrit sur la liste dressée par le procureur.de la République.

    En conséquence, si le juge n’a pas pris de décision encadrant spécifiquement la protection de la personne, le principe d’autonomie s’applique et il n’y a ni assistance ni représentation possible du majeur.

    Toutefois, selon l’article 459-1 du code civil (voir note [3]), les dispositions particulières prévues par le code de la santé qui prévoient l‘intervention du représentant légal, demeurent applicables. Le consentement de la personne chargée de la protection sera exigé par exemple pour une recherche impliquant la personne humaine (article L.1122-2 du code de la santé publique), une recherche sur les caractéristiques génétiques (article R.1131-4).

    Il convient encore de souligner que la personne chargée de la protection du majeur, sauf en cas d’urgence, ne peut sans l’autorisation du juge ou du conseil de famille « prendre une décision qui aurait pour effet de porter gravement atteinte à l’intégrité corporelle de la personne protégée ou à l’intimité de sa vie privée». Cette disposition couvre de nombreux actes touchant à la santé de la personne, comme les interventions chirurgicales.

    En conséquence :

    1. en cas d’urgence vitale, le médecin donne les soins qui s’imposent compte tenu de l’état du patient ; il en informe sans délai le juge et le conseil de famille s’il existe ;
    2. si l’intervention n’est pas urgente et peut être programmée :
    • soit elle est de nature à porter gravement atteinte à l’intégrité corporelle de la personne et requiert l’autorisation du juge ou du conseil de famille, s’il existe ;
    • soit elle n’a pas ce caractère et pour autant que la personne chargée de la protection du majeur ait reçu un pouvoir de représentation, c’est à elle qu’il incombe de donner son consentement.

    c)  personnes admises en soins psychiatriques

    Le consentement du patient aux soins qu’on lui propose doit être recherché et on insistera si besoin pour l’obtenir ; mais lorsqu’il s’y refuse, le médecin et  les proches doivent dans certains cas, passer outre. En cas d’aliénation mentale caractérisée ou d’état dangereux pour la sécurité des personnes, les soins sous contrainte, avec ou sans hospitalisation, s’imposent.

    La loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 (voir note [4]) relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge autorise, sous certaines conditions, à passer outre au refus de consentement du patient, tant pour réaliser l’admission en milieu hospitalier que pour appliquer le traitement.

    3 – Patient hors d’état d’exprimer son consentement

    « Lorsque la personne est hors d’état d’exprimer sa volonté, aucune intervention ou investigation ne peut être réalisée, sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance prévue à l’article L. 1111-6, ou la famille, ou à défaut, un de ses proches ait été consulté. » (article L.1111-4 du code de la santé publique).

    Dans le cas où le patient est hors d’état de donner son consentement et où tout retard serait préjudiciable au patient, le médecin ou le chirurgien peut être conduit à intervenir, sans pouvoir recueillir le consentement du patient, ni avertir la personne de confiance ou la famille. Il devra donner dès que possible les explications nécessaires et justifier sa décision.

    • Si le patient est comateux ou obnubilé, le médecin a souvent l’obligation d’agir immédiatement. Dès qu’il en aura la possibilité, il donnera des explications à la personne de confiance et au patient.
    • Mis en présence d’une tentative de suicide, le médecin doit tout faire pour sauver la vie de la personne et assurer une prise en charge adéquate.

    4 - Refus de consentement

    Si le patient, en état d'exprimer sa volonté, refuse ce qui lui est proposé, le médecin ne doit pas se satisfaire d'un seul refus. Il doit s’efforcer de le convaincre en lui apportant à nouveau toutes les précisions nécessaires, en s’assurant qu’elles sont correctement comprises, solliciter l’avis d’un consultant.

    En cas de refus réitéré du patient, le médecin pourra refuser de continuer la prise en charge, à condition de faire assurer la continuité des soins par un autre médecin.

    Le médecin pourra passer outre le refus du consentement lorsque le patient présente un risque vital : phase ultime d’une grève de la faim, conduite suicidaire, ….

    Face à des croyances sectaires, le médecin devra respecter la volonté des patients, après les avoir informés des conséquences de leur refus. En cas de risque vital, le médecin se doit d’agir en conscience (voir note 5).

    Face à un mineur en danger, il doit avertir le procureur de la République et donner les soins nécessaires.

    5 - Consentement du patient dans les  établissements de santé

    Comme l'hospitalisation est généralement décidée en raison d'une situation complexe, confuse ou sérieuse, les médecins doivent veiller tout spécialement à fournir aux patients les explications nécessaires, afin d'être assurés de leur adhésion aux soins prévus. Parfois le consentement du patient est un peu trop vite considéré comme acquis, au point que son opposition, si elle se manifeste, scandalise plus ou moins et peut prend l'allure d'une incongruité. Certes, avant de lui faire subir une intervention chirurgicale, on le préviendra, ainsi que sa famille ou ses proches, mais on l'aura parfois soumis au préalable à des examens dont certains comportent des risques, et à des traitements sur lesquels peu d'explications lui sont données. S'il exprime des réticences vis-à-vis du traitement, ou du transfert décidé vers un autre service, le médecin doit s’efforcer de lui expliquer et de le convaincre.

    Ces explications sont d'autant plus recommandables que le patient se trouve assez souvent pris par une obligation de fait de donner son consentement, dans un établissement hospitalier ou certains organismes de soins, parce qu'il ne voit pas pour lui d'alternative. L'alternative doit toujours exister et être signalée au patient. Quand le patient est réticent, il ne faut pas hésiter à lui faciliter l'accès à un consultant pour un "deuxième avis" et faire appel à son médecin traitant, avec lequel il décidera.

    6 - Domaines  particuliers

    Dans des domaines particuliers dont le nombre ne cesse de croître, le législateur est intervenu pour rappeler la nécessité du consentement écrit du patient avant l'exécution d'un acte médical et pour en fixer les modalités.

    • Interruption volontaire de grossesse : la femme,  majeure ou mineure (article L.2212-7 du code de la santé publique), confirme par écrit sa demande une semaine après la première consultation sauf dans le cas où le terme de douze semaines risquerait d’être dépassé article L.2212-5 du code de la santé publique).
    • Stérilisation à visée contraceptive : la personne confirme par écrit sa demande à l’issue du délai de quatre mois suivant la première consultation (article L.2123-2 du code de la santé publique).
    •  Recherche impliquant la personne humaine : il est exigé de recueillir par écrit le consentement libre et éclairé d’une personne qui accepte, après avoir reçu l’information prévue à l’article L.1122-1, de se prêter à une recherche (article L.1122-1-1 du code de la santé publique).
    • Prélèvement d’organes, tissus, cellules et produits du corps humain

    Il ne peut être procédé au prélèvement que si le donneur, dûment informé de l’objet du prélèvement ou de la collecte et de leurs conséquences et des risques qui y sont attachés, a donné par écrit son consentement (article L.1241-1 du code de la santé publique).

    Si la personne décédée était mineure, un prélèvement post-mortem ne peut avoir lieu qu’à la condition que chacun des titulaires de l’autorité parentale ou le tuteur y consente par écrit (article L.1232-2 du code de la santé publique).

    •  Examen des caractéristiques génétiques d’une personne et identification d’une personne par ses empreintes génétiques :

    Lorsque l’examen est entrepris à des fins médicales, le consentement exprès de la personne doit être recueilli par écrit après qu’elle a été dûment informée de sa nature et de sa finalité (articles 16-10 et 16-11 du code civil ; article R.1131-4 du code de la santé publique).

    • Don et utilisation de gamètes

    Le consentement du donneur et s’il fait partie d’un couple, celui de l’autre membre du couple sont recueillis par écrit et peuvent être révoqués à tout moment jusqu’à l’utilisation des gamètes (article L.1244-2 du code de la santé publique).


    ([1]) Article L.1111-4, 4ème alinéa du code de la santé publique : « Lorsque la personne est hors d'état d'exprimer sa volonté, aucune intervention ou investigation ne peut être réalisée, sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance prévue à l'article L. 1111-6, ou la famille, ou à défaut, un de ses proches ait été consulté. »
    Article L.1111-6 du code de la santé publique : « Toute personne majeure peut désigner une personne de confiance qui peut être un parent, un proche ou le médecin traitant, et qui sera consultée au cas où elle-même serait hors d'état d'exprimer sa volonté et de recevoir l'information nécessaire à cette fin. Cette désignation est faite par écrit. Elle est révocable à tout moment. Si le malade le souhaite, la personne de confiance l'accompagne dans ses démarches et assiste aux entretiens médicaux afin de l'aider dans ses décisions.
    Lors de toute hospitalisation dans un établissement de santé, il est proposé au malade de désigner une personne de confiance dans les conditions prévues à l'alinéa précédent. Cette désignation est valable pour la durée de l'hospitalisation, à moins que le malade n'en dispose autrement. Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas lorsqu'une mesure de tutelle est ordonnée. Toutefois, le juge des tutelles peut, dans cette hypothèse, soit confirmer la mission de la personne de confiance antérieurement désignée, soit révoquer la désignation de celle-ci. »

    ([2]) Article L.1111-5 du code de la santé publique : « Par dérogation à l'article 371-2 du code civil, le médecin peut se dispenser d'obtenir le consentement du ou des titulaires de l'autorité parentale sur les décisions médicales à prendre lorsque le traitement ou l'intervention s'impose pour sauvegarder la santé d'une personne mineure, dans le cas où cette dernière s'oppose expressément à la consultation du ou des titulaires de l'autorité parentale afin de garder le secret sur son état de santé. Toutefois, le médecin doit dans un premier temps s'efforcer d'obtenir le consentement du mineur à cette consultation. Dans le cas où le mineur maintient son opposition, le médecin peut mettre en œuvre le traitement ou l'intervention. Dans ce cas, le mineur se fait accompagner d'une personne majeure de son choix.… »

    ([3]) Article 459-1 du code civil : « L'application de la présente sous-section ne peut avoir pour effet de déroger aux dispositions particulières prévues par le code de la santé publique et le code de l'action sociale et des familles prévoyant l'intervention d'un représentant légal.
    Toutefois, lorsque la mesure a été confiée à une personne ou un service préposé d'un établissement de santé ou d'un établissement social ou médico-social dans les conditions prévues à l'article 451, et que cette personne ou ce service doit soit prendre une décision nécessitant l'autorisation du juge ou du conseil de famille en application du troisième alinéa de l'article 459, soit accomplir au bénéfice de la personne protégée une diligence ou un acte pour lequel le code de la santé publique prévoit l'intervention du juge, ce dernier peut décider, s'il estime qu'il existe un conflit d'intérêts, d'en confier la charge au subrogé curateur ou au subrogé tuteur, s'il a été nommé, et à défaut à un curateur ou à un tuteur ad hoc. »

    ([4]) Article L. 3212-1 et suivants ; article L. 3213-1 et suivants du code de la santé publique

    (5) A propos d’un Témoin de Jéhovah, transfusé sans son consentement : Conseil d’Etat, référé, 16 août 2002 – Feuillatey – n° 249552 : « Considérant que le droit pour le patient majeur de donner, lorsqu’il se trouve en état de l’exprimer, son consentement à un traitement médical revêt le caractère d’une liberté fondamentale ; que toutefois les médecins ne portent pas à cette liberté fondamentale, telle qu’elle est protégée par les dispositions de l’article 16-3 du code civil et par celles de l’article L.1111-4 du code de la santé publique, une atteinte grave et manifestement illégale lorsqu’après avoir tout mis en œuvre pour convaincre un patient d’accepter les soins indispensables, ils accomplissent, dans le but de tenter de la sauver, un acte indispensable à sa survie et proportionné à son état ; que le recours dans de telles conditions, à un acte de cette nature n’est pas non plus manifestement incompatible avec les exigences qui découlent de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et notamment de son article 9 ; »

  • Article 37 - Soulagement des souffrances - Limitation ou arrêt des traitements

    Article 37 (article R.4127-37 du code de la santé publique)

    I. - En toutes circonstances, le médecin doit s'efforcer de soulager les souffrances du malade par des moyens appropriés à son état et l'assister moralement. Il doit s'abstenir de toute obstination déraisonnable dans les investigations ou la thérapeutique et peut renoncer à entreprendre ou poursuivre des traitements qui apparaissent inutiles, disproportionnés ou qui n'ont d'autre objet ou effet que le maintien artificiel de la vie.

     
    II. - « Dans les cas prévus au cinquième alinéa de l'article L. 1111-4 et au premier alinéa de l'article L. 1111-13, la décision de limiter ou d'arrêter les traitements dispensés ne peut être prise sans qu'ait été préalablement mise en œuvre une procédure collégiale. Le médecin peut engager la procédure collégiale de sa propre initiative. Il est tenu de le faire au vu des directives anticipées du patient présentées par l'un des détenteurs de celles-ci mentionnés à l'article R. 1111-19 ou à la demande de la personne de confiance, de la famille ou, à défaut, de l'un des proches. Les détenteurs des directives anticipées du patient, la personne de confiance, la famille ou, le cas échéant, l'un des proches sont informés, dès qu'elle a été prise, de la décision de mettre en œuvre la procédure collégiale. » ;

    « La décision de limitation ou d'arrêt de traitement est prise par le médecin en charge du patient, après concertation avec l'équipe de soins si elle existe et sur l'avis motivé d'au moins un médecin, appelé en qualité de consultant. Il ne doit exister aucun lien de nature hiérarchique entre le médecin en charge du patient et le consultant. L'avis motivé d'un deuxième consultant est demandé par ces médecins si l'un d'eux l'estime utile.
    « La décision de limitation ou d'arrêt de traitement prend en compte les souhaits que le patient aurait antérieurement exprimés, en particulier dans des directives anticipées, s'il en a rédigé, l'avis de la personne de confiance qu'il aurait désignée ainsi que celui de la famille ou, à défaut, celui d'un de ses proches.
    « Lorsque la décision de limitation ou d'arrêt de traitement concerne un mineur ou un majeur protégé, le médecin recueille en outre, selon les cas, l'avis des titulaires de l'autorité parentale ou du tuteur, hormis les situations où l'urgence rend impossible cette consultation.
    « La décision de limitation ou d'arrêt de traitement est motivée. Les avis recueillis, la nature et le sens des concertations qui ont eu lieu au sein de l'équipe de soins ainsi que les motifs de la décision sont inscrits dans le dossier du patient. »
    « La personne de confiance, si elle a été désignée, la famille ou, à défaut, l'un des proches du patient sont informés de la nature et des motifs de la décision de limitation ou d'arrêt de traitement. »

    « III. - Lorsqu'une limitation ou un arrêt de traitement a été décidé en application de l'article L. 1110-5 et des articles L. 1111-4 ou L. 1111-13, dans les conditions prévues aux I et II du présent article, le médecin, même si la souffrance du patient ne peut pas être évaluée du fait de son état cérébral, met en œuvre les traitements, notamment antalgiques et sédatifs, permettant d'accompagner la personne selon les principes et dans les conditions énoncés à l'article R. 4127-38. Il veille également à ce que l'entourage du patient soit informé de la situation et reçoive le soutien nécessaire. »

    « Ne sais-tu pas que la source de toutes les misères pour l’homme ce n’est pas la mort, mais la crainte de la mort ? » Epictète (50 – 125 après J. C.), Entretiens.

    Nul ne peut être le spectateur de sa mort, c’est la mort de l’autre qui cause l’effroi. Notre société ne veut plus assumer l’agonie, elle a, peu à peu, fait disparaître les rituels entourant la mort pour en faire un événement banal, une abstraction qui ne trouble pas les bien portants.

    L’être humain redoute la mort mais plus encore le spectacle de la souffrance, de la déchéance, il désire pour les autres et pour lui-même une mort apaisée et rapide.

    La médiatisation de ces idées a suscité une réflexion politique avec la création d’une « mission parlementaire sur l’accompagnement de la fin de vie », présidée par M. Jean Leonetti, cardiologue de formation. Cette mission a procédé à de nombreuses auditions de personnalités de la société civile. Au terme de ces consultations, une proposition de loi a été votée, par les deux chambres, pour aboutir à un dispositif juridique relatif aux droits des malades et à la fin de vie : la loi n°2005-310 du 22 avril 2005. Cette loi qui peut être considérée comme un « laisser mourir, sans faire mourir », en accompagnant la personne malade vers une fin paisible traduit une évolution de la pensée médicale.

    Le législateur a fixé les règles qui permettent au médecin de limiter ou d’arrêter des traitements devenus inutiles en évitant soigneusement de lui octroyer le droit de donner volontairement la mort. Il était légitime que, pour prendre une telle décision, la procédure collégiale à suivre soit définie par le code de déontologie médicale ; l’article 37 consacré à la prise en charge de la douleur répond à cet impératif.

    Il conserve une première partie proche de l’ancienne rédaction sur l’obstination déraisonnable et la prise en charge de la douleur, à laquelle a été ajoutée une seconde partie où est définie la procédure collégiale prévue par la loi puis plus récemment une troisième qui traite du traitement de la douleur et de la sédation en fin de vie.

    Ni la loi du 22 avril 2005, ni l'article 37 du code de déontologie ne modifient les règles pénales. Le médecin en charge du patient reste libre de sa décision, il en reste le seul responsable  et doit pouvoir la justifier a posteriori.
     

    I - DOULEUR ET OBSTINATION DERAISONNABLE

    1. Douleur

    Le soulagement de la douleur fait partie des missions principales de la médecine. Au cours du siècle passé, l’enthousiasme soulevé par les technologies nouvelles, une certaine philosophie du dolorisme, la crainte de nuire avec les prescriptions d’antalgiques majeurs diabolisés par la loi de 1916 sur les médicaments dits stupéfiants, le respect de la « douleur symptôme » alors nécessaire au diagnostic (voir note [1]) ont occulté ce devoir primordial.

    Pourtant de tout temps, les médecins s’étaient attachés à soulager la douleur. Hippocrate disait que « c’est faire œuvre divine que soulager la douleur » et souvenons-nous qu’à son époque les médecins se disaient d’ascendance divine par Asclépios, fils d’Apollon.

    Au XVIIème siècle, c’est Sydenham qui déclare : « Praxim nolim exercere si carerem opi». Ce que Trousseau traduit deux siècles plus tard : « Sans opium, il n’y a pas de médecine possible ».

    Dans la deuxième partie du XXème siècle, sous l’impulsion des anglo-saxons, mais également en France grâce à des pionniers tels que le Dr François Bourreau, la douleur n’a plus été considérée seulement comme un symptôme d’alerte, mais comme un élément important de l’affection du malade, devenant même parfois maladie à part entière qu’il fallait prendre en compte et traiter.

    Le comportement du patient, en réponse à la douleur physique, varie en fonction de sa personnalité, de sa culture, de son niveau émotionnel, de son angoisse existentielle ; révolte ou résignation, plainte ou silence, repliement sur soi, agressivité sont les mécanismes psychiques d’adaptation de la souffrance du patient, que devra interpréter le médecin. Il doit tenir le plus grand compte de ce qu’exprime la personne malade, même s'il ne trouve pas de cause à la douleur.

    La loi (voir note [2]) consacre  le droit de toute personne malade dont l'état le requiert à accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement, et à s'opposer à toute investigation ou thérapeutique. Prolongeant les efforts faits depuis 1980 par la communauté médicale française, elle impose le développement des services et unités de soins palliatifs dans les établissements hospitaliers, organise la formation initiale et continue des médecins à cette prise en charge, la recherche et l'évaluation dans ce domaine (voir note [3]).

    2- Rôle du médecin

    Devant le patient qui souffre, l'incurable ou le mourant (article 38), le médecin obéit à un double impératif : assurer le contrôle de sa douleur et sa prise en charge psychologique. L'intervention du médecin ne peut se réduire aux seuls actes techniques qui mettent en jeu sa compétence et son expérience. Il aura une écoute attentive, de la compréhension, de la discrétion et manifestera tout ce que lui dictent sa conscience et son humanité (voir note [4]).

    1. L'approche du patient ayant une douleur aiguë ou celle du patient douloureux chronique, évoluant depuis plusieurs mois ou même années et dont l'histoire est parsemée d'échecs thérapeutiques, demande au praticien une attention particulière pour évaluer la douleur et décrypter l'expression de la souffrance.

    L'importance de l'entretien initial doit être soulignée. Certains repères (voir note 5) méritent d'être cités : le praticien doit montrer au patient qu'il reconnaît la réalité de sa souffrance, lui faire exprimer les interprétations qu'il a pu faire du discours médical antérieur, ne pas se présenter comme "le sauveur" d'une situation que le patient considère comme désespérée, éviter certains préjugés en faveur d'une organicité ou d'une cause psychologique systématique ou de la recherche par le patient d'un avantage économique ; donner au patient sur "son mal" toutes les précisions qu'il sollicite, ses causes et leurs conséquences, dans un langage clair et adapté à son niveau de compréhension (article 35). La démarche étiologique est l'étape suivante ; elle demande une réflexion clinique approfondie et le recours à des investigations complémentaires accompagnées d'un traitement simultané de la douleur.

    1. Le traitement de la douleur fait appel à des moyens thérapeutiques variés, dont la mise en  œuvre est actuellement bien codifiée : médicaments antalgiques et co-analgésiques, techniques anesthésiques et neurochirurgicales, kinésithérapie, etc. ; l'emploi des stupéfiants tient une place importante.

    Les obstacles, de principe ou pratiques, à la prescription adéquate d'antalgiques doivent être levés, sans pour autant que soient favorisés des abus ou détournements à des fins de toxicomanie. L'assouplissement de la délivrance des stupéfiants ne supprime pas les risques auxquels sont exposés médecins et pharmaciens, mais ces professionnels connaissent d'autres risques et doivent prendre toutes dispositions pour faciliter le traitement des patients qui en ont besoin.

    La loi du 22 avril 2005 rappelle, s’il en est besoin, que le médecin, lorsqu’il prescrit un traitement peut prendre, pour soulager la douleur, les risques nécessaires et proportionnés à l’état du patient (voir note 6). Mais n’est-ce pas là le fait de toute prescription médicale qui comporte une évaluation rigoureuse des risques et bénéfices escomptés ? L’intention doit être le soulagement de la douleur, à l’exclusion de tout autre but inavoué. Bien prescrits, d’ailleurs, les morphiniques ne comportent pas les risques qu’on leur attribue trop souvent et il serait regrettable que les médecins, comme le public, reviennent aux vieilles craintes dans ce domaine. Ce que l’on appelle, sans doute à tort, « le double effet » doit être compris comme l’application d’un traitement dans le seul but de soulager le patient même si le risque de complication existe. L’article 38 du code de déontologie médicale affirme que le médecin « ne doit pas provoquer délibérément la mort ». Si le patient est conscient, il doit recevoir des explications claires sur le traitement et ses risques. Il ne s’agit pas d’abréger les derniers instants, il ne s’agit pas de « voler la mort » du patient qui peut, au terme de son existence, avoir encore à vivre des moments de relation intenses. La prescription de morphiniques ou de sédatifs chez ce patient, dont la souffrance peut être évaluée, n'est pas systématique, mais répond à un besoin et à une indication médicale précise.

    3 - Obstination déraisonnable

    La complexité de la décision médicale, devant le patient en fin de vie, est abordée dans cet article. Il précise, en effet, que le médecin doit éviter toute obstination déraisonnable dans les investigations et la thérapeutique ; en d'autres termes, il doit se garder de l'acharnement thérapeutique.

    La question se pose avec acuité lorsque le praticien se prononce sur l'incurabilité. Deux possibilités d'erreur sont à évoquer. L'erreur par défaut : l’affection est curable et le médecin renonce trop tôt ; ou au contraire, l'erreur par excès : le médecin impose des investigations invasives, sans projet thérapeutique, et des soins douloureux, difficiles à supporter pour le patient, afin de prolonger sa vie de quelques jours. Le chemin est souvent étroit entre soigner, ce qui est la vocation du médecin et l’obstination déraisonnable qui peut le conduire à faire endurer à son patient des épreuves aussi inutiles que pénibles et souvent douloureuses.

    Dans cette prise de décision interviennent non seulement le médecin, grâce à l'évaluation médicale de la situation, du pronostic, des résultats attendus, mais aussi le patient et ses proches. Là encore, une écoute attentive de la personne malade, de ses souhaits, de sa souffrance, un profond respect de sa liberté et de sa volonté, une bonne communication avec sa famille, sont nécessaires pour maintenir un climat de confiance (voir note 7).

    La loi du 22 avril 2005 confirme tout en la précisant, la liberté de chacun de refuser un traitement (voir note 8). Mais le médecin ne doit pas se contenter d’un refus, même écrit et signé, pour dégager sa responsabilité tant morale et déontologique que civile et pénale. Il doit tout faire pour convaincre le patient d’accepter l’intervention ou les soins utiles, a fortiori lorsque leur refus ou leur interruption met la vie du patient en danger. Il dispose d’un délai raisonnable et il ne doit pas hésiter à demander l’intervention d’un confrère.

    Le législateur n’a pas désiré fixer la durée de ce délai, conscient que celui-ci est fonction de la situation et du degré d’urgence éventuel. Il appartient au médecin de l’apprécier en conscience.

    Lorsque la personne malade persiste dans son refus des soins proposés, la mission du médecin ne prend pas fin pour autant. Le traitement des souffrances physiques comme psychologiques doit rester sa préoccupation, après avoir manifesté avec humanité son désaccord sur cette décision. Si le lien de confiance est rompu, le praticien peut faire appel à un confrère sans jamais laisser penser qu'il abandonne son patient.

    II - MALADE HORS D’ETAT D’EXPRIMER SA VOLONTE

    La loi du 22 avril 2005 pose en principe, dans son article premier, que les actes médicaux « ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable. Lorsqu’ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou n’ayant d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris…. ». Il appartient au médecin de juger de la nécessité d’entreprendre, poursuivre ou limiter les investigations ou le traitement. L’appréciation de la pertinence d’un traitement relevant de sa seule compétence, il doit en conscience et dans l’intérêt du patient proposer le traitement le plus adapté à son état (article 8).

     Comment ce principe se décline-t-il lorsque le patient est hors d’état d’exprimer sa volonté ?

    Chez une personne malade hors d’état de communiquer, lorsqu’il s’agit d’entreprendre un traitement, particulièrement dans l’urgence, le médecin décide de son opportunité et peut s’abstenir de toute thérapeutique ou investigation qu’il juge inutile. L’absence d’indication d’un traitement dans ces conditions ne relève pas de la procédure collégiale.

    1. La procédure collégiale

    Lorsque la poursuite d’un traitement se révèle inutile ou disproportionnée, et que le patient ne peut ni être informé ni consentir, la loi du 22 avril 2005 a prévu des garanties procédurales particulières (voir note 9) qui s’imposent lorsqu’il s’agit de « limiter ou d’arrêter des traitements dispensés » donc déjà entrepris (article 37-II 1° alinéa).

    Une appréciation collégiale de l’état du patient est  prévue par la loi qui a confié à la profession médicale le soin de définir cette procédure dans le code de déontologie. C’est l’objet du II de l’article 37 qui prévoit en outre la consultation de l’équipe soignante. Sa présence quotidienne auprès des personnes malades dans les services hospitaliers, comme au domicile ou dans les institutions de soins, donne aux personnels paramédicaux une connaissance aiguë du ressenti et de l’état d’esprit du patient et de son entourage. Il est indispensable de recueillir leur avis. La cohésion de l’équipe médicale et paramédicale d’un service nécessite cette concertation.

    Le médecin traitant habituel doit, si possible, être consulté quand il ne fait pas partie de l’équipe soignante en charge du patient.

    Elle comporte plusieurs étapes :

    • Le médecin doit s’enquérir des souhaits du patient antérieurement exprimés à travers d’éventuelles directives anticipées telles qu’elles ont été définies par la loi (voir note 10). Si le patient a souhaité dans ses directives anticipées que la procédure prévue lui soit appliquée, celle-ci s'impose au médecin, sans que toutefois il soit tenu d'adopter telle ou telle attitude (II-1er alinéa.).

    Car la décision du médecin n’est pas liée par ces directives mais la loi prévoit clairement qu’il doit en tenir compte après en avoir vérifié la validité. Leur valeur peut apparaître relative, dans certains cas, car nul ne peut préjuger de son attitude dans telle ou telle situation tant qu’elle ne s’est pas effectivement présentée à lui. Néanmoins le contexte dans lequel elles ont été rédigées, particulièrement la connaissance éclairée  que le patient avait de la maladie en cours et de son évolution, prendra ici une importance toute particulière. Si, à terme la décision n'apparaît pas conforme aux désirs exprimés dans les directives anticipées le médecin doit d'autant plus la motiver dans le dossier du patient.

    • La personne de confiance doit être consultée - et selon la loi, son avis sur les décisions d’investigation, d’intervention ou de traitement (voir note 11) prévaut sur tout autre avis non médical - elle peut demander la mise en  œuvre de la procédure ; à défaut la famille et les proches sont entendus et peuvent demander  son application ; une telle demande doit toujours être prise en considération et entraîner la mise en œuvre de la procédure. Dans ces circonstances difficiles, l’entourage du patient a besoin d’être entendu et soutenu ; il pourra  faire part de l’opinion qu’aurait antérieurement exprimée le patient ; toutes les explications nécessaires lui sont apportées, avant et au moment de la décision. La prise en charge des proches ne s’arrête pas avec le décès. Il importe de rester disponible à l’accueil et à l’écoute et de favoriser  l’acceptation du deuil.
    • La procédure collégiale proprement dite prévoit de recueillir l’avis motivé d’au moins un autre médecin appelé à titre de consultant :

    Définie dans le code de déontologie (article 60), la notion de « consultant » renvoie à un médecin qui dispose des connaissances, de l’expérience, et, puisqu’il ne participe pas directement aux soins, du recul et de l’impartialité nécessaires pour apprécier la situation dans sa globalité.

    Ce praticien est étranger à l’équipe en charge du patient (voir note 12) et s’il doit être compétent dans le domaine de l’affection en cause, il n’est pas obligatoirement un spécialiste ou un expert de la question. Non pas que les avis techniques d’experts soient superflus, mais ils interviennent plus tôt, en amont de la décision. Il n’est pas non plus nécessairement un spécialiste de l’éthique, mais son expérience, ses capacités professionnelles et humaines doivent lui permettre une analyse claire de la question. En possession de toutes les données concernant la situation de la personne malade, il doit, non seulement apporter un avis éclairé, mais aussi aider, par un échange confraternel, le praticien qui le consulte à mener à terme sa réflexion dans l’intérêt du patient.

    Par sa présence auprès du patient, il conforte les proches dans l’assurance qui leur est due que la décision sera, en tout état de cause, prise de manière raisonnée et raisonnable.

    Bien que, comme le code de déontologie l’affirme par ailleurs (articles 5, 69), il ne puisse exister aucun lien de dépendance professionnelle entre ces deux médecins, l’article 37 précise, pour éviter tout risque de pression, réel ou redouté, qu’il ne doit exister « aucun lien de nature hiérarchique » entre les deux médecins. Cela exclut en particulier du rôle de consultant les médecins qui auraient entre eux un lien administratif de nature hiérarchique.

    • C’est une appréciation médicale de l’état global du patient qui est demandée ; elle peut se faire, par exemple, en référence aux « règles de bonnes pratiques » élaborées par les sociétés savantes.

    Ni la loi ni le code n’exigent le consensus entre les médecins mais il est difficile d’imaginer qu’une telle décision soit prise par le praticien en charge du patient en cas de désaccord. Aussi l’article 37 prévoit-il la consultation d’un troisième praticien si l’un des deux médecins le juge utile. Dans les cas difficiles, même si l’appréciation de la situation du patient est dans l’ensemble partagée entre les deux premiers praticiens, il peut persister des incertitudes justifiant de faire appel à un avis complémentaire.

    In fine la décision appartient au seul médecin en charge du patient après qu’il a respecté la procédure collégiale ici définie. Comme toute décision médicale, il s’agit d’une décision individuelle (article 69) qui engage la responsabilité de celui qui la prend.  Les noms et qualités des personnes consultées sont  mentionnés, le médecin consultant rédige son avis et le signe, les étapes de cette procédure et les éléments qui motivent la décision sont consignés dans le dossier médical du patient, des explications claires et adaptées sont fournies à l'entourage.

    2 - Accompagnement du patient

    Lorsque cette procédure collégiale aboutit à une décision d'arrêt des soins qui maintiennent le patient artificiellement en vie, la prise en charge médicale ne cesse pas pour autant. C’est ce que rappelle le III de l’article 37, ajouté par le décret n°2010-107 du 29 janvier 2010.

    Il est des cas où l'évaluation de la douleur devient impossible bien que les médecins, les autres soignants, l'entourage, aient des doutes sur une possible souffrance. Dans l'incertitude, la prescription d'antalgiques et de sédatifs devient nécessaire, elle doit être adaptée et proportionnée ; il ne s'agit en aucun cas de provoquer délibérément la mort comme le condamne l'article 38 du présent code.

    Il s'agit d'assurer, autant que faire se peut,  à ce patient dont l'état cérébral trop altéré ne permet pas de mesurer la souffrance, une prise en charge comparable à celle d'un patient encore capable de communiquer. Rien n'est plus difficile à supporter, pour la famille, les proches, mais les soignants aussi, que la pensée que ce patient a beaucoup souffert dans ses derniers moments.

    La transparence est de la plus haute importance, nul ne doit pouvoir croire qu’une telle décision a pu être prise sans avoir été pesée et discutée. A toutes les étapes de la procédure, la personne de confiance (voir note 13), la famille ou à défaut l'entourage le plus proche doivent être tenus au courant des questions qui se posent et des démarches entreprises, des décisions prises et de leurs motivations. Ils doivent être consultés et écoutés, leurs demandes même si elles ne peuvent pas toujours être satisfaites, doivent être  prises en considération.


    ([1]) « L’injection immédiate de morphine, en effet, équivaut à éteindre sa lampe au moment de chercher quelque chose dans l’obscurité », H. MONDOR : « Diagnostics urgents de l’abdomen »

    ([2]) Article L.1110-5, 3ème alinéa du code de la santé publique : « Toute personne a le droit de recevoir des soins visant à soulager sa douleur. Celle-ci doit être en toute circonstance prévenue, évaluée et traitée. »

    Article L.1110-9 du code de la santé publique : « Toute personne malade dont l'état le requiert a le droit d'accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement. »

    ([3]) Article L.6114-2 du code de la santé publique ; articles  L. 313-2 et L.313-12.du code de l’action sociale et des familles

    ([4]) Déontologie médicale et soins palliatifs - Ordre national des médecins, 1996

    (5) P. QUENEAU, G. OSTERMANN, « Le médecin, le patient et sa douleur – Comment border le malade souffrant », p. 45-51 - Masson 1994

    (6) Article L.1110-5, deuxième alinéa du code de la santé publique : « Ces actes ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable. Lorsqu'ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou n'ayant d'autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris. Dans ce cas, le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa vie en dispensant les soins visés à l'article L. 1110-10. »

    (7) J.-M. BOLES, Enjeux éthiques en réanimation, Traité de bioéthique, Tome III édition Erès 2010

    (8) Article L. 1111-4 du code de la santé publique : «Toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu'il lui fournit, les décisions concernant sa santé.

    Le médecin doit respecter la volonté de la personne après l'avoir informée des conséquences de ses choix. Si la volonté de la personne de refuser ou d'interrompre tout traitement met sa vie en danger, le médecin doit tout mettre en œuvre pour la convaincre d'accepter les soins indispensables. Il peut faire appel à un autre membre du corps médical. Dans tous les cas, le malade doit réitérer sa décision après un délai raisonnable. Celle-ci est inscrite dans son dossier médical. Le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa fin de vie en dispensant les soins visés à l'article L. 1110-10.
    Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment.
    Lorsque la personne est hors d'état d'exprimer sa volonté, aucune intervention ou investigation ne peut être réalisée, sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance prévue à l'article L. 1111-6, ou la famille, ou à défaut, un de ses proches ait été consulté.
    Lorsque la personne est hors d'état d'exprimer sa volonté, la limitation ou l'arrêt de traitement susceptible de mettre sa vie en danger ne peut être réalisé sans avoir respecté la procédure collégiale définie par le code de déontologie médicale et sans que la personne de confiance prévue à l'article L. 1111-6 ou la famille ou, à défaut, un de ses proches et, le cas échéant, les directives anticipées de la personne, aient été consultés. La décision motivée de limitation ou d'arrêt de traitement est inscrite dans le dossier médical.… »

    (9) Article L.1111-4, 4ème alinéa du code de la santé publique : « Lorsque la personne est hors d'état d'exprimer sa volonté, aucune intervention ou investigation ne peut être réalisée, sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance prévue à l'article L. 1111-6, ou la famille, ou à défaut, un de ses proches ait été consulté. »
    Article L.1111-13 du code de la santé publique : «  Lorsqu'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, est hors d'état d'exprimer sa volonté, le médecin peut décider de limiter ou d'arrêter un traitement inutile, disproportionné ou n'ayant d'autre objet que la seule prolongation artificielle de la vie de cette personne, après avoir respecté la procédure collégiale définie par le code de déontologie médicale et consulté la personne de confiance visée à l'article L. 1111-6, la famille ou, à défaut, un de ses proches et, le cas échéant, les directives anticipées de la personne. Sa décision, motivée, est inscrite dans le dossier médical.
    Le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa fin de vie en dispensant les soins visés à l'article L. 1110-10. »

    (10) Article L.1111-11 : «  Toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées pour le cas où elle serait un jour hors d'état d'exprimer sa volonté. Ces directives anticipées indiquent les souhaits de la personne relatifs à sa fin de vie concernant les conditions de la limitation ou l'arrêt de traitement. Elles sont révocables à tout moment.
    A condition qu'elles aient été établies moins de trois ans avant l'état d'inconscience de la personne, le médecin en tient compte pour toute décision d'investigation, d'intervention ou de traitement la concernant.
    Un décret en Conseil d'Etat définit les conditions de validité, de confidentialité et de conservation des directives anticipées. »
    Voir décret n° 2006-119 du 6 février 2006 : articles R.1111-17 à R.1111-20 du code de la santé publique

    (11) Article L.1111-12 du code de la santé publique : «  Lorsqu'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause et hors d'état d'exprimer sa volonté, a désigné une personne de confiance en application de l'article L. 1111-6, l'avis de cette dernière, sauf urgence ou impossibilité, prévaut sur tout autre avis non médical, à l'exclusion des directives anticipées, dans les décisions d'investigation, d'intervention ou de traitement prises par le médecin. »

    (12) P. HECQUARD, « Article R.4127-37 du code de la santé publique et médecins coordonnateurs d’EHPAD, de réseaux de soins palliatifs et de services d’hospitalisation à domicile », 26 juin 2009

    (13) I. KAHN-BENSAUDE, « La personne de confiance », rapport adopté par le CNOM le 8 octobre 2010,

  • Article 38 - Soins aux mourants - accompagnement

    Article 38 (article R.4127-38 du code de la santé publique)

    Le médecin doit accompagner le mourant jusqu'à ses derniers moments, assurer par des soins et mesures appropriés la qualité d'une vie qui prend fin, sauvegarder la dignité du malade et réconforter son entourage.
    Il n'a pas le droit de provoquer délibérément la mort.

    1 - L'accompagnement de l'agonie est l'ultime responsabilité du médecin. Un médecin ne peut abandonner son patient lorsque celui-ci aborde sa "dernière maladie". (voir note 1)

    Lorsque tout espoir de guérison disparaît, le médecin doit poursuivre sa mission auprès du patient et de sa famille. Il doit faire "l'analyse des besoins" corporels, psychiques, sociaux et surtout prendre en compte la douleur et la souffrance du patient (article 37).

    2 - Quand un traitement s'impose, soit pour prolonger la vie, soit pour améliorer la qualité de la vie, le médecin doit respecter la volonté de la personne malade, mais observer ce principe ne le dégage pas de sa responsabilité.

    Elucider la demande et évaluer les besoins fondamentaux du patient exige du thérapeute une recherche particulière qui pourra le conduire à privilégier les soins palliatifs par rapport aux soins curatifs et à proposer les différentes options qui peuvent le mieux correspondre aux impératifs du patient : maintien à domicile, transfert en milieu hospitalier ou en unité de soins palliatifs.

    La démarche éthique en ce domaine est d’évoluer vers une véritable "alliance thérapeutique". En effet, à ce stade de la fin de la vie, le médecin ne peut que permettre un véritable choix au patient et cela par une information complète dans le respect de sa volonté, dans la mesure où il peut encore l'exprimer ou en tenant compte de celle qu'il a pu antérieurement exprimer notamment dans des directives anticipées.

    3 - Le patient a le droit de savoir que sa mort approche et le droit de ne pas le savoir. Bien des patients n'osent pas formuler cette angoisse de mort qu'ils pressentent à travers leurs douleurs, la perte progressive de leurs forces physiques, de leur lucidité. Ils se savent gravement malades et feignent parfois de l'ignorer, avec l'aide complice de leur entourage. Ce n'est pas au médecin de leur faire violence en leur annonçant une mort prochaine, mais ne doit-il pas les aider, avec délicatesse et compassion, à en prendre conscience ? L'attitude souvent préconisée est de laisser parler le malade, lui-même, de sa mort. Cette attitude, dite d'écoute active, consiste à répondre à une question du patient par une autre question (requestionnement) afin de discerner les informations qu'il possède déjà, dans le but aussi de ne pas bouleverser les repères qu'il s'est donnés pour ne pas s'abandonner au désespoir, croire qu'il peut guérir ou vivre encore, en maintenant des échanges de qualité, y compris sur des points sensibles.

    Il est nécessaire d'accompagner ainsi la personne malade dans sa réflexion ultime "sur le sens de la vie dans sa finitude, ses limites et sa fragilité". "Reconnaissons qu'il y a une immense différence entre dire à quelqu'un "vous allez mourir" et le laisser dire "je vais mourir". Celui qui dit à un médecin ou à un proche "je vais mourir" reste le sujet de sa vie alors que celui qui s'entend dire "vous allez mourir" devient objet et victime de condamnation. Ainsi le respect du malade en tant que personne humaine conduit-il à souligner l'importance déontologique, non pas de l'informer de sa mort prochaine, mais de lui consacrer le temps et l'attention dont il a besoin pour rester pleinement lui-même et parler librement de ce qu'il vit, c'est-à-dire la fin de sa vie". (voir note [2])

    En établissant une relation d'une telle qualité avec le patient, le médecin reste "l'ami ultime". Il évite ainsi au patient d'être enfermé dans le silence ou "le mensonge" parfois, l'abandon progressif, la régressive dépendance physique, sa vie étant limitée à la seule souffrance. Il lui permet de se resituer dans son présent, son passé et son devenir, d'exprimer ses désirs, ses volontés, de nouer des échanges avec les soignants, amis et parents, selon des voies diversifiées, neutres et bienveillantes, qu'elles soient médicales, affectives, philosophiques ou religieuses. Il préserve ou lui redonne le droit de retrouver- au-delà de la douleur, de la souffrance et du deuil- l'estime de soi, l'homme intérieur avec les valeurs qui fondent sa dignité. (voir note [3])

    4 - Certains patients préfèrent éluder toutes les informations qui leur sont apportées sur  le diagnostic et  le pronostic les concernant (voir note [4]). Le devoir de réserve s'impose alors conformément à l'article 35 du code de déontologie ; pour ces patients, le silence est la réponse à leur désir. Il faut se garder de l'acharnement psychologique tout autant que de l'acharnement thérapeutique.

    5 - Un autre impératif s'impose au médecin respectueux de la personne en fin de vie : l'obligation du secret médical. Le médecin doit, là encore, déterminer, avec l'accord du patient et selon son degré de conscience, quelle sera l'information à donner, ou à ne pas donner à la famille ou au tiers désigné par le patient. Le généraliste, ou l'équipe médicale assurant la prise en charge du patient, est souvent entouré de personnes bénévoles (réseau de solidarité), fréquemment sans lien professionnel avec le milieu de santé, ce qui doit entraîner une vigilance particulière de chaque intervenant pour préserver le secret médical. Les associations qui organisent l'intervention des bénévoles doivent se doter d'une charte qui définit les principes qu'ils doivent respecter dans leur action : respect des opinions philosophiques et religieuses de la personne accompagnée, respect de sa dignité et de son intimité, la discrétion, la confidentialité et l'absence d'interférence dans les soins.

    6- Le soutien apporté aux familles fait partie de la mission dévolue au médecin. En effet, ces familles se trouvent souvent désorientées et désespérées, d'autant plus qu'elles manquent d'information (voir note [5]). Elles se retrouvent abandonnées à leur propre angoisse devant une hospitalisation prolongée ou le stress d'événements aigus à répétition. Elles sont aussi désorientées par le manque d'empathie avec les soignants. C'est au médecin de les informer, de les aider à accompagner le mourant et de les préparer ainsi à cette mort et à ce deuil, sans se substituer à elles. C'est aussi au médecin qu'il appartient de sensibiliser l'équipe soignante non seulement à l'accompagnement de l'agonisant mais aussi à celui des familles.

    7 - Les soins palliatifs médicalisés, à domicile, ou en milieu hospitalier et l'accompagnement des mourants constituent, à l'heure actuelle, en France, un droit reconnu par le législateur (voir note [6]) et un devoir des soignants (voir note [7]). L'acharnement thérapeutique qui prolonge l’agonie du patient par des soins inutiles et pénibles est unanimement rejeté (article 37).

    Les soins palliatifs médicalisés sont définis comme "des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire en institution ou à domicile. Ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage". Ces soins visent à diminuer ou à supprimer les symptômes d'une maladie lorsqu'il est permis d'affirmer que les diverses thérapeutiques possibles à visée curative sont devenues incapables d'obtenir la guérison. L'objectif des soins palliatifs est donc de donner au patient, en phase terminale, le maximum de confort, physique et psychique.

    Ces soins peuvent être assurés par le médecin généraliste au domicile du patient, dans des unités de soins palliatifs, ou dans des secteurs hospitaliers non spécialisés. Dans les unités de soins palliatifs, l'équipe est pluridisciplinaire et comprend des anesthésistes-réanimateurs, des généralistes, des cancérologues et des psychiatres, des infirmières et des kinésithérapeutes.

    L'accompagnement des mourants, moins médicalisé, fait appel autour de l'équipe des professionnels de santé à d'autres intervenants tels que des psychologues, diététiciens... auxquels peuvent s'associer des bénévoles et des ministres du culte. Une autre formule paraît bien adaptée à leur intervention : "accompagner la vie jusqu'à la mort". Cette prise en charge du relationnel, c'est-à-dire des composantes psychologiques, sociales et affectives du patient, en fin de vie est essentielle. Chacun de ces intervenants se révèle un collaborateur précieux de l'équipe de soins.

    8 - Le dernier alinéa de l'article 38 fonde le refus de l'euthanasie "acte de provoquer délibérément la mort".

    La déontologie médicale comme la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales condamnent formellement cette démarche, sans retour. Le Conseil de l'Europe (note [8])  recommande aux Etats membres de respecter et protéger la dignité des patients incurables et des mourants en maintenant l'interdiction absolue de mettre intentionnellement fin à leur vie. En effet, il faut tenir compte des progrès réalisés, grâce aux soins palliatifs, dans le domaine de la maîtrise de la douleur et rejeter la négation flagrante du devoir d'écoute, d'information et d'accompagnement précédemment décrit.

    9 - La société, qui rejette la médicalisation à outrance de la mort, s'interroge alors qu'elle n'a pas encore complètement intégré les soins palliatifs. De nombreux esprits restent troublés par l'attrait certain de la proposition de "mourir dans la dignité à l'heure choisie, par le moyen choisi".

    C'est un constant dilemme dans l'exercice médical : au terme d'une vie, il est parfois difficile de discerner si une demande d'euthanasie n'est pas en réalité une quête affective, ou un appel au secours, une volonté authentiquement suicidaire, ou s'il ne s'agit pas davantage d'une décision dictée par d'autres priorités personnelles.

    10 - Les arguments ne manquent pas contre une législation qui conférerait au médecin l'exorbitant pouvoir de tuer : le risque d'une erreur de diagnostic sur l'incurabilité, la difficulté d'interpréter la demande du patient, les mobiles très divers qui peuvent guider sa famille.

    Peut-on imaginer qu'un grand malade, un infirme, un vieillard ait à se demander si l'injection qui est préparée par le soignant est destinée à le soulager ou bien, avec l'accord de la famille, à le faire mourir ?

    Toute transgression dans ce domaine engage la responsabilité du médecin, sur le plan pénal et disciplinaire.

    À la dernière phase de l'existence humaine le médecin doit demeurer celui qui soigne. Accompagner signifie écouter, être compréhensif et secourable, prendre en charge les besoins somatiques et psychiques, maîtriser la douleur, apaiser l'angoisse, rompre la solitude. En d'autres termes, c'est aider le patient et sa famille à admettre et à supporter l'approche de la mort.

    L’euthanasie ne se confond pas avec la décision de limitation ou d’arrêt de thérapeutique(s) active(s) qui sous réserve qu’elle soit prise et mise en œuvre en respectant un certain nombre de règles vise à restituer son caractère naturel à la mort et représente dans les situations désespérées la seule alternative éthique à un acharnement thérapeutique, contraire au code de déontologie (article 37).


    ([1]) Article L.1110-5, 4ème alinéa du code de la santé publique : « Les professionnels de santé mettent en œuvre tous les moyens pour assurer à chacun une vie digne jusqu’à la mort. »

    ([2]) R. SCHAERER, Parler de la mort avec un malade - III° congrès international d'éthique- Mars 1991

    ([3]) J.R COURTIOL., Les soins palliatifs et l'accompagnement des mourants. Commission nationale permanente de l'Ordre national des médecins. Bulletin de l'Ordre, décembre 1993,. Hœrni B., Déontologie médicale et soins palliatifs, Ordre national des médecins, 1996

    ([4]) Article L.1111-2, 4ème alinéa du code de la santé publique : « La volonté d’une personne d’être tenue dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic doit être respectée, sauf lorsque des tiers sont exposés à un risque de transmission »

    ([5]) Article L.1110-4, 6ème alinéa du code de la santé publique : « En cas de diagnostic ou de pronostic grave le secret ne s’oppose pas à ce que la famille, les proches de la personne malade ou la personne de confiance définie à l’article L.1111-6 reçoivent les informations nécessaires destinées à leur permettre d’apporter un soutien direct à celle-ci, sauf opposition de sa part. Seul un médecin est habilité à délivrer, ou à faire délivrer sous sa responsabilité, ces informations ».

    ([6]) Article L.1110-9 du code de la santé publique : « Toute personne malade dont l'état le requiert a le droit d'accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement. »

    ([7]) Charte des soins palliatifs et de l'accompagnement, 1984, révisée en 2006 - Union Nationale des Associations pour le développement des Soins Palliatifs

    ([8]) Recommandation 1418 (1999) – Protection des droits de l’homme et de la dignité des malades incurables et des mourants - Texte adopté par le Conseil de l’Europe le 25 juin 1999

  • Article 39 - Charlatanisme

    Article 39 (article R.4127-39 du code de la santé publique)

    Les médecins ne peuvent proposer aux malades ou à leur entourage comme salutaire ou sans danger un remède ou un procédé illusoire ou insuffisamment éprouvé.
    Toute pratique de charlatanisme est interdite.

    1 - Le médecin est libre de ses prescriptions (art.8), mais le patient ne doit pas être trompé, et l'article 39 met en garde les praticiens contre l'utilisation imprudente de médications incertaines, de procédés illusoires et les affirmations abusives. Il n'est pas admissible qu'un médecin s'écarte dans ses propos d'une exactitude rigoureuse, lorsqu'il propose un traitement.

    L'expérimentation clinique et l'essai de thérapeutiques nouvelles sont soumis à des précautions très précises, qui  sont rappelées à  l'article 15. La loyauté et la prudence s'imposent en cette matière.

    2 - D'une manière plus générale, l'article 39 condamne "toute pratique de charlatanisme". Le charlatanisme, c'est l'exploitation de la crédulité publique. L'imagination des charlatans est inépuisable.

    C'est pour protéger les patients contre les charlatans que l'exercice de la médecine a été réglementé, depuis très longtemps ; d'abord par les examens et diplômes des universités ; puis par la loi qui confère aux médecins le monopole de l'exercice médical ; enfin par le contrôle de l'Ordre des médecins.

    Il serait indigne d'un médecin de se livrer à quelque tromperie que ce soit et de quelque manière que ce soit. On a ainsi pu regretter les faits suivants :

    • expliquer la maladie et le traitement par des considérations scientifiques fantaisistes ;
    • annoncer sans raison que la maladie est très grave, pour se donner l'air d'accomplir un "miracle" ;
    • donner des consultations par correspondance à partir d'un questionnaire, ou de l'examen des cheveux, voire d'une photographie ;
    • prétendre soigner par des ondes ou des radiations mystérieuses (par le "magnétisme") ;
    • se présenter indûment comme l'inventeur d'une "méthode nouvelle", etc ;
    • appliquer des attitudes prétendument thérapeutiques de nature sectaire.

    3 - Le médecin ne doit pas se servir de remèdes secrets qui ne figurent dans aucune pharmacopée et dont la composition n'est pas connue, pour exploiter le goût si répandu du "mystère", comme on l'a vu faire naguère pour la tuberculose, plus récemment pour le cancer ou le sida (article 21).

    L'article R. 5125-57 du code de la santé publique, concernant la pharmacie, interdit la vente de remèdes secrets, produits, simples ou composés, ne portant pas le nom du pharmacien producteur, ou ne portant pas le nom et la dose des substances qu'ils contiennent.

  • Article 40 - Risque injustifié

    Article 40 (article R.4127-40 du code de la santé publique)

    Le médecin doit s'interdire, dans les investigations et interventions qu'il pratique comme dans les thérapeutiques qu'il prescrit, de faire courir au patient un risque injustifié.

    Il n'est pas dit que le médecin ne doit pas faire courir de risque, mais de risque injustifié. L'adage  "Primum non nocere" ne doit pas être compris de façon trop stricte qui condamnerait le médecin à l'impuissance (son abstention pourrait être également nocive). Il n'y a pas d'intervention absolument sans danger, en médecine comme ailleurs : même une substance inactive responsable d'un effet placebo peut aussi entraîner, chez le même patient ou chez un autre, un effet nocebo.

    Aucune prescription n'est anodine. On pense volontiers, surtout dans le public, aux risques de la chirurgie et de l'anesthésie. Mais tout traitement comporte des risques, certains plus que d'autres. Les dictionnaires de spécialités pharmaceutiques indiquent les effets indésirables et les contre-indications des médicaments. Des équipes de "pharmacovigilance" enquêtent sur chaque incident signalé pour que les risques thérapeutiques soient mieux connus. Le code de déontologie italien a un article pour rappeler que "le médecin est tenu de connaître la composition, les indications, les contre-indications et les interactions des produits qu'il prescrit".

    Des investigations dites naguère "sanglantes", aujourd'hui "invasives", comme des ponctions-biopsies ou relevant de l'imagerie interventionnelle, peuvent entraîner des complications, qui seront considérées avant que l'indication en soit posée. Même des examens réputés plus anodins présentent des inconvénients, proprement toxiques ou psychologiques, qu'on ne saurait sous-estimer. La seule intervention du médecin peut avoir des conséquences défavorables, par ce qu'il fait ou prescrit, mais aussi par ce qu'il dit..

    Tous les actes du médecin relèvent de choix, parfois simples et rapides, d'autres fois plus complexes, entre des décisions qui comportent des avantages et des inconvénients. Avec ses connaissances et son expérience (article 70), il lui revient d’évaluer le rapport bénéfices/risques, de peser les enjeux, d'apprécier les risques que fait courir la maladie et, en regard, ceux de l'intervention possible et qu'il va proposer au patient. Un principe de proportionnalité intervient selon lequel l'évolution spontanée va être équilibrée par l'intervention médicale, avec ses divers termes et ses diverses conséquences, probables ou possibles.

    L'acquisition de techniques ou de thérapeutiques nouvelles ne se fait pas sans risques. Leur développement a encouragé les responsables de la santé à proposer des mesures et règles de bonne pratique visant à assurer la sécurité des patients (voir note [1]) sous le contrôle de divers établissements (Etablissement français du sang, Agence de la Biomédecine, Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé).

    La justification d'un acte médical dépend ainsi de la maladie et des données de la science médicale détenues par le médecin. Cependant elle dépend aussi et en dernier ressort du patient, comme celui-ci en témoigne en appelant ou en venant voir le médecin.

    La suite de l'intervention médicale est également déterminée par l'avis qu'il peut donner. En matière de chirurgie esthétique, pour des affections chroniques, pour des maladies menaçant la vie au même titre que les thérapeutiques nécessaires pour les combattre, en fin de vie..., les circonstances sont nombreuses où le patient a non seulement le droit de donner son avis sur un acte médical mais où le médecin a le devoir de le recueillir car cet avis peut être déterminant pour des enjeux de vie, de mutilation grave ou de mort. C'est une lourde responsabilité qui impose, encore plus que d'ordinaire, l'information du patient (articles 8, 35, 36, 41).


    ([1]) notamment hémovigilance : articles L.1221-13,  R.1221-40 et suivants du code de la santé publique ; pharmacovigilance : articles R.5121-150 et suivants du code de la santé publique ; matériovigilance : articles R.5212-1 et suivants du code de la santé publique.

  • Article 41 - Mutilation

    Article 41 (article R.4127-41 du code de la santé publique)
    (commentaires révisés en 2010 )

    Aucune intervention mutilante ne peut être pratiquée sans motif médical très sérieux et, sauf urgence ou impossibilité, sans information de l'intéressé et sans son consentement.

    L'amputation d'un membre, l'ablation d'un organe, sont lourdes de conséquences puisque irréversibles. Il va de soi que le chirurgien ne s'y décide qu'en cas de nécessité, parce que les lésions l'imposent, parce qu'agir autrement serait périlleux. Les interventions mutilantes ne sont pas seulement chirurgicales. D'autres thérapeutiques peuvent entraîner la privation d'une fonction majeure, par exemple une stérilisation à la suite d'un traitement médical ou d'une radiothérapie.

    Dans tous les cas, le consentement du patient, sauf si son état ne lui permet pas de le donner, est indispensable, encore plus qu'en d'autres circonstances (article 36).

    1 - INTERVENTIONS MUTILANTES

    1 - L'article 41 insiste sur la gravité de ces interventions. Ce sont les données relevant de l'examen clinique et des examens complémentaires qui dictent la décision.

    S'il existe pour le patient une méthode thérapeutique qui permette sans compromettre les chances de guérison, d'éviter une mutilation, elle doit être préférée. Mais ces efforts pour éviter une mutilation au patient ne doivent pas déborder les limites de la prudence. La nature des lésions, leur étendue, leur potentiel évolutif, l'état général du patient, sont les éléments déterminants de la conduite du chirurgien.

    2 - Une information claire et complète du patient sur l’intervention proposée, ses conséquences et celles d’une abstention et le recueil précis de son consentement sont plus indispensables que jamais lorsqu'on envisage la nécessité, ou même seulement l'éventualité d'une mutilation.

    Même si le patient a exprimé à son médecin une "totale confiance", il ne peut être laissé dans l'ignorance de la décision prise et il ne saurait y avoir à ce sujet un malentendu.

    3 - La rédaction de l'article 41 du code ajoute, car aucune règle déontologique n'est absolue, "sauf urgence ou impossibilité". Dans de tels cas, le chirurgien décidera parfois seul ce qui doit être fait.

    L'urgence ne dispense pas le médecin, si le patient malade ou blessé n'est pas inconscient, d'avoir avec celui-ci un entretien qui le renseigne ou le prépare, en respectant la réserve et les ménagements nécessaires à cette annonce.

    Lorsque le patient est obnubilé ou comateux, on ne peut plus parler de son consentement. La personne de confiance qu’il aurait désigné - ou un membre de la famille - doit être averti de la situation et le chirurgien expose les raisons de l'intervention qu'il propose ou la possibilité prévisible d'être amené à sacrifier un organe.

    Mais la conscience du praticien peut être mise à rude épreuve si la personne de confiance, la famille, effrayée par la gravité de l'acte envisagé et peut-être de sa propre responsabilité, oppose un refus catégorique.

    Dans cette situation, le principe de procédure collégiale prévue à l’article 37 pourrait être mis en œuvre.

    Le médecin décidera en conscience, sous sa propre responsabilité.

    4 - Ce peut être au cours de l'intervention que la nécessité d'une action mutilante apparaît. Si, autrefois, les décisions peropératoires étaient relativement fréquentes (erreur de diagnostic entre une tumeur maligne et une tumeur bénigne, erreur sur l'organe atteint : ovaire ou utérus...), actuellement, grâce aux progrès des techniques de diagnostic, de l'imagerie, de la biologie, de la cytopathologie, les rectifications de diagnostic au cours d'une intervention sont devenues rares.

    Les chirurgiens demandent aux investigations préopératoires une connaissance précise des lésions et se mettent ainsi à l'abri de surprises. Celles-ci restent cependant possibles. Il est rare alors que le chirurgien puisse interrompre l'intervention, pour avertir le patient réveillé avant de ré-intervenir. En général, il doit assumer seul la décision, en faisant prévenir, si possible, la famille ou le médecin traitant (art.36). Dans tous les cas, il devra en informer le patient dès que possible et lui expliquer sa décision.

    5 - La chirurgie du cerveau fournit une situation exemplaire parce que le neurochirurgien, au moment d'intervenir, ne sait pas toujours parfaitement ce qu'il devra faire. Souvent, il opère dans des conditions d'urgence et de gravité. La chirurgie d'exérèse des tumeurs cérébrales peut amener à des résections dont l'étendue n'était pas prévisible.

    La neurochirurgie fonctionnelle, la "psychochirurgie" (lobotomie, topectomie, coagulations) ont des indications qui doivent être pesées avec une grande circonspection. Des auteurs ont parlé de "mutilations inadmissibles" parce qu'il s'agit d'atteintes portées à la personnalité du patient, dans des conditions où un consentement valable ne peut être recueilli. Cette chirurgie n'est légitime que dans des cas très étudiés, en fonction de la gravité des symptômes et de l'impossibilité d'obtenir un résultat par d'autres méthodes.

    2 - STERILISATION CHIRURGICALE

    La suppression irréversible de la fonction de reproduction  est bien une intervention mutilante qui justifie qu’il en soit traité dans les commentaires de l’article 41.

    Pour voir clair dans ce chapitre de la déontologie, il faut distinguer les buts visés et les différentes indications de la ligature des trompes ou de la vasectomie.

    Ces interventions peuvent avoir trois sortes de motifs : thérapeutique, contraceptif, eugénique.

    1 - Stérilisation dans un but thérapeutique

    C'est la stérilisation rendue nécessaire par des lésions sérieuses de l'appareil génital. L'information et le consentement du patient sont indispensables ; il se peut toutefois que la mutilation (hystérectomie, salpingectomie double, castration) non prévue préalablement, soit décidée en cours d'intervention, mais cela est rare comme on l'a vu.

    Peut être aussi rangée sous cette rubrique la castration pratiquée comme thérapeutique complémentaire de certains cancers. Le patient doit évidemment être prévenu de l'intervention et de ses conséquences.

    2 - Stérilisation contraceptive

    Ligature des trompes et vasectomie sont le plus souvent pratiquées comme procédé définitif de contraception.

    • Cette intervention est décidée pour des raisons médicales : si l'on a des raisons de prévoir des risques obstétricaux (il a été longtemps classique de ligaturer les trompes après trois césariennes), ou si la femme est atteinte d'une affection contre-indiquant définitivement la grossesse : cardiopathie, néphropathie, toxémie gravidique récidivante, otospongiose, sclérose en plaques, certaines affections mentales...

    Elle ne peut être pratiquée sur une personne majeure dont l’altération des facultés mentales constitue un handicap, placée sous tutelle ou curatelle, que lorsqu’il existe une contre-indication médicale absolue aux méthodes de contraception ou une impossibilité avérée de les mettre en œuvre efficacement. L’intervention est subordonnée à l’autorisation du juge des tutelles après avis d’un comité d’expert (voir note 1).

    La personne concernée doit recevoir une information adaptée à son degré de compréhension et son consentement doit être systématiquement recherché. Il ne peut être passé outre à son refus.

    • Ou bien la stérilisation est envisagée, comme procédé de contraception simple et sûr, à la demande des intéressés.

    Longtemps en France, la stérilisation chirurgicale, sans motif médical a été interdite. Cependant les techniques opératoires se sont perfectionnées, permettant certains succès des tentatives ultérieures de reperméabilisation. Cette possibilité a entraîné un assouplissement des positions déontologiques, aujourd’hui consacrées par la loi.

    La stérilisation à visée contraceptive est désormais admise (voir note 2) à la demande d’une personne majeure qui a exprimé « une volonté libre, motivée et délibérée, après une information claire et complète sur les risques médicaux qu’elle encourt et les conséquences de l’intervention ». Un délai de réflexion de quatre mois doit permettre à la personne de mûrir sa décision avant de confirmer sa demande par écrit.

    Le médecin n’est jamais tenu de pratiquer cet acte mais il doit informer l’intéressé de son refus dès la première consultation.

    3 - Stérilisation eugénique

    Parfois appelé « eugénisme négatif », il s’agit de pratiques sous-tendues par une idéologie politique, sanitaire ou directement raciale, mises en œuvre pour empêcher la reproduction des « porteurs de tares » et autres « anormaux psychiques », délinquants, pervers sexuels … notamment en les stérilisant.

    Ces pratiques sont unanimement réprouvées.

    Elles se distinguent de la stérilisation assez souvent admise, sur demande d’un couple, inspirée par un conseil génétique.

     3 – TRANSSEXUALISME

     Le transsexualisme, transidentité, troubles de l’identité de genre, connu encore sous le terme de syndrome de Benjamin, tend à être plus souvent dénommé dysphorie de genre.

    « On entend par transsexuels les personnes qui tout en appartenant physiquement à un sexe, ont le sentiment d'appartenir à un autre. » (voir note 3)

    Il n'existe pas actuellement en France de législation spécifique sur ces questions, la jurisprudence prévaut.

    Le transsexualisme, au regard des organismes d'assurance maladie, n'est plus actuellement abordé sous l'angle d'une pathologie psychiatrique. En effet, le décret n°2010-125 du 8 février 2010 portant modification de l’annexe figurant à l’article D. 322-1 du code de la sécurité sociale relative aux critères médicaux utilisés pour la définition de l’affection de longue durée : "affections psychiatriques de longue durée", a supprimé les  mots " troubles précoces de l’identité de genre".

    Pour autant les médecins comme les chirurgiens sont sollicités par des  personnes qui désirent changer leur apparence afin de la mettre en conformité avec  le sexe  duquel elles se réclament.

    Le médecin et le chirurgien interviennent généralement dans un contexte de reconnaissance sociale demandée par ces personnes, qui souhaitent que soit  indiqué, sur leur état civil, le sexe dont elles ont l'apparence.

    Il convient de rappeler que la Cour de Cassation, à la suite d’une décision rendue le 25 mars 1992 par la Cour européenne des droits de l’homme (note 4), a décidé le 11 décembre 1992 en Assemblée plénière (note 5) que "lorsqu'à la suite d'un traitement médico-chirurgical subi dans un but thérapeutique, une personne présentant le syndrome de transsexualisme ne possède plus tous les caractères de son sexe d'origine et a pris une apparence physique la rapprochant de l'autre sexe, auquel correspond son comportement social, le principe du respect dû à la vie privée justifie que son état civil indique désormais le sexe dont elle a l'apparence".

    De la décision de la Cour de Cassation, il ressort que trois conditions cumulatives sont nécessaires à la satisfaction de cette reconnaissance :

    • Le syndrome de dysphorie de genre doit avoir été médicalement constaté.
    • L'intéressé(e) doit avoir subi une opération de réassignation sexuelle
    • L'intéressé(e) doit avoir adopté, outre l'apparence physique du sexe opposé, le comportement social de celui-ci.

    Toutefois, dans sa circulaire DACS n° CIV/07/10 du 14 mai 2010 relative aux demandes de changement de sexe à l’état civil, la Chancellerie rappelle que certaines juridictions du fond ont fait droit à des demandes de changement de sexe présentées par des personnes n’ayant pas subi l’opération de réassignation sexuelle mais rapportant la preuve de l’irréversibilité du processus de changement de sexe.

    Comme le précise la Haute Autorité de Santé, " le chirurgien qui pratique une opération de réassignation sexuelle doit respecter les conditions de reconnaissance de la dysphorie de genre définies par les autorités."

    Aussi, avant d'accéder à la demande d'un transsexuel, il est recommandé de prendre les précautions suivantes :

    • observation clinique prolongée et compétente (expertise endocrinologique et psychiatrique notamment pour repérer d'éventuelles contre-indications)
    • période probatoire d'au minimum une année et psychothérapie d'essai avec le concours d’un spécialiste expérimenté dans les cas de transsexualisme ;
    • consultation de plusieurs spécialistes avant de retenir l'indication d'intervenir chirurgicalement.

    Bien que sur le plan pénal, la finalité thérapeutique de la chirurgie de réassignation sexuelle confère au chirurgien l'impunité légale, ce dernier doit argumenter soigneusement sa décision et prévoir d'avoir éventuellement à s'en justifier en cas de litige ultérieur.

    Il devra également, comme l'y oblige l'article 35 du code de déontologie délivrer une information loyale, claire et appropriée  sur l'état de la personne, les investigations et les soins qu'il propose.

    Il devra recueillir le consentement libre et éclairé de la personne, et ce par écrit.

    Enfin, selon les circonstances, le médecin peut estimer se trouver dans la situation prévue à l'article 47 ; il en appliquera alors les dispositions.


    (1) Article L.2123-2 du code de la santé publique

    (2) Article L.2123-1 du code de la santé publique : « La ligature des trompes ou des canaux déférents à visée contraceptive ne peut être pratiquée sur une personne mineure. Elle ne peut être pratiquée que si la personne majeure intéressée a exprimé une volonté libre, motivée et délibérée en considération d'une information claire et complète sur ses conséquences.
    Cet acte chirurgical ne peut être pratiqué que dans un établissement de santé et après une consultation auprès d'un médecin.
    Ce médecin doit au cours de la première consultation :

    •  informer la personne des risques médicaux qu'elle encourt et des conséquences de l'intervention ;
    •  lui remettre un dossier d'information écrit.

    Il ne peut être procédé à l'intervention qu'à l'issue d'un délai de réflexion de quatre mois après la première consultation médicale et après une confirmation écrite par la personne concernée de sa volonté de subir une intervention.
    Un médecin n'est jamais tenu de pratiquer cet acte à visée contraceptive mais il doit informer l'intéressée de son refus dès la première consultation. »

    (3) CEDH, Rees c/Royaume-Uni, 10 octobre 1986, req. n° 9532/81 - point I – B / Observation de l'article 8

    (4) CEDH, B c/ France, req. n°13343/87

    (5) Cass. Ass. Plén., 11 décembre 1992, n°91-11900

  • Article 42 - Soins aux mineurs, aux majeurs protégés

    Article 42 (article R.4127-42 du code de la santé publique)


    Un médecin appelé à donner des soins à un mineur ou à un majeur protégé doit s'efforcer de prévenir ses parents ou son représentant légal et d'obtenir leur consentement.

    En cas d'urgence, même si ceux-ci ne peuvent être joints, le médecin doit donner les soins nécessaires.
    Si l'avis de l'intéressé peut être recueilli, le médecin doit en tenir compte dans toute la mesure du possible.

    1. SOINS AUX MINEURS
       

    Le médecin qui soigne un mineur doit une information loyale et précise aux parents et titulaires de l’autorité parentale. Leur consentement lui est nécessaire pour agir (article 36).

    Les parents divorcés ou séparés exercent en commun l'autorité parentale et ils doivent tous deux être prévenus et consultés pour une décision grave concernant leur enfant.

    L'article 372-2 du code civil précise néanmoins « qu'à l'égard des tiers de bonne foi, chacun des parents est réputé agir avec l'accord de l'autre, quand il fait seul un acte usuel de l'autorité parentale relativement à la personne de l'enfant ».

    Si les parents ne peuvent être prévenus en temps utile et que des soins sont urgents, le médecin peut et doit assumer lui-même la responsabilité de la décision : il donne les soins nécessaires et urgents.

    Par ailleurs, le médecin doit informer le mineur et, dans la mesure du possible, recueillir son consentement (voir note 1). Cette information est importante car elle permet aux enfants selon leur maturité de participer au colloque patient-médecin.

    À cette question se rattache celle du consentement écrit exigé par avance des parents dans beaucoup d'établissements hospitaliers pour le cas où une intervention chirurgicale serait nécessaire et urgente, alors qu'on ne pourrait les joindre. Ce "chèque en blanc" est une pratique contestable, parce que les parents ne peuvent guère refuser de signer cette '"autorisation d'opérer". Il n'atténue en rien la responsabilité morale du médecin ou du chirurgien et ne dispense pas de tout entreprendre pour avertir les parents au moment où une intervention est décidée. Aucune opération qui ne serait pas urgente ne peut être pratiquée avant qu'on les ait joints (voir note 2).

     L’article L. 1111-5 du code de la santé publique (voir note 3) ouvre une dérogation à l’autorité parentale.

    Le médecin peut se dispenser d’obtenir le consentement des représentants légaux du mineur venu le consulter si ce dernier a exprimé son opposition à l’information de ses parents pour pouvoir garder le secret sur son état de santé.

    Le médecin doit s’efforcer de convaincre le mineur de la nécessité d’informer les titulaires de l’autorité parentale ; en cas de refus, il doit s’assurer que le mineur sera accompagné d’une personne majeure avant de mettre en œuvre le traitement.

    En toute logique, ce droit du mineur au secret s’applique aussi au dossier constitué à l’occasion des soins dispensés sans l’accord des représentants légaux. Le mineur peut s’opposer à ce que ceux-ci y aient accès.

     Cette disposition nouvelle s’inscrit dans la reconnaissance de l’autonomie juridique et des droits spécifiques de l’enfant, énoncés en 1990 par la Convention relative aux Droits de l’enfant (note 3).

    L’article 12 rappelle que l’enfant est capable de discernement, qu’il a le droit d’exprimer librement son opinion sur toutes questions l’intéressant et que son avis doit être pris en considération en fonction de son âge et de sa maturité.

    Elle avait été précédée d’une modification de la loi sur l’interruption volontaire de grossesse (voir note 4) pour permettre à une mineure de demander une IVG sans l’autorisation des titulaires de l’autorité parentale.

    2- SOINS AUX MAJEURS PROTEGES

    La loi n° 2007-305 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs a conservé le principe d’autonomie de la personne ; c'est-à-dire que le majeur protégé, quel que soit le régime de protection auquel il est soumis (sauvegarde de justice, curatelle, tutelle ou mandat de protection future) prend lui-même les décisions touchant à sa personne (voir note 6).

    1- La loi pose ainsi l’obligation de laisser le majeur protégé prendre seul les décisions relatives à sa personne et, à tout le moins, impose le recueil a priori du consentement de la personne protégée par la personne en charge de la protection.

    Néanmoins, l’alinéa 2 de l’article 459 du code civil permet au juge d’adapter l’exigence du consentement à la réalité de la personne et de le prendre en compte « dans la mesure » permise par son état. Si la personne protégée ne peut prendre une décision éclairée, le juge pourra prévoir, dès l’ouverture de la mesure de protection ou ultérieurement en fonction de l’évolution de son état de santé, que le curateur ou le tuteur devra l’assister, ou, si nécessaire, que le tuteur devra la représenter dans les actes la concernant. Ainsi, même dans le cadre d’une mesure de tutelle, le juge peut limiter le rôle du tuteur à une assistance pour ce qui concerne la protection de la personne.

    Le juge peut prévoir que cette assistance ou cette représentation sera nécessaire pour l’ensemble des actes touchant à la personne ou pour certains d’entre eux seulement, ou pour une série d’actes. Il statuera au vu des éléments médicaux du dossier, figurant dans le certificat médical circonstancié initial ou recueillis ultérieurement par l’intermédiaire de la personne protégée elle-même ou par son curateur ou tuteur.

    En conséquence, si le juge n’a pas pris de décision encadrant spécifiquement la protection de la personne (par une assistance ou une représentation) comme décrit ci-dessus, le principe d’autonomie de la personne s’applique et il n’y a ni assistance ni représentation possible du majeur.

    2 - Toutefois, selon l’article 459-1 du code civil, les dispositions particulières prévues par le code de la santé publique, ainsi que par le code de l’action sociale et des familles, qui prévoient l’intervention d’un représentant légal, demeurent intégralement applicables. Le consentement du tuteur sera exigé par exemple pour une recherche impliquant la personne humaine (article L.1122-2 du code de la santé publique), une recherche sur les caractéristiques génétiques (article R.1131-4). Il faut noter que ces dispositions concernent les personnes majeures sous tutelle mais non celles placées sous d’autres régimes.

    3 - Enfin, aux termes de l’avant dernier alinéa de l’article 459 du code civil, la personne en charge d’une mesure de protection, sauf en cas d’urgence, ne peut, sans l’autorisation du juge ou du conseil de famille, « prendre une décision qui aurait pour effet de porter gravement atteinte à l’intégrité corporelle de la personne protégée ou à l’intimité de sa vie privée ». Cette disposition couvre de nombreux actes touchant à la santé de la personne, comme les interventions chirurgicales, ainsi que ceux impliquant une immixtion du curateur ou du tuteur dans la vie affective de la personne protégée ou concernant le droit à l’image de la personne protégée.

    En conséquence :

    • en cas d’urgence vitale, le médecin donne les soins qui s’imposent compte tenu de l’état du patient ; il en informe sans délai le juge et le conseil de famille s’il existe ;
    • si l’intervention notamment chirurgicale n’est pas urgente et peut être programmée :
    • soit elle est de nature à porter gravement atteinte à l’intégrité corporelle de la personne et requiert l’autorisation du juge ou du conseil de famille, s’il existe ;
    • soit elle n’a pas ce caractère et pour autant que le tuteur ait reçu un pouvoir de représentation, c’est à lui qu’il incombe de donner son consentement.

    (1) Article L.1111-4, 5ème alinéa du code de la santé publique : « Le consentement du mineur ou du majeur sous tutelle doit être systématiquement recherché s'il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision. Dans le cas où le refus d'un traitement par la personne titulaire de l'autorité parentale ou par le tuteur risque d'entraîner des conséquences graves pour la santé du mineur ou du majeur sous tutelle, le médecin délivre les soins indispensables. »

    (2) E. DUSEHU, « Soins aux patients mineurs – consentement des représentants légaux », rapport adopté par le Conseil national de l’Ordre des médecins  lors de sa session des 31 janvier et 1er février 2002,

    (3) Cette convention internationale a été adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 20 novembre 1989 et signée par la France le 26 janvier 1990.

    (4) Article. L.1111-5 du code de la santé publique : « Par dérogation à l'article 371-2 du code civil, le médecin peut se dispenser d'obtenir le consentement du ou des titulaires de l'autorité parentale sur les décisions médicales à prendre lorsque le traitement ou l'intervention s'impose pour sauvegarder la santé d'une personne mineure, dans le cas où cette dernière s'oppose expressément à la consultation du ou des titulaires de l'autorité parentale afin de garder le secret sur son état de santé. Toutefois, le médecin doit dans un premier temps s'efforcer d'obtenir le consentement du mineur à cette consultation. Dans le cas où le mineur maintient son opposition, le médecin peut mettre en œuvre le traitement ou l'intervention. Dans ce cas, le mineur se fait accompagner d'une personne majeure de son choix.
    Lorsqu'une personne mineure, dont les liens de famille sont rompus, bénéficie à titre personnel du remboursement des prestations en nature de l'assurance maladie et maternité et de la couverture complémentaire mise en place par la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle, son seul consentement est requis. »

    (5) Article L.2212-7 du code de la santé publique : « Si la femme est mineure non émancipée, le consentement de l'un des titulaires de l'autorité parentale ou, le cas échéant, du représentant légal est recueilli. Ce consentement est joint à la demande qu'elle présente au médecin en dehors de la présence de toute autre personne.
    Si la femme mineure non émancipée désire garder le secret, le médecin doit s'efforcer, dans l'intérêt de celle-ci, d'obtenir son consentement pour que le ou les titulaires de l'autorité parentale ou, le cas échéant, le représentant légal soient consultés ou doit vérifier que cette démarche a été faite lors de l'entretien mentionné à l'article L. 2212-4.
    Si la mineure ne veut pas effectuer cette démarche ou si le consentement n'est pas obtenu, l'interruption volontaire de grossesse ainsi que les actes médicaux et les soins qui lui sont liés peuvent être pratiqués à la demande de l'intéressée, présentée dans les conditions prévues au premier alinéa. Dans ce cas, la mineure se fait accompagner dans sa démarche par la personne majeure de son choix.
    Après l'intervention, une deuxième consultation, ayant notamment pour but une nouvelle information sur la contraception, est obligatoirement proposée aux mineures. »

    (6) Article 459-1 du code civil : « L'application de la présente sous-section ne peut avoir pour effet de déroger aux dispositions particulières prévues par le code de la santé publique et le code de l'action sociale et des familles prévoyant l'intervention d'un représentant légal.
    Toutefois, lorsque la mesure a été confiée à une personne ou un service préposé d'un établissement de santé ou d'un établissement social ou médico-social dans les conditions prévues à l'article 451, et que cette personne ou ce service doit soit prendre une décision nécessitant l'autorisation du juge ou du conseil de famille en application du troisième alinéa de l'article 459, soit accomplir au bénéfice de la personne protégée une diligence ou un acte pour lequel le code de la santé publique prévoit l'intervention du juge, ce dernier peut décider, s'il estime qu'il existe un conflit d'intérêts, d'en confier la charge au subrogé curateur ou au subrogé tuteur, s'il a été nommé, et à défaut à un curateur ou à un tuteur ad hoc. »

  • Article 43 - Protection de l'enfance

    Article 43 (article R.4127-43 du code de la santé publique)

    Le médecin doit être le défenseur de l'enfant lorsqu'il estime que l'intérêt de sa santé est mal compris ou mal préservé par son entourage.

    1. Opposition aux soins

    Les parents ont certes des droits légaux (art. 371-2 et suivants du code civil) non pas tant sur leur enfant que pour l’intérêt de l’enfant.

    Ces droits ne doivent pas s’exercer au détriment de la santé de l’enfant.

    L’opposition aux soins préconisés par le médecin pour l’enfant peut avoir des causes diverses : défiance, crainte, ignorance, mésintelligence entre les parents.

    Le médecin doit s’efforcer de les convaincre de la nécessité des soins, leur proposer un autre avis médical et les informer des conséquences dommageables pour     l’enfant, en cas d’abstention.

    Lorsque les efforts du médecin ont échoué mais que la situation ne présente pas un caractère d’urgence, le médecin rédigera un compte rendu :

    • précisant les données de l’examen médical et les conclusions thérapeutiques qui en découlent ;
    •  relatant les informations dispensées et la teneur des entretiens menés par le praticien, au besoin accompagné dans sa démarche par d’autres membres de l’équipe médicale.

    Il en adressera un exemplaire au Conseil départemental afin de justifier le cas échéant de son attitude.

    Lorsqu’il existe un danger grave ou que l’état de l’enfant impose une intervention urgente, le médecin passera outre l’avis des parents et dispensera les soins nécessaires (voir note[1]). Il en avisera le procureur de la République qui saisira le juge des enfants aux fins d’une mesure d’assistance éducative temporaire.

    1. Protection de l’enfance

    En dehors des cas de refus plus ou moins explicite des soins préconisés pour le mineur par les titulaires de l’autorité parentale, le médecin peut être amené à relever certains éléments qui lui laissent supposer ou craindre que l’intérêt de l’enfant (voir note [2]) est mal compris par son entourage et qu’il se trouve en situation de danger ou de risque de danger. Isolées, ces informations ne permettent pas d’évaluer la situation et de mettre en œuvre si nécessaire, les mesures d’aide à l’enfant, voire à sa famille.

    La loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance autorise désormais le partage de tels éléments qualifiés « d’informations préoccupantes » (voir note [3]) entre professionnels concernés par la protection de l’enfance (voir note [4]).

    L’article L.226-2-2 du code de l’action sociale et des familles  précise : « Par exception à l'article 226-13 du code pénal, les personnes soumises au secret professionnel qui mettent en œuvre la politique de protection de l'enfance définie à l'article L. 112-3 ou qui lui apportent leur concours sont autorisées à partager entre elles des informations à caractère secret afin d'évaluer une situation individuelle, de déterminer et de mettre en œuvre les actions de protection et d'aide dont les mineurs et leur famille peuvent bénéficier. Le partage des informations relatives à une situation individuelle est strictement limité à ce qui est nécessaire à l'accomplissement de la mission de protection de l'enfance. Le père, la mère, toute autre personne exerçant l'autorité parentale, le tuteur, l'enfant en fonction de son âge et de sa maturité sont préalablement informés, selon des modalités adaptées, sauf si cette information est contraire à l'intérêt de l'enfant. »

      La cellule départementale de recueil, de traitement et d’évaluation de l’information préoccupante (CRIP), placée sous la responsabilité du président du Conseil général, a pour mission de centraliser les informations, de les analyser et de rechercher la réponse possible (voir note [5]). La finalité de ce recueil d’informations est d'évaluer la situation d'un mineur et de déterminer les actions de protection et d'aide dont le mineur et sa famille peuvent bénéficier.

    Lorsqu’ils sont préoccupés par la situation d’un enfant (lorsque sa santé, sa sécurité ou sa moralité sont en danger ou les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises ou risquent de l'être), les médecins peuvent utilement contacter le médecin de la cellule.

      Lorsqu’un médecin (hospitalier, libéral, PMI…) constate des sévices ou privations, l’article 226-14, 2ème alinéa du code pénal s’applique et il doit directement procéder à un signalement judiciaire au Procureur de la République, avec information de la démarche faite auprès de la cellule.


    ([1]) Article L.1111-4 du code de la santé publique : « Dans le cas où le refus d'un traitement par la personne titulaire de l'autorité parentale ou par le tuteur risque d'entraîner des conséquences graves pour la santé du mineur ou du majeur sous tutelle, le médecin délivre les soins indispensables. »

    ([2]) Article L.112-4 du code de l’action sociale et des familles : « L’intérêt de l’enfant, la prise en compte de ses besoins fondamentaux, psychiques, intellectuels, sociaux et affectifs, ainsi que le respect de ses droits doivent guider toutes décisions le concernant ».

    ([3]) I. KAHN-BENSAUDE, J-M FAROUDJA, « La protection de l'enfance : signalement et information préoccupante », rapport adopté par le Conseil national de l’Ordre des médecins lors de sa session du 8 octobre 2010

    ([4]) Pour les professionnels de santé, il s’agit notamment des médecins hospitaliers (en particulier des services de pédiatrie, maternité, pédo-psychiatre, urgences) salariés (Centre Médico-Psychologique, Centre Médico-Psycho-Pédagogique, Service de l’Education Spécialisée et de Soins à Domicile, Institut Médico-Educatif, hôpital de jour…)

    ([5]) Le guide de la cellule départementale de recueil, de traitement et d’évaluation de l’information préoccupante – les guides d’accompagnement, http://www.reforme-enfance.fr/guides.html

  • Article 44 - Sévices

    Article 44 (article R.4127-44 du code de la santé publique)

     

    Lorsqu'un médecin discerne qu'une personne auprès de laquelle il est appelé est victime de sévices ou de privations, il doit mettre en œuvre les moyens les plus adéquats pour la protéger en faisant preuve de prudence et de circonspection.

    Lorsqu’il s’agit d’un mineur ou d’une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychique, il alerte les autorités judiciaires ou administratives sauf circonstances particulières qu’il apprécie en conscience.

    1 - SEVICES ET PRIVATIONS

    Les "mauvais traitements" ne sont pas réservés aux mineurs : ils peuvent aussi concerner les personnes âgées ou handicapées, les conjoints, concubins ou « pacsés » et d'une façon générale toute personne vulnérable.

    On entend par maltraitance toute violence physique, psychique, toute atteinte sexuelle, toute cruauté mentale, toute négligence ayant des conséquences préjudiciables sur l'état de santé et, pour un enfant, sur son développement physique et psychique.

    Dans les cas flagrants de maltraitance ou de fortes présomptions, le médecin doit soustraire d'urgence la victime aux sévices, par exemple en l'hospitalisant et en s'assurant que cette mesure a bien été réalisée.

    Dans les cas moins évidents, le médecin traitant ne doit pas rester seul. Il doit faire appel au concours d’une équipe pluridisciplinaire (pédiatre, psychiatre, gynécologue, assistant social...) afin que dans tous les cas le diagnostic de maltraitance repose sur des éléments indiscutables étant donné les répercussions d'un tel diagnostic, la nécessité d'un bilan global et d'une prise en charge adaptée.

    Le signalement de maltraitance à enfant a fait l'objet de la loi 89-487 du 10 juillet 1989 relative à la prévention des mauvais traitements à l’égard des mineurs et à la protection de l’enfance (article L.221-1 du code de l’action sociale et des familles). Des dispositions identiques sont applicables pour permettre le signalement de maltraitance sur personnes vulnérables, majeurs protégés ou non.

    La règle du secret médical ne fait pas obstacle à ce que le médecin signale les sévices qu’il a constatés : l'article 226-14 du code pénal établit à ce sujet une dérogation au secret médical. Le médecin n’encourt d’ailleurs aucune sanction disciplinaire, si le signalement a été fait dans les conditions prévues par cet article.

    Cependant, l’article 44 est nuancé, il recommande au médecin d’agir avec prudence et circonspection et d’alerter les autorités administratives et judiciaires pour protéger au mieux la personne, en fonction de plusieurs facteurs :

    • un signalement aux autorités sur de simples présomptions peut déstabiliser une famille ;
    • l’hospitalisation de l’enfant ou de l’adulte peut être une mesure de sauvegarde et de mise à l’abri du risque ;
    • une surveillance étroite et un accompagnement du milieu familial en équipe pluridisciplinaire (enseignants, éducateurs, travailleurs sociaux) peuvent être suffisants ; la cellule départementale de recueil, de traitement et d’évaluation peut être utilement saisie.

    Le médecin aura à peser les différents avantages et inconvénients, dans la situation considérée, les solutions possibles avant de prendre une décision. Il peut solliciter un avis auprès du Conseil départemental.

    Il a l’impérieux devoir d’intervenir. L’absence d’intervention est répréhensible notamment lorsque le médecin suspecte des sévices ou mauvais traitements.

    2 – SIGNALEMENT

    Ce qui caractérise le signalement est qu'il s'agit d'un document dont le destinataire n'est ni le patient ni un membre de sa famille mais le procureur de la République ou son substitut.

    Il doit être adressé directement par le médecin à son destinataire et ne doit jamais être remis à un tiers, fût-il parent de la victime.

    Cette information, par laquelle le professionnel fait connaître la situation de la personne en danger à une autorité compétente, peut en principe être donnée par tout moyen, y compris par appel téléphonique (dans ce cas, il doit être conservé trace de l’interlocuteur et la date de l'appel). En pratique, il est recommandé d'effectuer le signalement sous forme d'un document écrit, éventuellement faxé, en en gardant un double.

    1)  La victime est un mineur.

    Depuis la loi n° 2004-1 du 2 janvier 2004 relative à l’accueil et à la protection de l’enfance, le terme concerne désormais l’adolescent jusqu’à 18 ans.

    Le signalement doit dans ce cas être adressé par le médecin au Procureur de la République, ou au substitut du Procureur (voir note [1]), au Tribunal de Grande Instance du lieu de résidence habituel du mineur. Une permanence est assurée 24 heures sur 24.  Les commissariats de police et brigades de gendarmerie disposent de la liste des magistrats de permanence et de leurs coordonnées téléphoniques.

     Le magistrat devra apprécier l’opportunité :

    • d'une enquête complémentaire confiée à un service de police ou de gendarmerie ;
    • celle de la poursuite du (des) présumé(s) auteur(s) de violences : il ouvrira le plus souvent une information auprès du juge d'instruction, mais peut aussi classer l’affaire sans suite sur le plan pénal ;
    • celle de la saisine d'un juge des enfants au titre de l'assistance éducative.

    En urgence, le magistrat peut intervenir pour prendre toute mesure conservatoire et notamment le « placement » du mineur (ordonnance de placement provisoire ou OPP).

    2)  La victime est majeure.

    Avec l’accord de la victime, le signalement des sévices est effectué dans les mêmes formes auprès du procureur de la République.

    Lorsque la victime des sévices et privations est une personne majeure vulnérable, qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique, le signalement est fait sans qu’il soit besoin de recueillir l’accord de la personne.

    3 - Contenu et forme du signalement.

    Selon le code pénal, le médecin n’est tenu que de signaler les faits constatés.

    Cependant l'article 44 du code de déontologie médicale est nuancé. Selon ses termes mêmes, le médecin « alerte » l'autorité publique sur une situation qu'il est obligé d'interpréter puisqu'il doit affirmer que l'état du patient a pour cause, avérée ou probable, des sévices.

    Ainsi après avoir rapporté aussi fidèlement que possible les paroles de l'enfant recueillies au cours de l'entretien et citées entre guillemets, décrit les signes relevés à l'examen clinique, le médecin peut faire état dans le signalement de sa conviction, de son sentiment ou de ses soupçons que l'enfant est victime ou très probablement victime de sévices (Cf. infra, modèle de rédaction d'un signalement).

    Il faut enfin répéter que :

    • le secret médical ne fait pas obstacle au signalement des sévices et maltraitances constatés chez un mineur ou une personne vulnérable ; l’article 226-14 du code pénal est une dérogation légale au secret médical ;
    • le médecin n’encourt aucune sanction disciplinaire si le signalement a été fait dans les conditions prévues par cet article ;
    • la crainte d’une poursuite ultérieure pour dénonciation calomnieuse ne saurait arrêter le médecin. Celle-ci implique, conformément à l’article 226-10 du code pénal, que la personne dénonçant les faits ait conscience du caractère mensonger des éléments dénoncés.
    •  l’évaluation de la situation de la victime, partie intégrante du signalement, est propre à démontrer la bonne foi du médecin.

    4 – Certificat

    A la différence du signalement, un certificat est remis en main propre au patient ou à son représentant légal.

    Un tel certificat est souvent demandé au médecin pour obtenir la modification des droits de visite et de garde au prétexte de sévices corporels et souvent sexuels dont l’enfant serait victime de la part de l’ex-conjoint ou de son nouveau compagnon.

    Le médecin doit se montrer particulièrement vigilant et prudent. Le certificat doit se borner aux constatations du médecin sans se livrer à des interprétations hasardeuses et encore moins partiales.

    En pratique :

    Le médecin est tenu de constater objectivement les lésions et signes qui témoignent de violences avant de rédiger le certificat  : il ne peut, sauf à agir avec légèreté ou imprudence, établir le certificat sans examen médical préalable ; il doit consigner avec précision ses constatations ; il ne peut présenter comme fait avéré des agressions sur la seule foi de déclarations. En aucun cas, il ne peut attribuer les troubles présentés par un enfant au comportement d’une personne qu’il ne connaît pas ou révéler la pathologie d’une personne qui a été son patient.

    Si à l’occasion de son examen, le médecin acquiert la conviction que la personne examinée est victime de sévices, il procédera à un signalement au procureur de la République. Car la délivrance d’un certificat ne protège pas automatiquement la victime puisque le médecin n’a pas la maîtrise de l’utilisation qui en sera faite.


    ([1]) Article. 226-14 du code pénal : « L'article 226-13 n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. En outre, il n'est pas applicable :

    1º A celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de privations ou de sévices, y compris lorsqu'il s'agit d'atteintes ou mutilations sexuelles, dont il a eu connaissance et qui ont été infligés à un mineur ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ;
    2º Au médecin qui, avec l'accord de la victime, porte à la connaissance du procureur de la République les sévices ou privations qu'il a constatés, sur le plan physique ou psychique, dans l'exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences physiques, sexuelles ou psychiques de toute nature ont été commises. Lorsque la victime est un mineur ou une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique, son accord n'est pas nécessaire ;
    (…)

    Le signalement aux autorités compétentes effectué dans les conditions prévues au présent article ne peut faire l'objet d'aucune sanction disciplinaire.»

  • Article 45 - Dossier professionnel ou fiche d’observation, tenu par le médecin

    Article 45 (article R.4127-45 du code de la santé publique)

     

    I -  Indépendamment du dossier médical prévu par la loi, le médecin tient pour chaque patient une fiche d'observation qui lui est personnelle ; cette fiche est confidentielle et comporte les éléments actualisés, nécessaires aux décisions diagnostiques et thérapeutiques.
    Les notes personnelles du médecin ne sont ni transmissibles ni accessibles au patient et aux tiers.
    Dans tous les cas, ces documents sont conservés sous la responsabilité du médecin.

    II - A la demande du patient ou avec son consentement, le médecin transmet aux médecins qui participent à la prise en charge ou à ceux qu'il entend consulter les informations et documents utiles à la continuité des soins.
    Il en va de même lorsque le patient porte son choix sur un autre médecin traitant.

    Il existe divers dossiers médicaux prévus par la loi, par exemple, celui prévu dans les établissements de santé, celui prévu dans les EPAHD, celui prévu dans les centres de santé…

    Parmi ces dossiers médicaux, figure un dossier médical personnel (DMP), institué par la loi n° 2004-810 du 13 août 2004, qui appartient au patient et dans lequel chaque professionnel de santé reporte, à chaque acte ou consultation, les éléments diagnostiques et thérapeutiques nécessaires à la coordination des soins de la personne prise en charge.

    Indépendamment de ces dossiers prévus par la loi,  le médecin tient pour chaque patient un dossier professionnel qui correspond à la fiche d’observation.

    1 -  Dossier professionnel ou fiche d’observation, tenu par le médecin

     Pour le suivi de chaque patient, le médecin élabore un dossier professionnel ou fiche d’observation dont la rédaction n'est soumise à aucun formalisme.  Il comporte des éléments objectifs cliniques et paracliniques nécessaires aux décisions diagnostiques et thérapeutiques, à la nature des soins dispensés et aux prescriptions effectuées, pharmaceutiques notamment et les confidences éventuelles du patient.  Ce dossier professionnel ou fiche d’observation appartient au médecin qui  l’a établi.

    Il est aujourd’hui généralement informatisé. Le patient a accès aux informations qu’il contient, en application de l’article L. 1111-7 du code de la santé publique, dans les conditions  qui ont été précisées par décret (voir note [1]).

    A côté, le médecin peut établir des notes personnelles, qui ne sont pas communicables au patient, comme aux tiers.

    L'ensemble de ces dossiers professionnels ou fiches d’observation est soumis à l'article 34 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée (voir note [2]) qui prévoit que leur responsable « est tenu de prendre toutes précautions utiles, au regard de la nature des données et des risques présentés par le traitement, pour préserver la sécurité des données et, notamment empêcher qu'elles ne soient déformées, endommagées, ou que des tiers non autorisés y aient accès ». Tout fichier informatisé doit être déclaré à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL).

     Ces dossiers professionnels ou fiches d’observation, quel que soit leur support (papier ou informatique), doivent être protégés contre toute indiscrétion (article 73).

    2 - Devenir  des dossiers professionnels ou fiches d’observation en cas de rupture d'association ou de cessation d'activité

    Lors des ruptures d'association, des difficultés peuvent apparaître pour la répartition des dossiers professionnels entre les médecins. Dans les associations de praticiens et dans les sociétés civiles de moyens, la règle de l'exercice personnel de chacun voudrait que  les dossiers professionnels ou fiches d’observation relatifs aux patients suivis par chaque médecin soient séparés.

    Dans les sociétés civiles professionnelles ou dans les sociétés d'exercice libéral, les dossiers professionnels ou fiches d’observation appartiennent aussi à ces sociétés qui doivent assurer leur conservation conformément à la déontologie médicale. Puisqu'elles sont réputées exercer elles-mêmes la médecine, les sociétés d'exercice assument les mêmes responsabilités que les médecins vis-à-vis des patients. Elles ne peuvent donc se dessaisir des dossiers professionnels ou fiches d’observation mais l'ancien associé pourra obtenir la copie de ceux qu’il a établis. Pour limiter les désaccords qui risquent de conduire les anciens associés devant la juridiction disciplinaire et les tribunaux civils, une disposition contractuelle prévoyant les modalités de répartition des dossiers professionnels ou fiches d’observation entre les parties est la meilleure solution.

    Lors de l'arrêt brutal et définitif de l'activité d'un médecin, provoqué par la maladie ou la mort, son successeur doit transmettre les dossiers professionnels ou fiches d'observation, aux médecins désignés par les patients qui ne désirent pas être suivis par lui.  Si le médecin n'a pas de successeur, le conseil départemental apportera son aide pour assurer la transmission des documents demandés par les patients, dans les mêmes conditions que le successeur. Cependant l’archivage du reliquat des dossiers professionnels ou fiches d’observation restera de la responsabilité  des héritiers du médecin.

    Lors de la cession d'un cabinet, la transmission automatique de l'intégralité des dossiers professionnels ou fiches d’observation au médecin successeur ne peut être acceptée comme une règle. D'une part, parce que la "présentation du successeur à la  patientèle" n'empêche nullement les patients de décider du choix d'un autre médecin et de demander en conséquence que le dossier professionnel ou la fiche d'observation les concernant, lui soit transmis. Qu’il ait ou non un successeur, il est impératif que le médecin informe le Conseil départemental du lieu où sont conservés les dossiers professionnels ou fiches d’observation.

    3 -  Saisie des dossiers professionnels ou fiches d’observation

    Les saisies effectuées dans le cadre d'une procédure judiciaire par le procureur ou un officier de police judiciaire agissant à sa demande et sous son contrôle, un juge d'instruction, un magistrat délégué par lui ou un officier de police judiciaire muni d'une commission rogatoire, ne peuvent porter que sur les seuls documents strictement indispensables à l'enquête, qui doivent être immédiatement placés sous scellés fermés, en présence d’un conseiller ordinal. Les mêmes règles s’appliquent à tous les dossiers médicaux (voir article 4).

    4 -  Conservation des dossiers professionnels ou fiches d’observation

    Il n’existe pas de prescription juridique déterminant la durée de conservation des archives des médecins libéraux.

    Toutefois, il existe un délai de prescription s’agissant de la mise en jeu de la responsabilité civile professionnelle des médecins. C’est pourquoi, un archivage de 30 ans, durée alignée sur le délai de prescription en matière civile, a été conseillé.

    L’article L.1142-28 du code de la santé publique, issu de la loi du 4 mars 2002, a ramené le délai de prescription trentenaire de responsabilité à 10 ans à compter de la consolidation du dommage.

    Mais la réduction de la prescription de 30 ans à 10 ans ne s’applique pour les médecins libéraux qu’aux actes ou préjudices causés à compter de la publication de la loi au Journal officiel, c’est-à-dire du 5 mars 2002.

    Dans ces conditions, la possibilité pour un praticien libéral de voir sa responsabilité civile professionnelle recherchée dans un délai de trente ans n’est nullement éteinte aujourd’hui… et il est encore utile de conserver les dossiers professionnels ou fiches d’observation pendant un délai de trente ans, voire de quarante-huit ans.

    En outre le législateur a fixé comme point de départ de ce délai de dix ans la consolidation du dommage et non pas la première constatation médicale du dommage. Le point de départ ainsi fixé est de nature à permettre en pratique des actions en responsabilité bien au-delà du délai de dix ans, lorsque la consolidation du dommage n’est pas acquise.

    On relève que l’article R.1112-7 du code de la santé publique (voir note [3]) réduit de façon sensible la durée de conservation des dossiers médicaux des établissements de santé.

    Dans ces conditions,  il est conseillé aux médecins de s’aligner sur le délai minimal de vingt ans appliqué par les établissements de santé de façon à préserver la justification essentiellement médicale de cette durée, à conserver les preuves nécessaires à toute défense utile du médecin comme du patient, enfin, à garantir le droit d’accès des patients aux informations de santé les concernant très largement ouvert par la loi précitée du 4 mars 2002.

    Les dossiers professionnels ou fiches d’observation doivent être conservés dans des conditions permettant d’assurer leur confidentialité et leur pérennité (voir note [4]).


    ([1]) Articles R. 1111-1 à R. 1111-8 du code de la santé publique

    ([2]) Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés

    ([3]) Article R.1112-7 du code de la santé publique : « Le dossier médical mentionné à l'article R. 1112-2 est conservé pendant une durée de vingt ans à compter de la date du dernier séjour de son titulaire dans l'établissement ou de la dernière consultation externe en son sein. Lorsqu'en application des dispositions qui précèdent, la durée de conservation d'un dossier s'achève avant le vingt-huitième anniversaire de son titulaire, la conservation du dossier est prorogée jusqu'à cette date. Dans tous les cas, si la personne titulaire du dossier décède moins de dix ans après son dernier passage dans l'établissement, le dossier est conservé pendant une durée de dix ans à compter de la date du décès. Ces délais sont suspendus par l'introduction de tout recours gracieux ou contentieux tendant à mettre en cause la responsabilité médicale de l'établissement de santé ou de professionnels de santé à raison de leurs interventions au sein de l'établissement. »

     ([4]) Dossiers médicaux : conservation et archivage, mai 2009

  • Article 46 - Communication du dossier médical tenu par le médecin

    Article 46 (article R.4127-46 du code de la santé publique)

    Lorsqu'un patient demande à avoir accès à son dossier médical par l'intermédiaire d'un médecin, celui-ci remplit cette mission en tenant compte des seuls intérêts du patient et se récuse en cas de conflit d'intérêts.

    Le dossier médical mentionné correspond au dossier professionnel ou fiche d’observation.

    Le droit du patient à l'information qui le concerne est un principe fondamental qui s'inscrit dans la relation privilégiée établie entre le médecin et son patient. Le secret médical n'est pas opposable au patient. C'est ainsi, par exemple, qu'il faut informer le patient des examens et traitements qui lui sont proposés (article 35) pour obtenir son consentement libre et éclairé et qu'il faut lui fournir les attestations et certificats qui lui sont nécessaires        (article 50).

    La loi du 4 mars 2002 a ouvert au patient un droit d’accès direct (voir note [1]) aux informations de santé le concernant, sans devoir faire nécessairement appel à l’intermédiaire d’un médecin. Toutefois, le patient peut choisir d’exercer son droit d’accès par l’intermédiaire d’un médecin et il peut être contraint de le faire lorsque les informations ont trait à une admission en soins psychiatriques, à la demande d’un tiers ou sur décision du représentant de l’Etat et que leur communication directe présenterait des risques d’une gravité particulière.

    Cet accès indirect constitue un compromis qui tient compte à la fois du droit à l'information et de la prudence avec laquelle les informations de caractère médical doivent être présentées au patient (voir note [2]) ou s’agissant d’un mineur aux titulaires de l’autorité parentale (voir note [3]).

    Le médecin désigné par le patient se trouve alors dans les conditions fixées par le présent article.

    L'information peut être d'ailleurs délicate et engager la responsabilité du praticien qui devra faire preuve de tact et de discernement (cf article 35).

    Les informations obtenues auprès de tiers ne participant pas à la prise en charge thérapeutique ne doivent en aucun cas être communiquées au patient ou à ses ayants droit, pas plus que les informations concernant de tels tiers (voir note [4]). Elles devraient, dans tous les cas, être occultées par le médecin détenteur du dossier.

    Rappelons enfin qu'investi de la confiance du patient le médecin ne peut utiliser l'accès au dossier médical que dans l'intérêt du patient. Son utilisation au profit du médecin ou d'un de ses commettants serait un détournement de la loi (voir note [5]).

    L'article 46 impose au médecin désigné comme intermédiaire de se récuser s’il existe un conflit d’intérêts. Tel est bien le cas d'un médecin qui agit à la demande et pour le compte d'une compagnie d'assurances. Le médecin pourrait faire l'objet de sanctions disciplinaires s'il ne se récusait pas.


    ([1]) Article L.1111-7 du code de la santé publique. Les dispositions de la loi Informatique et Libertés (article 43) et de la loi du 17 juillet 1978 sur la communication des documents administratifs (article 6, II) ont également été modifiées pour permettre aux personnes concernées d’avoir directement accès aux informations de santé les concernant.
    Information du patient dans la loi du 4 mars 2002

    ([2]) B. HŒRNI, « Rôle du médecin intermédiaire dans l'accès au dossier médical par un malade, son représentant légal ou ses ayants droits », Conseil national de l'Ordre des médecins, avril 1997

    ([3]) Article L.1111-7, 5ème alinéa du code de la santé publique : « Sous réserve de l'opposition prévue à l'article L. 1111-5, dans le cas d'une personne mineure, le droit d'accès est exercé par le ou les titulaires de l'autorité parentale. A la demande du mineur, cet accès a lieu par l'intermédiaire d'un médecin. »

    ([4]) Article L.1111-7 du code de la santé publique : « Toute personne a accès à l’ensemble des informations concernant sa santé (…) à l’exception des informations mentionnant qu’elles ont été recueillies auprès de tiers n’intervenant pas dans la prise en charge thérapeutique ou concernant un tel tiers ».

     ([5]) F. STEFANI, « Formulaires médicaux et assurances », rapport adopté par le Conseil national de l’Ordre des médecins lors de sa session de septembre 2007

  • Article 47 - Continuité des soins

    Article 47 (article R.4127-47 du code de la santé publique)

    Quelles que soient les circonstances, la continuité des soins aux malades doit être assurée.

    Hors le cas d'urgence et celui où il manquerait à ses devoirs d'humanité, un médecin a le droit de refuser ses soins pour des raisons professionnelles ou personnelles.

    S'il se dégage de sa mission, il doit alors en avertir le patient et transmettre au médecin désigné par celui-ci les informations utiles à la poursuite des soins.

    Par définition, la fonction du médecin est de porter assistance aux personnes malades, avec une double mission : "au service de l'individu et de la santé publique" (article 2).

    De caractère individuel, l'acte médical relève aussi de la notion de service public d'ordre collectif. Toutefois, entre ces deux éléments constitutifs de la fonction médicale, il existe une hiérarchie de valeurs :

    • du côté du patient, ses intérêts personnels passent en règle générale, on l'a vu, avant ceux de la collectivité ;
    • du côté du médecin, l'intérêt de la santé publique passe avant le sien propre ; il ne peut y avoir résurgence du droit personnel du médecin qu'après avoir répondu aux exigences de l'ordre public.


    Dans le cadre de la médecine considérée ainsi comme un service public, le médecin a pour premier devoir de porter secours aux patients et il ne saurait s'y dérober. Ce n'est qu'une fois remplie cette obligation que le médecin peut reprendre sa liberté d'action individuelle.

    L'échange de consentements entre le médecin et son patient constitue juridiquement le contrat de soins. Il suppose une double liberté : pour le patient le libre choix de son médecin, pour ce dernier la possibilité de se dégager de ce contrat.

    Le patient peut à tout moment rompre cet échange de consentements sans préavis ni explications. Au contraire, le dégagement du médecin nécessite une triple condition préalable :

    • il ne doit pas ou plus y avoir d'urgence ;
    • il doit informer sans délai le patient de son refus ou de son impossibilité à continuer à le prendre en charge ;
    • il doit prendre toutes dispositions pour que soit assurée la continuité des soins, avec notamment transmission de toutes les informations nécessaires à un autre médecin désigné par le patient.


    Lorsque le médecin estime devoir rompre unilatéralement le contrat médical, il peut fournir au patient les raisons de sa rupture mais n'est pas obligé de le faire. Celles-ci lui étant strictement personnelles, et pouvant relever d'une clause de conscience (voir note [1]), il n'a pas à les justifier.

    À la liberté de choix du patient correspond cette liberté du médecin, bien que conditionnelle.


    ([1]) J-M FAROUDJA, « Clause de conscience du médecin », rapport adopté par le Conseil national de l’Ordre des médecins lors de sa session du 16 décembre 2011

  • Article 48 - Continuité des soins en cas de danger public

    Article 48 (article R.4127-48 du code de la santé publique)

    Le médecin ne peut pas abandonner ses malades en cas de danger public, sauf sur ordre formel donné par une autorité qualifiée, conformément à la loi.

    Présent dès le premier code de 1947 rédigé après la Seconde Guerre mondiale, cet article est écrit pour les cas de guerre, catastrophe naturelle ou épidémie. Que le médecin soit ou non requis officiellement dans ces circonstances, il ne peut décider de lui-même d'abandonner malades ou blessés et leur doit ses soins tant qu'une autorité qualifiée ne lui aura pas donné l'ordre ou l'autorisation de partir.

    D'ancienne tradition médicale, cette présence du médecin face à une épidémie, malgré les risques auxquels elle l'expose, doit être régulièrement rappelée. Naguère des médecins traitant des tuberculeux ont pu être contaminés et éventuellement mourir de tuberculose pour avoir fait leur devoir. Aujourd'hui des infections contagieuses ou transmissibles, persistantes ou nouvelles, l’apparition de risques nucléaires, chimiques, telluriques appellent toujours des soins médicaux, dans le cadre de la médecine humanitaire ou même de l'exercice courant. Les risques connus ou supposés justifient des mesures de protection, qui ne peuvent être toutefois ni absolument générales, ni complètement efficaces. À ce propos comme pour d'autres raisons, la profession médicale est exposée à des dangers. Il a toujours été et il reste à l'honneur des médecins de ne pas les fuir.

  • Article 49 - Hygiène et prophylaxie

    Article 49 (article R.4127-49 du code de la santé publique)

    Le médecin appelé à donner ses soins dans une famille ou une collectivité doit tout mettre en oeuvre pour obtenir le respect des règles d'hygiène et de prophylaxie.
    Il doit informer le patient de ses responsabilités et devoirs vis-à-vis de lui-même et des tiers ainsi que des précautions qu'il doit prendre.

    Le médecin est chargé d'une mission curative qui passe le plus souvent par un traitement médical approprié à la situation pathologique du patient. L'hygiène est un élément de cette prise en charge et son défaut peut favoriser l'éclosion d'une pathologie donnée ou son aggravation au sein d'une communauté, d'une famille ou d'une collectivité. L'efficacité d'un traitement ou d'une prise en charge peut être entamée par le défaut ou le non-respect de ces mêmes règles d'hygiène.

    Aujourd'hui où la prise en charge de la maladie associe fréquemment - dans un enchaînement parfois complexe - plusieurs techniques ou spécialités et requiert le concours de plusieurs professionnels, chaque médecin devra veiller au respect des règles de l'hygiène pour ne pas compromettre l'efficacité de l'ensemble des autres maillons de la chaîne de soins ou de la prise en charge, la qualité de l'ensemble d'une prestation de soins étant déterminée par le maillon le plus faible.

    L'hygiène est un préalable dont le médecin ne doit pas faire l'économie dans la mesure où, de surcroît, son respect peut épargner l'usage de moyens thérapeutiques potentiellement coûteux pour la collectivité. L'hygiène contribue à l'efficacité et à l'économie des moyens utilisés, ou prévient la propagation de  pathologies opportunistes susceptibles d'anéantir l'ensemble des efforts et des ressources mis en œuvre.

    L'apparition de pathologies nouvelles, infectieuses transmissibles, non accessibles à un traitement systématiquement curatif donne à cette hygiène une dimension nouvelle et de première importance puisqu'elle est actuellement le seul moyen de lutter contre la propagation de la maladie et son extension dans la population. Idéalement, c'est même le seul moyen d'éradiquer la maladie chez l'homme.

    Le médecin doit faire tout son possible pour convaincre un sujet infecté de ses responsabilités. Malgré des propositions périodiques de dénonciation ou d'isolement, peu réalistes ou illusoires, rien ne peut remplacer la prise de conscience par le patient des risques auxquels il expose son entourage et des précautions qu'il lui revient de prendre pour les limiter et si possible les supprimer.

    Dans ces circonstances, l'intérêt individuel et l'intérêt de la collectivité se rejoignent.

    L'hygiène concerne enfin les médecins dans la gestion des matériels et des produits potentiellement contaminés que leur pratique professionnelle les amène à manipuler. Il est de leur devoir de les traiter de manière à ce que leurs collaborateurs, ou ceux qui seront amenés à leur contact, ne risquent pas de contamination accidentelle.

  • Article 50 - Secret partagé avec les médecins conseils des organismes d'assurance maladie

    Article 50 (article R.4127-50 du code de la santé publique)

    Le médecin doit, sans céder à aucune demande abusive, faciliter l'obtention par le patient des avantages sociaux auxquels son état lui donne droit.
    A cette fin, il est autorisé, sauf opposition du patient, à communiquer au médecin-conseil nommément désigné de l'organisme de sécurité sociale dont il dépend, ou à un autre médecin relevant d'un organisme public décidant de l'attribution d'avantages sociaux, les renseignements médicaux strictement indispensables.

    Aider un patient à obtenir les avantages auxquels son état lui donne droit est un devoir pour le médecin car ils constituent souvent la condition  nécessaire  pour qu'il puisse suivre sa prescription. Cette démarche ne doit donc pas être considérée comme facultative et accessoire, mais comme faisant partie de la prise en charge du patient ; il importe donc que le médecin maintienne à jour ses connaissances dans  le domaine médico-social.

    Dans certains cas, il peut se retrouver dans une situation inconfortable parce que des patients, de bonne ou de mauvaise foi, s'attribuent des droits qu'ils n'ont pas. Malgré les difficultés que cela peut susciter, il ne doit céder à aucune demande abusive et ne saurait être complice d'une fraude. Sa signature engage sa responsabilité et la production de faux certificats est lourde de conséquences (art.28) : elle porte atteinte à la dignité de la profession et expose le médecin à des poursuites pénales et disciplinaires. Le grand nombre de certificats qu'il est amené à établir ne doit pas estomper la gravité de cet acte médical ni le conduire à une certaine légèreté. Il doit rester vigilant à ce propos.

    La contrepartie de cette attribution d'avantages sociaux prévue dans le deuxième alinéa de cet article 50 est l'exercice d'un contrôle possible par la sécurité sociale ou les autres organismes publics qui décident de leur attribution. Tous renseignements et tous documents d'ordre médical, individuel ou général, seront communiqués - sauf opposition du patient - aux médecins conseils en charge du contrôle, dans le respect des règles du "secret partagé" et de la déontologie. Le médecin doit satisfaire à cette obligation mais ne fournit au médecin conseil d’assurance maladie que les documents strictement nécessaires pour mener à bien sa mission (note [1]).


    ([1]) Article L. 1112-1, 6ème alinéa du code de la santé publique : « Les médecins membres de l'inspection générale des affaires sociales, les médecins inspecteurs de santé publique, les inspecteurs de l'agence régionale de santé ayant la qualité de médecin et les médecins conseils des organismes d'assurance maladie ont accès, dans le respect des règles de déontologie médicale, à ces informations lorsqu'elles sont nécessaires à l'exercice de leurs missions. »

  • Article 51 - Immixtion dans les affaires de familles

    Article 51 (article R.4127-51 du code de la santé publique)

    Le médecin ne doit pas s'immiscer sans raison professionnelle dans les affaires de famille ni dans la vie privée de ses patients.

    Cet article définit les limites de l'action du médecin admis à pénétrer l'intimité de la famille dans le cadre de son exercice professionnel.

    Le médecin est le conseiller naturel des patients et des familles et souvent leur confident. Il ne donne pas seulement des conseils thérapeutiques, d'hygiène de vie mais aussi de psychologie. L'avis du médecin est souvent sollicité sur la nécessité d'un changement de résidence, d'une retraite anticipée, de la pratique d'un sport, etc. De même le pédiatre sera interrogé sur l'intérêt d'un redoublement scolaire, d'un changement d'établissement, le choix d'une région pour les vacances...

    La confiance dont il bénéficie peut le mettre dans des situations délicates et le conduire au-delà des limites de son rôle professionnel s'il n'y prend pas suffisamment garde.

    Le médecin doit s'interdire aussi la curiosité et s'en tenir, dans la vie privée du patient et de sa famille, aux informations nécessaires à la compréhension de la situation qu'il prend en charge. Il est évidemment impensable qu'il puisse exploiter une information obtenue au cours de son exercice professionnel à des fins personnelles.

    Pour s'en prévenir, le médecin ne doit jamais se départir de son impartialité. En cas de conflit, il doit analyser les faits et prodiguer ses conseils sans jamais prendre un parti quelconque. Il peut chercher à concilier les points de vue en présence, mais doit savoir constater l'échec de sa mission et refuser alors de s'ériger en juge de la situation ou effectuer un arbitrage, particulièrement dans les situations de divorce où il ne doit jamais prendre le parti de l'un ou de l'autre, pour la garde des enfants notamment. Il ne doit pas non plus établir à cette occasion un certificat médical imprudent qui pourrait être par la suite sujet à interprétation tendancieuse (art. 28, 76).

    Il en va de même lors des successions et de tous les actes officiels de la vie du patient auxquels le médecin se doit de rester étranger. Il doit garder une parfaite neutralité en limitant ses conseils à ceux que l'objectivité lui permet de prodiguer.

    Enfin, dans toutes les situations difficiles, quand le discernement n'est pas aisé, il  peut s’adresser au conseil départemental.

  • Article 52 - Interdiction de recevoir des dons et legs

    Article 52 (article R.4127-52 du code de la santé publique)

    Le médecin qui aura traité une personne pendant la maladie dont elle est décédée ne pourra profiter des dispositions entre vifs et testamentaires faites par celle-ci en sa faveur pendant le cours de cette maladie que dans les cas et conditions prévus par la loi.
    Il ne doit pas davantage abuser de son influence pour obtenir un mandat ou contracter à titre onéreux dans des conditions qui lui seraient anormalement favorables.

    En cohérence avec l'article précédent, le code de déontologie précise désormais des dispositions admises depuis toujours au nom de l'éthique médicale. Cette obligation, dégagée par la jurisprudence de l'ancien régime, inscrite dès le début du XIXème siècle dans le code civil, n'était auparavant définie que par l'article 909 du code civil qui indique :  « Les membres des professions médicales et de la pharmacie, ainsi que les auxiliaires médicaux qui ont prodigué des soins à une personne pendant la maladie dont elle meurt ne peuvent profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires qu'elle aurait faites en leur faveur pendant le cours de celle-ci.

    Sont exceptées :

    1. les dispositions rémunératoires faites à titre particulier, eu égard aux facultés du disposant et aux services rendus ;
    2.  les dispositions universelles, dans le cas de parenté jusqu'au quatrième degré inclusivement, pourvu toutefois que le décédé n'ait pas d'héritiers en ligne directe ; à moins que celui au profit de qui la disposition a été faite ne soit lui-même du nombre de ces héritiers…. ».
       

    L’article 52 est applicable au médecin qui a traité la personne pendant la maladie dont elle est décédée et non pas seulement à celui qui a traité la personne pour l’affection dont elle est décédée (voir note[1]).

    Au-delà du cas d'espèce de la dernière maladie, c'est une attitude générale de prudence qui s'impose au médecin en la matière. Il ne doit en aucune circonstance pouvoir être suspecté d'avoir profité de son statut professionnel et de l'influence qui en découle pour tirer un avantage matériel quelconque de la part du patient.

     

    ([1] ) Conseil d’Etat, 18 février 2005, n°264014 ; sur la même affaire, Civ. 1ère, 4 novembre 2010, n°07-21303

  • Article 53 - Honoraires

    Article 53 (article R.4127-53 du code de la santé publique)

     

    Les honoraires du médecin doivent être déterminés avec tact et mesure, en tenant compte de la réglementation en vigueur, des actes dispensés ou de circonstances particulières.

    Ils ne peuvent être réclamés qu'à l'occasion d'actes réellement effectués même s’ils relèvent de la télémédecine.

    Le simple avis ou conseil dispensé à un patient par téléphone ou par correspondance ne peut donner lieu à aucun honoraire.

    Un médecin doit répondre à toute demande d'information préalable et d'explications sur ses honoraires ou le coût d'un traitement. Il ne peut refuser un acquit des sommes perçues.

    Aucun mode particulier de règlement ne peut être imposé aux malades.

    1. LA RECLAMATION D'HONORAIRES

    La perception d’honoraires implique qu'un acte médical ait été réellement effectué, engageant la responsabilité du médecin, y compris un acte relevant de la télémedecine (voir note [1]).

    Un renseignement donné au patient par téléphone, par lettre ou par courriel ou une précision sur le traitement suivi n’est pas assimilable à une consultation et ne peut donner lieu à des honoraires.

    1. LA DETERMINATION DES HONORAIRES

    Le médecin n'est pas toujours libre de fixer le montant de ses honoraires. S'il est conventionné secteur 1, il doit  appliquer les tarifs publiés en annexe de la convention nationale, signée entre les syndicats médicaux et l’assurance maladie.

    Le médecin, conventionné secteur 2, est autorisé à pratiquer des honoraires différents de ceux fixés par la convention. S’il peut déterminer librement ses honoraires, il doit le faire avec tact et mesure, en tenant compte de la situation financière du patient et éventuellement de circonstances particulières (voir note [2]). Quatre éléments peuvent permettre au médecin de mesurer et de justifier le tarif des honoraires demandés :

    1. les capacités financières du patient ;
    2. le temps passé et la complexité de l’acte ;
    3. la notoriété ;
    4. les exigences éventuelles du patient.

     Il peut encourir une sanction disciplinaire pour honoraires abusifs. Il n'a pas le droit d'abaisser ses honoraires au-dessous des tarifs conventionnels dans un but de concurrence (article 67) mais il peut toujours donner ses soins gratuitement.

    Il ne peut imposer un mode de paiement particulier (espèces), ni le versement d'une provision avant de donner ses soins.

    Dans certaines situations, il doit appliquer le système de tiers-payant, notamment pour les soins dispensés aux patients bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU) ou de l’aide médicale d’Etat (AME).

    Le médecin doit tenir compte des règles de codage et de facturation des actes de la classification commune des actes médicaux (CCAM) et de la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP). Le médecin inscrit sur la feuille de soins le montant exact des honoraires réellement perçus.

    La loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires interdit les dépassements d’honoraires pour les soins dispensés en urgence dans les établissements de santé. Dans le cadre de la permanence des soins organisée et régulée, le médecin doit appliquer les tarifs conventionnels en vigueur.

    1. LES OBLIGATIONS D'INFORMATION DU MEDECIN

    En cas de dépassement des tarifs conventionnels, le médecin doit en avertir préalablement et personnellement le patient.

    3-1 L’affichage des informations relatives aux honoraires pratiqués est obligatoire pour tous les médecins libéraux

    La réglementation (voir note [3]) oblige les médecins à afficher dans leur salle d'attente ou leur salle de consultation, de manière visible et lisible, les tarifs ou fourchettes des honoraires pratiqués ainsi que leur tarif de remboursement par l’assurance maladie. Cette obligation d’affichage concerne les prestations suivantes lorsqu’elles sont effectivement proposées : la consultation, la visite à domicile et la majoration de nuit, la majoration de dimanche, les majorations pratiquées dans le cadre de la permanence des soins et au moins cinq des prestations les plus couramment pratiquées.

    3-2 La note d’information

    La perception des honoraires par le médecin doit se faire en toute transparence. Le médecin ne peut refuser de donner des explications sur sa note d'honoraires (voir note 4).

    En cas de dépassement d'honoraires, le médecin est tenu de remettre au patient une information écrite préalable précisant le tarif des actes effectués ainsi que la nature et le montant du dépassement facturé dès lors que le montant des honoraires demandés est égal ou supérieur à 70 €, dépassement d'honoraires inclus (note 5), sauf si le médecin prescrit un acte à réaliser ultérieurement. Dans ce cas, il doit remettre au patient l'information écrite préalable, même si ses honoraires sont inférieurs à 70 €.

     3-3 Le devis pour les actes médicaux et chirurgicaux à visée esthétique

    Pour toute prestation à visée esthétique, dont le montant estimé est supérieur ou égal à 300 euros ou comportant une anesthésie générale, le praticien a l’obligation de remettre au patient un devis détaillé. Les autres prestations à visée esthétique doivent également donner lieu à un devis détaillé lorsque le patient le demande.

    Les informations et mentions obligatoires que doivent comporter ces devis sont définies par arrêté (note [6]).

    Ce devis devra être anonymisé en cas de vérification par un agent de la Direction de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes, en présence d'un représentant du Conseil départemental de l'Ordre des médecins.

    Le médecin doit respecter un délai minimum de quinze jours entre la remise du devis et l'intervention. Pendant cette période, il ne peut demander aucune contrepartie ou engagement à la personne, excepté les honoraires afférents aux consultations préalables à l'intervention.


    ([1]) Articles R. 6316-1 et suivants du code de la santé publique

    ([2]) F. X MERCAT, « Tact mesure dans la fixation des honoraires »  rapport adopté par le Conseil national de l’Ordre des médecins en 1998 et actualisé au cours de sa session de décembre 2005,

    ([3]) Articles L.1111-3 et R. 1111-21 du code de la santé publique
    Affichage des honoraires – Quelques conseils à lire absolument avant affichage, 2 avril 2009

    (4) Note préalable d’information sur les honoraires, 2 février 2009

    (5) Arrêté du  2 octobre 2008, publié au JO du 11 octobre 2008

    ([6] ) Arrêté du 17 octobre 1996 modifié relatif à la publicité des prix des actes médicaux et chirurgicaux à visée esthétique ; article L.6322-2 du code de la santé publique

  • Article 54 - Note d'honoraires

    Article 54 (article R.4127-54 du code de la santé publique)

    Lorsque plusieurs médecins collaborent pour un examen ou un traitement, leurs notes d'honoraires doivent être personnelles et distinctes.
    La rémunération du ou des aides-opératoires, choisis par le praticien et travaillant sous son contrôle, est incluse dans ses honoraires.

    Cet article rappelle la nécessité d'une parfaite transparence des honoraires des médecins. Ainsi, lorsque plusieurs médecins concourent à  la prise en charge d’un patient, ils doivent lui fournir  une note d'honoraires personnelle. Cela permet au patient d'être informé des tarifs demandés et de tenir compte des situations conventionnelles, qui peuvent être différentes, des praticiens.

    Aucun supplément ne peut être exigé d'un patient par un praticien ayant recours à des aides-opératoires.

  • Article 55 - Interdiction du forfait

    Article 55 (article R.4127- 55 du code de la santé publique)

    Le forfait pour l'efficacité d'un traitement et la demande d'une provision sont interdits en toute circonstance.

    En refusant toute notion de forfait ou de provision, cet article fait application  de l’interdiction déontologique de demander des honoraires pour des actes non  réellement effectués.

    La réglementation prévoit parfois que certains actes techniques font l'objet d'une facturation au forfait, comme par exemple la surveillance des suites opératoires 

  • Rapport des médecins entre eux et avec les membres des autres professions de santé (art 56 à 68-1)

  • Article 56 - Confraternité

    Article 56 (article R.4127-56 du code de la santé publique)

    Les médecins doivent entretenir entre eux des rapports de bonne confraternité.
    Un médecin qui a un différend avec un confrère doit rechercher une conciliation, au besoin par l'intermédiaire du conseil départemental de l'ordre.
    Les médecins se doivent assistance dans l'adversité.

    1 - Confraternité

    Si l'exercice de la médecine est pour le praticien éminemment personnel (articles 5, 69), le patient ne peut être toujours suivi, ni accompagné, ni traité par le médecin de façon individualiste. Le médecin est au regard de la médecine l'élément d'un corps qui le rend dépendant des autres membres auxquels le rattachent des liens indispensables, confraternels.

    Ainsi le corps médical doit vivre dans la confraternité. Il est uni par un état d'esprit commun, celui d'une profession de responsabilité et d'action, par une formation intellectuelle particulière, alliant science et humanisme.

    Il ne s'agit pas d'une manifestation de corporatisme mais d'une solidarité et d'une entraide nécessaires à l'accomplissement de la mission médicale. Les médecins ont besoin les uns des autres, en complémentarité, non seulement au chevet des patients, mais aussi dans le domaine de la prévention, dans l'accès aux avantages sociaux, dans la reconnaissance des droits de leurs patients. Les médecins doivent donc se connaître et savoir travailler ensemble, sans qu'une bonne entente entre eux ne devienne jamais une connivence au détriment du patient. L'expérience a montré que lorsque des différends existent entre les praticiens qui s'occupent d'un même patient, celui-ci risque d'en pâtir.

    Il est de bonne pratique qu’au moment de son installation - ou d'une réinstallation - le médecin se présente à ses confrères voisins généralistes et spécialistes. Il lui est conseillé de nouer des relations avec les établissements de santé de la région. Les rencontres entre médecins, dans les réunions scientifiques, ordinales ou amicales, sont toujours bénéfiques.

    Cette confraternité de principe se traduira par des attitudes, des comportements qui soient clairs, en particulier, vis-à-vis des patients ; lorsqu'un médecin croit découvrir une erreur commise par un confrère, la meilleure conduite consiste à entrer en rapport avec lui. Il en est de même en bien d'autres circonstances. Le patient ne doit jamais être ni l'objet ni même le témoin d'affrontements entre praticiens qui se disent confrères. Le médecin ne doit jamais médire d’un confrère dans l'exercice de sa profession, mais plutôt prendre sa défense s'il est injustement attaqué.

    Malgré les difficultés qui atteignent un grand nombre de médecins, la dignité et la retenue restent aux yeux des patients des sources de considération, de confiance qui valent mieux que quelques blessures d'amour-propre.

    Il est aussi attendu du médecin, qu’il soit, ou non, enseignant ou maître de stage, praticien hospitalier ou médecin remplacé, qu’il partage ses connaissances et son expérience avec les étudiants en médecine durant leur formation.

    Cette relation de compagnonnage requiert de part et d’autre considération et respect.

    2 - Différends et conciliation

    Les origines des désaccords entre médecins sont multiples. Ils peuvent, du fait de leur importance, être portés devant les juridictions disciplinaires, voire civiles ou administratives. Compte tenu de l'implication de nombreux facteurs dans les situations litigieuses et de leurs intrications, il est souvent nécessaire, dans un souci de clarification, de recueillir les avis et conseils d'une personne tierce, expérimentée et capable de procéder à un réexamen de l'objet et des circonstances d'un désaccord.

    Non seulement c'est une recommandation de bon sens, mais plus encore une obligation : le médecin doit rechercher une conciliation, il s'agit là d'une règle déontologique. Le médecin qui s'y soustrait peut se le voir reprocher par la juridiction disciplinaire. Les contrats passés entre médecins la prévoient d'ailleurs dans une clause spécifique (voir note [1]).

    Le conseil départemental de l'Ordre constitue, par essence, l'intermédiaire privilégié entre les protagonistes d'un désaccord, le plus souvent par l'intermédiaire de son président, ou d'un membre choisi soit en raison de son expérience ou de sa spécialité, soit de sa notoriété, ou encore de deux membres choisis par les médecins concernés, selon la procédure prévue par le contrat.

    La  mission dont ils sont chargés leur permet de rechercher une solution consensuelle qu'ils auront la charge de faire avaliser sous la forme d'un procès-verbal signé par chaque partie.

    En cas d'échec, le procès-verbal de non-conciliation constituera un document important pour les suites tant disciplinaires que judiciaires éventuelles.

    On ne saurait ainsi trop recommander aux praticiens de prendre un soin très particulier à l'étude des projets de contrats qu'ils signent, aux remarques des conseillers ordinaux chargés de leur examen lorsqu'ils leur ont été soumis. Rien ne vaut l'expérience de praticiens plus anciens et c'est, en l'occurrence, un bon exemple de confraternité.

    3 – Entraide

    Au-delà d'une obligation morale, l’assistance aux confrères dans l’adversité est aussi une obligation déontologique et confraternelle ; le terme adversité devant être entendu au sens large englobant les difficultés de santé, matérielles, morales, sociales et professionnelles.

    Elle concerne tous les médecins quelle que soit leur forme d'exercice.

    Alors qu'il est attendu beaucoup du médecin en termes de compétence et de disponibilité, les exigences qui pèsent sur son exercice sont de plus en plus lourdes. Le surmenage qui peut en résulter, une situation familiale délicate, un accident, une maladie plus ou moins grave, parfois occultée, sont autant de situations susceptibles de provoquer un isolement tant professionnel que social du médecin.

    L'obligation d'assistance a toujours été présente dans tous les serments médicaux depuis l’origine. Le serment actuel mentionne aussi les familles dans l’adversité. Il est vrai que les médecins et leurs familles, en cas d’épreuve, comptent sur le soutien de la communauté médicale.

    Parfois par manque de prévoyance, des médecins malades se retrouvent dans une situation financière difficile alors qu’il existe, pour les libéraux, par exemple, des assurances complémentaires permettant de couvrir le délai de carence des 90 jours de la CARMF. Les confrères hospitaliers ou salariés devraient se préoccuper de leur prévoyance.

    Un grand nombre d’organismes contribuent désormais à assurer une entraide plus structurée. L’Ordre des médecins tout d’abord, comme l’y engage l'article L.4121-2 du code de la santé publique, exerce auprès de tous les médecins cette mission, au niveau départemental par l’intermédiaire d’une commission dédiée auprès de chaque conseil départemental à cette entraide. L’action départementale est relayée au niveau national par la Commission nationale. Pour les médecins libéraux, d’autres organismes interviennent également comme la CARMF par son fonds d’action sociale, l’AFEM (Aide aux Familles et Entraide Médicale), les organismes d’assurance et de prévoyance privée ainsi que de nombreuses associations d’écoute et d’assistance dans lesquelles l’Ordre et différentes organisations professionnelles participent activement.

    Les situations nécessitant d’assurer une assistance à un confrère en difficulté ne manquent pas. Cette assistance peut être :

    • matérielle, qui se fait de plus en plus rare : aide financière ponctuelle, délais de paiement de frais professionnels…
    • professionnelle par des remplacements, par la tenue ponctuelle de cabinet, et l’aide organisationnelle ou administrative…
    • morale et psychologique : il s’agit désormais d’un volet essentiel de l’entraide individuelle. La profession doit être solidaire et le “confrère de proximité” est souvent le mieux à même de déceler les difficultés, d’apporter son réconfort et, s’il le juge utile, de prodiguer ses conseils. Les modes d’exercice en équipe qui se généralisent facilitent tant la veille que cette forme d’assistance.


    Il est d’autre part avéré que l’efficacité de l’entraide dépend souvent de la précocité du dépistage des problèmes. Les conseils départementaux disposent certes de différents indices (signalements de patients, non prise de garde, absence de paiement de la cotisation…) mais là également le “confrère de proximité” doit jouer un rôle essentiel.

    Tout médecin qui a connaissance des difficultés d’un confrère doit s’en ouvrir à lui, lui proposer son aide et le convaincre de se rapprocher du conseil départemental qui, de façon confidentielle, peut enclencher plusieurs niveaux d’aide et d’assistance.

    Si ce processus n’aboutit pas et que la gravité de la situation qu’il lui appartient d’apprécier en conscience l’exige et sous réserve qu’il ne soit pas médicalement en charge du confrère, il doit aviser ce confrère qu’il informera le Président du conseil départemental. Celui-ci, dans la plus stricte confidentialité, prendra toutes dispositions utiles. Cette attitude, qui est déjà une obligation déontologique pour certains Ordres Européens de médecins, traduit le principe éthique de bienfaisance.

    Enfin, en cas de décès du médecin, le conseil départemental apporte aide et conseil à la famille.


    ([1]) www.conseil-national.medecin.fr, rubrique « les modèles de contrats »

  • Article 57 - Détournement de clientèle

    Article 57 (article R.4127-57 du code de la santé publique)

    Le détournement ou la tentative de détournement de clientèle est interdit.

    Le médecin ne doit pas abuser de certaines situations particulières, telles que  la participation à la permanence des soins pour détourner à son profit  des patients traités en urgence (ceux-ci doivent en effet être confiés à nouveau  à leur médecin habituel). La même règle s'applique au  confrère auquel un médecin a adressé un patient en consultation ; de même le médecin qui exerce en établissement de santé doit informer le médecin traitant, généraliste ou spécialiste, de l'hospitalisation du  patient.

    Chacun de ces  médecins est concerné par cet article 57.

    D'aucuns ont jugé bon d'atténuer cette responsabilité, du fait que dans certains cas, le patient doit être revu une seconde fois. Il suffit alors que le médecin traitant soit utilement informé.

    Cet article n'est en aucune manière en contradiction avec le cas particulier où le praticien consulté en seconde intention considère qu'il est plus apte à dispenser des soins plus appropriés. À lui de concilier alors l'intérêt du patient et sa liberté de choix, dans le respect impératif de la confraternité.

  • Article 58 - Consultation occasionnelle d’un autre médecin

    Article 58 (article R.4127-58 du code de la santé publique)

    Le médecin consulté par un malade soigné par un de ses confrères doit respecter :

    •  l'intérêt du malade en traitant notamment toute situation d'urgence ;
    •  le libre choix du malade qui désire s'adresser à un autre médecin.

    Le médecin consulté doit, avec l'accord du patient, informer le médecin traitant et lui faire part de ses constatations et décisions. En cas de refus du patient, il doit informer celui-ci des conséquences que peut entraîner son refus.

    Cet article et les quatre suivants concernent l'intervention d'un médecin auprès d'un patient habituellement suivi par un autre médecin. Cette intervention inhabituelle peut se produire dans quatre situations.

    1. En situation d'urgence, le médecin habituel peut être indisponible ou trop éloigné - lors d'un déplacement - et on appelle un médecin proche, disponible ou de  permanence.
    2. Le nouveau médecin est consulté à l'initiative du patient qui souhaite changer de médecin de compétence identique. Le patient dispose d'une liberté de choix (article 6) qui lui permet de modifier son choix habituel sans avoir à en donner les raisons.
    3. Il peut s’agir d’un spécialiste dont l'intervention est sollicitée par le patient ou le médecin traitant habituel, en raison de la nécessité de compétences particulières pour la prise en charge du patient.
    4. Il peut être consulté pour un "deuxième avis" souhaité généralement par le patient ou son entourage ; il s'agit alors d'un autre spécialiste.
       

    Dans les trois derniers cas, le recours à un nouveau médecin peut être décidé d'un commun accord par le médecin habituel et par le patient - à l'initiative de l'un ou de l'autre - et le médecin habituel adressera alors le patient à son confrère avec une lettre d'accompagnement ou un dossier. Ce recours peut être aussi décidé par le patient et son entourage à l'insu du premier médecin. Cette seconde situation n'est pas souhaitable, car source de difficultés connues ou méconnues qui peuvent pénaliser le patient ou porter atteinte à la confraternité. Aucune des raisons de changement de médecin n'est en réalité inavouable et il est donc souhaitable, dans l'intérêt de tous, qu'il s'opère au grand jour, quelles que soient les hésitations des patients ou les susceptibilités des médecins.

    Dans tous les cas, les principes à respecter sont les suivants :

    • L'intérêt du patient est primordial. Il peut être de consulter un autre médecin dont l'intervention est souhaitable pour traiter sa maladie, d'avoir un deuxième avis confortant une attitude et évitant par la suite des regrets, voire de cesser de voir un médecin avec lequel la relation de confiance s'est rompue. En situation d'urgence, l'intérêt du patient est d'être convenablement et rapidement traité par le médecin le plus à même d'intervenir sans délai.

    • Le libre choix du patient est rappelé par l'article 6 qui précise que tout médecin se doit d'en favoriser l'exercice. Ce libre choix peut conduire le patient à changer durablement de médecin, à consulter occasionnellement un autre médecin pour une raison précise - par exemple lors de l'absence de son médecin habituel, qu'il soit ou non remplacé - ou à souhaiter l'intervention d'un spécialiste pour une exploration ou un traitement particuliers. Il n'est pas pour autant souhaitable qu'il débouche sur ce qu'on appelle le "nomadisme médical", le patient multipliant des consultations redondantes d'une manière inutile et parfois préjudiciable.
       

    Dans tous les cas, il est souhaitable, d'abord pour le patient, que ce dernier soit adressé au nouveau médecin avec une lettre (voir note [1]) ou un dossier favorisant la transmission d'informations le concernant et la continuité des soins. En retour, le nouvel intervenant répondra ou tiendra le médecin habituel  informé de son intervention.  Cette transmission d’informations nécessite l'accord du patient, qui donne d'une part, l'identité de son médecin habituel, d'autre part, son agrément pour la transmission. À défaut de l'un ou de l'autre, le nouveau médecin s'efforcera de persuader le patient qu'une telle transmission est dans son intérêt. Si le patient persiste à ne pas donner le nom de son médecin habituel ou, l'ayant fait, à refuser qu'il soit  informé, le nouveau médecin ne peut que respecter sa volonté, après lui avoir indiqué les conséquences de ce refus.

    L’instauration du DMP pourrait contribuer à une transparence souhaitable et convaincre les patients réticents que ces transmissions d’informations se font dans leur intérêt.

    Dans tous les cas enfin, l'intervention du nouveau médecin doit se limiter à ce qui lui est demandé par son confrère ou par le patient.


    ([1]) En règle générale, cette lettre sera remise au patient sous pli non cacheté, afin qu'il puisse en prendre connaissance s'il le souhaite.

  • Article 59 - Consultation en urgence

    Article 59 (article R.4127-59 du code de la santé publique)

    Le médecin appelé d'urgence auprès d'un malade doit, si celui-ci doit être revu par son médecin traitant ou un autre médecin, rédiger à l'intention de son confrère un compte rendu de son intervention et de ses prescriptions qu'il remet au malade ou adresse directement à son confrère en en informant le malade.
    Il en conserve le double.

     

    Sauf s'il est le médecin habituel du patient, le médecin qui intervient en urgence et règle seul la situation, va avoir à assurer une transmission vers un autre médecin. 

    •  Ou bien il est le médecin habituel du patient mais juge nécessaire de l'adresser à un autre praticien, dans un établissement de santé plus apte à le traiter convenablement : il rédige alors un compte-rendu de ses observations et de ce qu'il a fait, pour favoriser la continuité des soins avec l'autre médecin appelé à intervenir.
    • Ou bien il n'est pas le médecin habituel du patient, il  participe à la permanence des soins ou a été appelé auprès d'un patient éloigné de son domicile : à ce moment, il rédige le même type de compte-rendu qu'il adresse directement au médecin traitant habituel ou qu'il remet au patient pour le même destinataire, sauf opposition du patient (article 58). De la même manière, le médecin du service de permanence d’un établissement de santé devrait informer le médecin traitant de son intervention auprès du patient.
       

    Dans tous les cas, le médecin qui intervient ponctuellement doit garder un double de son compte-rendu, trace d'une intervention dont il pourrait avoir à se justifier.

  • Article 60 - Appel à un consultant ou spécialiste

    Article 60 (article R.4127-60 du code de la santé publique)

    Le médecin doit proposer la consultation d'un confrère dès que les circonstances l'exigent ou accepter celle qui est demandée par le malade ou son entourage.
    Il doit respecter le choix du malade et, sauf objection sérieuse, l'adresser ou faire appel à tout consultant en situation régulière d'exercice.
    S'il ne croit pas devoir donner son agrément au choix du malade, il peut se récuser. Il peut aussi conseiller de recourir à un autre consultant, comme il doit le faire à défaut de choix exprimé par le malade.
    A l'issue de la consultation, le consultant informe par écrit le médecin traitant de ses constatations, conclusions et éventuelles prescriptions en en avisant le patient.

    En corollaire de l'article 33 qui demande au médecin « d’élaborer son diagnostic avec le plus grand soin... en s'aidant... s'il y a lieu, de concours approprié », cet article et les deux suivants traitent des consultations entre médecins (voir note [1]).

    C’est un devoir pour tout médecin que de proposer une telle consultation, pour demander l'avis d'un confrère spécialisé, lorsqu'il se trouve lui-même en difficulté, souhaite un avis complémentaire ou estime que l'état du patient requiert une intervention spécialisée (article 70).

    Le médecin ne peut s’opposer à ce qu’un patient prenne l’initiative de consulter un autre médecin. Le choix du médecin consultant peut être orienté par le médecin traitant sur la demande du patient qui garde sa liberté de choix. Si ce choix n'a pas l'agrément du médecin habituel ou si la spécialité ne correspond pas à la maladie présentée, ce dernier doit l'indiquer au patient. Dans tous les cas, il doit de préférence remettre au patient une lettre ou tout document susceptible d'éclairer le consultant ou les lui adresser séparément s'il ne juge pas souhaitable de les remettre en main propre au patient, mais en l'en informant.

    S'il n'en a pas pris l'initiative, il doit accepter une telle consultation demandée par le patient ou par son entourage, avec l'accord de l'intéressé.

    À la fin de la consultation, le médecin consultant écrira au médecin traitant et l'informera de ses constatations ou donnera l'avis demandé. En cas d'urgence, cette réponse peut être orale, téléphonique, mais elle sera systématiquement doublée par une correspondance, moins soumise à erreur de transmission et laissant une trace de la consultation auprès des deux médecins. Le patient est informé de cet échange et peut en demander copie. Les progrès de la télémédecine créent de nouveaux modes de consultation et permettent de prendre l'avis d'experts quel que soit leur éloignement. Les mêmes règles déontologiques s’appliquent.


    ([1]) C'était naguère un chapitre important. Les traités de déontologie du XIXème siècle et du début du XXème entraient dans le détail de cette pratique qui existait déjà au Moyen-Age : le médecin traitant doit arriver le premier au rendez-vous, fait les présentations, s'entretient un moment avec le médecin consultant avant de le regarder examiner le malade ; puis médecins traitant et consultant se retirent dans une autre pièce "où l'on a fait placer du papier et de l'encre", pour discuter. Le médecin le moins gradé prend le premier la parole, le plus ancien résume la situation et propose les conclusions. Au moment de rédiger l'ordonnance c'est le médecin traitant qui doit "tenir la plume" et signer le premier ; le consultant contresigne "au-dessous ou sur la même ligne" et c'est lui qui donnera les explications à la famille et lira l'ordonnance. Puis il sera question d'honoraires...

  • Article 61 - Divergence entre consultant et médecin traitant

    Article 61 (article R.4127-61 du code de la santé publique)

    Quand les avis du consultant et du médecin traitant diffèrent profondément, à la suite d'une consultation, le malade doit en être informé. Le médecin traitant est libre de cesser ses soins si l'avis du consultant prévaut auprès du malade ou de son entourage.
     

    Une divergence entre consultant et médecin traitant pourra conduire à la prescription d’investigations supplémentaires, susceptibles de lever les doutes.

    Cet article rappelle que dans cette éventualité :

    • le patient (ou sa famille) doit en être informé ;
    • la liberté du patient reste entière ;
    • le médecin traitant n'est en aucune façon contraint de se soumettre (il garde son indépendance professionnelle) et peut cesser ses soins si le patient décide de suivre les conseils du consultant, contre son propre avis (article 47).
       

    Ces conseils valent également dans les rapports entre médecins spécialistes et médecins traitants, de même que dans les rapports qui doivent s'instaurer entre confrères participant à l'hospitalisation à domicile.

  • Article 62 - Fin du rôle du consultant

    Article 62 (article R.4127-62 du code de la santé publique)

    Le consultant ne doit pas de sa propre initiative, au cours de la maladie ayant motivé la consultation, convoquer ou réexaminer, sauf urgence, le malade sans en informer le médecin traitant.
    Il ne doit pas, sauf volonté contraire du malade, poursuivre les soins exigés par l'état de celui-ci lorsque ces soins sont de la compétence du médecin traitant et il doit donner à ce dernier toutes informations nécessaires pour le suivi du patient.

    L'article 62, corollaire de l’article 57, interdit au médecin consultant de s'approprier la clientèle du médecin qui l'a fait intervenir. Il prescrit la loyauté de ses rapports avec le médecin traitant.

    Mais l'intérêt du patient ne saurait être négligé : la règle n'est applicable que si les soins ou la surveillance ne dépassent pas les possibilités du médecin traitant. De toute façon, ce dernier doit être averti et un échange entre médecins doit permettre de transmettre au patient une proposition commune à propos de la répartition des interventions de chaque médecin.

    Cet article concerne le consultant et le spécialiste,  quels que soient leur mode et lieu d’exercice.
     

  • Article 63 - Information entre médecins en cas d'hospitalisation du patient

    Article 63 (article R.4127-63 du code de la santé publique)

    Sans préjudice des dispositions applicables aux établissements publics de santé et aux établissements privés participant au service public hospitalier, le médecin qui prend en charge un malade à l'occasion d'une hospitalisation doit en aviser le praticien désigné par le malade ou son entourage. Il doit le tenir informé des décisions essentielles auxquelles ce praticien sera associé dans toute la mesure du possible.

    Lorsqu'un patient, après ou sans consultation préalable, est hospitalisé, le médecin de l’établissement de santé doit tenir au courant le médecin traitant et éventuellement le spécialiste qui  contribue à la prise en charge du patient.

    L’article L.1112-1 du code de la santé publique précise que les établissements de santé, publics ou privés, sont tenus de communiquer aux personnes recevant ou ayant reçu des soins, sur leur demande, les informations médicales conservées dans leur dossier médical. Les praticiens qui ont prescrit l'hospitalisation ont accès, sur leur demande et sous réserve de l’accord du patient, à ces informations, de même que le médecin désigné par le patient (voir note 1).

    Cette information doit se faire dans les meilleurs délais, au cours de l'hospitalisation, lorsqu'un diagnostic a été établi et aux principaux temps d'un traitement. Elle doit être systématique, même si un diagnostic n'a pas encore été établi. Outre l'élémentaire courtoisie qui fait tenir au courant le médecin habituel du patient, ce dernier doit pouvoir aussi répondre aux préoccupations de l'entourage lorsque l'hospitalisation a lieu loin du domicile du patient et de sa famille, en particulier lorsque des données sensibles se prêtent mal à une simple communication téléphonique.

    Les établissements de santé doivent donner aux médecins les moyens de remplir cette obligation dans des délais convenables.

    Cette information est également nécessaire lorsque le médecin traitant est sollicité pour donner un avis, systématiquement ou, pour des décisions difficiles, à la demande d'un spécialiste ou du patient. L'association du médecin traitant à ces décisions est souhaitable mais elle tiendra compte des conditions pratiques, de l'urgence, du type de décisions à prendre.

    Il est aussi souhaitable que le médecin traitant soit prévenu téléphoniquement du décès d'un de ses patients afin de pouvoir remplir son rôle auprès de la famille.


    (1) Article R.1112-6 du code de la santé publique : « Les établissements publics de santé et les établissements privés participant à l'exécution du service public hospitalier sont tenus d'informer par lettre le praticien désigné par le malade hospitalisé ou sa famille de la date et de l'heure de l'admission du malade et du service concerné. Ils l'invitent en même temps à prendre contact avec le service hospitalier, à fournir tous les renseignements utiles sur le malade et à manifester éventuellement le désir d'être informé sur l'évolution de l'état de ce dernier.

    En cours d'hospitalisation, le chef de service communique au praticien désigné dans les conditions ci-dessus et qui en a fait la demande écrite toutes les informations significatives relatives à l'état du malade ».

  • Article 64 - Exercice collégial

    Article 64 (article R.4127-64 du code de la santé publique)

    Lorsque plusieurs médecins collaborent à l'examen ou au traitement d'un malade, ils doivent se tenir mutuellement informés ; chacun des praticiens assume ses responsabilités personnelles et veille à l'information du malade.
    Chacun des médecins peut librement refuser de prêter son concours, ou le retirer, à condition de ne pas nuire au malade et d'en avertir ses confrères.

    Cet article évoque des conditions d'exercice de plus en plus fréquentes au sein d'équipes médicales. Celles-ci fonctionnent régulièrement ou découlent de collaborations qui s'établissent entre médecins pour traiter  des situations complexes de patients,  en établissement de santé ou hors établissement de santé.

    Chaque intervention d'un médecin justifie une trace écrite dans le dossier concernant le patient ; cela n'exclut pas une communication orale en cas d'urgence, sur un point important ou un problème complexe.

    Chaque intervention correspond aux compétences particulières de chaque médecin qui en informera au fur et à mesure le patient mais gagnera souvent à échanger son point de vue avec celui de ses confrères. Les relations bilatérales n'excluent pas des rencontres à plusieurs dans un cas compliqué. Il reste souhaitable que la conclusion de ces échanges soit enregistrée par écrit dans le dossier du patient.

    Comme en d'autres circonstances, un médecin peut retirer sa participation, quelle qu'en soit la raison, sauf en cas d'urgence, à condition d'en informer le patient et de s'assurer de la suite de la prise en charge, avec en outre la nécessité ici d'en avertir les autres médecins.

    La démarche de soins peut, de nos jours, requérir l'intervention de nombreux médecins et/ou professionnels de santé dont les compétences diversifiées sont requises pour la prise en charge d'un patient donné.

    Dans les circonstances où cette prise en charge pluridisciplinaire n'est pas coordonnée par l'un des médecins et requiert le concours et l'alliance du savoir de tous les professionnels concernés, chacun des médecins doit aussi être soucieux du résultat final et veiller pour cela, avec l'accord du patient, à informer de ses observations, au-delà de ses interlocuteurs naturels, tous ceux qui, dans le réseau formel ou informel, sont susceptibles de bénéficier de ses observations ou ceux que ses observations sont susceptibles d'éclairer dans le cadre de leur propre intervention.

  • Article 65 - Remplacements : - conditions

    Article 65 (article R.4127-65 du code de la santé publique)

     

    Un médecin ne peut se faire remplacer dans son exercice que temporairement et par un confrère inscrit au tableau de l'ordre ou par un étudiant remplissant les conditions prévues par l'article L.4131-2 du code de la santé publique.

    Le médecin qui se fait remplacer doit en informer préalablement, sauf urgence, le conseil de l'ordre dont il relève en indiquant les nom et qualité du remplaçant ainsi que les dates et la durée du remplacement.

    Le remplacement est personnel.

    Le médecin remplacé doit cesser toute activité médicale libérale pendant la durée du remplacement.

    Toutefois, des dérogations à cette règle peuvent être accordées par le conseil départemental, dans l'intérêt de la population lorsqu'il constate une carence ou une insuffisance de l'offre de soins.

    Cet article ne concerne pas les remplacements des médecins qui exercent leur activité à titre salarié.

    1 - CONDITIONS DU REMPLACEMENT

    Elles sont strictement réglementées. Leur non-respect peut entraîner des poursuites disciplinaires voire pénales (pour exercice illégal de la médecine).

    En outre,  l’assurance-maladie est en droit de refuser le remboursement des actes effectués.

    1-1 Le médecin remplacé

    Un médecin, indisponible, ne  peut se faire temporairement remplacer que par un confrère ou un étudiant en médecine, afin d’assurer la continuité des soins à ses patients.

    Le médecin remplacé doit être en situation régulière d’exercice : un médecin privé du droit d’exercer par mesure disciplinaire, par décision judiciaire ou à la suite d’une mesure de contrôle judiciaire ne peut être remplacé.

    1-2 Le remplaçant

    Le remplaçant ne peut être que :

    •  un médecin titulaire de la même qualification que le médecin remplacé, inscrit au tableau de l’Ordre ou enregistré comme prestataire de service, conformément à l’article R.4112-9-2 du code de la santé publique ;
    • Si le médecin assure des fonctions de chef de clinique des universités-assistant des hôpitaux, il peut bénéficier, sur sa demande et sous réserve de l’avis favorable du chef de pôle ou responsable de la structure, d’une mise en congé sans rémunération, dans la limite de 30 jours par an pendant la 1ère année de fonctions et de 45 jours à partir de la 2ème année pour effectuer des remplacements. ou un étudiant en médecine remplissant les conditions légales (voir note [1]) et titulaire d’une « licence de remplacement » dans la discipline exercée par le médecin remplacé (voir note [2]).
       

    1-3 Les formalités

    Un médecin qui se fait remplacer doit avertir, à l’avance, le conseil départemental de l’ordre dont il relève en lui indiquant par écrit la date et la durée du remplacement, le nom et l’adresse du remplaçant. Lorsque le médecin exerce en SCP ou en SEL, la demande est présentée par le représentant légal de la société et, s’il est différent, par le médecin associé effectivement remplacé. Sera joint à la déclaration, selon le cas, l’attestation d’inscription du médecin, ou le récépissé comportant le numéro d’enregistrement du médecin enregistré en qualité de prestataire de services qui assurera le remplacement ou la licence de remplacement de l’étudiant.

    Lorsque le remplacement a un réel caractère d’urgence, le médecin en informe le conseil départemental par télécopie, courriel ou téléphone, mais doit régulariser sa demande dans les meilleurs délais. Le remplacement peut commencer sans attendre la notification officielle de l’autorisation ordinale si le remplaçant est un étudiant.

    Quelles que soient la nature et la durée du remplacement, un contrat (voir note 3), parfois tripartite (représentant légal de la société d’exercice, médecin remplacé et remplaçant), consignant les conditions du remplacement doit être signé et communiqué au conseil départemental (voir article 91). Ce contrat permettra de connaitre l’intention des parties en cas de litige ultérieur portant notamment sur les honoraires, la durée des remplacements, la possibilité d’installation du remplaçant (voir article 86).

    Le conseil départemental vérifie que le remplaçant remplit les conditions requises et si celui-ci est un étudiant autorise le remplacement. Dans ce cas, il informe l’Agence Régionale de Santé de l’autorisation délivrée.

    2-  CARACTERES DU REMPLACEMENT

    2-1 Le remplacement est personnel et ne concerne qu’un seul médecin nommément désigné.

    Le remplacement simultané de deux ou plusieurs médecins est interdit, sauf circonstances exceptionnelles appréciées par le conseil départemental.

    2-2 Il est prévu pour un temps limité correspondant à l’indisponibilité du médecin remplacé.

    L’article 89 interdit au médecin de faire gérer son cabinet par un confrère.

    2-3 Le médecin remplacé doit cesser toute activité médicale libérale pendant la durée du remplacement.

    L’article 65 exclut que le médecin remplacé exerce, durant cette période, une activité libérale sauf dans le cas de la dérogation prévue au dernier alinéa.

    Dans l’intérêt des patients, cet alinéa vise la situation dans laquelle un médecin libéral installé, ira exercer dans une zone déficitaire en matière d’offre de soins afin d’y assurer la continuité des soins et prévoit le remplacement possible de ce médecin, pendant ce temps, à son cabinet.

    Dès lors que le médecin organise son remplacement pour pallier une absence due à un exercice habituel salarié dans un autre lieu, ce remplacement, a fortiori si les conditions financières prévues permettent au médecin d’en tirer bénéfice, doit être regardé comme contraire à l’article 89 déjà cité (voir note [3]).

    2-4 Le remplacement comprend toutes les activités habituelles du médecin remplacé ou les techniques dont il a la maîtrise.

    Ainsi ne sont pas admis les remplacements partiels (scanner par exemple) ou dans un lieu particulier (clinique, site distinct, …).

    Par exception et dans l’intérêt exclusif des patients, des remplacements portant sur une technique spécifique commune entre plusieurs spécialités (ex : échographie fœtale) peuvent parfois être admis. Il est aussi admis que les médecins en convalescence ou les femmes médecins enceintes puissent être remplacés pour leurs visites à domicile.

    A l’occasion du remplacement dûment autorisé par le conseil départemental, le remplaçant étudiant peut accomplir tous les actes relevant de la compétence du médecin qu’il remplace et notamment établir des prescriptions de produits stupéfiants, signer un certificat de décès ou en vue de soins psychiatriques, à la demande d’un tiers ou du représentant de l’Etat. Pendant qu’il effectue un remplacement, l’étudiant relève de la juridiction disciplinaire de l’Ordre des médecins.

    2-5 Le remplaçant – médecin ou étudiant – exerce sous sa propre responsabilité.

    Il doit contracter une assurance en responsabilité civile professionnelle.

     
    3 – CAS PARTICULIERS DE REMPLACEMENT

    3.1 Remplacement régulier et de courte durée

    Des remplacements réguliers, s’ils sont de courte durée (par exemple, 1/2 journée ou journée complète) sont envisageables. Le médecin remplacé doit justifier de motifs précis (fonctions électives, DPC etc.). Le conseil départemental veillera à ce que ces remplacements, par leur régularité, n’aboutissent pas à une gérance de cabinet prohibée par l’article 89.

    3.2 Remplacement d’un médecin participant à la permanence des soins 

    La participation à la permanence des soins étant une obligation personnelle (article77), le médecin inscrit sur le tableau de permanence doit, s’il est indisponible, s’assurer personnellement de son remplacement. L’astreinte est dûe à celui qui exécute la garde.

    3.3 Remplacement par un médecin installé

    Aucune disposition du code de déontologie médicale n’interdit formellement à un médecin de fermer son cabinet pour aller remplacer un confrère pendant cette période.

    Les réserves qui pourraient être faites à ce remplacement tiennent aux obligations déontologiques de continuité des soins et de réponse aux urgences qui pèsent sur tout médecin installé vis-à-vis des patients qu’il prend en charge.

    Lorsqu’il s’avère, en raison du dispositif de continuité des soins mis en place (en fonction du mode d’exercice du médecin : en groupe, en association, en société ; d’accord convenu avec les médecins environnants, …) que la population qu’il prend en charge n’aura pas à souffrir de son absence, rien ne fait obstacle à ce qu’un médecin installé assure le remplacement d’un confrère.


    ([1]) Article L.4131-2 du code de la santé publique : « Peuvent être autorisées à exercer la médecine, soit à titre de remplaçant d'un médecin, soit comme adjoint d'un médecin en cas d'afflux exceptionnel de population, constaté par un arrêté du représentant de l'Etat dans le département, les personnes remplissant les conditions suivantes :

    1° Avoir suivi et validé la totalité du deuxième cycle des études médicales en France ou titulaires d'un titre sanctionnant une formation médicale de base équivalente, délivré par un Etat membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen ;

    2° Avoir validé au titre du troisième cycle des études médicales en France un nombre de semestres déterminé, en fonction de la spécialité suivie, par le décret mentionné au dernier alinéa ;

    Ces autorisations sont délivrées pour une durée limitée par le conseil départemental de l'ordre des médecins qui en informe les services de l'Etat.

    Lors du remplacement d'un médecin salarié, le directeur de l'établissement de santé respecte les obligations liées à la formation universitaire ainsi qu'à la formation pratique et théorique du remplaçant.

    (…)

    Un décret, pris après avis du Conseil national de l'ordre des médecins, fixe les conditions d'application des quatre premiers alinéas du présent article, notamment le niveau d'études exigé selon la qualification du praticien remplacé, la durée maximale des autorisations et les conditions de leur prorogation».

    ([2]) Sur le niveau d’études exigé pour un remplacement : article R.4131-1, annexe 41-1 du code de la santé publique

    (3) Des modèles de contrat de remplacement sont proposés aux médecins sur le site internet du Conseil national de l’Ordre des médecins

    (5) Conseil national de l’Ordre des médecins, 10 octobre 2002, dossier n°1131

  • Article 66 - Cessation d'activités à l'issue d'un remplacement

    Article 66 (article R.4127-66 du code de la santé publique)

    Le remplacement terminé, le remplaçant doit cesser toute activité s'y rapportant et transmettre les informations nécessaires à la continuité des soins.

    Le médecin ou l'étudiant ne doit pas profiter du crédit acquis auprès des patients du médecin qu'il a remplacé pour continuer à leur donner des soins, fût-ce de façon déguisée, après la reprise de son activité par le médecin remplacé.

    Dans le même esprit, l'article 86 du code de déontologie impose, sauf disposition contractuelle contraire, des conditions à tout projet d'installation de l'ex-remplaçant dans le secteur géographique où exerce le médecin qu'il a remplacé.

  • Article 67 - Abaissement des honoraires dans un but de concurrence

    Article 67 (article R.4127-67 du code de la santé publique)

    Sont interdites au médecin toutes pratiques tendant à abaisser, dans un but de concurrence, le montant de ses honoraires.
    Il est libre de donner gratuitement ses soins.

    L'abaissement volontaire des honoraires au-dessous des barèmes officiellement admis (conventions médicales) est un procédé de détournement de clientèle que la déontologie réprouve.

    Cette règle ne s'oppose pas à ce qu'un médecin tienne compte de l'impécuniosité de ses patients : il peut donner ses soins gratuitement.

    L'oubli volontaire et systématique des frais de déplacement dans la somme que demande le médecin pour ses visites est un procédé incorrect bien que le Conseil d'Etat (voir note [1]) ait jugé que l'indemnité horo-kilométrique prévue dans les barèmes ne faisait pas partie à proprement parler des "honoraires"..


    ([1]) Conseil d’Etat, 20 février 1981, n°18933

  • Article 68 - Rapport avec les autres professionnels de santé

    Article 68 (article R.4127-68 du code de la santé publique)

    Dans l'intérêt des malades, les médecins doivent entretenir de bons rapports avec les membres des professions de santé. Ils doivent respecter l'indépendance professionnelle de ceux-ci et le libre choix du patient.

    De même qu'un esprit de bonne confraternité est souhaitable entre médecins, de bonnes relations doivent être entretenues avec les autres professionnels de la santé :

    • autres professions médicales : chirurgiens-dentistes, sages-femmes,
    • auxiliaires médicaux,
    • pharmaciens.

    L'indépendance professionnelle de chacun doit être respectée. Les patients ne doivent pas souffrir de rivalités professionnelles.

    Les professions d'auxiliaires médicaux réglementées par le code de la santé publique sont les suivantes : infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, orthophonistes, orthoptistes, ergothérapeutes, psychomotriciens, audioprothésistes, opticiens-lunetiers, manipulateurs d'électro radiologie, diététiciens. Les trois premières sont désormais organisées en Ordre professionnel. Les diplômes exigés pour l'exercice de ces professions sont définis. Des décrets donnent la liste des actes que chaque catégorie de ces professionnels est autorisée à pratiquer.

    Le médecin doit respecter l'indépendance professionnelle des  professionnels de santé. Il peut évidemment conseiller ses patients, à leur demande, dans le choix de ces professionnels et montrer la confiance qu'il peut avoir pour un ou certains d'entre eux, mais il devra toujours respecter le libre choix du patient. Tout compérage est interdit (article 23).

    Un médecin ne peut pas, en principe, former une association d'exercice professionnel avec un ou des  professionnels de santé. Seule est possible une société civile de moyens, mais les locaux de consultation et de soins doivent être distincts (voir note[1]). Les statuts de la SCM doivent être communiqués au conseil départemental de l'Ordre.

    Toutefois, la loi n° 2011-940 du 10 août 2011 modifiant certaines dispositions de la loi HPST a ouvert aux personnes physiques exerçant une profession de médecin, d’auxiliaire médical ou de pharmacien, la possibilité de constituer une société interprofessionnelle de soins ambulatoires (SISA) (voir note [2]). Cette société présente l’originalité d’être à la fois une société de moyens et une structure d’exercice pour des activités communes, définies par décret (note [3]), dont les rémunérations sont versées à la société.

    Il existe aussi de nombreuses associations, type loi 1901, réunissant des médecins et des  professionnels de santé pour des actions de prévention, des actions de soins aux personnes âgées, aux personnes handicapées, et des associations à but humanitaire...


    ([1]) F. SIMON, « Maisons de santé pluriprofessionnelles et déontologie médicale », rapport adopté par le Conseil national au cours de sa session de décembre 2008 et modifié en octobre 2012

    ([2]) Article L.4041-1 du code de la santé publique

    ([3]) Article R. 4041- et suivants du code de la santé publique

  • Article 68-1 - Compagnonnage

    Article 68-1 (article R.4127-68-1 du code de la santé publique)

    Le médecin partage ses connaissances et son expérience avec les étudiants et internes en médecine durant leur formation dans un esprit de compagnonnage, de considération et de respect mutuel.

    Cet article traite des rapports que doit entretenir tout médecin – quel que soit son mode d’exercice (hospitalier, salarié ou libéral) –  avec les étudiants et internes en médecine, à la formation desquels il participe. 

    Cette notion de transmission des connaissances se présente comme une obligation morale, ainsi qu'en témoigne le Serment d’Hippocrate : "Je jure de communiquer les préceptes généraux, les leçons orales et tout le reste de la doctrine à mes fils, à ceux de mon maître et aux disciples assermentés suivant la loi médicale" (note 1). 

    L’article fonde la  relation entre médecin et étudiant sur la notion de  compagnonnage, que l’on peut définir ainsi : « mode d’apprentissage qui repose sur la réalisation d’activités professionnelles en présence d’un pair qui transmet ses connaissances et son savoir-faire en particulier par la démonstration ainsi que les règles et les valeurs de l’organisation » (note 2).

     Pour que cette relation  respecte ces règles et valeurs fondamentales, qui sont, pour les médecins, la déontologie, il faut qu’elle comporte l'apprentissage de ces règles et une sensibilisation à l’éthique qui devra se poursuivre tout au long de la vie professionnelle du médecin. Ces valeurs se manifesteront d’abord par le respect des patients qui ne doivent pas être traités comme des « objets d’étude », des « organes malades » mais être considérés en tant que personnes, écoutés avec empathie, informés de leurs droits et libres d’accepter ou de refuser de participer à la formation clinique des étudiants (note [1]). L’exemplarité du médecin est particulièrement importante en ce domaine. 

    La participation d’un étudiant à l’activité professionnelle d’un médecin, quelle que soit la structure ou le mode d’exercice doit être effective et s’exercer en situation réelle. L’autonomisation progressive de l’étudiant devra être recherchée, contribuant ainsi à la détermination des choix professionnels du futur praticien, à l’élaboration et à la construction de sa vie professionnelle et favorisant son intégration dans la profession 

    En introduisant la notion de compagnonnage, cet article insiste, également, sur l’importance de la réciprocité dans les relations entre médecin et étudiant, chacun ayant des droits et des devoirs. Nous avons vu ceux de l’enseignant, l’étudiant devra quant à lui, non seulement participer à l’exercice professionnel du service, de la structure ou du cabinet, mais contribuer, du fait même de sa mobilité, à l’actualisation des connaissances de l’enseignant.

    En faisant référence à la considération et au respect mutuel, ce texte rappelle enfin l’exigence de confraternité, visée à l’article 56, dans les relations entre médecin et étudiant et internes en médecine.


    (1) Traduction littérale de M. Riquet et E. des Places (1878)

    (2) Définition est inspirée de la lettre du CEDIP (juin 2002)

    ([1]) Article L.1111- 4, 7ème alinéa du code de la santé publique : « L'examen d'une personne malade dans le cadre d'un enseignement clinique requiert son consentement préalable. Les étudiants qui reçoivent cet enseignement doivent être au préalable informés de la nécessité de respecter les droits des malades énoncés au présent titre. »

  • De l'exercice de la profession : Règles communes à tous les modes d'exercice (art 69 à 84)

  • Article 69 - Caractère personnel de l'exercice

    Article 69 (article R.4127-69 du code de la santé publique)

    L'exercice de la médecine est personnel ; chaque médecin est responsable de ses décisions et de ses actes.

    Le caractère personnel de l'exercice médical et la notion de responsabilité sont intimement liés ; l'un ne se conçoit pas sans l'autre. Mais sous le simple énoncé de cet article des situations diverses peuvent se présenter.

    1 - EXERCICE PERSONNEL

    1- 1 - Le médecin exerce sous son propre nom (article75).

    Le diplôme de docteur en médecine et la formation médicale spécialisée qui lui est liée confèrent le droit d'exercer. Les conditions d'exercice (modes, titres, qualifications) sont cautionnées par l'Ordre pour que le public soit exactement informé des qualités du médecin qu'il choisit. L'Ordre veille également à la compétence du remplaçant (qui exerce sous sa propre responsabilité), afin que la confiance du patient ne puisse être abusée. L'accomplissement des formalités de remplacement (article 65) permet au remplaçant de se substituer au médecin remplacé pour un temps déterminé contractuellement. Ce dernier ne peut exercer à titre libéral pendant la période définie en commun, sous réserve des dispositions du dernier alinéa de l’article 65.

    Le médecin peut s’attacher le concours d’un médecin collaborateur, libéral ou salarié (article 87) ou salarier un confrère  (article 95). Dans des circonstances exceptionnelles (épidémie, afflux de population en période de vacances), il peut se faire aider temporairement par un assistant médecin ou un adjoint étudiant en médecine (article L.4131-2 du code de la santé publique ; article 88 du code de déontologie). Chacun d’eux exerce en toute indépendance.

    1-2 - Le médecin ne peut pour autant rester isolé dans son exercice. De plus en plus la complexité des moyens diagnostiques ou thérapeutiques nécessite l'avis et la coopération de plusieurs médecins.

    Quelles que soient les situations ou formes d’organisation, chaque médecin conserve son indépendance et ses responsabilités propres ; le caractère personnel de l'exercice doit toujours être bien précisé et affirmé dans les contrats (voir note [1]).

    Enfin, des auxiliaires médicaux (infirmiers, infirmiers anesthésistes ou de  bloc opératoire, manipulateurs d'électro-radiologie médicale, laborantins etc.) peuvent aider le médecin dans son exercice. Les actes qu'ils peuvent pratiquer sont précisés par décrets et leur exécution est de leur responsabilité propre, le médecin restant responsable de sa prescription.

    En aucun cas, qu'il s'agisse d'actes exécutés par un médecin ou par un auxiliaire, la confiance que le patient a accordée personnellement à son praticien ne doit être trompée

     2 - RESPONSABILITE DU MEDECIN

    2-1 - Chaque médecin est responsable et cette responsabilité personnelle est d'abord d'ordre moral. Elle est partie intégrante du "contrat de soins" où s'exprime la "rencontre d'une confiance et d'une conscience" (L. Portes).

    L'article 70 habilite le médecin à une pratique limitée seulement par ses connaissances, son expérience, ses possibilités. Ainsi le médecin doit toujours, en toutes situations et circonstances pouvoir se justifier, notamment devant ses pairs, des décisions qu'il a prises, des actes qu'il a effectués. Il ne peut jamais oublier les risques qu'il fait courir à un patient, même s'ils sont exceptionnels, ni ceux qu'il court indirectement.

    En plus de cet article 69 qui pose le principe du caractère personnel de l'exercice, l'ensemble du code l'aide à déterminer sa responsabilité déontologique.

    Cette notion est à prendre en considération pour le programme des études médicales. Celles-ci ne consistent pas seulement en l'acquisition de connaissances, elles doivent être une école de responsabilité auprès de la personne malade.

    Cette idée de la responsabilité médicale est sensiblement différente de la notion juridique de cette responsabilité. En droit, on cherche à déterminer si tel praticien porte la responsabilité d'un dommage ou d'un échec. La responsabilité morale du médecin (cela est vrai aussi pour d'autres professions) va plus loin, ou plus exactement commence plus tôt, dès l'action, dès la décision d'agir : le médecin sait qu'il assume non seulement la responsabilité d'un geste qu'il doit faire, et qui doit être correctement fait, mais aussi celle du sort de l'être humain qui s'est confié à lui. Le médecin n'ignore pas que son métier consiste à choisir entre des risques car l'action thérapeutique en comporte nécessairement (art.40). Il ne pense pas trop à sa responsabilité "juridique", qui pourrait le paralyser. Il pèse le pour et le contre et agit de la façon qui lui paraît la plus adaptée. Son souci ne doit pas être de "se mettre à couvert" mais de bien faire.

    2-2 - Le médecin peut être appelé à répondre devant les tribunaux de sa responsabilité juridique, pénale ou civile. Celle-ci a une base contractuelle, c'est-à-dire que, depuis un arrêt célèbre (voir note 2), les juristes considèrent qu'entre patient et médecin se forme un contrat tacite, le "contrat de soins" par lequel le médecin s'engage à donner des soins "non pas quelconques... mais consciencieux, attentifs et, réserve faite de circonstances exceptionnelles, conformes aux données acquises de la science".

    La responsabilité juridique du médecin n'est pas une obligation de résultat : il ne s'engage pas à guérir la maladie, l'échec n'entraîne pas par lui-même une responsabilité ni pénale ni civile, c'est une responsabilité de moyens. Les soins doivent être adéquats, donnés avec compétence et conscience. Le juge pourra condamner le médecin si l'on peut retenir contre lui une faute dans les moyens employés (faute technique, négligence, imprudence, faute de jugement, faute de surveillance).

    L'appréciation des fautes médicales est souvent délicate. Elle est toujours (ou presque) éclairée par une expertise confiée à un ou plusieurs médecins experts.

    La tendance actuelle de la jurisprudence est celle d'une sévérité plus grande que par le passé. La médecine a fait de grands progrès, le public en attend toutes les guérisons, on demande davantage aux médecins. On cherche aussi davantage à désigner un responsable afin d'indemniser le plaignant.

    Une procédure de règlement amiable des accidents médicaux, des affections iatrogènes ou infections nosocomiales a été instituée par la loi du 4 mars 2002 (voir note 3). Dans chaque région, une commission régionale de conciliation et d’indemnisation (CRCI), composée de représentants des malades et des usagers du système de santé, des professionnels de santé, des établissements et des assureurs, présidée par un magistrat, va, après expertise, apprécier si le dommage dont la victime d’un acte de prévention, de diagnostic ou de soins l’a saisie, engage la responsabilité du professionnel ou de l’établissement de santé qui en est l’auteur. Selon le cas, l’indemnisation du dommage sera à la charge de l’assureur ou de la solidarité nationale par l’intermédiaire de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

    Tout médecin libéral est tenu de contracter une assurance pour les risques encourus en matière de responsabilité civile (article L.1142-2 du code de la santé publique). Certes les médecins exerçant à titre salarié dans un établissement de prévention, de diagnostic ou de soins sont en principe couverts, dans la limite de la mission qui leur est impartie, par l’assurance de l’établissement employeur mais il leur est vivement conseillé de s’assurer à titre personnel. Le manquement à l’obligation d’assurance est disciplinairement et pénalement répréhensible (voir note 4).

    Il est également prudent que les médecins qui cessent leur activité mais délivrent des soins à leurs proches, ou sont appelés à porter assistance à une personne en danger, souscrivent un contrat de responsabilité civile professionnelle adapté à ces situations.

    2-3 - Dans les établissements publics de santé, la responsabilité morale de chaque médecin n'est pas différente de celle de la pratique privée et, entre médecin et patient, à l'hôpital comme ailleurs, existe ce "contrat" tacite qui oblige le médecin.

    A l'hôpital comme ailleurs, la responsabilité médicale est personnelle. Le travail s'y effectue souvent en équipe et certaines décisions sont prises à plusieurs, mais, comme il a déjà été dit, chaque médecin est responsable de ce qu'il fait et prescrit. Le médecin responsable de l’unité a en outre une responsabilité dans l'organisation et le fonctionnement de son service, ainsi que dans la délégation des actes et soins aux praticiens (internes ou médecins associés) placés sous son autorité.

    Au point de vue juridique, les médecins hospitaliers ont un statut administratif. A moins d'une faute personnelle détachable de la fonction, c'est l'établissement qui supporte la responsabilité civile des actes pratiqués. Ce sont les tribunaux administratifs qui sont compétents.

    A titre principal la responsabilité de l’établissement de santé public est engagée sur le fondement de la faute de service. La distinction traditionnelle entre faute simple pour un mauvais fonctionnement du service et faute lourde, seule susceptible d'engager la responsabilité de l'établissement pour un acte médical, est aujourd'hui abandonnée. Depuis un arrêt du Conseil d'Etat de 1992 (CE Ass., 10 avril 1992, Ep. V, req. n°79027), il n'est plus exigé pour un acte médical qu'il s'agisse d'une faute lourde. Mais la faute médicale demeure une faute spécifique aux critères bien définis. Constitue également une faute, le défaut d’information (CE Sect., 5 janvier 2000, Consorts T, req.n°181899).

    En dehors du régime de présomption de faute, retenu en matière d’infection iatrogène et de maladie nosocomiale (article L.1142-1 du code de la santé publique), la responsabilité de l’établissement de santé public est engagée, en l’absence de toute faute, sur le fondement du risque :

    1. dans des cas prévus par des lois  spécifiques, (contamination par le virus de l’hépatite C, vaccination obligatoire d’un professionnel de santé)
    2. dans quelques cas exceptionnels admis par la jurisprudence :
    • recours à une thérapeutique nouvelle (CAA Lyon, 21 décembre 1990, Consorts Gomez, n° 89LY01742) ; accident hors de proportion avec l’état du patient à son entrée à l’hôpital (CE Ass., 9 avril 1993, Bianchi, req. n° 69336).

    Les choses se passent donc, au point de vue juridique, un peu comme si le "contrat de soins" était conclu entre le patient et l’établissement de santé. Cette évolution qui déplace une partie de la responsabilité ne manque pas de s'accompagner d'un certain transfert de l'autorité.

    Un médecin hospitalier peut toutefois être poursuivi personnellement devant les juridictions pénales pour homicide, coups et blessures, faute technique supposant une méconnaissance manifeste de l'art médical, absence de consentement du patient, non-assistance à personne en péril, manquement au secret professionnel, etc.

    Depuis la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009, un médecin hospitalier peut être traduit devant la juridiction professionnelle de l'Ordre, pour des faits se rattachant à sa fonction hospitalière publique, par le ministre chargé de la santé, le représentant de l’Etat dans le département, le directeur général de l’ARS, le procureur de la République, le Conseil national ou le Conseil départemental au tableau duquel le praticien est inscrit (article L.4124-2 du code de la santé publique).

    Il en va de même pour tout médecin exerçant une fonction publique.

    Le caractère responsable - sous ses différents aspects - de l'exercice personnel du médecin constitue ainsi un facteur social essentiel. "La société ne saurait garantir à ses membres un droit à la bonne santé. Elle peut seulement organiser pour eux l'accès à des soins de qualité. Et peut-être cette qualité est-elle liée au sentiment conservé par les médecins qu'ils sont personnellement responsables de leurs actes" (voir note 5).


    ([1]) Dans le cas  d’une SEL ou d’une SCP, bien que ce soit la société elle-même qui exerce, chaque médecin est individuellement soumis au code de déontologie ;

    (2) Cour de Cassation, arrêt Mercier, 20 mai 1936

    (3) Articles L.1142-1 à L.1142-24 ; R.1142-13 à R.1142-18 du code de la santé publique

    (4) Article L.1142-25 du code de la santé publique : « Le manquement à l'obligation d'assurance prévue à l'article L. 1142-2 est puni de 45 000 Euros d'amende.
    Les personnes physiques coupables de l'infraction mentionnée au présent article encourent également la peine complémentaire d'interdiction, selon les modalités prévues par l'art. 131-27 du code pénal, d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice de laquelle ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. Cette interdiction est portée à la connaissance du directeur général de l’Agence Régionale de Santé qui en informe les organismes d'assurance maladie. »

    (5) J. SAVATIER , « Aspects actuels ou méconnus de la responsabilité médicale », Actes Colloque CERSAMS 1991 - 111

  • Article 70 - Omnivalence du diplôme et limites

    Article 70 (article R.4127-70 du code de la santé publique)

    Tout médecin est, en principe, habilité à pratiquer tous les actes de diagnostic, de prévention et de traitement. Mais il ne doit pas, sauf circonstances exceptionnelles, entreprendre ou poursuivre des soins, ni formuler des prescriptions dans des domaines qui dépassent ses connaissances, son expérience et les moyens dont il dispose.

    Le droit reconnu à tout médecin d'exécuter tout acte de diagnostic, de prévention ou de traitement est fort justement maintenu dans le code de déontologie.

    Cette affirmation vaut certainement vis-à-vis de la notion pénale d'exercice illégal de la médecine, le médecin étant ainsi protégé. Elle doit toutefois être reconsidérée à la lumière de certains critères plus actuels que l'on peut qualifier de restrictifs (voir note [1]).

    Les connaissances doivent être prises ici au sens large (on a préféré ce terme à celui de compétence, plus équivoque, plus réducteur). Celles acquises pendant la formation universitaire doivent être entretenues, mises à jour, complétées (article11).

    L'expérience, évoque à la fois celle relevant d'une formation précédemment reçue et celle acquise dans la pratique quotidienne.

    Les moyens dont dispose le médecin doivent être évoqués devant l’évolution des technologies de la médecine. L'accès à l'imagerie sous tous ses aspects conditionne, par exemple, des indications thérapeutiques qui ne peuvent être prises sans elle.

    L'ensemble détermine les possibilités du médecin qu'évoquait le précédent code. Cela concerne, outre son environnement, sa culture propre, sa capacité à répondre à l'urgence. Il appartient au médecin de décider, souvent seul, en conscience, du rôle qu'il peut jouer. La formation nouvelle de certains confrères généralistes, formés dans les services appropriés, confrontés régulièrement avec la médecine de catastrophe leur donne incontestablement toute aptitude à intervenir dans ce cadre et y exercer une large autonomie de décision.

    Le code de déontologie montre bien où se situent réellement les inévitables limites de la règle de l'omnivalence du diplôme. Ce ne sont pas toujours celles du découpage administratif de la profession médicale, mais plutôt celles de la réelle expérience du praticien, en tenant compte aussi des circonstances particulières du moment. En cas de doute, le médecin doit penser qu'il aura à se justifier s'il y a litige ou contestation (voir note [2]).


    ([1]) Ces restrictions ne se confondent pas avec l'engagement d'exercice exclusif de la discipline, souscrit par un médecin qualifié spécialiste (art.2 de l'arrêté du 16 octobre 1989 modifié) et qui lui permet de coter ses actes en CS et VS.

    ([2]) Civ. 1ère, 25 novembre 2010, n° 09-68631

  • Article 71 - Installation convenable

    Article 71 (article R.4127-71 du code de la santé publique)

    Le médecin doit disposer, au lieu de son exercice professionnel, d'une installation convenable, de locaux adéquats pour permettre le respect du secret professionnel et de moyens techniques suffisants en rapport avec la nature des actes qu'il pratique ou de la population qu'il prend en charge. Il doit notamment veiller à la stérilisation et à la décontamination des dispositifs médicaux qu'il utilise et à l'élimination des déchets médicaux selon les procédures réglementaires.
    Il ne doit pas exercer sa profession dans des conditions qui puissent compromettre la qualité des soins et des actes médicaux ou la sécurité des personnes examinées.
    Il doit veiller à la compétence des personnes qui lui apportent leur concours.

    Cet article apporte un éclairage sur tout ce qui concerne l'installation et les conditions de la pratique médicale, quel que soit le mode d'exercice du médecin.

    Cela responsabilise le médecin vis-à-vis des conditions matérielles de son exercice, qu'elles lui soient propres ou mises à sa disposition par des tiers (cabinet, mais aussi hôpitaux, cliniques, centres de soins...).

    Dans le même esprit on retrouve l'exigence du caractère convenable de l'installation, afin d'y exercer une médecine consciencieuse et conforme aux "données acquises de la science". Tout local inapproprié, une chambre d'hôtel par exemple, mal isolé, un local à vocation totalement différente (local commercial) doit être rejeté.

    Il en est de même pour ce qui concerne les moyens techniques qui doivent permettre diagnostic et soins de bon niveau.

    Il s'agit essentiellement des appareils, instruments et produits pharmaceutiques susceptibles d'être utilisés parfois en urgence donc immédiatement disponibles. On ne peut en dresser la liste en raison de l'évolution rapide de la pratique. La compétence et la conscience du médecin doivent lui permettre une adaptation permanente.

    Au-delà de ses conditions matérielles d'exercice, nécessaires au respect et au confort du patient, le comportement du médecin, la nature de ses actes, les mesures de protection qui les entourent engagent tout autant sa responsabilité.

    Chaque décision ou geste thérapeutique ne peut être pris que dans un environnement défini. Cela est particulièrement vrai pour un chirurgien, un anesthésiste-réanimateur, un spécialiste médical ou chirurgical, responsable à la fois de son environnement technique et du personnel médical ou paramédical qui l'assiste dans sa démarche, que ce soit à hôpital, en clinique ou en centre de soins. Une mention spéciale doit être ici faite pour les structures pratiquant l’anesthésie et la chirurgie ambulatoire : une réglementation stricte (voir note [1]) vise à assurer le suivi postopératoire après le retour du patient à son domicile.

    Il ne faudrait pas qu'au travers de sites d’exercice multiples, mal équipés ou trop éloignés du cabinet principal, s'installe un suivi thérapeutique négligent. C'est une des raisons du contrôle exercé par les conseils départementaux avant d’autoriser ces derniers (article 85).

     Plusieurs éléments retiennent l'attention.

    Les locaux doivent être aménagés (isolation phonique, visuelle) pour permettre le respect du secret professionnel et les dossiers médicaux protégés contre toute indiscrétion, notamment si plusieurs médecins de disciplines différentes se succèdent dans un local partagé. Dans ce cas le fichier, au sens large, doit être personnel et son accès protégé. Le développement de l'informatique exige la protection des dossiers par des clés d'accès.

    Les Conseils départementaux s’assurent lors de la communication du contrat que les moyens mis à la disposition du médecin sont suffisamment définis pour lui permettre de respecter ses obligations déontologiques, notamment en ce qui concerne son indépendance professionnelle et le secret professionnel (article 83).

    Le cabinet médical proprement dit doit être sécurisé en l'absence du médecin .

    Si le médecin recourt à des dispositifs de vidéoprotection pour la sécurité des personnes et des biens, les moyens utilisés doivent nécessairement être proportionnés aux risques identifiés, ne pas porter atteinte à l’intimité des personnes et respecter le secret professionnel. Les patients doivent être informés de l’existence du dispositif qui doit être déclaré à la CNIL en cas d’enregistrement des images.

    Une place particulière a été réservée à l'hygiène et à l'asepsie. La stérilisation et la décontamination des matériels médicaux comme l'élimination des déchets médicaux sont soumises à des règlements désormais bien établis et incontournables. Il convient de protéger le patient d'une éventuelle contamination, mais aussi le médecin lui-même, son entourage professionnel, le personnel chargé de manipuler et d'évacuer les déchets médicaux. Ces règles concernent tout aussi bien le milieu stérile de la chirurgie orthopédique par exemple que le cabinet du généraliste. La Cour de Cassation (voir note [2]) juge que le médecin est tenu vis-à-vis de son patient, en matière d'infection nosocomiale, à une obligation de sécurité de résultat dont il ne peut se libérer qu'en rapportant la preuve d'une cause étrangère. Il importe peu que le médecin n’ait commis aucune faute. Les victimes doivent seulement rapporter la preuve du caractère nosocomial de l’infection (voir note [3]).

    Enfin la qualité et la sécurité des actes est aussi liée à la compétence des collaborateurs du médecin, sanctionnée aujourd'hui par un ensemble de diplômes spécifiques dont il lui revient de vérifier l'adéquation par rapport aux activités prévues. La capacité reconnue à ces derniers ne retire néanmoins aucune part de responsabilité au médecin dans sa pratique médicale.


    ([1]) Articles D. 6124-301 et suivants du code de la santé publique 

    ([2]) Civ., 1ère , 13 février 2011, 98-19433

    ([3]) Civ.,1ère , 30 octobre 2008, 07-13791

  • Article 72 - Respect du secret par les collaborateurs du médecin

    Article 72 (article R.4127-72 du code de la santé publique)

    Le médecin doit veiller à ce que les personnes qui l'assistent dans son exercice soient instruites de leurs obligations en matière de secret professionnel et s'y conforment.
    Il doit veiller à ce qu'aucune atteinte ne soit portée par son entourage au secret qui s'attache à sa correspondance professionnelle.

    Le principe du secret professionnel, affirmé dès l'article 4, s'étend aux aides et collaborateurs du médecin, sous sa responsabilité. Les secrétaires, les infirmières, les techniciens de laboratoires d'analyses médicales, les agents hospitaliers … et d'une façon générale toutes les personnes qui l'assistent, sont astreints au secret professionnel (voir note [1]). L'article 226-13 du code pénal les concerne.

    Ce personnel a, en effet, accès au courrier, aux fiches cliniques, aux dossiers médicaux ou aux comptes rendus d'analyses quel qu’en soit le support. Il est ainsi dépositaire, au même titre que le médecin, d'informations à caractère confidentiel, se rapportant aux patients. Chaque collaborateur d'un médecin est tenu, personnellement, au secret.

    L'article 72 rappelle que le médecin est responsable de toute indiscrétion venue de son entourage. La jurisprudence des chambres disciplinaires de l'Ordre présente des exemples de médecins qui ont été condamnés pour des indiscrétions commises par leurs collaborateurs. Le médecin doit, en conséquence, instruire tous les membres de son personnel de leurs obligations en matière de secret professionnel et doit s'astreindre à multiplier ses recommandations sur ce sujet.

    Un certain nombre de médecins, en général salariés, travaillant au sein ou auprès d'administrations, de collectivités territoriales ou d'autres organismes chargés ou non d’une mission de service public, rencontrent des difficultés pour faire respecter le secret médical, leur courrier étant ouvert par, ou sous la responsabilité, de leur hiérarchie.

    A cet égard, il convient de rappeler que le secret médical est garanti par l'article 226-13 du code pénal et que la loi n'édicte aucune dérogation à ce secret au bénéfice de l'administration. On ne saurait donc invoquer, dans cette situation, un quelconque consentement des intéressés à la divulgation des faits les concernant ; dans la mesure où ils adressent leur courrier au médecin en cette qualité, ils s’attendent à bénéficier de toute la discrétion nécessaire, a fortiori lorsque figure sur l'enveloppe le nom du médecin, ce qui est souhaitable, ou la mention « secret médical ». Les atteintes au secret des correspondances sont sanctionnées par l'article 226-15 du code pénal lorsqu'elles sont commises par un particulier, par l'article 432-9 du même code lorsqu'elles sont le fait d'un dépositaire de l'autorité publique.

    Les médecins ont la responsabilité de faire reconnaître, par leur employeur ou supérieur hiérarchique, leurs obligations déontologiques et ont le droit d'obtenir les moyens de les respecter. Ils peuvent demander l’intervention du Conseil départemental lorsqu’une autorité quelle qu’elle soit prétend y porter atteinte.

    Dans les établissements publics de santé, les informations concernant un patient, notamment les examens qui lui sont prescrits et les soins qui lui sont dispensés, circulent obligatoirement entre les équipes pluridisciplinaires de médecins, d'internes et d'externes, qui le prennent en charge. Ces données sont portées dans le cadre de leur exercice, à la connaissance des équipes d'infirmières, d'aides soignants, du personnel paramédical souvent très mobile, et des étudiants en formation. C'est ainsi que s'est instaurée une certaine pratique du "secret collectif" qui expose à l’indiscrétion (article 4).

    Néanmoins la loi (voir note [2]) garantit la confidentialité à la personne hospitalisée et la révélation d'une information couverte par le secret est pénalement sanctionnable, conformément aux termes de l'article 226-13 du code pénal.

    Le sixième point de la Charte européenne des droits des patients (voir note [3]) rappelle ce droit à la confidentialité. Le principe du secret s'applique donc au personnel soignant. Il est étendu, par la loi (voir note 1), aux directeurs d'établissement de santé, au personnel administratif et auxiliaires non médicaux. Un effort tout particulier doit être fait pour protéger contre les indiscrétions l'identité des consultants et leur intimité lors de leur accueil, dans les salles d'attente ou à l'occasion des prises de rendez-vous.

    Les médecins responsables du pôle ou de l’unité doivent veiller à ce que le secret médical soit respecté par l'ensemble du personnel médical et paramédical. L'exemple qu'ils peuvent donner chaque jour, ainsi que celui des cadres-infirmiers est le principal procédé éducatif.

    Un effort rigoureux et constant doit être soutenu par tout le personnel hospitalier pour maintenir le respect de ce principe. Un tel effort exige une vigilance quotidienne.


    ([1]) Article L.1110-4, 2ème alinéa du code de la santé publique : « Excepté dans les cas de dérogation, expressément prévus par la loi, ce secret couvre l'ensemble des informations concernant la personne venues à la connaissance du professionnel de santé, de tout membre du personnel de ces établissements ou organismes et de toute autre personne en relation, de par ses activités, avec ces établissements ou organismes. Il s'impose à tout professionnel de santé, ainsi qu'à tous les professionnels intervenant dans le système de santé. »

    ([2]) Article L.1112-1 du code de la santé publique

    ([3]) Cette charte en 14 points, établie le 15 novembre 2002, par l’association de citoyens européens Active Citizenship Network (ACN) a pour but d’harmoniser les droits des patients dans les Etats européens

  • Article 73 - Conservation et protection des documents médicaux

    Article 73 (article R.4127-73 du code de la santé publique)

    Le médecin doit protéger contre toute indiscrétion les documents médicaux concernant les personnes qu'il a soignées ou examinées, quels que soient le contenu et le support de ces documents.
    Il en va de même des informations médicales dont il peut être le détenteur.
    Le médecin doit faire en sorte, lorsqu'il utilise son expérience ou ses documents à des fins de publication scientifique ou d'enseignement, que l'identification des personnes ne soit pas possible. A défaut, leur accord doit être obtenu.

    Le dossier professionnel ou fiche d’observation, tenu par le médecin pour chaque patient conformément à l’article 45, est couvert par le secret médical et le médecin est personnellement responsable de sa protection contre toute indiscrétion (voir note [1]).

    1 - Les documents médicaux

    Les documents médicaux concernant une personne s'adressant à un médecin sont très divers. En font partie les dossiers professionnels ou fiches d’observation, tenus par le médecin. Le code fait obligation au médecin d’avoir au minimum une fiche d’observation comportant les éléments actualisés nécessaires aux décisions diagnostiques et thérapeutiques (article 45). Au maximum, il peut s'agir d'un dossier professionnel volumineux, voire de plusieurs dossiers répartis entre plusieurs médecins intervenant séparément pour le même patient.

    Le médecin doit en assurer la conservation en prenant toutes les précautions utiles : locaux, armoires de classement fermées à clef, ordinateur protégé par un code d’accès et si les dossiers ne sont plus sous sa garde, s'assurer qu'ils sont conservés dans des conditions permettant d'en respecter la confidentialité.

    Les documents médicaux  établis sur support informatique doivent faire l'objet d'une déclaration auprès de la CNIL (note [2]).

    Dans les cabinets de groupe, les dossiers professionnels ou fiches d’observation sont, dans la pratique, bien souvent  accessibles à tous les médecins. Ils  peuvent être alors consultés par les différents médecins du groupe qui sont appelés à se remplacer mutuellement, avec l'accord du patient. Mais un patient a le droit de demander à ce qu'un seul médecin du groupe connaisse son dossier. Chacun des médecins doit avoir ses dossiers professionnels ou fiches d’observation et ses accès personnels.

    Des difficultés peuvent surgir lorsqu'un médecin décide de se dissocier du groupe. Il est donc souhaitable que, dès la constitution d'un cabinet de groupe, des dispositions contractuelles soient établies, afin que le problème de la transmission des données médicales puisse être réglé, sans conflit, en fonction de l'intérêt des patients.

    Dans les centres de santé, gérés par des organismes sociaux, la question s’est posée de savoir qui était "le propriétaire" des dossiers professionnels ou fiches d’observation. Ces dossiers ou fiches ne peuvent être utilisés et consultés que par les médecins du centre. Mais un médecin qui quitte le centre ne peut prétendre emporter les dossiers ou fiches des patients qu'il a soignés ; il peut, cependant, y avoir accès, en cas de nécessité. Un arrêt de la Cour de Cassation du 28 octobre 1970 justifie cette disposition ; en effet, un médecin généraliste ayant exercé dans un centre médical mutualiste s'est vu débouté de sa demande que lui soient restituées toutes "les fiches établies par lui, et la correspondance médicale écrite par lui ou à lui adressée". L'argument invoqué par la Cour était que le fichier était l’œuvre collective des médecins du centre où le généraliste travaillait et à leur disposition "en particulier de celui qui reçoit ou va visiter le malade". Le dossier médical est donc dans ce cas particulier un document "collectif" à l'usage des médecins pratiquant dans ce centre ; ils n'ont donc "aucun droit de propriété sur les fiches médicales", ils en ont seulement la garde.

    Le 11 février 1972 (note [3]),  le Conseil d'Etat a adopté une solution identique, estimant que « lorsque malade s’adresse à un organisme qui pratique la médecine collective, c'est nécessairement à l'ensemble du personnel médical de cet organisme que, sauf prescription particulière de la part de ce malade le secret médical est confié. Dès lors, un tel organisme ne peut, sans le consentement du malade intéressé, se dessaisir, au profit d'un médecin qui aurait cessé d'exercer ses fonctions en son sein, des fiches médicales établies par les médecins qui lui sont attachés.».

    En cas de fermeture du centre, les dispositions de l’article R.1112-8 du code de la santé publique s'appliquent : "Lorsqu'un établissement de santé privé, ne participant pas à l'exécution du service public hospitalier cesse ses activités, les dossiers médicaux, sous réserve des tris nécessaires, peuvent faire l'objet d'un don à un service public d'archives par voie contractuelle entre le directeur de l'établissement et l'autorité administrative compétente".

    2- En cas de cessation d'activité

    Le devenir des dossiers professionnels ou fiches d’observation du médecin pose de nombreux problèmes, notamment en cas de décès du praticien (voir note [4]).

    Les dossiers professionnels ou fiches d’observation, quel qu’en soit le support, ne peuvent être détruits : les informations qu'ils contiennent peuvent être utiles et même indispensables pour la poursuite des soins ou pour la défense  du médecin ou de ses héritiers en cas de recherche de responsabilité civile professionnelle.

    a) Lorsqu'un médecin quitte son poste pour exercer ailleurs ou prend sa retraite, la transmission des dossiers professionnels ou fiches d’observation à son successeur ne peut être automatique. En effet, la "présentation du successeur à la patientèle" n'empêche nullement que les patients puissent choisir un autre médecin.

    Il est normal que les patients demandent la transmission de leur dossier ou fiche d’observation au médecin de leur choix.

    b) Lorsque l'activité du médecin est brusquement interrompue, par sa mort ou par une maladie qui l'empêche de procéder au tri des dossiers, son remplaçant ou le médecin qui va lui succéder doivent mettre en œuvre, à la demande des patients, la transmission des dossiers aux médecins désignés par eux. Dans ce but, les dossiers doivent donc être conservés plusieurs années : un minimum de 20 ans est recommandé.

    S'il n'y a pas de médecin successeur, le conjoint du médecin ou ses héritiers recevront du conseil départemental de l'Ordre l’aide nécessaire pour le tri des documents médicaux et des conseils sur les décisions à prendre quant au devenir des documents restants.

    3- Dossiers médicaux en médecine du travail ou médecine de prévention

    La convention collective nationale du personnel des services interentreprises de médecine du travail du 20 juillet 1976 prévoit dans son article 10 : " Les services interentreprises s'engagent à prendre toutes dispositions utiles pour que le secret professionnel soit respecté dans les locaux qu'ils mettent à la disposition du personnel, notamment en ce qui concerne le courrier, les modalités de conservation des dossiers médicaux, quel qu'en soit le support...".

    Cette formulation est reprise dans les modèles de contrat pour un médecin du travail : «l’entreprise s'engage à prendre toutes dispositions utiles pour que le secret professionnel soit respecté dans les locaux qu'il mettra à la disposition du Dr …, notamment en ce qui concerne le courrier, les modalités de conservation des dossiers médicaux, quel qu'en soit le support (notamment numérisé), et l'isolement acoustique des locaux où sont examinés les salariés. »

    Les informations contenues dans les dossiers médicaux en santé au travail ne peuvent être communiqués qu'aux médecins inspecteurs du travail, liés eux-mêmes par le secret, au salarié et en cas de décès, à ses ayants droit ( note [5]).Le principe, posé par la loi du 4 mars 2002, d’un accès direct de la personne aux informations la concernant, s’applique en médecine du travail et en médecine de prévention.

    L’article D. 4624-46 du code du travail renvoie aux dispositions du code de la santé publique pour ce qui est de la durée et des conditions de conservation des dossiers médicaux en santé au travail. Si l'on envisage le rôle du médecin du travail dans les enquêtes épidémiologiques, comme le prévoit l’article D.4624-50 du code du travail (voir note [6]), la conservation des dossiers pourrait être sans limite.

    Ces mêmes règles sont applicables pour les personnels relevant de la fonction publique (note [7]).

    4- Dossiers médicaux en médecine scolaire

    Les dossiers médicaux ne sont pas communicables à des tiers.

    Lorsque l’enfant change d’établissement scolaire, la transmission du dossier médical est subordonnée à l’autorisation préalable des titulaires de l’autorité parentale.

    Bien qu’il soit détenu par les parents et non le médecin, il n’est pas inutile de rappeler ici que le carnet de santé des enfants a un caractère confidentiel et que nul hormis les personnes qui participent à la prise en charge médicale de l’enfant ne peut en exiger la communication (article L. 2132-1 du code de la santé publique).

    Ce carnet doit être remis au médecin scolaire par les parents s’ils le jugent utile, en main propre, sous pli fermé.

    5 - Dossiers médicaux en médecine de contrôle

    Les dossiers médicaux établis par les médecins conseils des organismes d'assurance maladie ne peuvent être communiqués ni aux personnes étrangères au service médical, ni à une autre administration, conformément à l'article 104 du code de déontologie.

    Dans l'exercice de leurs missions, ces médecins ont accès, dans le respect des règles de déontologie médicale au dossier médical des patients accueillis ou hospitalisés dans les établissements publics ou privés de santé (art. L. 162-30-1 du code de la sécurité sociale, article L. 1112-1, 6ème alinéa du code de la santé publique).

    6 - Dossiers médicaux établis dans les établissements de santé publics ou privés

    L’exigence d’un dossier hospitalier a reçu une consécration légale en 1970 pour en permettre la communication aux médecins appelés à donner des soins aux patients hospitalisés ou reçus en consultation externe.

    La loi hospitalière du 31 juillet 1991 a reconnu aux patients le droit d’accéder à leur dossier médical par l’intermédiaire d’un médecin. Cette condition est désormais levée par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades.

    L’article L.1112-1 du code de la santé publique précise : « Les établissements de santé, publics ou privés, sont tenus de communiquer aux personnes recevant ou ayant reçu des soins, sur leur demande, les informations médicales définies à l'article L. 1111-7. Les praticiens qui ont prescrit l'hospitalisation ont accès, sur leur demande, à ces informations. Cette communication est effectuée, au choix de la personne concernée, directement ou par l'intermédiaire d'un médecin qu'elle désigne ».

    La reconnaissance de ce droit d’accès a amené à définir la composition du dossier communicable.

    • Composition du dossier communicable

    Selon l’article R.1112-2 du code de la santé publique, « Un dossier médical est constitué pour chaque patient hospitalisé dans un établissement de santé public ou privé. Ce dossier contient au moins les éléments suivants, ainsi classés :

    1º Les informations formalisées recueillies lors des consultations externes dispensées dans l'établissement, lors de l'accueil au service des urgences ou au moment de l'admission et au cours du séjour hospitalier, et notamment :

    a) La lettre du médecin qui est à l'origine de la consultation ou de l'admission ;

    b) Les motifs d'hospitalisation ;

    c) La recherche d'antécédents et de facteurs de risques ;

    d) Les conclusions de l'évaluation clinique initiale ;

    e) Le type de prise en charge prévu et les prescriptions effectuées à l'entrée ;

    f) La nature des soins dispensés et les prescriptions établies lors de la consultation externe ou du passage aux urgences ;

    g) Les informations relatives à la prise en charge en cours d'hospitalisation : état clinique, soins reçus, examens para-cliniques, notamment d'imagerie ;

    h) Les informations sur la démarche médicale, adoptée dans les conditions prévues à l'article L. 1111-4 ;

    i) Le dossier d'anesthésie ;

    j) Le compte rendu opératoire ou d'accouchement ;

    k) Le consentement écrit du patient pour les situations où ce consentement est requis sous cette forme par voie légale ou réglementaire ;

    l) La mention des actes transfusionnels pratiqués sur le patient et, le cas échéant, copie de la fiche d'incident transfusionnel mentionnée au deuxième alinéa de l'article R.1221-40;

    m) Les éléments relatifs à la prescription médicale, à son exécution et aux examens complémentaires ;

    n) Le dossier de soins infirmiers ou, à défaut, les informations relatives aux soins infirmiers ;

    o) Les informations relatives aux soins dispensés par les autres professionnels de santé ;

    p) Les correspondances échangées entre professionnels de santé ;

    q) Les directives anticipées mentionnées à l’article L.1111-11 ou, le cas échéant, la mention de leur existence ainsi que les coordonnées de la personne qui en est détentrice.

    2º Les informations formalisées établies à la fin du séjour :

    Elles comportent notamment :

    a) Le compte rendu d'hospitalisation et la lettre rédigée à l'occasion de la sortie ;

    b) La prescription de sortie et les doubles d'ordonnance de sortie ;

    c) Les modalités de sortie (domicile, autres structures) ;

    d) La fiche de liaison infirmière.

    3º Informations mentionnant qu'elles ont été recueillies auprès de tiers n'intervenant pas dans la prise en charge thérapeutique ou concernant de tels tiers.

    Sont seules communicables les informations énumérées aux 1º et 2º. »

    • L'archivage des dossiers s'effectue sous la responsabilité du directeur de l'établissement qui doit veiller à ce que toutes les dispositions soient prises pour assurer la garde et la confidentialité des dossiers (voir note [8]).

    La destruction des dossiers exige l'accord conjoint du médecin responsable de la structure médicale concernée et du directeur de l'établissement et le cas échéant (dossier établi dans un établissement public ou privé participant au service public) le visa de l’administration des archives.

    Le personnel qui a la garde des dossiers est astreint au secret professionnel et ne peut rien communiquer sans l'accord du médecin responsable du service concerné.

    7 - Hébergement des données de santé

    L’activité d’hébergement des données de santé peut être définie comme toute activité d’externalisation, de détention et de conservation de données de santé recueillies ou produites à l’occasion d’un acte de prévention, de diagnostic ou de soins et confiées à un tiers qui n’avait pas mission de les collecter.

     Le volume des archives est considérable et l'informatisation notamment dans les établissements de santé, permet d'envisager un système optimisé de stockage et de communication des informations médicales. La confidentialité des données nominatives  conservées sur support informatique ou transmises par voie électronique obéit aux  prescriptions de la loi sur l’informatique et les libertés et du code de la santé publique (voir note [9]).

    L’article L.1111-8 du code de la santé publique a prévu que les professionnels de santé, les établissements de santé ou la personne concernée puissent déposer des données de santé à caractère personnel, recueillies ou produites à l’occasion des activités de prévention, de diagnostic ou de soins auprès de personnes physiques ou morales agréées à cet effet. Cet hébergement des données ne peut avoir lieu qu’avec le consentement exprès de la personne concernée et fait l’objet d’un contrat. Par dérogation, le consentement exprès des personnes concernées est, à compter du 11 août 2011, réputé accordé pour ce qui concerne les données de santé hébergées avant cette date par les établissements publics et privés de santé.

    Les conditions d’agrément des hébergeurs sont fixées par décret pris après avis de la CNIL et des Conseils de l’Ordre des professions de santé (articles R.1111-9 et suivants du code de la santé publique). Il est notamment exigé la présence d’un médecin, inscrit au tableau de l’Ordre, chez l’hébergeur.

    Les hébergeurs et les personnes placées sous leur autorité qui ont accès aux données déposées sont astreints au secret professionnel dans les conditions prévues à l’article 226-13 du code pénal, soumis à des conditions strictes concernant le traitement et la conservation des données qui leur sont confiées. Ils relèvent du contrôle de l’IGAS, des médecins inspecteurs de la santé et inspecteurs de l’ARS.

    8 - Publications scientifiques et enseignement

    L'anonymat des observations rapportées dans les publications scientifiques est une règle absolue.

    Le patient ne doit être désigné que par un numéro d'ordre.

    Les photographies, si elles comprennent le visage, doivent être masquées. Si des détails de l'observation étaient de nature à permettre une identification facile, ils exposeraient l'auteur à des poursuites pour violation du secret.

    Le médecin doit prendre toutes mesures pour que l'identification des personnes soit impossible lorsqu'il fait part de son expérience ou de ses documents aux fins de publication scientifique ou d'enseignement.

    A défaut, il doit solliciter l'accord des patients dans le cas où leur anonymat ne peut être préservé.

    Un système de codage doit rendre anonymes les dossiers consultés ou étudiés à des fins scientifiques, épidémiologiques et statistiques.

    Toutefois, certains travaux de recherche (études de pharmacovigilance, protocoles de recherche réalisés dans le cadre d'études coopératives nationales ou internationales), ou certaines particularités de la recherche nécessitent le recueil des informations sous forme nominative. De telles études, dérogatoires aux exigences d'anonymisation des données, doivent être autorisées par la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés, après avis du Comité consultatif pour le traitement de l'information en matière de recherche dans le domaine de la santé.

    Mais, même dans ces situations dérogatoires, la présentation des résultats du traitement des données ne peut en aucun cas permettre l'identification directe ou indirecte des personnes concernées (voir note [10]).

    De même la plus grande discrétion est de mise dans le cadre du DPC, lors d’un enseignement à l’université ou d’une formation à l’hôpital. L’article L.1111-4, 6ème alinéa du code de la santé publique rappelle que l’examen d’une personne dans le cadre d’un enseignement clinique requiert son consentement préalable et que les étudiants qui reçoivent cet enseignement doivent être informés des droits des malades et les respecter.

    La médiatisation de la médecine a malheureusement entraîné de nombreuses dérives dans ce domaine et favorisé une certaine "médecine spectacle" que l'Ordre des médecins a sévèrement condamnée à plu


    ([1]) J. LUCAS, « Dématérialisation des documents médicaux : Créer la confiance pour favoriser l’informatisation », rapport adopté par le Conseil national de l’Ordre des médecins lors de sa session de juin 2010

    ([2]) La CNIL a adopté une norme simplifiée de déclaration NS n°50 pour la gestion des dossiers tenus par les médecins qui exercent à titre libéral

    ([3]) conseil d’Etat, 11 février 1972, n°76799

    ([4]) Dossiers médicaux : conservation et archivage, CNOM, 2009

    ([5]) Articles L. 1110-4 et L. 1111-7 du code de la santé publique

    ([6]) Article D. 4624-50 du code du travail : « Le médecin du travail participe, notamment en liaison avec le médecin inspecteur du travail, à toutes recherches, études et enquêtes, en particulier à caractère épidémiologique, entrant dans le cadre de ses missions ».

    ([7]) Décret n°82-453 du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique ; décret n°85-603 du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique territoriale

    ([8]) Article R.1112-7 du code de la santé publique : « Les informations concernant la santé des patients sont soit conservées au sein des établissements de santé qui les ont constituées, soit déposées par ces établissements auprès d'un hébergeur agréé en application des dispositions à l'article L. 1111-8.

    Le directeur de l'établissement veille à ce que toutes dispositions soient prises pour assurer la garde et la confidentialité des informations ainsi conservées ou hébergées.

    Le dossier médical mentionné à l'article R. 1112-2 est conservé pendant une durée de vingt ans à compter de la date du dernier séjour de son titulaire dans l'établissement ou de la dernière consultation externe en son sein. Lorsqu'en application des dispositions qui précèdent, la durée de conservation d'un dossier s'achève avant le vingt-huitième anniversaire de son titulaire, la conservation du dossier est prorogée jusqu'à cette date. Dans tous les cas, si la personne titulaire du dossier décède moins de dix ans après son dernier passage dans l'établissement, le dossier est conservé pendant une durée de dix ans à compter de la date du décès. Ces délais sont suspendus par l'introduction de tout recours gracieux ou contentieux tendant à mettre en cause la responsabilité médicale de l'établissement de santé ou de professionnels de santé à raison de leurs interventions au sein de l'établissement.

    A l'issue du délai de conservation mentionné à l'alinéa précédent et après, le cas échéant, restitution à l'établissement de santé des données ayant fait l'objet d'un hébergement en application de l'article     L. 1111-8, le dossier médical peut être éliminé. La décision d'élimination est prise par le directeur de l'établissement après avis du médecin responsable de l'information médicale. Dans les établissements publics de santé et les établissements de santé privés participant à l'exécution du service public hospitalier, cette élimination est en outre subordonnée au visa de l'administration des archives, qui détermine ceux de ces dossiers dont elle entend assurer la conservation indéfinie pour des raisons d'intérêt scientifique, statistique ou historique. »

    ([9]) Loi n°78-17 du 6 janvier 1978 modifiée : art. 34, 36, 40 ; Articles L.1110-4, R.1110-1 à R.1110-3 du code de la santé publique

    ([10]) Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, chapitre IX : Traitements de données à caractère personnel ayant pour fin la recherche dans le domaine  de la santé, art. 55

  • Article 74 - Interdiction de la médecine foraine

    Article 74 (article R.4127-74 du code de la santé publique)

    L'exercice de la médecine foraine est interdit ; toutefois des dérogations peuvent être accordées par le conseil départemental de l'ordre dans l'intérêt de la santé publique.
    Toutefois, quand les nécessités de la santé publique l'exigent, un médecin peut être autorisé à dispenser des consultations et des soins dans une unité mobile selon un programme établi à l'avance.
    La demande d'autorisation est adressée au conseil départemental dans le ressort duquel se situe l'activité envisagée. Celui-ci vérifie que le médecin a pris toutes dispositions pour répondre aux urgences, garantir la qualité, la sécurité et la continuité des soins aux patients qu'il prend en charge.
    L'autorisation est personnelle et incessible. Il peut y être mis fin si les conditions fixées aux deux alinéas précédents ne sont plus réunies.
    Le conseil départemental au tableau duquel le médecin est inscrit est informé de la demande lorsque celle-ci concerne une localité située dans un autre département.

     

    La médecine foraine est l'exercice de la médecine sans lieu d'exercice permanent, sans moyen technique adapté. Les consultations sont données dans des lieux divers.

    De telles pratiques sont interdites. En effet l'exercice de la médecine exige une installation qui permette une activité professionnelle de bonne qualité (article71). En outre, les patients doivent pouvoir joindre leur médecin lorsqu'ils ont besoin de lui.

    Dans le même esprit, l'exercice de la médecine par correspondance doit être condamné.

    Pour les spécialistes dont l'exercice professionnel s'inscrit dans un cadre particulier (urgentistes, anesthésistes...), le médecin s'attachera à ce que son acte médical soit effectué dans des conditions qui respectent le patient et sa sécurité.

    Toutefois et c’est notamment l’objet de la modification en 2012 de cet article, les besoins de la population peuvent conduire à mobiliser des médecins pour donner des soins dans des conditions inhabituelles. Dans l'intérêt de la santé publique, le conseil départemental de l'Ordre peut alors autoriser un médecin à exercer dans une unité mobile selon un programme défini à l’avance.

  • Article 75 - Interdiction d'exercer sous un pseudonyme

    Article 75 (article R.4127-75 du code de la santé publique)

    Conformément à l' article L.4113-3 du code de la santé publique, il est interdit d'exercer la médecine sous un pseudonyme.
    Un médecin qui se sert d'un pseudonyme pour des activités se rattachant à sa profession est tenu d'en faire la déclaration au conseil départemental de l'ordre.

    L’exercice de la médecine est personnel. Un médecin est inscrit au tableau de l’Ordre et exerce sous le nom qui figure sur son état civil.

    L’usage d’un pseudonyme, défini par la jurisprudence (voir note [1]) comme « un nom de fantaisie librement choisi par la personne pour masquer au public sa personnalité véritable dans l’exercice d’une activité particulière » est, par voie de conséquence, interdit tant par l’article L.4113-3 du code de la santé publique que par le code de déontologie. Le non respect de cette interdiction est passible d’amende (voir note [2]) et de sanctions disciplinaires.

    La loi n’interdit pas au médecin d’utiliser un pseudonyme dans une activité littéraire ou artistique. Mais si cette activité comporte des liens avec son activité médicale, comme c’est souvent le cas dans une activité de vulgarisation médicale (articles 13 et 20), il est tenu d’en faire la déclaration au Conseil départemental dont il relève.

    A cette question de l’identité du médecin se rattache celle de sa responsabilité professionnelle : l’utilisation d’un pseudonyme ne soustrait pas le médecin à la compétence de la juridiction disciplinaire.


    ([1]) Civ, 1ère, 23 février 1965, n° 62-13427

    ([2]) Article L.4163-5 du code de la santé publique : « L'exercice de la médecine, l'art dentaire ou la profession de sage-femme sous un pseudonyme est puni de 4500 euros d'amende.
    La récidive est punie de six mois d'emprisonnement et de 9000 euros d'amende. »

  • Article 76 - Délivrance des certificats

    Article 76 (article R.4127-76 du code de la santé publique)

    L'exercice de la médecine comporte normalement l'établissement par le médecin, conformément aux constatations médicales qu'il est en mesure de faire, des certificats, attestations et documents dont la production est prescrite par les textes législatifs et réglementaires.
    Tout certificat, ordonnance, attestation ou document délivré par un médecin doit être rédigé lisiblement en langue française et daté, permettre l'identification du praticien dont il émane et être signé par lui. Le médecin peut en remettre une traduction au patient dans la langue de celui-ci.

    Tout médecin, quelle que soit sa forme d'activité professionnelle, est amené à remettre aux personnes qu'il a examinées tantôt une ordonnance, tantôt un certificat. Ce document signé engage sa responsabilité. Le médecin doit donc consacrer à sa rédaction toute l’attention et la rigueur nécessaire (voir note [1]).

    Les articles 28, 50 et 76 du code de déontologie déclinent les règles et limites d’établissement des certificats.

    1 - L'établissement des certificats médicaux est une des fonctions du médecin. Il ne peut s'y soustraire que pour des raisons précises.

    Il en a l'obligation pour les certificats exigés par les lois et règlements (accident du travail, application des lois sociales, etc.). Quand ce n'est pas le cas, le médecin apprécie s'il y a lieu ou non de délivrer le certificat qui lui est demandé et rejettera les demandes indues (voir note 2) ou abusives.

    2 - Le médecin est libre de la rédaction du certificat, mais celui-ci doit être parfaitement objectif. Il relate les constatations faites par le médecin. Il ne doit pas affirmer ce qui n'est que probable, il ne doit pas comporter d'omissions dénaturant les faits.

    3 - Un médecin ne doit jamais délivrer un certificat sans avoir vu et examiné la personne dont il s'agit. L'établissement d'un certificat est en effet un acte à part entière de l'activité médicale.

    L'examen sera soigneux et attentif, et le certificat détaillé et précis, en particulier dans certains cas : description de lésions traumatiques après accident ou agression (le certificat initial sera la pièce fondamentale du dossier du blessé), ou certificat d'internement (dans lequel il n'est pas nécessaire de formuler un diagnostic, mais qui doit décrire les symptômes ou comportements pathologiques).

    Le signataire du certificat exprime à l'indicatif présent (ou passé) les constatations qu'il a faites et ce dont il est sûr. S'il rapporte des indications fournies par le patient ou l'entourage, il le fait avec la plus grande circonspection et emploie le mode conditionnel ou il écrit : "X me dit que... ".

    Exemple : "J'ai examiné une personne disant s’appeler X et avoir été victime d'un accident de la voie publique. Il (elle) aurait perdu connaissance environ dix minutes lors de cet accident. Je constate les signes d'une contusion du genou droit, nécessitant une radiographie, une plaie de la face externe de la jambe droite longue de quatre centimètres. Je n'ai pas constaté de signes neurologiques, mais le blessé souffrirait de céphalées assez vives... ".

    Cependant, le médecin doit se garder d’attribuer la responsabilité des troubles de santé, physiques ou psychiques, constatés, au conflit conjugal, familial (article 51) ou professionnel dont le patient lui a fait part.

    Il n’a pas plus à authentifier, en les notant dans le certificat sous forme de « dires du patient », les accusations de celui-ci contre un tiers, le conjoint ou l’employeur.

    Il n’a pas non plus à remettre à l’un des parents ou à un tiers un certificat tendant à la modification du droit de visite ou de garde de l’enfant ni attribuer les troubles présentés par un enfant au comportement de l’autre parent ou d’un tiers (article 44).

    Lorsqu'une personne s'adresse à un médecin pour certifier son intégrité physique ou mentale, celui-ci doit éviter d'affirmer, après un examen négatif, qu'elle est en bonne santé. Il est préférable d'écrire : "Je n'ai pas constaté ce jour de signes d’affection cliniquement décelables. Il (elle) semble en bonne santé".

    4 - Le médecin qui rédige un certificat doit se préoccuper de ne pas violer le secret professionnel (article 4), bien qu'il puisse en droit tout écrire du moment que le document est remis directement à la personne concernée.

    La question ne se pose pas pour les certificats qui ne donneront qu'une conclusion sans mention de diagnostic : "X a besoin de tant de jours de repos, doit être transporté en ambulance, ne peut se déplacer, etc.".

    Les certificats pour accident du travail, maladie professionnelle, demande de pension, répondent à des textes qui instituent une dérogation légale au secret professionnel.

    En dehors de ces cas, dès qu'un certificat comporte des renseignements médicaux ou un diagnostic, le médecin doit tenir compte dans la rédaction, des éventuelles réactions de son patient si le certificat constitue pour lui une révélation traumatisante, et de la destination du document.

    Le principe fondamental est que, sauf lorsque la loi en dispose autrement (voir note 3), le certificat médical ne peut être remis qu'au patient lui-même et en main propre. Lorsque le médecin y fait figurer des renseignements confidentiels, il lui est conseillé d'inscrire sur le certificat : "attestation confidentielle délivrée à X sur sa demande". Il peut faire contresigner la remise du certificat par l'intéressé.

    Cependant un certificat peut être délivré à un proche de la personne malade ou blessée, si celle-ci est inconsciente ou incapable.

    Sauf cette circonstance, un certificat médical ne doit jamais être fourni à un tiers (surtout à l'insu du patient), quel que soit ce tiers (ami, voisin, adversaire, administration, compagnie d'assurances...).

    Le conjoint doit être considéré comme un tiers. Le médecin, sollicité notamment dans une procédure de divorce - dont il peut ignorer qu'elle est  envisagée ou en cours - doit se garder de donner à l'un des conjoints ou à son avocat une attestation concernant l'autre conjoint ou la vie du couple qui pourrait être utilisée dans le cadre de la procédure de divorce.

    Le secret médical n'est pas aboli par le décès du patient : le médecin ne peut en principe délivrer de certificats après la mort (en dehors du certificat de décès), ni aux héritiers, ni aux administrations et organismes.

    Les tribunaux l'admettent parfois, "lorsqu'on peut estimer que le défunt aurait accepté la révélation des éléments en cause". Dans les litiges concernant  un testament, le médecin peut accepter de certifier, si c’était la vérité, que le testataire était sain d'esprit au moment où il a signé ; et en cas de rente viagère que le crédirentier était, ou non, atteint au jour de l’acte, de la maladie dont il est décédé dans les vingt jours de la date du contrat.

    Quand une compagnie d'assurances demande que le médecin indique la cause d'un décès, celui-ci peut seulement certifier, si c'est la vérité, que la mort a été naturelle et sa cause étrangère aux risques exclus par le contrat qui lui a été communiqué. Les ayant droit du patient peuvent avoir accès, pour faire valoir leurs droits, aux informations le concernant, sauf opposition de celui-ci exprimée de son vivant (voir note 4).

    5 - Un certificat médical engage la responsabilité du médecin signataire. Il doit donc comporter ses nom et adresse et être signé de sa main ; il doit être lisible et daté. Le médecin ne peut antidater ou postdater un certificat.

    La signature du document sera manuscrite, en utilisant un moyen dont la permanence sera aussi durable que possible, c'est-à-dire à l'exclusion d'un crayon ou stylo à mine. Il est formellement proscrit d'utiliser un cachet ou un fac-similé de signature, dont l'emploi ne saurait garantir que l'auteur ou le signataire est bien celui dont le nom et l'adresse figurent en tête du document.

    La reproduction d'ordonnances par des procédés de photocopie, l'imitation ou la falsification de la signature d'un médecin sont devenues des phénomènes assez courants. Il est important, lorsque le médecin en a connaissance qu'il en avertisse le conseil départemental de l'Ordre, ou selon les circonstances le médecin-conseil de la caisse d'assurance maladie, et éventuellement les autorités de justice.

    L'identification du signataire est indispensable pour conférer à tout acte, une valeur probante. Si une ordonnance est utilisée pour établir le certificat, celle-ci comportera le nom, le prénom, l'adresse professionnelle et le n° d’inscription au tableau du praticien (article 79). Si le certificat est établi sur papier sans en-tête (manuscrit ou dactylographié), les nom, prénom et adresse professionnelle doivent y figurer.

    Si le patient ne parle pas français, doit se rendre à l'étranger ou est victime d'un accident en dehors de son pays d'origine, il peut être amené à demander une traduction du certificat pour faciliter ses soins ou faire valoir ses droits. Le médecin peut parfois rédiger lui-même cette traduction. Il ne peut toutefois assurer la responsabilité d'une traduction faite dans une langue qu'il ne maîtrise pas ; le patient s'en remettra aux soins d'un traducteur assermenté.

    6 - Dans sa correspondance personnelle et privée, le médecin ne doit pas utiliser un document à en-tête professionnel ou une formulation qui pourrait prêter à son courrier le caractère d'un certificat ou d'un témoignage médical. Il en va de même des attestations ou témoignages destinés à être produits en justice qui lui sont demandés, en sa qualité, non de médecin, mais de simple citoyen.


    ([1]) H. BOISSIN, D. ROUGEMONT, « Les certificats médicaux – Règles générales d’établissement », octobre 2006

    Rapport de la Commission nationale permanente adopté lors des Assises du Conseil national de l'Ordre des médecins du 18 juin 2011 : « Signature : engagement personnel du médecin »

    J-M. FAROUDJA., « Certificats… Attention aux pièges ! », Entretiens de Bichat, janvier 2011

    (2) Circulaire DSS/MCGR/DGS n°2011-331 du 27 septembre 2011 relative à la rationalisation des certificats médicaux

    (3) Par exemple : certificat de soins psychiatriques sous contrainte ; certificat établi après examen d’une personne sur réquisition d’un officier de police judiciaire (article 4)

    (4) F. STEFANI., « Formulaires médicaux et assurances », rapport adopté par le Conseil national de l’Ordre des médecins le 20 septembre 2007

  • Article 77 - Permanence de soins - obligations

    Article 77 (article R.4127 du code de la santé publique)

    Il est du devoir du médecin de participer à la permanence des soins dans le cadre des lois et des règlements qui l'organisent

    La permanence des soins est une organisation collective, confraternelle et mutualisée de la réponse à des demandes non programmées de soins.

    1- Elle implique tous les médecins quel que soit leur mode d’exercice : libéral, hospitalier ou salarié et quelle que soit leur spécialité médicale, dès lors qu’ils ont une pratique dans le domaine du soin.

    Les médecins hospitaliers, salariés mais aussi libéraux, exerçant en établissement ne sont pas libres des modalités de leur participation.

    Dans l’exercice libéral, hors établissement, les médecins satisfont à ce devoir sur la base du volontariat et de la confraternité dans le cadre d’une organisation qui a pour finalité l’intérêt de la population.

    La régulation médicale est une des modalités de la participation des médecins à la permanence des soins.

    La réglementation propre à l’organisation de la permanence des soins en médecine ambulatoire confie notamment au conseil départemental de l’Ordre la mission de prendre les décisions en matière d’exemption (art. R.6315-4 du code de la santé publique).

    2- La permanence des soins s’inscrit dans « le cadre des lois et règlements qui l’organisent ». La modification du code de déontologie médicale en 2003 traduit la place que prend l’Etat pour garantir l’accès aux soins qui ne saurait relever des seules initiatives individuelles.

    Le devoir des médecins vis-à-vis des patients est subordonné à l’organisation sanitaire dans laquelle il s’inscrit.

    Les médecins participent à la mise en place de cette organisation ; l’Etat en est le garant et adopte, avec les instances professionnelles compétentes, les modalités paraissant les plus appropriées. Le devoir du médecin variera suivant les lois et règlements en vigueur et les conditions locales de leur mise en œuvre.

    3- La permanence des soins assurée par les médecins a été reconnue mission de service public par le Parlement (voir note [1]) à la demande du Conseil national de l’Ordre des médecins. Cette reconnaissance de la fonction essentielle du médecin dans l’organisation de la santé publique engage l’Etat qui doit assurer sa protection aux médecins qui subiraient un dommage lors de cette mission.

    Pour sa part, le conseil départemental de l’Ordre qui serait saisi d’une plainte contre ces médecins à l’occasion de leur activité de permanence des soins pourra, si la plainte est insuffisamment fondée, ne pas y donner de suites disciplinaires, conformément à l’article L 4124-2 du code de la santé publique (note [2]).


    ([1]) Article L. 6314-1 du code de la santé publique

    ([2]) Article L. 4124-2 du code de la santé publique : « Les médecins, les chirurgiens-dentistes ou les sages-femmes chargés d'un service public et inscrits au tableau de l'ordre ne peuvent être traduits devant la chambre disciplinaire de première instance, à l'occasion des actes de leur fonction publique, que par le ministre chargé de la santé, le représentant de l'Etat dans le département, le directeur général de l'agence régionale de santé, le procureur de la République, le conseil national ou le conseil départemental au tableau duquel le praticien est inscrit.

  • Article 78 - Permanence des soins - Modalités

    Article 78 (article R.4127-78 du code de la santé publique)

    Lorsqu'il participe à un service de garde, d'urgences ou d'astreinte, le médecin doit prendre toutes dispositions pour être joint au plus vite.
    Il est autorisé, pour faciliter sa mission, à apposer sur son véhicule une plaque amovible portant la mention "médecin-urgences", à l'exclusion de toute autre. Il doit la retirer dès que sa participation à l'urgence prend fin.
    Il doit tenir informé de son intervention le médecin habituel du patient, dans les conditions prévues à l'
    article 59 .

    1 -  Cet article s’applique en particulier aux médecins qui participent à la permanence des soins ambulatoire, sous l’égide de l’ARS et aux médecins participant à la permanence des soins et à la réponse aux urgences, en établissement de santé public et privé .

    Il importe que le médecin de permanence puisse être joint au plus vite pour :

    • donner un conseil en attendant sa consultation ou sa visite et programmer son intervention ;
    • ou intervenir immédiatement pour traiter l'urgence.

    Si l'appel a transité par le centre 15, la "régulation" a déjà été faite.

    Les moyens modernes de communication permettent à un médecin d'être joint immédiatement. Dans ce cadre et pour satisfaire à l'obligation de moyens, chaque médecin doit être équipé, soit individuellement, soit par l'intermédiaire de la structure pour laquelle il assure la permanence des soins ou la réponse aux urgences. L’utilisation du "répondeur-enregistreur" doit être évitée, car il laisse l'appelant sans réponse précise.

    2 - le Conseil d’Etat a admis que le médecin pouvait  apposer, sur son véhicule, une plaque comportant le nom de l’association de permanence de soins (note [1]).

    L’article 78 ne fait pas obstacle aux dispositions (voir note [2]) prévues pour faire bénéficier d'une facilité de passage certains véhicules :

    • véhicules  A : police, gendarmerie, pompiers ;
    • véhicules B : associations médicales concourant à la permanence des soins, médecins  participant à la permanence des soins : ils peuvent, pour faciliter leur progression de façon non prioritaire, bénéficier par autorisation préfectorale de dispositifs spéciaux (feux bleus clignotants et avertisseur sonore trois tons), sachant que tout abus est répréhensible.

    3 - Pour la continuité des soins, il est indispensable que le médecin traitant habituel soit tenu au courant, en particulier en cas d'hospitalisation ou de demande d'examens complémentaires. Il est conseillé que sur l'ordonnance soit inscrite la mention "médecin de garde" sous le nom du prescripteur, ainsi que le nom du médecin traitant.

    En cas de demande d'examens complémentaires, un mot au laboratoire ou au spécialiste demandera de faire parvenir les résultats au médecin traitant habituel


    ([1]) Conseil d’Etat, 27 octobre 1997, req. n°164187 : « eu égard au caractère d'urgence des interventions des médecins adhérents à "SOS Médecins", l'usage par ces derniers, de véhicules équipés d'un gyrophare et portant la mention "SOS Médecins" ne peut être regardé comme constituant un procédé, direct ou indirect, de publicité. »

     ([2]) Article R.313-27 (signalisation lumineuse) ; article R.313-34 (avertisseurs sonores) du code de la route

  • Article 79 - Libellé des ordonnances

    Article 79 (article R.4127-79 du code de la santé publique)

    Les seules indications qu'un médecin est autorisé à mentionner sur ses feuilles d'ordonnances sont :


    1°) ses nom, prénoms, adresse professionnelle, numéros de téléphone et de télécopie, jours et heures de consultation ;
    2°) si le médecin exerce en association ou en société, les noms des médecins associés ;
    3°) sa situation vis-à-vis des organismes d'assurance-maladie ;
    4°) la qualification qui lui aura été reconnue conformément au règlement de qualification établi par l'Ordre et approuvé par le ministre chargé de la santé ;
    5°) ses diplômes, titres et fonctions lorsqu'ils ont été reconnus par le Conseil national de l'ordre ;
    6°) la mention de l'adhésion à une société agréée prévue à l'article 64 de la loi de finances pour 1977 ;
    7°) ses distinctions honorifiques reconnues par la République française.

    Pour éviter toute dérive publicitaire, ou que l'on puisse se prévaloir de titres fantaisistes ou illusoires, de titres non acquis, de pseudo spécialisation, il a été nécessaire de réglementer les inscriptions sur les feuilles d'ordonnances, en particulier celles des diplômes, titres, fonctions, etc. Aux mêmes fins, les mentions qui peuvent figurer sur un annuaire (art. 80) et sur la plaque professionnelle (art. 81) ont été précisées.

    Les inscriptions portées sous le nom du médecin sur ses feuilles d’ordonnances ont pour objet une information précise, concise et intelligible du public sur ses qualités professionnelles, lieux et moyens d’exercice. L'usage s'est établi d'assimiler à l'ordonnance proprement dite l'ensemble des documents professionnels du médecin (compte rendu d'examen, certificat, rapport et tout document à en-tête).

    Aucune usurpation de titres, susceptible d'introduire la confusion ou la tromperie n'est admissible. Une qualification ne peut être mentionnée que si elle a été officiellement reconnue, conformément au règlement de qualification en vigueur. De même la mention de l'appareillage (scanner, IRM...) utilisé par le médecin n'est pas autorisée.

    Pour éviter toute erreur dans ces intitulés, il est souhaitable de les soumettre pour avis au conseil départemental qui vérifiera leur régularité, ce qui limitera les risques de contestation ultérieure.

    Il est fait obligation au médecin, dans le cadre de l'information des patients sur l'organisation des urgences médicales (voir note 1), d'inscrire sur l'ordonnance la mention « en cas d’urgence... » suivie du numéro d'appel téléphonique sur lequel, pendant ses absences, le médecin dirige ses patients. Il est conseillé d'inscrire le numéro de téléphone du cabinet, le répondeur devant indiquer le numéro de téléphone du médecin assurant la continuité des soins et de s’adresser au centre 15 pendant les horaires de permanence des soins. Le téléphone du médecin ne sera ainsi jamais muet donnant une réponse précise et actualisée.


    (1) Arrêté du 25 juillet 1996 relatif à l’information du consommateur sur l’organisation des urgences médicales

  • Article 80 - Libellé des annuaires

    Article 80 (article R.4127-80 du code de la santé publique)

    Les seules indications qu'un médecin est autorisé à faire figurer dans les annuaires à usage du public, quel qu'en soit le support, sont :

    1°) ses nom, prénoms, adresse professionnelle, numéros de téléphone et de télécopie, jours et heures de consultations ;
    2°) sa situation vis-à-vis des organismes d'assurance-maladie ;
    3°) la qualification qui lui aura été reconnue conformément au règlement de qualification, les diplômes d'études spécialisées complémentaires et les capacités dont il est titulaire.

    Cet article est limitatif: son objectif prioritaire est une information du public exacte et rapide.

    Il précise que les seules rubriques autorisées dans l'annuaire sont celles correspondant à une qualification (selon le règlement de qualification en vigueur), un DESC, une capacité ou au droit aux titres reconnus par l’Ordre.

    Deux exceptions ont été acceptées par le Conseil national, en 1974, en vue d'une bonne information du public ; la mention des deux orientations  "acupuncture" et "homéopathie" a été autorisée, sous réserve de l'accord du conseil départemental.

  • Article 81 - Libellé des plaques

    Article 81 (article R.4127-81 du code de la santé publique)

    Les seules indications qu'un médecin est autorisé à faire figurer sur une plaque à son lieu d'exercice sont ses nom, prénoms, numéro de téléphone, jours et heures de consultations, situation vis-à-vis des organismes d'assurance-maladie, diplômes, titres et qualifications reconnus conformément au 4°) et 5°) de l' article 79 .
    Une plaque peut être apposée à l'entrée de l'immeuble et une autre à la porte du cabinet ; lorsque la disposition des lieux l'impose, une signalisation intermédiaire peut être prévue.
    Ces indications doivent être présentées avec discrétion, conformément aux usages de la profession.
    Lorsque le médecin n'est pas titulaire d'un diplôme, certificat ou titre mentionné au 1°) de l' article L.4131-1 du code de la santé publique (ancien article L.356-2 ), il est tenu, dans tous les cas où il fait état de son titre ou de sa qualité de médecin, de faire figurer le lieu et l'établissement universitaire où il a obtenu le diplôme, titre ou certificat lui permettant d'exercer la médecine.

    La plaque apposée par un médecin à la porte de son cabinet ou de l'immeuble est réglementée (la dimension de 30x25cm est traditionnellement admise). Cette plaque doit être présentée avec discrétion et ne pas apparaître publicitaire ; elle ne peut mentionner que des diplômes, titres ou qualifications reconnus conformément à l'article 79, en vue de l'information du public.

    Des dispositions réglementaires (voir note [1]) obligent à indiquer sur la plaque professionnelle, lors de l'installation ou d'un renouvellement de cette plaque, la mention de la situation vis-à-vis des organismes d'assurance maladie, ainsi que le secteur d'appartenance conventionnelle.

    L’article 81 précise que deux plaques seulement peuvent être utilisées : l'une à l'entrée de l'immeuble, l'autre à la porte du cabinet ; si l'immeuble n'abrite que le cabinet une seule plaque est admise.

    Dans certains cas une signalisation intermédiaire (fléchage) peut être prévue mais il ne s'agit pas de plaques supplémentaires. L'appréciation des dispositions locales peut être difficile et l'avis du conseil départemental pourra être utilement sollicité.

    Le dernier alinéa de l'article 81 reprend les dispositions de l'article L.4111-5  du code de la santé publique et rappelle aux médecins qui ne sont pas titulaires de diplômes français de médecin, ou délivrés par un Etat membre de l'Union Européenne ou partie à l’Accord sur l’Espace économique européen, qu'ils doivent préciser la faculté et le pays où ils ont obtenu leur diplôme.


    ([1]) Arrêté du 11 juin 1996

  • Article 82 - Libellé des annonces dans la presse

    Article 82 (article R.4127-82 du code de la santé publique)

    Lors de son installation ou d'une modification de son exercice, le médecin peut faire paraître dans la presse une annonce sans caractère publicitaire dont le texte et les modalités de publication doivent être préalablement communiqués au conseil départemental de l'ordre.

    Cet article a pour objet d'uniformiser les insertions dans la presse, d'en préciser les motifs et d'empêcher toute dérive publicitaire.

    La communication préalable de l'annonce au conseil départemental est obligatoire. Elle peut conduire à faire remarquer son inadéquation au médecin, lui permettre de la rectifier et lui éviter d'être soumis à une contestation ultérieure.

  • Article 83 - Rédaction d'un contrat

    Article 83 (article R.4127-83 du code de la santé publique)

    I - Conformément à l'article L.4113-9, l'exercice habituel de la médecine, sous quelque forme que ce soit, au sein d'une entreprise, d'une collectivité ou d'une institution ressortissant au droit privé doit, dans tous les cas, faire l'objet d'un contrat écrit.

    Ce contrat définit les obligations respectives des parties et doit préciser les moyens permettant aux médecins de respecter les dispositions du présent code.

    Tout projet de contrat peut être communiqué au conseil départemental de l'ordre, qui doit faire connaître ses observations dans le délai d'un mois.

    Toute convention ou renouvellement de convention avec un des organismes prévus au premier alinéa, en vue de l'exercice de la médecine, doit être communiqué au conseil départemental intéressé, de même que les avenants et règlements intérieurs lorsque le contrat y fait référence. Celui-ci vérifie sa conformité avec les prescriptions du présent code ainsi que, s'il en existe, avec les clauses essentielles des contrats-types établis soit par un accord entre le conseil national et les collectivités ou institutions intéressées, soit conformément aux dispositions législatives ou réglementaires.

    Le médecin doit signer et remettre au conseil départemental une déclaration aux termes de laquelle il affirmera sur l'honneur qu'il n'a passé aucune contre-lettre ou avenant relatifs au contrat soumis à l'examen du conseil.
     

    II- Un médecin ne peut accepter un contrat qui comporte une clause portant atteinte à son indépendance professionnelle ou à la qualité des soins, notamment si cette clause fait dépendre sa rémunération ou la durée de son engagement de critères de rendement.

    1. Commentaires propres à l’article 83

    L'article 83 a trait aux conventions qui lient les médecins à des entreprises, collectivités ou institutions ressortissant au droit privé.

    Son champ d'application est donc très large et comprend notamment : cliniques privées à but lucratif, établissements de santé privés d’intérêt collectif, mutuelles, compagnies d’assurances, institutions médico-sociales exerçant sous forme associative, associations loi 1901,  caisses de sécurité sociale à l'exception des caisses nationales qui ont le statut d'établissement public, les sociétés nationales et entreprises publiques non érigées en établissements publics…

    Tous ces contrats doivent obligatoirement être passés par écrit.

    Leur contenu doit être suffisamment substantiel. Ils doivent définir les droits et obligations réciproques des parties et préciser les moyens mis en oeuvre pour assurer le respect des règles de déontologie, notamment en ce qui concerne l'indépendance des médecins et le secret professionnel.

    Il ne suffit donc pas de stipuler que le médecin exercera ses fonctions conformément au code de déontologie et que les parties prendront toutes mesures utiles afin que soient assurés le secret médical et l'indépendance technique du praticien. Il faut aussi préciser la nature des mesures ainsi envisagées et le contenu des engagements pris par les parties (voir note [1]).

    Il est précisé en outre, que cette obligation de communication porte non seulement sur le contrat mais aussi sur les avenants et sur les règlements intérieurs auxquels il est fait référence. Il est rappelé aussi que les médecins doivent, lors de la communication de leur contrat, déclarer sur l'honneur qu'ils n'ont pas passé à leur propos de contre-lettre.

    Pour tous ces contrats le code de déontologie rappelle les règles que pose l'article L.4113-9 du code de la santé publique et notamment l'obligation d'une communication à l'Ordre, avec la possibilité, particulièrement recommandable, d'une présentation de ce contrat à l'état de projet, ce qui a l'avantage de permettre au médecin concerné de tenir compte, avant de signer, des observations ordinales.

    Cette communication doit être faite au conseil départemental au tableau duquel est inscrit ou demande à s'inscrire le médecin signataire. C'est à ce conseil qu'il appartient d'étudier le contrat, avenant ou projet qui lui est soumis, de procéder aux vérifications portant, comme il a été indiqué ci-dessus, sur la conformité déontologique de leurs stipulations, leur validité juridique et même leur opportunité au regard du bon exercice de la profession, enfin de formuler les observations qui découlent de cet examen et qui peuvent aller jusqu'à l'émission d'un avis partiellement ou entièrement défavorable.

    Dans l'accomplissement  de cette tâche, qui  peut se révéler  très difficile  - tant sont diverses les situations particulières et tant sont grandes les ressources imaginatives des médecins et surtout de leurs conseils juridiques - les conseils départementaux peuvent trouver une aide dans la consultation du Conseil national en soumettant à sa commission des contrats les problèmes qu’ils rencontrent. Mais l'avis du Conseil national ne se substitue pas à celui du conseil départemental qui en est le seul destinataire et qui demeure le seul interlocuteur du médecin qui l'a saisi.

    L'article 83 rappelle enfin que la mission de contrôle impartie au conseil départemental porte essentiellement sur la conformité des articles des contrats qui lui sont soumis aux principes formulés dans le code de déontologie, en ajoutant, ce que la loi ne disait pas, que cette conformité doit être vérifiée également par rapport, s'il en existe, aux clauses essentielles des contrats-types établis soit par un accord entre le conseil national et les collectivités ou institutions intéressées, soit conformément aux dispositions législatives ou réglementaires.

    Ces contrats-types sont au départ des modèles de contrats élaborés par les instances de l'Ordre en accord avec l'établissement ou l'institution concerné, dans le strict respect des règles de la déontologie. Ils sont proposés et non imposés aux médecins désireux de contracter et il leur est recommandé de s'en inspirer. La question des clauses essentielles est abordée dans les commentaires de l’article 91.

    1. Commentaires communs à l’ensemble des contrats (articles 83, 84 et 91 du code de déontologie médicale)

    L'exercice de la profession médicale conduit souvent les médecins à passer des contrats, soit avec d'autres médecins, soit avec des tiers, contrats d'exercice en commun, en association ou en société - contrat de location de locaux professionnels ou de matériels - contrats d'exercice en clinique - contrat d'engagement dans des établissements publics ou privés - contrats de remplacement - contrats de cession de cabinet, et beaucoup d'autres...

    En application du principe de la liberté des conventions, ces contrats sont conclus librement sans besoin d'autorisation et, sous réserve de ne pas contrevenir à l'ordre public, leur contenu est librement déterminé par les parties signataires qui sont tenues d'en respecter les stipulations.

    Toutefois l'Ordre qui a pour mission aux termes de l'article L.4121-2 du code de la santé publique de "veiller à l'observation par tous les médecins de leurs devoirs professionnels ainsi que des règles édictées par le code de déontologie", ne peut se dispenser d'exercer sur tous ces contrats non seulement un droit de regard mais aussi un certain contrôle.

    C'est ce qu'a prévu le législateur en instituant aux articles L.4113-9 à L.4113-12 du code de la santé publique, un régime de communication des contrats à l'Ordre avec possibilité de certaines interventions de sa part, en vue de concilier au mieux le respect de la liberté contractuelle avec les impératifs d'un contrôle déontologique.

    L'article L.4113-9 a donc d'abord spécifié que tous les contrats et avenants intervenant à l'occasion de l'exercice de la profession devaient nécessairement être passés par écrit, puis posé le principe de leur communication obligatoire aux conseils départementaux de l'Ordre. Il a enfin prévu des sanctions à l'encontre des médecins qui s'en abstiendraient (refus d'inscription ou poursuites disciplinaires) ainsi que des tiers qui s'y opposeraient (amende pénale).

    Les contrats et avenants doivent être communiqués lors de la demande d'inscription au tableau (contrat à annexer à la demande) et à tout moment en cours d'exercice, dans le mois suivant leur conclusion.

    Les médecins ont également la possibilité d'anticiper cette communication en soumettant à l'avis du conseil départemental un contrat encore à l'état de projet (article L.4113-12).

    Les vérifications à opérer portent, sans que soit perdu de vue le principe fondamental de la liberté contractuelle qui fait la loi des parties, sur la conformité déontologique des stipulations du contrat en cause, au regard notamment du respect de la liberté d'exercice et de l'indépendance professionnelle ainsi que des principes du libre choix, de la liberté d'installation et de prescription, du secret professionnel, sur sa validité juridique (absence de clauses contraires à l'ordre public et à la loi), sur sa cohérence interne (clauses obscures, contradictoires, mal rédigées) et enfin sur son opportunité au regard du bon exercice de la profession (clauses léonines ou potentiellement conflictuelles).

    L'examen auquel doit procéder le conseil départemental est enfermé dans des délais : un mois s'il s'agit d'un projet (article L.4113-12), six mois pour les contrats déjà signés (article L.4113-10).

    L'expiration de ces délais a pour seul effet d'interdire la mise en œuvre de poursuites disciplinaires en cas de clauses antidéontologiques. Elle ne dessaisit nullement le conseil de ses pouvoirs de mise en garde ou d'injonction et ne vaut pas approbation tacite du contrat en cause.

    En règle générale l'Ordre n'a aucun pouvoir d'approbation. Le contrat est valable de par la signature des parties, indépendamment des observations qu'il peut être amené à formuler et seule l'autorité judiciaire peut en prononcer l'annulation.

    Les observations du conseil départemental ne constituent qu'un avis qui toutefois, par exception aux principes généraux du contentieux administratif, est regardé, lorsqu'il est négatif, comme faisant grief et pouvant faire l'objet d'un recours devant le Conseil national, puis d'un pourvoi devant le Conseil d'Etat (voir note [2]).

    On doit relever que la loi 2009-879 du 21 juillet t 2009 a renforcé les pouvoirs de l’Ordre en introduisant les dispositions suivantes à l’article L 4113-9 du code de la santé publique : « Les dispositions contractuelles incompatibles avec les règles de la profession ou susceptibles de priver les contractants de leur indépendance professionnelle les rendent passibles de sanctions disciplinaires…»

    Dans trois cas particuliers le conseil de l'Ordre dispose de pouvoirs supplémentaires :

    1. lorsque le contrat accompagne une demande d'inscription au tableau, la présence de clauses antidéontologiques peut justifier un refus d'inscription ;

    2. il en va de même s'il s'agit d'un contrat instituant une société civile professionnelle (SCP) ou une société d'exercice libéral (SEL) car la reconnaissance par le conseil de la régularité juridique et déontologique des statuts est une condition à l'inscription de ces sociétés ;

    3. si les parties ont elles-mêmes subordonné l'entrée en vigueur du contrat à l'approbation de l'Ordre.
       

    C'est dans le cadre de ce régime général défini par la loi et applicable à tous les contrats ayant pour objet l'exercice de la profession médicale que s'insèrent trois des articles du code de déontologie, respectivement consacrés à certains d'entre eux parmi les plus usuels, qui viennent sur le plan réglementaire compléter et adapter à leurs cas particuliers les règles du code de la santé publique :

    • l'article 83 concerne les contrats intervenant entre médecins et entreprises ou établissements de droit privé ;
    • l'article 84 a trait aux contrats conclus entre médecins et administrations publiques ;
    • l'article 91 régit les contrats passés par les médecins entre eux ou avec d'autres professionnels de la santé.

    ([1]) Conseil d’Etat, 9 juin 1967, Laudet, n°68156, Recueil p.243

    ([2]) Conseil d’Etat, 25 octobre 1974, Valton et Allemandou, non publié

  • Article 84 - Exercice dans une administration

    Article 84 (article R.4127-84 du code de la santé publique)

    L'exercice habituel de la médecine, sous quelque forme que ce soit, au sein d'une administration de l'Etat, d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public doit faire l'objet d'un contrat écrit, hormis les cas où le médecin a la qualité d'agent titulaire de l'Etat, d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public ainsi que les cas où il est régi par des dispositions législatives ou réglementaires qui ne prévoient pas la conclusion d'un contrat.
    Le médecin est tenu de communiquer ce contrat à l'instance compétente de l'ordre des médecins. Les observations que cette instance aurait à formuler sont adressées par elle à l'autorité administrative intéressée et au médecin concerné.

    L’article 84 régit les contrats que passent les médecins avec les administrations et établissements publics. C'est donc le pendant de l'article 83 consacré aux contrats conclus par les médecins avec les établissements et institutions privés.

    Il spécifie qu'il s'applique à l'exercice de la médecine au sein d'une administration publique "sous quelque forme que ce soit". Il déborde donc le strict domaine de l'exercice salarié.

    Quant aux institutions que recouvre l'expression « administrations de l'État, établissements publics ou collectivités territoriales », elles sont celles que les juristes qualifient de personnes morales de droit public, qui sont notamment : l'État, les collectivités publiques décentralisées que sont la région, le département et la commune et les établissements publics nationaux, départementaux ou communaux.

    Sont donc exclues les personnes privées d'intérêt général telles que les établissements d'utilité publique, les associations et fondations reconnues d'utilité publique, les établissements privés participant à l'exécution d'un service public, les entreprises publiques ou sociétés nationales non érigées en établissements publics, qui sont du domaine de l'article 83 (voir note [1]).

    Tous les médecins qui, dans l'exercice de leur profession, passent un contrat avec une personne morale de droit public sont tenus de le faire par écrit.

    Le fait que le contrat ainsi conclu s'insère dans le cadre d'un statut de caractère réglementaire, ainsi qu'il est de plus en plus courant avec le développement des statuts d'agents contractuels, ne place pas le médecin hors du champ d'application de l'article 84. Seuls y échappent les médecins, recrutés par concours administratif, qui ont la qualité d’agent titulaire, ainsi que ceux qui sont régis par des dispositions législatives ou réglementaires qui ne prévoient pas la conclusion d'un contrat.

    Enfin ces contrats doivent être de véritables conventions définissant les droits et obligations des parties en présence et signées par chacune d'elles, et non des actes unilatéraux d'engagement émanant de la seule puissance publique.

    Les contrats en cause, comme ceux relevant des articles 83 et 91, doivent être communiqués par les médecins concernés au conseil départemental dont ils relèvent.

    Les contrats avec une administration doivent être communiqués à l'instance compétente de l'Ordre des médecins. Le contrôle opéré sur ces contrats, que ce soit par le Conseil national ou par un conseil départemental, s'effectue selon les mêmes règles qu'appliquent les conseils départementaux sur les contrats relevant de l'article 83 et ses pouvoirs d'intervention sont analogues.

    Mais l'article 84, à la différence des articles 83 et 91, ne prévoit pas de contrats-types et n'attribue aux conseils de l'Ordre aucun pouvoir réglementaire pour en imposer des clauses essentielles.

    Dans tous les cas l'instance de l'Ordre compétente pour l'examen de ces contrats adresse ses observations à l'administration en cause ainsi qu'au médecin concerné et, s'il s'agit du Conseil national, au conseil départemental qui l'a saisi.


    ([1]) Sur la distinction entre établissements publics et institutions privées d'intérêt général, voir l'étude du Conseil d'Etat intitulée : Les établissements publics nationaux - catégories et spécificités. Note et études documentaires - La Documentation Française 1985, qui comporte notamment une liste des établissements publics nationaux

  • De l'exercice de la profession : Exercice en clientèle privée (art 85 à 94)

  • Article 85 - Exercice sur plusieurs sites

    Article 85 (article R.4127-85 du code de la santé publique)

    "Le lieu habituel d'exercice d'un médecin est celui de la résidence professionnelle au titre de laquelle il est inscrit sur le tableau du conseil départemental, conformément à l'article L. 4112-1 du code de la santé publique.

    Dans l'intérêt de la population, un médecin peut exercer son activité professionnelle sur un ou plusieurs sites distincts de sa résidence professionnelle habituelle :

    • lorsqu'il existe dans le secteur géographique considéré une carence ou une insuffisance de l'offre de soins préjudiciable aux besoins des patients ou à la permanence des soins ;
    • ou lorsque les investigations et les soins qu'il entreprend nécessitent un environnement adapté, l'utilisation d'équipements particuliers, la mise en oeuvre de techniques spécifiques ou la coordination de différents intervenants.

    Le médecin doit prendre toutes dispositions et en justifier pour que soient assurées sur tous ces sites d'exercice la réponse aux urgences, la qualité, la sécurité et la continuité des soins.

    La demande d'ouverture d'un lieu d'exercice distinct est adressée au conseil départemental dans le ressort duquel se situe l'activité envisagée. Elle doit être accompagnée de toutes informations utiles sur les conditions d'exercice. Si celles-ci sont insuffisantes, le conseil départemental doit demander des précisions complémentaires.

    Le conseil départemental au tableau duquel le médecin est inscrit est informé de la demande lorsque celle-ci concerne un site situé dans un autre département.

    Le silence gardé par le conseil départemental sollicité vaut autorisation implicite à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la date de réception de la demande ou de la réponse au supplément d'information demandé.

    L'autorisation est personnelle et incessible. Il peut y être mis fin si les conditions fixées aux alinéas précédents ne sont plus réunies.

    Les recours contentieux contre les décisions de refus, de retrait ou d'abrogation d'autorisation ainsi que ceux dirigés contre les décisions explicites ou implicites d'autorisation ne sont recevables qu'à la condition d'avoir été précédés d'un recours administratif devant le Conseil national de l'ordre."

    Dans sa précédente version, l’article 85 du code traitait de l’exercice d’un médecin en cabinet secondaire. Les restrictions qui entouraient cet exercice et les conditions de son autorisation ont conduit le Conseil national, soucieux d’apporter plus de souplesse dans la pratique des médecins et un meilleur service aux patients dans les zones souffrant d’un déficit démographique, à proposer une nouvelle rédaction de l’article 85.

    Ce texte comporte des modifications substantielles par rapport à la rédaction précédente :

    1- Définition du site d’exercice

    La notion de site d’exercice est substituée à celle de cabinet médical. Elle désigne aussi bien la résidence professionnelle visée à l’article L.4112-1 du code de la santé publique, – et qui conditionne l’inscription au tableau du Conseil départemental dans le ressort duquel se trouve cette résidence (note [1]) – que les sites sur lesquels le médecin consulte ou intervient par ailleurs et ce, quelle que soit l’importance en temps qu’il y consacre.

    2 - Conditions d’exercice sur plusieurs sites

    La possibilité offerte au médecin d’exercer sur plusieurs sites professionnels reste encadrée. L’article 85 ne limite ni le nombre ni le périmètre géographique des sites sur lequel le médecin pourra exercer. Il n’autorise pas cependant le médecin à disperser son activité, de façon plus ou moins clandestine et dangereuse pour les patients.

    C’est pourquoi l’activité du médecin sur un site distinct de sa résidence professionnelle, quelle que soit la nature de cette activité (consultations, actes techniques, explorations, expertises…) ou le mode d’exercice (salarié ou libéral), est subordonnée à l’autorisation du conseil départemental dans le ressort duquel elle s’exerce.

    a) L’activité du médecin sur un site distinct de sa résidence professionnelle habituelle doit répondre à l’intérêt de la population en fonction de deux critères non cumulatifs :

    • soit d’ordre démographique : zone où la pénurie de médecins est avérée ou zone dans laquelle la population reste insuffisante pour justifier l’installation à temps complet d’un médecin ;
    • soit d’ordre « technique » : les investigations et soins qu’il entreprend nécessitent un environnement adapté, l’utilisation d’équipements particuliers, la mise en œuvre de techniques spécifiques ou la coordination de différents intervenants.

    b) Sur tous les sites d’exercice, la réponse aux urgences, la qualité, la sécurité et la continuité des soins doivent être assurées. Le Conseil départemental est fondé à demander au médecin toutes précisions utiles sur les dispositions prises à ce sujet et à refuser l’autorisation s’il apparaît que l’exercice du médecin sur le nouveau site se ferait au détriment de ses obligations déontologiques vis-à-vis des patients qu’il prend en charge sur un autre site.

    3 - Instruction de la demande

    a) Le médecin qui souhaite exercer sur un site différent de celui de sa résidence professionnelle doit en faire la demande écrite (lettre recommandée avec accusé de réception) au Conseil départemental dans le ressort duquel se situe l’activité envisagée.

    Il doit préciser les raisons de sa demande permettant ainsi au Conseil départemental d’apprécier si elle correspond aux critères posés à l’article 85 et justifier des mesures qu’il a prises pour assurer sur ce site la qualité, la sécurité et la continuité des soins.

    Le Conseil saisi de la demande procède à une enquête approfondie et objective. Il s’informera auprès du Conseil départemental du lieu d’inscription du médecin s’il est différent, des modalités d’exercice du médecin au lieu de sa résidence professionnelle et le cas échéant sur les autres sites d’activité préalablement autorisés, afin de vérifier la compatibilité de cette nouvelle activité avec les précédentes.
    b) Le Conseil départemental saisi dispose d’un délai de trois mois, à compter de la réception de la demande accompagnée d’un dossier complet, pour se prononcer. Si des précisions complémentaires sont demandées, le délai de 3 mois court du jour où elles parviennent au Conseil départemental.


    4 - Autorisation d’exercice sur plusieurs sites

    Le régime retenu à l’article 85 du code de déontologie médicale est celui de l’autorisation implicite. Cela signifie qu’à l’expiration du délai de trois mois, et en l’absence de réponse du Conseil départemental à sa demande, le médecin peut régulièrement exercer sur le site.

    La décision d’autorisation ou de refus d’autorisation est motivée et notifiée (lettre recommandée avec accusé de réception) :

    • au médecin intéressé ;
    • au Conseil départemental au tableau duquel le médecin est inscrit s’il est différent;
    • au Conseil national de l’Ordre des médecins.

    La décision est susceptible d’un recours administratif, préalable à tout recours contentieux, devant le Conseil national, à l’initiative soit du médecin concerné soit de tout autre médecin qui estimerait que l’autorisation est injustifiée et lui cause un préjudice.

    Le recours est formé :

    • dans le délai de deux mois suivant la notification de la décision explicite d’autorisation ou de refus d’autorisation ;
    • dans le délai de deux mois suivant la période de trois mois à l’issue de laquelle l’autorisation implicite est acquise ;
    • pour les tiers qui ne sont pas destinataires de la décision, dans le délai de deux mois suivant la date à laquelle ils ont eu connaissance de l’autorisation.


    5 - Les sociétés d’exercice

    Le décret n°2012-884 du 17 juillet 2012 relatif aux lieux d’exercice des sociétés d’exercice libéral de médecins (JO du 19 juillet 2012) a modifié l’article R. 4113-23 du code de la santé publique (voir note [2]). Ces dispositions sont applicables aux demandes d’exercice sur site distinct déposées à compter du 20 juillet 2012.

    La réglementation des lieux d’exercice des praticiens qu’ils exercent à titre individuel, en SEL ou en SCP est donc harmonisée.


    6. Caractères de l’autorisation

    L’autorisation est personnelle et incessible.

    a) Les médecins exerçant en cabinet de groupe ou en association doivent individuellement demander une autorisation d’exercice sur le site.

    b) L’autorisation est incessible.

    Peuvent toutefois être cédés les éléments corporels (mobilier, appareillage ….) et incorporels (droit au bail …) attachés au site.

    7 - Abrogation d’une autorisation d’activité sur un site

    L’autorisation est accordée au médecin sans limitation dans le temps.

    Le Conseil départemental peut néanmoins y mettre fin si les conditions d’octroi ne sont plus réunies.

    Périodiquement, le Conseil départemental devra vérifier que l’autorisation d’exercice sur le site est toujours justifiée, notamment en s’informant auprès du Conseil au tableau duquel le médecin est inscrit, d’une éventuelle modification de l’activité du médecin sur les lieux (résidence professionnelle et autres sites) où il exerce.

    Après avoir recueilli les informations nécessaires, le conseil invitera le médecin à présenter ses observations. La décision d’abrogation d’autorisation doit être motivée et sera notifiée:

    • au médecin intéressé;
    • au Conseil départemental au tableau duquel le médecin est inscrit, s’il est différent;
    • au Conseil national de l’Ordre des médecins.

    Elle est susceptible de recours devant le Conseil national dans le délai de deux mois suivant sa notification.


    8 - Information sur le site

    Le médecin autorisé à exercer sur un site professionnel peut le signaler au public par une annonce dans la presse locale et une insertion dans les pages jaunes de l’annuaire.

    Une plaque professionnelle peut être apposée à la porte du site


    ([1]) La résidence professionnelle du médecin est le lieu où il exerce principalement son activité professionnelle c’est-à-dire celui où il consacre la majeure partie de son activité, en terme de temps

    ([2]) Article R. 4113-23 du code de la santé publique: «I.-Le lieu habituel d'exercice d'une société d'exercice libéral de médecins est celui de la résidence professionnelle au titre de laquelle elle est inscrite au tableau de l'ordre.
    Toutefois, dans l'intérêt de la population, la société peut être autorisée à exercer son activité sur un ou plusieurs sites distincts de sa résidence professionnelle :

    1. Lorsqu'il existe dans le secteur géographique considéré une carence ou une insuffisance de l'offre de soins préjudiciable aux besoins des patients ou à la permanence des soins ; ou
    2. Lorsque les investigations et les soins à entreprendre nécessitent un environnement adapté, l'utilisation d'équipements particuliers, la mise en œuvre de techniques spécifiques ou la coordination de différents intervenants.

    La société prend toutes dispositions pour que soient assurées sur l'ensemble des sites d'exercice la réponse aux urgences, la qualité, la sécurité et la continuité des soins.

    II.-La demande d'ouverture d'un site distinct est adressée au conseil départemental dans le ressort duquel se situe l'activité envisagée. Elle est accompagnée de toutes informations utiles sur les conditions d'exercice. Si ces informations sont insuffisantes, le conseil départemental demande des précisions complémentaires.
    Lorsque le site concerné est implanté dans un autre département, le conseil départemental au tableau duquel la société est inscrite est informé de la demande et des suites qui lui sont données.
    Le conseil départemental saisi se prononce, par une décision motivée, dans un délai de trois mois à compter de la réception du dossier de demande complet. L'autorisation est réputée acquise au terme de ce délai.

    III.-L'autorisation est personnelle et incessible. Il peut y être mis fin si les conditions fixées au I ne sont plus réunies.

    IV.-Les recours contentieux formés devant le tribunal administratif territorialement compétent contre les décisions de refus, de retrait ou d'abrogation d'autorisation ainsi que ceux dirigés contre les décisions d'autorisation ne sont recevables qu'à la condition d'avoir été précédés d'un recours administratif devant le Conseil national de l'ordre des médecins.
    Si l'ouverture d'un site distinct implique, eu égard notamment aux statuts types établis par le Conseil national de l'ordre des médecins, l'inscription d'une mention en ce sens dans les statuts de la société ou la modification de ces statuts, les dispositions de l'article R. 4113-4 ne s'appliquent pas à cette inscription ou à cette modification».

  • Article 86 - Installation après remplacement

    Article 86 (article R.4127-86 du code de la santé publique)

    Un médecin ou un étudiant qui a remplacé un de ses confrères pendant trois mois, consécutifs ou non, ne doit pas, pendant une période de deux ans, s'installer dans un cabinet où il puisse entrer en concurrence directe avec le médecin remplacé et avec les médecins qui, le cas échéant, exercent en association avec ce dernier, à moins qu'il n'y ait entre les intéressés un accord qui doit être notifié au Conseil départemental.
    A défaut d'accord entre tous les intéressés, l'installation est soumise à l'autorisation du Conseil départemental de l'Ordre.

    Cet article ne s'applique qu'en l'absence, dans le contrat de remplacement signé entre remplacé et remplaçant, de clause précisant les conditions dans lesquelles ce dernier pourrait éventuellement s'installer après le remplacement (art. 65 et 66).

    C'est une restriction au principe de la liberté d'installation des médecins. Elle doit éviter que le médecin ou l'étudiant qui a pris contact avec la clientèle du médecin remplacé à l'occasion du remplacement, ne détourne la clientèle de ce dernier en s'installant dans le même secteur. Cette interdiction est limitée dans le temps et dans l'espace.

    1 - La restriction n'intervient qu'après un remplacement d'une durée supérieure à trois mois ou de remplacements répétés, dont le cumul dépasse 90 jours. Sont pris en compte tous les remplacements effectués pour le médecin ou le groupe médical auquel il appartient, qu'ils aient, ou non, été déclarés au conseil départemental. La déclaration, par ailleurs obligatoire, des remplacements au conseil départemental permet d'éviter toute difficulté d'interprétation sur la durée effective de ces derniers.

    L'interdiction d'installation porte sur le secteur géographique dans lequel l'ancien remplaçant se trouverait en concurrence directe avec le médecin qu'il a remplacé (ou avec les associés de celui-ci). L'étendue de ce secteur est appréciée selon le lieu où exerce le médecin remplacé (zone urbaine, semi-urbaine ou rurale).

    Elle vaut seulement pour les deux années suivant la fin du dernier remplacement.

    2 - L'article 86 prévoit que l'ancien remplaçant peut s'installer dans le voisinage du médecin qu'il a remplacé s'il a son accord écrit. Lorsque celui-ci exerce en association, l'accord des associés est également requis.

    En cas de différend, le cas est soumis au conseil départemental. Celui-ci prendra en compte pour sa décision tous les éléments (durée et conditions du remplacement, éventuels projets d'association avec le médecin remplacé, modalités projetées d'installation : par exemple reprise d'un cabinet médical voisin...) qui permettent d'apprécier notamment :

    • l'existence d'une concurrence directe,
    • un éventuel accord, même tacite, du remplacé,
    • la connaissance effective de la clientèle que le remplaçant a pu acquérir.
       

    La décision du conseil départemental peut être déférée devant le Conseil national, dans les deux mois de sa notification.

  • Article 87 - Médecin collaborateur

    Article 87 (article R.4127-87 du code de la santé publique)


    Le médecin peut s'attacher le concours d'un médecin collaborateur libéral, dans les conditions prévues par l'article 18 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises ou d’un médecin collaborateur salarié.

    Chacun d'entre eux exerce son activité en toute indépendance, sans lien de subordination, et dans le respect des règles de la profession, notamment le libre choix du médecin par les patients et l'interdiction du compérage.

    1. Collaboration libérale

    1. 1 Selon l’article 18 de la loi susvisée : « I. - Les membres des professions libérales soumises à statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, à l'exception des professions d'officiers publics ou ministériels, des commissaires aux comptes et des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires au redressement et à la liquidation des entreprises, peuvent exercer leur activité en qualité de collaborateur libéral.

    II. - A la qualité de collaborateur libéral le membre non salarié d'une profession mentionnée au I qui, dans le cadre d'un contrat de collaboration libérale, exerce auprès d'un autre professionnel, personne physique ou personne morale, la même profession.

    Le collaborateur libéral exerce son activité professionnelle en toute indépendance, sans lien de subordination. Il peut compléter sa formation et peut se constituer une clientèle personnelle.

    III. - Le contrat de collaboration libérale doit être conclu dans le respect des règles régissant la profession.

    Ce contrat doit, à peine de nullité, être établi par écrit et préciser :

    1° Sa durée, indéterminée ou déterminée, en mentionnant dans ce cas son terme et, le cas échéant, les conditions de son renouvellement ;

    2° Les modalités de la rémunération ;

    3° Les conditions d'exercice de l'activité, et notamment les conditions dans lesquelles le collaborateur libéral peut satisfaire les besoins de sa clientèle personnelle ;

    4° Les conditions et les modalités de sa rupture, dont un délai de préavis.

    IV. - Le collaborateur libéral est responsable de ses actes professionnels dans les conditions prévues par les textes régissant chacune des professions mentionnées au I.

    V. - Le collaborateur libéral relève du statut social et fiscal du professionnel libéral qui exerce en qualité de professionnel indépendant. »

    Les travaux préparatoires de la loi indiquent que le législateur a envisagé la collaboration libérale comme un état qui s’adresse, de façon préférentielle mais non exclusive, aux jeunes professionnels leur permettant d’acquérir une expérience pratique avant de s’installer. Elle permet aux médecins installés de se faire seconder de la manière la plus simple possible ; elle constitue une des solutions à la pénurie liée à la démographie médicale, en permettant le maintien dans certains secteurs de médecins qui, sans l’aide et l’assistance de leur collaborateur, se seraient désengagés.

    Le médecin collaborateur libéral exerce auprès du médecin avec lequel il collabore. Ce n’est ni un remplaçant ni un associé, même si les plages d’activités de chacun ne sont pas entièrement superposables.

    Il exerce à titre libéral, sous son entière responsabilité et doit souscrire un contrat d’assurance en responsabilité civile professionnelle. Il relève à titre personnel de la convention médicale prévue à l’article L.162-5 du code de la sécurité sociale.

    Il dispose d’ordonnances et de feuilles de soins pré-identifiées à son nom.

    Sa qualité de médecin collaborateur est également mentionnée sur sa plaque professionnelle :

    «  Cabinet de médecine générale (ou d’ophtalmologie, etc.)

    Dr X : jours et heures de consultation…

    Dr Y , collaborateur : jours et heures de consultation… »

    Il est immatriculé auprès de l’URSSAF et affilié à la CARMF.

    1.2 Contrat

    L’article 18 de la loi du 2 août 2005 impose à peine de nullité que le contrat de collaboration libérale soit établi par écrit.

    Le Conseil national a établi des contrats type de médecin collaborateur (voir note [1]) qui outre les dispositions imposées par la loi, décline les modalités pratiques de cet exercice. Il est accompagné de commentaires permettant d’éclairer les médecins qui veulent recourir à cette forme d’exercice.

    1.3 Aspects particuliers de la collaboration libérale

    Une des caractéristiques de la situation du collaborateur libéral est la possibilité qui lui est donnée de développer sa propre clientèle, tout en demeurant astreint à suivre, pour partie, la clientèle du médecin avec lequel il collabore.

    Il faut donc veiller à ce que le libre choix des patients puisse réellement s’exercer et que la répartition des patients entre les médecins ne soit pas seulement dépendante de leur emploi du temps ou de l’organisation des rendez-vous par le secrétariat.

    Au surplus, comme l’a rappelé le Conseil d’Etat (arrêt du 11 octobre 2010, n° 330296), les principes selon lesquels le médecin ne peut aliéner son indépendance professionnelle, l’exercice de la médecine est personnel, la médecine ne doit pas être pratiquée comme un commerce, l’interdiction du compérage ou de la gérance de cabinet s’appliquent tout particulièrement en cas de collaboration.

    2 - Collaboration salariée

    Depuis 2006, le médecin a la possibilité de recruter un collaborateur salarié. La situation des médecins salariés est évoquée à l’article 95 du code de déontologie.

     Les principes suivants doivent être rappelés :

    •  Indépendance

     Le médecin salarié intervient pour le compte et au nom de son employeur.

     Le lien de subordination qui encadre la relation du médecin salarié et du médecin employeur pour tout ce qui relève de l’organisation du travail et de la gestion du cabinet n’interfère cependant en rien sur la relation du médecin salarié avec le patient. 

    Le médecin salarié garde sa totale indépendance dans le cadre de sa relation directe avec le patient et des décisions médicales qu’il doit prendre. Cette indépendance implique qu’il puisse, pour des raisons sérieuses et motivées et notamment lorsque toute relation de confiance est rompue, refuser ses soins à un patient. Cette indépendance implique qu’il dispose également de son entière liberté de prescription.

    •  Contrat

      C’est pour que soit assurée cette indépendance mais aussi pour garantir les confrères recourant au salariat contre les conséquences d’une méconnaissance des obligations propres à ce statut que le Conseil national a procédé à la rédaction de contrats-types de collaboration salariée :

     Le contrat conclu entre deux confrères doit en effet respecter les dispositions impératives du droit du travail. Le non respect de l’une de ces dispositions peut entraîner la nullité de la clause ou la requalification du contrat.

     Le Conseil national a donc rappelé dans ces contrats-types, par la voie des clauses essentielles, les dispositions incontournables du droit du travail et de la déontologie médicale.

    •  Assurance 

    Le Conseil national a, par ailleurs, du clarifier la situation assurantielle des médecins employeurs et salariés. Il a saisi le Gouvernement d’une demande de modification de l’article L1142-2 du code de la santé publique afin de l’élargir à la situation particulière de la collaboration salariée. 

     L’article L.1142-2 du code de la santé publique modifié s’applique donc. Le médecin employeur est tenu de souscrire, à ses frais, une assurance destinée à garantir la responsabilité civile susceptible d’être engagée en raison des dommages subis par des tiers et résultant d’atteintes à la personne, survenant dans le cadre de l’activité exercée par le  médecin salarié pour le compte de son employeur.

    Pour sa part, le médecin salarié doit s’assurer pour faire face notamment au risque de poursuites pénales dans le cadre de son activité médicale. Ce risque est minimum et le montant des primes est alors proportionné à la faible incidence du risque assuré.

    La couverture assurantielle accordée ainsi aux médecins salariés n’enlève rien à leur indépendance professionnelle. 

    • Feuilles de soins 

    S’agissant des feuilles de soins, il appartient à l’Assurance maladie de mettre à la disposition du médecin salarié des feuilles de soins portant l’identification du médecin salarié et l’identification du médecin employeur pour permettre au premier de signer personnellement les actes qu’il aura réalisés et le second d’attester du paiement des honoraires.



    ([1]) Commentaires des contrats type de collaboration 

  • Article 88 - Assistanat

    Article 88 (article R.4127-88 du code de santé publique)

    Le médecin peut, sur autorisation, être assisté dans son exercice par un autre médecin lorsque les besoins de la santé publique l'exigent, en cas d'afflux exceptionnel de population, ou lorsque, momentanément, son état de santé le justifie.

    L'autorisation est accordée par le conseil départemental pour une durée de trois mois, renouvelable.

    Le silence gardé pendant deux mois par le conseil départemental sur la demande d'autorisation ou de renouvellement vaut décision d'acceptation.

    Le médecin peut également s'adjoindre le concours d'un étudiant en médecine, dans les conditions prévues à l'article L. 4131-2 du code de la santé publique.


    Cet article répond notamment à des difficultés pratiques d'exercice de médecins dont l'état (grossesse, maladie, handicap) ne leur permet pas momentanément de satisfaire à toutes leurs obligations professionnelles ou peut concerner des situations de désertification médicale.

    Le conseil départemental peut ainsi, comme le précise le texte, autoriser un assistanat pour une durée maximum de trois mois éventuellement renouvelable, solution qui permet de pallier une incapacité partielle du praticien. Il sera utile de la faire confirmer (degré, nature, durée), par certificat ou par expertise, et de délibérer sur toute demande de renouvellement.

    La décision du conseil départemental doit pouvoir s'appuyer sur un contrat adapté à chaque situation et définissant précisément :

    • le champ d'activité de l'assistant : consultations et/ou visites, horaires, participation éventuelle à toutes les gardes, possibilités d'activités complémentaires (vacations, présence hospitalière),
    • les modalités de la rémunération, et en particulier de la répartition des frais,
    • l'accord éventuel d'un ou des associés ou des membres d'un groupe (liés seulement par une SCM),
    • les conditions d'installation ultérieure ou bien d'une éventuelle succession.

    Ainsi seront prévenues bien des situations conflictuelles.

    Le régime retenu à l’article 88 est celui de l’autorisation implicite.

    Le silence gardé par le Conseil départemental vaut autorisation implicite à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la date de réception de la demande d'autorisation ou de renouvellement.

  • Article 89 - Tenue cabinet

    Article 89 (article R.4127-89 du code de la santé publique)


    Il est interdit à un médecin de faire gérer son cabinet par un confrère.
    Toutefois, le conseil départemental peut autoriser, pendant une période de trois mois, éventuellement renouvelable une fois, la tenue par un médecin du cabinet d'un confrère décédé ou empêché pour des raisons de santé sérieuses de poursuivre son activité..

    L'exercice de la médecine est personnel (article 69). Le médecin n'a pas le droit d'installer dans son cabinet un de ses confrères auquel il en confierait la gérance. Pour cette même raison, un médecin qui a été autorisé à exercer dans un lieu distinct de sa résidence habituelle professionnelle habituelle ne peut, pendant qu'il y exerce, s’y faire remplacer (article 85).

    L'absence du médecin au lieu de son exercice, en dehors de cette circonstance, peut survenir dans des conditions variées :

    • en raison d'une incapacité temporaire totale pour laquelle il est remplacé (art.65),
    • du fait d'une mission humanitaire, pendant laquelle il peut se faire remplacer,
    • parce qu'il fait l'objet d'une interdiction d'exercer (et donc de se faire remplacer),
    • en cas de décès, de maladie, mais surtout d'accident ne permettant pas toujours de prendre en temps opportun les dispositions nécessaires permettant aux patients de bénéficier en particulier de la permanence des soins. La tenue par un confrère du cabinet du médecin décédé répond à cette exigence en même temps qu'elle constitue pour la famille du médecin la marque d'une solidarité sous l'égide du conseil départemental.
       

    Dans des conditions analogues à celles de l'assistanat (article88), le code officialise dorénavant la tolérance consentie jusqu'ici par les conseils départementaux dans ces situations.

    Il convient d'insister sur la nécessité - malgré des difficultés pratiques liées aux circonstances et aux désirs de la famille - de préciser par écrit les conditions déontologiques et financières de cet exercice (article 91).

  • Article 90 - Installation dans le même immeuble

    Article 90 (article R.4127-90 du code de la santé publique)

    Un médecin ne doit pas s’installer dans un immeuble où exerce un confrère de même discipline sans l’accord de celui-ci ou sans l’autorisation du conseil départemental de l’ordre. Cette autorisation ne peut être refusée que pour des motifs tirés d’un risque de confusion pour le public.
    Le silence gardé par le conseil départemental vaut autorisation tacite à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la date de réception de la demande.

    Cet article a pour but d'éviter toute confusion entre deux installations médicales, de même discipline, trop proches l'une de l'autre. L'accord du médecin le premier installé dans l'immeuble, ou l'autorisation du conseil départemental, sont nécessaires pour une nouvelle installation.

    L'interdiction ne s'adresse qu'à des médecins de même discipline et le conseil départemental ne peut refuser l'autorisation que pour des motifs tirés d'un risque de confusion pour le public.

    Par même discipline, il faut entendre les disciplines reconnues par le règlement de qualification et non les orientations que les médecins ont pu donner à leur exercice.

    La taille des immeubles s'est modifiée et il s'agit souvent de groupe de bâtiments. Mais le Conseil d'Etat considère que le fait d'exercer la même discipline dans le même immeuble, même si ce dernier n'a qu'une entrée, ne suffit pas à créer un risque de confusion. Seules des circonstances très particulières (homonymie, configuration des lieux, exercice antérieur en association...) permettent d'estimer qu'il y a risque de confusion pour le public.

    Il demeure qu'il est toujours souhaitable que le médecin qui projette de créer un cabinet consulte le conseil départemental et rende une visite de courtoisie au médecin déjà installé dans l'immeuble.

    Le silence gardé par le Conseil départemental vaut autorisation tacite à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la date de réception de la demande.

    Si le Conseil départemental ne s'est pas prononcé dans ce délai, l'autorisation est acquise.

  • Article 91 - Contrat d'association

    Article 91 (article R.4127-91 du code de la santé publique)

    Toute association ou société entre médecins en vue de l'exercice de la profession doit faire l'objet d'un contrat écrit qui respecte l'indépendance professionnelle de chacun d'eux.

    Il en est de même dans les cas prévus aux articles R. 4127-65, R. 4127-87 et R. 4127-88 du présent code de déontologie, ainsi qu'en cas d'emploi d'un médecin par un confrère dans les conditions prévues par l'article R. 4127-95

    Les contrats et avenants doivent être communiqués, conformément aux articles L.462 et suivants du code de la santé publique, au conseil départemental de l'Ordre, qui vérifie leur conformité avec les principes du présent code, ainsi que, s'il en existe, avec les clauses essentielles des contrats-types établis par le conseil national.

    Toute convention ou contrat de société ayant un objet professionnel entre un ou plusieurs médecins d'une part, et un ou plusieurs membres des professions de santé d'autre part, doit être communiqué au conseil départemental de l'Ordre des médecins. Celui-ci le transmet avec son avis au conseil national, qui examine si le contrat est compatible avec les lois en vigueur, avec le code de déontologie et notamment avec l'indépendance des médecins.

    Les projets de convention ou de contrat établis en vue de l'application du présent article peuvent être communiqués au conseil départemental de l'Ordre, qui doit faire connaître ses observations dans le délai d'un mois.

    Le médecin doit signer et remettre au conseil départemental une déclaration aux termes de laquelle il affirme sur l'honneur qu'il n'a passé aucune contre-lettre ou avenant relatifs au contrat soumis à l'examen du conseil.

    L'article 91 concerne les contrats passés, en vue de l'exercice de leur profession, par les médecins entre eux ou avec d'autres professionnels de la santé.

    Il régit d'abord les contrats passés par les médecins lorsqu'ils ont pour objet l’exercice en commun ou de faciliter cet exercice en commun.

    Il s'applique également à trois catégories de contrats passés entre médecins et visés à divers articles du code de déontologie : les contrats de remplacement (article 65), les contrats de médecin collaborateur (article 87) ou les contrats passés en cas de maladie grave du praticien ou d’afflux de population (article 88).

    Il vise enfin, en leur appliquant un régime de contrôle particulier, les contrats conclus entre médecins et autres professionnels de santé.

    Tous ces contrats doivent dans tous les cas être passés par écrit, obligation qui s'applique notamment, aux contrats de remplacement.

    La communication de ces contrats doit  être faite, comme pour les contrats relevant de l'article 83, au conseil départemental au tableau duquel sont inscrits les médecins signataires (voir note [1]) et c'est à ce conseil qu'il appartient d'étudier le contrat, avenant ou projet qui lui est soumis et de formuler les observations qui découlent de cet examen, avec cette fois encore la possibilité de solliciter l'avis de la commission des contrats du Conseil national.

    L'article 91 rappelle enfin que la mission de contrôle impartie à l'Ordre porte non seulement sur la conformité des articles du contrat aux prescriptions du code de déontologie, mais aussi, comme le faisait déjà l'article 83, aux clauses essentielles, s'il en existe, des contrats-types établis et adoptés par le Conseil national.

    On retrouve là l'invitation faite à l'Ordre d'établir des contrats types dans le domaine visé par cet article 91 et l'attribution à cet effet d'un pouvoir réglementaire confié à l'Ordre et consacré par le Conseil d'État dans un important arrêt de principe du 14 février 1969 (voir note [2]).

    Cet article autorise l'Ordre à présenter certaines clauses de ces contrats-types comme essentielles et déclare qu'elles auront valeur réglementaire.

    Ce ne sont plus de simples propositions que les médecins sont libres de ne pas suivre, ce sont, comme les articles du code de déontologie lui-même, de véritables dispositions réglementaires qu'ils sont tenus d'observer.

    L'existence de ce pouvoir réglementaire confié à l'Ordre a été rappelée et confirmée par le Conseil d'Etat dans un arrêt du 13 mai 1987(voir note [3]).

    La constatation du caractère réglementaire de ces clauses essentielles des contrats-types entraîne comme conséquence, à côté de leur caractère obligatoire, leur soumission, comme toute disposition réglementaire au contrôle de légalité du Conseil d'Etat par la voie du recours pour excès de pouvoir et par celle de l'exception d'illégalité qui peut s'exercer sans condition de délai.

    Ce contrôle conduit le Conseil d'Etat à annuler ou à déclarer illégales et sans effet les clauses qui ne répondent pas aux exigences de légalité qu'il définit lui-même et qui sont notamment, en vertu de la jurisprudence précitée :

    •  de ne pas être contraires à la loi,
    • de ne pas imposer une obligation qui ne peut être instituée que par le législateur,
    • de ne pas porter une atteinte grave à la liberté contractuelle,
    • et surtout de n'imposer que ce que justifient le respect du code de déontologie ou les exigences propres de l'exercice de la profession médicale.

    Ces modèles de contrats et contrats-types sont disponibles sur le site internet du Conseil national de l’Ordre des médecins

    Parmi ceux qui contiennent des clauses déclarées essentielles, on citera les contrats types d'association entre médecins de même discipline pour l'exercice de la médecine en cabinet de groupe avec ou sans mise en commun des honoraires, les statuts types de sociétés civiles professionnelles de médecins non biologistes, les statuts de SEL, les contrats de collaboration libérale ou salariée...


    ([1]) Dans le cas où le remplacé et le remplaçant sont inscrits à deux tableaux différents, le contrat doit être transmis au conseil départemental au tableau duque

    ([2]) Conseil d’Etat, 14 février 1969, Association syndicale nationale des médecins exerçant en groupe ou en équipe, Recueil p.96

    ([3]) Conseil d’Etat, 13 mai 1987, Syndicat national professionnel des médecins du travail, n° 13751

  • Article 92 - Abrogé

    Article 92 (article R.4127-92 du code de la santé publique)

     abrogé par le décret n°2012-694 du 7 mai 2012

     

    NB : Ces dispositions ont été reportées au II de l’article 83.

  • Article 93 - Exercice en commun

    Article 93 (article R.4127-93 du code de la santé publique)

    Dans les cabinets regroupant plusieurs praticiens exerçant en commun, quel qu'en soit le statut juridique, l'exercice de la médecine doit rester personnel. Chaque praticien garde son indépendance professionnelle.
    Le libre choix du médecin par le malade doit être respecté.
    Sans préjudice des dispositions particulières aux sociétés civiles professionnelles ou aux sociétés d'exercice libéral, lorsque plusieurs médecins associés exercent en des lieux différents, chacun d'eux doit, hormis les urgences et les gardes, ne donner des consultations que dans son propre cabinet.
    Il en va de même en cas de remplacement mutuel et régulier des médecins au sein de l'association.
    Le médecin peut utiliser des documents à en-tête commun de l'association ou de la société d'exercice dont il est membre. Le signataire doit être identifiable et son adresse mentionnée.

    Cet article concerne les  médecins qui ont décidé d'organiser en commun leur travail.

    Les buts et l'intérêt de tels regroupements sont évidents : continuité des soins mieux assurée, remède au surmenage professionnel, émulation, aide mutuelle, équipement plus important, documentation scientifique plus complète, possibilité de s'absenter pour le DPC ou un enseignement post-universitaire, acquisition et utilisation plus rationnelle de plateaux techniques.

    La création d'un cabinet de groupe  doit permettre l’amélioration de la prise en charge  des patients  et de meilleures conditions de travail pour les médecins.

    1 - Qu'il s'agisse d'association simple ou de société d'exercice (SCP et SEL), l'exercice de la médecine reste personnel.. Le fait d’exercer en société n’enlève rien aux obligations de chaque médecin (note [1]).

    Chaque médecin est donc responsable des soins qu'il donne et doit avoir son indépendance professionnelle. Aucune relation de subordination n'existe entre les médecins du groupe.

    Le patient a le libre choix de son médecin et ses demandes préférentielles doivent être satisfaites dans la mesure du possible.

    Le libellé des ordonnances et des documents professionnels doit permettre de connaître le nom du médecin qui a prescrit ou qui a délivré un certificat. Les documents professionnels doivent mentionner l'appartenance à une société d'exercice (SCP ou SEL).

    2 - Les médecins associés exercent dans un lieu d'exercice commun avec un secrétariat et une salle d’attente communs.

    Des médecins installés dans des lieux différents mais voisins peuvent s'associer. Dans ce cas, ils ne peuvent exercer que dans leurs locaux respectifs, même en cas de remplacement mutuel ; ils doivent utiliser de façon constante leurs feuilles d'assurance maladie et leurs cartes de professionnel de santé (CPS) personnelles.

    Si dans des  locaux différents existent des matériels spécifiques, il est légitime de déplacer le médecin plutôt que le patient. Il en est de même lorsqu'un problème de compétence technique apparaît et qu'un médecin est plus apte qu'un autre à faire fonctionner un appareillage particulier. Mais en règle générale, lorsque les cabinets sont équipés de façon semblable, rien ne justifie l'exercice d'un médecin hors de son cabinet personnel. Dans les SCP et dans les SEL, les associés peuvent exercer sur chacun des sites autorisés. Ces autorisations sont données selon des dispositions réglementaires spécifiques, qui sont identiques à celles de l’article 85.

    3 - Un contrat écrit d'exercice en commun est indispensable et sera communiqué au conseil départemental de l'Ordre qui aura pour mission de vérifier que sont garanties à la fois l'indépendance professionnelle du praticien et la liberté de choix des patients.

    Le contrat doit détailler de façon précise - pour éviter toute difficulté d'interprétation - les droits et obligations du médecin ainsi que les moyens d'exercice dont il dispose (conditions d'utilisation des locaux et de l'équipement, horaires des consultations, répartition des gardes, remplacement, vacances, répartition des frais et des honoraires en cas de mise en commun...). les droits et obligations des médecin exerçant en groupe figurent dans les contrats-types et statuts-types.


    ([1]) Article 17 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales : « Les dispositions de la présente loi ne font pas obstacle à l'exercice des professions mentionnées à l'article 1er selon les modalités prévues par les textes particuliers à chacune d'elles ».

  • Article 94 - Partage des honoraires au sein d'un groupe

    Article 94 (article R.4127-94 du code de la santé publique)

    Dans les associations de médecins et les cabinets de groupe, tout versement, acceptation ou partage de sommes d'argent entre praticiens est interdit, sauf si les médecins associés pratiquent tous la médecine générale, ou s'ils sont tous spécialistes de la même discipline, et sous réserve des dispositions particulières relatives aux sociétés civiles professionnelles et aux sociétés d'exercice libéral.

    Cet article rappelle l’interdiction du compérage (article 23) et  la transparence qui doit présider aux rapports entre médecin et patient en ce qui concerne les honoraires.

  • De l'exercice de la profession : Exercice salarié de la médecine (art 95 à 99)

  • Article 95 - Respect des obligations déontologiques

    Article 95 (article R.4127-95 du code de la santé publique)

    Le fait pour un médecin d'être lié dans son exercice professionnel par un contrat ou un statut à un autre médecin, à une administration, une collectivité ou tout autre organisme public ou privé n'enlève rien à ses devoirs professionnels et en particulier à ses obligations concernant le secret professionnel et l'indépendance de ses décisions.
    En aucune circonstance, le médecin ne peut accepter de limitation à son indépendance dans son exercice médical de la part du médecin, de l'entreprise ou de l'organisme qui l'emploie. Il doit toujours agir, en priorité, dans l'intérêt de la santé publique et dans l'intérêt des personnes et de leur sécurité au sein des entreprises ou des collectivités où il exerce.

    La déontologie est la même quel que soit le mode d'exercice ou de rémunération du médecin. Un médecin salarié doit avoir, pour souci primordial, l'intérêt de la santé des personnes prises en charge. Il est soumis à toutes les règles déontologiques de sa profession (devoirs généraux, devoirs envers les patients, devoirs de confraternité).

    Il doit disposer, pour l'exercice de ses fonctions, d'une installation convenable et de moyens techniques suffisants, ainsi que d'un personnel compétent.

    Le médecin salarié est tenu au secret professionnel notamment vis-à-vis de l'employeur ou de l'administration. Il doit veiller à ce qu'aucune atteinte ne soit portée par son entourage au secret qui s'attache à sa correspondance professionnelle (article 72).

    L'indépendance du médecin étant avant tout un droit du patient (article 5), le médecin salarié ne peut accepter que ses avis, ses actes, ses prescriptions y compris la rédaction de ses certificats soient limités par des directives. Il en est le seul responsable. Il ne peut y avoir de subordination ou de dépendance, vis-à-vis de l'établissement, de l'organisme ou du confrère qui emploie le médecin, qu'au point de vue administratif (horaires, organisation du service...).

    Le médecin et le conseil départemental devront veiller à ce que le contrat proposé ne contienne aucune mention contraire à la déontologie.

    Il précise également  que les dossiers relatifs aux patients ne peuvent être communiqués qu'à un médecin habilité légalement à y accéder : médecin désigné par un patient ou praticien conseil.

    Les remarques formulées dans cet article et ses commentaires doivent faire l'objet d'une rédaction claire et précise dans les contrats dont la production est obligatoire pour le médecin (articles 83, 84, 87 et 91 du code de déontologie) mais également pour l'employeur (article L.4113-9 du code de la santé publique), sous peine de sanctions pénales (note [1]) ou disciplinaires.

    Les simples formules de "exercera son art en toute indépendance" ou de "bénéficiera de toutes facilités pour suivre une formation continue" ou "en fonction des nécessités du service" se révèlent trop souvent insuffisantes, car elles permettent toutes les interprétations si leurs modalités ne sont pas rédigées de manière détaillée. Des modèles de contrat d’exercice salarié ont été établis par la commission des contrats du Conseil national.


    ([1]) Article L. 4163-10 du code de la santé publique : « Le refus d'un contractant non praticien de rédiger par écrit un des contrats ou avenants prévus à l'article L. 4113-9 est puni de 6000 euros d'amende ».

  • Article 96 - Conservation des dossiers médicaux

    Article 96 (article R.4127-96 du code de la santé publique)

    Sous réserve des dispositions applicables aux établissements de santé, les dossiers médicaux sont conservés sous la responsabilité du médecin qui les a établis.

    Le médecin est personnellement responsable du secret des informations de santé nominatives qu’il recueille ou détient à l’occasion de son activité médicale qu’elle soit de soin, de prévention, de contrôle, d’expertise ou s’exerce en matière de recherche, d’épidémiologie, d’information médicale.

    Il doit vérifier que l’organisme qui l’emploie (administration ou collectivité locale, institution, établissement ou service privés …) lui assure les moyens de respecter le secret médical. (articles 4, 45). Cela implique notamment que :

    • les collaborateurs du médecin sont instruits de leurs obligations en matière de secret professionnel et s’y conforment (articles 72, 73) ;
    • le courrier adressé au médecin n’est décacheté que par lui ou une personne habilitée par lui et astreinte au secret professionnel ;
    • les dossiers, quel qu’en soit le support, sont protégés contre toute indiscrétion, modification, destruction ou perte accidentelles par des mesures techniques et organisationnelles suffisantes (voir note [1]) ;
    • l’accès aux dossiers, leur communication est autorisé par le médecin responsable et en cas d’absence, un médecin désigné à cet effet ;

    Les médecins, les établissements de santé peuvent choisir de conserver eux-mêmes les données de santé de leurs patients ou de les confier à un hébergeur, personne physique ou morale, agréée pour cette activité.

    1 – Hébergement des dossiers médicaux

    L’article L. 1111-8 du code de la santé publique précise les conditions dans lesquelles les données de santé, quel qu’en soit le support, papier ou informatique, peuvent être confiées à un hébergeur.

    • La personne concernée par les données doit avoir consenti expressément à l’hébergement de ses données (voir note [2]) ;
    • La prestation d’hébergement fait l’objet d’un contrat qui prévoit que l’hébergement des données, les modalités d’accès à celles-ci et leurs modalités de transmission sont subordonnées à l’accord de la personne concernée ;
    • L’hébergeur doit être agréé pour son activité par le ministre chargé de la santé, après avis de la CNIL et d’un comité d’agrément dont l’Agence des Systèmes d’Information Partagés de Santé (ASIP Santé) assure le secrétariat ; la procédure permet de vérifier les capacités du candidat à assurer la sécurité, la protection, la conservation et la restitution des données de santé à caractère personnel.
    • Seuls peuvent accéder aux données hébergées les personnes que celles-ci concernent et les professionnels de santé ou les établissements de santé qui les prennent en charge et qui sont désignés par les personnes concernées ;
    • L’hébergeur tient les données de santé à disposition de ceux qui les lui ont confiées. Il ne peut les utiliser à d’autres fins ni les transmettre à d’autres professionnels de santé ou établissement que ceux qui ont été désignés dans le contrat.
    • Lorsqu’il est mis fin à l’hébergement, l’hébergeur restitue les données qui lui ont été confiées, sans en garder de copie, au professionnel, à l’établissement ou à la personne ayant contracté avec lui.
    • L’hébergeur de données de santé à caractère personnel et les personnes placées sous leur autorité qui ont accès aux données déposées sont astreints au secret professionnel  dans les conditions et sous les peines prévues à l’article 226-13 du code pénal.
       

    L’article R.1111-9 du code de la santé publique impose la présence d’un médecin dans l’organisation de l’activité d’hébergement. Ce médecin, inscrit au tableau de l’Ordre, est le garant de la confidentialité des données personnelles de santé déposées chez l’hébergeur à toutes les étapes de leur traitement ; après consultation du médecin ou de l’établissement qui a déposé les dossiers (voir note [3]), il donne accès à tout ou partie des données conformément à  l’accord du patient, au contrat d’hébergement, à la loi et à la déontologie médicale ; il reçoit et traite toute demande d’un patient tendant à obtenir l’historique des accès à son dossier ainsi que le contenu des informations consultées et les traitements éventuellement opérés ; il vérifie sur demande de l’hébergeur, du patient concerné, ou de la personne physique ou morale à l’origine du dépôt des données, la cohérence des données personnelles de santé en cas de suspicion, de collision ou de doublon.

    Le Conseil national a adopté un contrat cadre type entre un médecin et un hébergeur de données personnelles de santé (voir note [4]).

    2– Règles applicables à certains dossiers

    a) dossiers des établissements de santé

    Conformément à l’article R.1112-7 du code de la santé publique, les informations de santé concernant les patients pris en charge dans l’établissement sont soit conservées au sein de l’établissement qui les a constituées, soit déposées par cet établissement auprès d’un hébergeur agréé.

    Le directeur de l’établissement veille à ce que toutes dispositions soient prises pour assurer la garde et la confidentialité.

    A l’issue du délai de conservation (voir note [5]) et après le cas échéant restitution à l’établissement de santé des données ayant fait l’objet d’un hébergement, le dossier médical peut être éliminé. La décision d’élimination est prise par le directeur de l’établissement après avis du médecin responsable de l’information médicale.

    Dans les établissements publics de santé et les établissements de santé privés d’intérêt collectif (ESPIC), cette élimination est en outre subordonnée au visa de l’administration des archives qui détermine ceux de ces dossiers dont elle entend assurer la conservation plus longue pour des raisons d’intérêt scientifique, statistique ou historique (voir note [6]).

    Lorsqu’un ESPIC cesse ses activités, les informations concernant les patients peuvent sous réserve des tris nécessaires, faire l’objet d’un don à un service public d’archives par voie contractuelle entre le directeur de l’établissement et l’autorité administrative compétente (article R. 1112-8 du code de la santé publique).

    b) dossiers en médecine du travail

    Le code du travail (articles L. 4624-2 et D. 4624-46)impose la tenue d’un dossier médical dont le modèle est fixé par arrêté du ministre chargé du travail (note [7]).

    Ce dossier, complété au fur et à mesure des examens médicaux, vise à assurer la continuité du suivi médical du travailleur tout au long de sa prise en charge dans le service de santé au travail et la traçabilité des expositions professionnelles, des conditions de travail et des données sanitaires. Il n’est communicable qu’au médecin inspecteur régional du travail et de la main d’œuvre, au salarié ou, à sa demande, au médecin qu’il désigne et sous certaines conditions à un autre médecin du travail.

    Il incombe au médecin du travail de prendre les dispositions nécessaires pour assurer la protection des informations  de santé et des  dossiers contre toute indiscrétion et lorsque le dossier médical est informatisé de veiller à ce que les règles de sécurité soient définies et respectées. Il devra notamment vérifier qu’il existe une séparation entre le système informatique du service de santé au travail et celui du service informatique central de l’entreprise; que les autorisations et niveaux d’accès au dossier des collaborateurs des médecins sont établis par écrit, sous sa responsabilité (voir note [8]).

    Le choix du logiciel ne peut lui être imposé.

    Il n’existe pas  dans le code du travail de règle fixant  la durée de conservation des dossiers : l’article D. 4624-46 renvoie aux exigences du code de la santé publique

    Toutefois, il existe des règles spécifiques en fonction de certains risques auxquels le salarié est exposé (par exemple, au moins cinquante ans après la fin de la période d’exposition pour les salariés exposés à des agents chimiques dangereux ou aux rayonnements ionisants ; dix ans pour les salariés exposés à des agents biologiques pathogènes).

    Le médecin du travail, comme tout médecin salarié, n’a aucun droit personnel sur les dossiers constitués dans le cadre du service de santé au travail. Il ne peut ni les emporter ni les détruire lorsqu’il quitte le service de santé au travail mais doit les remettre directement à son successeur.


    ([1]) Articles R.1110-1 à R. 1110-3 du code de la santé publique sur la confidentialité des informations médicales conservées sur support informatique.

    La CNIL a établi des recommandations pour  la sécurité des fichiers de données de santé informatisés en particulier dans les applications en réseau et à l’occasion des opérations de maintenance.

    ([2]) Compte tenu de l’importance des archives qu’ils détiennent et de leur ancienneté, les établissements de santé publics et privés sont, à titre dérogatoire, autorisés à déposer les archives qu’ils détiennent à la date du 10 août 2011, auprès d’un hébergeur, sans avoir à recueillir le consentement exprès des personnes concernées dont le consentement est réputé accordé - art. 29 de la loi n°2011-940 du 10 août 2011.

    ([3]) Article R. 1111-8 du code de la santé publique :« Pour l’application des dispositions mentionnées aux troisième et sixième alinéas de l’article L. 1111-7 , les informations de santé qui ont été déposées auprès d’un hébergeur par un professionnel ou un établissement de santé ne peuvent être communiquées par cet hébergeur à la personne qu’elles concernent qu’avec l’accord du professionnel de santé ou l’établissement qui en a le dépôt. »

    ([4]) Disponible sur le site www.conseil-national.medecin.fr

    ([5]) Article R.1112-7, 3ème alinéa : « Le dossier médical mentionné à l'article R. 1112-2 est conservé pendant une durée de vingt ans à compter de la date du dernier séjour de son titulaire dans l'établissement ou de la dernière consultation externe en son sein. Lorsqu'en application des dispositions qui précèdent, la durée de conservation d'un dossier s'achève avant le vingt-huitième anniversaire de son titulaire, la conservation du dossier est prorogée jusqu'à cette date. Dans tous les cas, si la personne titulaire du dossier décède moins de dix ans après son dernier passage dans l'établissement, le dossier est conservé pendant une durée de dix ans à compter de la date du décès. Ces délais sont suspendus par l'introduction de tout recours gracieux ou contentieux tendant à mettre en cause la responsabilité médicale de l'établissement de santé ou de professionnels de santé à raison de leurs interventions au sein de l'établissement. »

    ([6]) Circulaire DHOS/E1 n° 2009-271 du 21 août 2009 relative à la communicabilité des informations de santé concernant une personne décédée ayant été hospitalisée dans un établissement public de santé ou un établissement privé chargé d’une mission de service public ;

    ([7]) Arrêté du 24 juin 1970 fixant les modèles de dossier médical et de fiche de visite du travail prévus à l'article 16 du décret n° 69-623 du 13 juin 1969 relatif à l'organisation des services médicaux du travail,  publié au J.O du 12 septembre 1970

    ([8]) HAS/Service des bonnes pratiques professionnelles : Le dossier médical en santé au travail, janvier 2009.

  • Article 97 - Interdiction mesures incompatibles avec l'indépendance des méd. salariés

    Article 97 (article R.4127-97 du code de la santé publique)

    Un médecin salarié ne peut, en aucun cas, accepter une rémunération fondée sur des normes de productivité, de rendement horaire ou toute autre disposition qui auraient pour conséquence une limitation ou un abandon de son indépendance ou une atteinte à la qualité des soins.

    Cet article est essentiel pour préserver l’indépendance du médecin dans son activité médicale. Dans plusieurs hypothèses, l’indépendance professionnelle du médecin peut être menacée :

    • contrat de travail ;
    • convention collective ;
    • accord d’intéressement ;
    • rémunérations complémentaires des médecins hospitaliers ;
    • instructions et objectifs donnés aux médecins salariés.

    Les contrats qui les définissent devront donc être rédigés avec le plus grand soin.

    Il est rappelé ici, que si les contrats doivent obligatoirement être soumis à l’instance compétente de l’Ordre des médecins (article L 4113-9 du code de la santé publique), il est vivement conseillé, avant leur signature, de solliciter l’avis de l’Ordre.

    Le paiement mensuel ou horaire est le plus fréquent. Sa fixité devrait mettre, en principe, le médecin à l’abri des pressions. Il faudra cependant être vigilant sur deux points :

    • Les rémunérations complémentaires (octroi de primes ou d’avantages…) ne devront en aucun cas être subordonnées à des objectifs quantitatifs qui porteraient atteinte à l’indépendance du médecin telle qu’elle a été envisagée aux articles 5 et 95 du code.
    • Il en est de même pour les évolutions de carrière et donc de rémunérations. Il est préférable qu’elles soient fixées sur des indices ou des critères objectifs indépendamment  du pouvoir discrétionnaire de l’employeur
       

    La possibilité, offerte par un même employeur de compléter une  rémunération salariée par des paiements à l’acte doit être considérée avec circonspection, car son application  peut constituer un important moyen de pression. Si elle est proposée, elle devra faire l’objet, de dispositions permettant d’en apprécier la caractère déontologique.

    De façon générale, le médecin et l’Ordre doivent être vigilants sur les objectifs quantitatifs voire qualitatifs qui lui seraient imposés.

    Cet article ne vise pas uniquement les modes de rémunération des médecins salariés mais interdit de façon plus générale toute disposition qui limiterait ou nuirait à l’indépendance du médecin ou à la qualité des soins.

  • Article 98 - Abus de fonction

    Article 98 (article R.4127-98 du code de la santé publique)

    Les médecins qui exercent dans un service privé ou public de soins ou de prévention ne peuvent user de leur fonction pour accroître leur clientèle.

    Cet article s'applique aux médecins qui appartiennent à un service privé ou public de soins ou de prévention et qui ont également une activité de soins privée.

    Ils doivent veiller à ce qu'aucune confusion ne soit créée par ces activités différentes..

    Deux situations sont répréhensibles :

    1. lorsque le médecin profite de l’exercice de ses fonctions salariées pour recruter une patientèle personnelle pour son activité privée ;
    2. lorsqu’en dehors de son activité salariée, le médecin oriente les patients vers le service privé ou public de soins ou de prévention où il exerce ses fonctions.
       

    Le médecin peut être praticien hospitalier à temps partiel, attaché dans un établissement hospitalier public, ou bien contractuel  d'un service public, de prévention le plus souvent, et dispose parallèlement d'une activité dans le secteur privé. Dans ce cas, il ne profitera pas de sa situation pour orienter vers son activité privée des patients qu'il aurait été amené à prendre en charge dans le cadre de son activité publique.

     Le praticien hospitalier à temps plein bénéficie de la possibilité statutaire d’exercer une activité libérale (secteur privé) pouvant comprendre des consultations, des actes et des soins en hospitalisation au sein de l’établissement public de santé, (articles L.6154-1 et suivants du code de la santé publique). Dans ce cas, il exerce dans le cadre d'un contrat type d'activité libérale (voir note [1]). Il est indispensable que les contrats établis à l'occasion de ce type d'activité fassent référence au présent article du code de déontologie.

    Aucune installation médico-technique ne doit être réservée à l’exercice de l’activité libérale et le praticien hospitalier doit veiller à ce qu'aucune confusion n'apparaisse entre l'activité publique et l'activité privée. Il s’assurera du libre choix des patients et de l'égalité d'accès à l'un et l'autre des secteurs de soins et respectera la proportion de temps et le volume d’actes qu'il doit consacrer au cours de la semaine, respectivement à l'une et à l'autre activité. 

    Les soins d'un patient pris en charge initialement dans le secteur public ne devront pas être poursuivis dans le secteur privé, sauf demande expresse du patient.

    Le praticien enfreint le présent article du code si l'organisation de l'activité privée crée des conditions d'accès privilégié au secteur privé ou si, par exemple, par son comportement, les consignes qu'il donne au personnel ou l'accueil qu'il réserve  aux patients, il crée des conditions discriminantes entre le secteur public et le secteur privé de soins de son service.


    ([1]) Article R.6154-4 du code de la santé publique, annexe 61-2

  • Article 99 - Interdiction de donner des soins en médecine de prévention

    Article 99 (article R.4127-99 du code de la santé publique)

    Sauf cas d'urgence ou prévu par la loi, un médecin qui assure un service de médecine préventive pour le compte d'une collectivité n'a pas le droit d'y donner des soins curatifs.
    Il doit adresser la personne qu'il a reconnue malade au médecin traitant ou à tout autre médecin désigné par celle-ci.

    En cas d'urgence un médecin doit donner ses soins ou s'assurer que le patient reçoit les soins nécessaires, selon les dispositions de l'article 10 du présent code. L'article 223-6 du code pénal réprime le manquement à cette obligation (voir note [1]).

    En dehors de ce cas précis, le praticien chargé d'un service de prévention  doit assurer sa seule mission définie par la loi. Par exemple le rôle du médecin du travail, exclusivement préventif (voir note [2]), consiste à éviter toute altération de la santé des salariés du fait de leur travail notamment en surveillant les conditions d'hygiène sur le lieu de travail, les risques de contagion, l'état de santé des salariés.

    Si, à l'occasion d'un examen, le médecin de prévention dépiste un problème médical, pour lequel il lui paraît nécessaire d'envisager un traitement ou de consulter un praticien, il doit adresser l'intéressé au médecin de son choix.

    Le cas de la consultation spécialisée nécessitée par un problème précis d'aptitude à un poste est différent.  Le médecin  du travail  est libre de prescrire les examens complémentaires en relation avec l’activité du salarié ou liés au dépistage des maladies dangereuses pour l’entourage du salarié et de les confier aux professionnels de santé de son choix (articles R. 4624-25 et R. 4624-26 du code du travail). Le médecin doit informer le médecin désigné par le salarié des conclusions de l'examen, si celles-ci font apparaître une pathologie jusqu'alors silencieuse.

    Ces précisions doivent apparaître dans le contrat d'exercice.


    ([1]) Article 223-6 - 2° alinéa du code pénal (ex-art.63) : « Sera puni des mêmes peines (cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende) quiconque s'abstient volontairement de porter à une personne en péril l'assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours ».

    ([2]) Article L 4622-3 du code du travail

  • De l'exercice de la profession : Exercice de la médecine de contrôle (art 100 à 104)

  • Article 100 - Non cumul des rôles de contrôle, de prévention, de soins

    Article 100 (article R.4127-100 du code de la santé publique)

    Un médecin exerçant la médecine de contrôle ne peut être à la fois médecin de prévention ou, sauf urgence, médecin traitant d'une même personne.
    Cette interdiction s'étend aux membres de la famille du malade vivant avec lui et, si le médecin exerce au sein d'une collectivité, aux membres de celle-ci.

    Les commentaires de ce chapitre concernent au premier chef les médecins-conseils des régimes d'assurance maladie de sécurité sociale. D'autres médecins sont chargés de missions de contrôle et leurs activités sont alors soumises aux prescriptions des articles 100 à 104 du code de déontologie. Mais il existe des différences entre ces deux formes de médecine de contrôle. Si l’échange d’information entre le médecin traitant et le médecin conseil des régime d’assurance maladie obligatoire est autorisé, conformément à l’article 50, cela n’est pas le cas des médecins contrôleurs des mutuelles complémentaires et des compagnies d’assurance privées.

    L'indépendance du médecin contrôleur doit être totale. Il doit donc être libre de tout lien avec la personne examinée, au même titre qu’il se doit de défendre sa totale indépendance professionnelle vis-à-vis de l’organisme qui le mandate et ne jamais se trouver en situation de conflit d’intérêts. L’exercice habituel de la médecine de contrôle pour un organisme privé doit donner lieu à la rédaction d’un contrat, communiqué au conseil départemental et garantissant cette indépendance.

    La médecine de contrôle s'adresse à un patient dans des conditions différentes de l'exercice de soins. C'est essentiellement lorsqu'il demande le bénéfice de la législation sociale ou lorsqu'il a contracté librement avec un organisme de droit privé, directement dans le cas d'une assurance-vie, par exemple, indirectement s'il s'agit, par exemple encore, du contrôle patronal des arrêts de travail du personnel salarié ou de celui des personnels de la fonction publique par les médecins agréés.

    Certaines obligations déontologiques du médecin pratiquant cette forme de l'exercice médical sont identiques quelles qu'en soient les modalités.

    Le médecin se doit d'abord d'avertir clairement le patient de la mission qui lui est confiée et notamment qu'il ne s'agit pas d'une mission de soins. Il doit aussi lui expliquer le cadre particulier de son examen médical.

    L'exigence de confraternité demeure. En aucun cas le médecin contrôleur ne doit faire publiquement de commentaires qui puissent être désobligeants ou risquent d'entamer la confiance du patient pour le ou les médecins chargés des soins, notamment lorsqu'il prend connaissance des documents qui lui sont communiqués, à l'occasion des confidences qui lui sont faites, ou au terme de l'examen qu'il a pratiqué. Il ne se départira jamais vis-à-vis du patient d'un comportement qui soit respectueux, neutre et réservé.

    Il tiendra informé le médecin traitant de ses conclusions et les explicitera, surtout lorsqu'elles divergent de la prise en charge choisie par le médecin traitant pour le patient examiné.

    Dans les conclusions qu'il rédigera pour l'organisme qui le mandate, le médecin s'en tiendra aux conclusions sans rien indiquer qui soit susceptible de transgresser le secret médical.

    Comme dans le cadre de l'exercice libéral, le médecin veillera à la confidentialité de ses dossiers, du courrier qui lui est adressé ou qu'il envoie. Il instruira son personnel de ses obligations vis-à-vis du secret professionnel et plus généralement veillera au respect des règles afférentes au secret médical dans le cadre de sa pratique professionnelle.

    Certaines particularités peuvent concerner les praticiens chargés de l'application de la législation sociale, surtout dans les organismes d'assurance maladie. Ils se doivent de veiller à l'indépendance du médecin contrôleur qui doit être totale.

  • Article 101 - Désistement

    Article 101 (article R.4127-101 du code de la santé publique)

    Lorsqu'il est investi de sa mission, le médecin de contrôle doit se récuser s'il estime que les questions qui lui sont posées sont étrangères à la technique proprement médicale, à ses connaissances, à ses possibilités ou qu'elles l'exposeraient à contrevenir aux dispositions du présent code.

    Cet article impose au médecin de contrôle, qu'il agisse dans le cadre de l'assurance, du contrôle de l'absentéisme... de se récuser si la mission qui lui est confiée dépasse sa qualification, ses connaissances et son expérience ou est susceptible d'altérer l'indépendance de ses décisions (article 46).

    Il faut en outre rappeler qu'un médecin spécialiste, qui de façon régulière pratiquerait des contrôles en dehors de sa discipline de qualification, peut, sans préjudice des poursuites disciplinaires qui pourraient être engagées à son encontre, être retiré de la liste des spécialistes.

  • Article 102 - Information de la personne examinée

    Article 102 (article R.4127-102 du code de la santé publique)

    Le médecin de contrôle doit informer la personne qu'il va examiner de sa mission et du cadre juridique où elle s'exerce et s'y limiter.
    Il doit être très circonspect dans ses propos et s'interdire toute révélation ou commentaire.
    Il doit être parfaitement objectif dans ses conclusions.

    Le médecin examine des patients qui ne l'ont pas choisi ou des dossiers derrière lesquels se trouve une personne, dont le sort est en jeu.

    Il doit formuler des conclusions impartiales et équitables dans le respect du secret médical. Il donne son avis en toute indépendance, il défend, contre toute fraude et tout abus, les intérêts légitimes de l'organisme qui l'a mandaté, mais il n'est pas l'instrument d'un dirigisme médical qui imposerait l'orientation thérapeutique.

    Le médecin contrôleur a aussi des obligations envers les patients qu'il examine de manière complète (ou dont il examine les dossiers). Son examen tant des patients que des dossiers doit être consciencieux. Il ne peut exiger une investigation qui comporterait des risques. Il doit être prudent dans ses propos et se garder de toute révélation traumatisante.

    Enfin le médecin conseil d'un organisme social est fréquemment en relation avec les médecins traitants des malades (article 50). Il ne doit pas déborder sa mission et n'intervient pas dans le traitement. S'il estime avoir à faire une observation ou une suggestion, c'est au médecin traitant qu'il doit s'adresser.

    Le médecin d’assurance doit demeurer indépendant vis-à-vis des compagnies qui le missionnent. Il doit éviter tout ce qui pourrait constituer un conflit d’intérêts.

  • Article 103 - Non immixtion dans le traitement

    Article 103 (article R.4127-103 du code de la santé publique)

    Sauf dispositions contraires prévues par la loi, le médecin chargé du contrôle ne doit pas s'immiscer dans le traitement ni le modifier. Si, à l'occasion d'un examen, il se trouve en désaccord avec le médecin traitant sur le diagnostic, le pronostic ou s'il lui apparaît qu'un élément important et utile à la conduite du traitement semble avoir échappé à son confrère, il doit le lui signaler personnellement. En cas de difficultés à ce sujet, il peut en faire part au Conseil départemental de l'Ordre.

    Les relations entre médecins-conseils des organismes sociaux et médecins traitants sont à tous points de vue souhaitables et souvent nécessaires. Elles permettent d'éviter la répétition de certains examens, elles apportent au médecin-conseil des éléments parfois indispensables. Certains avantages sociaux ne sont attribués que s'il y a accord entre les deux médecins (affections de longue durée, cures thermales avec hospitalisation, etc.).

    C'est à son confrère médecin traitant que le médecin-conseil doit s'adresser s'il a une remarque à faire sur le diagnostic ou la thérapeutique.

    La communication de renseignements du médecin traitant au médecin-conseil des régimes de sécurité sociale est possible mais selon les règles du "secret partagé" (c'est-à-dire entre praticiens concourant au diagnostic et au traitement). On peut considérer l'échange entre les deux médecins comme une consultation médico-sociale dans laquelle chacun apporte sa compétence (article 50).

    Mais le médecin traitant n'y est pas obligé. Et il ne peut donner les renseignements qu'à plusieurs conditions :

    •  que le patient ne s'y oppose pas ;
    • que ces renseignements soient transmis confidentiellement, à un méde­cin-conseil nommément désigné (et non au "service du contrôle").
       

    Les mêmes précautions sont à prendre lorsque ces renseignements sont demandés au médecin par le biais d'un questionnaire. Si le médecin estime pouvoir les fournir avec l'accord de son patient il ne doit correspondre qu'avec un médecin-conseil d’assurance maladie déterminé, tenu par le secret.

  • Article 104 - Secret et médecine de contrôle

    Article 104 (article R.4127-104 du code de la santé publique)

    Le médecin chargé du contrôle est tenu au secret envers l'administration ou l'organisme qui fait appel à ses services. Il ne peut et ne doit lui fournir que ses conclusions sur le plan administratif, sans indiquer les raisons d'ordre médical qui les motivent.
    Les renseignements médicaux nominatifs ou indirectement nominatifs contenus dans les dossiers établis par ce médecin ne peuvent être communiqués ni aux personnes étrangères au service médical, ni à un autre organisme.

    Le médecin contrôleur est, comme tout médecin, astreint au secret  médical. Il ne doit pas divulguer à des tiers ce qu'il a appris sur les patients à l'occasion de ses contrôles. Il est tenu au secret vis-à-vis de son administration ou de son mandant (voir note [1]) auquel il ne donnera que ses conclusions sans communiquer les données médicales qui ont dicté son avis.

    Les médecins-conseils des régimes d'assurance maladie ont obtenu une séparation stricte entre les données administratives ou de liquidation de prestations et les données personnelles de santé, couvertes par le secret médical, qui sont détenues exclusivement par les services médicaux. C'est grâce à cette séparation que des échanges de renseignements peuvent s'effectuer entre médecin-conseil et médecin traitant (article50).

    Les documents médicaux du médecin contrôleur sont confidentiels et doivent être protégés contre toute indiscrétion. Il appartient à l'organisme auquel le médecin collabore de lui procurer les conditions matérielles nécessaires à cette confidentialité.


    ([1]) La Cour de cassation a jugé que la remise de la lettre du médecin traitant à la Compagnie d'assurances procédait d'une violation du secret médical, commise par le médecin d'assurances qui ne pouvait révéler à son mandant (la Compagnie d'assurances) des renseignements qu'il avait reçus de son confrère, de sorte que cette lettre devait être écartée des débats (Civ. 1ère, 12 janvier 1999,   n° 96-20580).

  • De l'exercice de la profession : Exercice de la médecine d'expertise (art 105 à 108)

  • Article 105 - Non cumul des rôles d'expert et de médecin traitant

    Article 105 (article R.4127-105 du code de la santé publique)

    Nul ne peut être à la fois médecin expert et médecin traitant d'un même malade.
    Un médecin ne doit pas accepter une mission d'expertise dans laquelle sont en jeu ses propres intérêts, ceux d'un de ses patients, d'un de ses proches, d'un de ses amis ou d'un groupement qui fait habituellement appel à ses services.

    La fonction d'expert recouvre une très grande variété de missions (note [1]).

    L'indépendance du médecin expert est fondamentale. Il a l'obligation d'être tout à fait objectif. Pour cela il doit être libre de tout lien avec la personne examinée et avec les parties en cause

    Dans le cadre judiciaire, il est l'auxiliaire de la justice et doit en informer la personne examinée (article107). Son rôle est de fournir, dans les limites de la mission qui lui est confiée, les éléments médicaux qui éclaireront la décision du juge.


    ([1]) J. ROSSANT-LUMBROSO « Les experts médicaux et les médecins qui évaluent le dommage corporel », rapport adopté lors de la session du Conseil national de l’Ordre des médecins du 20 octobre 2011,

  • Article 106 - Récusation

    Article 106 (article R.4127-106 du code de la santé publique)

    Lorsqu'il est investi d'une mission, le médecin expert doit se récuser s'il estime que les questions qui lui sont posées sont étrangères à la technique proprement médicale, à ses connaissances, à ses possibilités ou qu'elles l'exposeraient à contrevenir aux dispositions du présent code.

    Comme le médecin de contrôle (article 101), le médecin expert est soumis à l'ensemble du code de déontologie et doit se récuser si sa mission l'expose à contrevenir à certaines de ses dispositions (article 46).

    Il doit aussi se récuser si sa qualification et ses connaissances médico-légales (techniques de l'expertise, cadre juridique) ne lui permettent pas de mener à bien la mission qui lui est confiée.

  • Article 107 - Information de la personne examinée

    Article 107 (article R.4127-107 du code de la santé publique)

    Le médecin expert doit, avant d'entreprendre toute opération d'expertise, informer la personne qu'il doit examiner de sa mission et du cadre juridique dans lequel son avis est demandé.

    La situation du médecin expert est particulière. Il ne doit pas y avoir de malentendu de la part du sujet examiné, ni sur l'identité et la qualité de médecin de l'expert, ni sur l'origine et le contenu de la mission qui lui est confiée.

    Quelles que soient les circonstances, le médecin expert accomplit sa fonction dans le respect de la personne humaine. Il n'a pas le droit d'employer des moyens de contrainte ni de procéder à des investigations dangereuses.

  • Article 108 - Rédaction du rapport et secret

    Article 108 (article R.4127-108 du code de la santé publique)

    Dans la rédaction de son rapport, le médecin expert ne doit révéler que les éléments de nature à apporter la réponse aux questions posées. Hors de ces limites, il doit taire tout ce qu'il a pu connaître à l'occasion de cette expertise.
    Il doit attester qu'il a accompli personnellement sa mission.

    Cet article tire les conséquences de l'obligation du secret professionnel dans l'exercice de la médecine d'expertise.

    Dans le cadre de l'expertise judiciaire, l'expert n'a pas de secret pour le juge, dans les limites de sa mission. Mais il est seulement chargé de répondre aux questions (d'ordre médical ou médico-légal) de cette mission. Il doit taire tout ce qu'il a pu apprendre ou ce qui lui a été confié hors des limites de la mission. Dans le cadre pénal il ne doit pas faire état des aveux d'un inculpé, ni d'une dénonciation qui lui aurait été faite.

    Le médecin expert se trouve souvent dans des situations délicates. Car si, son expertise faite, il est cité comme témoin - par exemple devant la Cour d'assises il prêtera serment de dire "toute la vérité" - il peut se demander s'il a le devoir de livrer des confidences. Et si sa mission le charge de recueillir "tous renseignements", doit-il tout dire ? Un médecin expert chargé de faire l'autopsie d'une jeune femme morte dans un accident et qui découvre, en plus du traumatisme crânien responsable de la mort, l'existence d'une maladie sexuellement transmissible concomitante, doit-il consigner ce dernier élément dans son rapport ?

    A ces questions difficiles il faut répondre que le médecin expert, pour respecter le secret professionnel, n'a jamais à déborder sa mission, et qu'il ne doit pas accepter une mission qui va au-delà de l'appréciation des éléments médicaux de l'affaire pour laquelle il a été commis.

    Bien entendu, c'est seulement au juge ou à l'administration qui l'a désigné que le médecin répond. Il ne doit rien divulguer au-dehors, à aucun tiers et notamment à la presse. Il ne peut publier son expertise, ni donner à son sujet une conférence de presse, ni accepter d'interview (voir note [1]).

    La question se pose de savoir si le médecin expert peut interroger le médecin traitant et si celui-ci peut lui répondre sans déroger au secret médical. Cette question est très controversée. S'il estime pouvoir répondre (il ne peut y être obligé et doit s’assurer de l’absence d’opposition sur ce point du patient), le médecin traitant doit s'en tenir strictement aux seuls points soumis à l'expertise. Sa position est particulièrement délicate dans le domaine psychiatrique, car ici ce que connaît le médecin traitant est presque entièrement fait de confidences.

    Les dossiers médicaux sont-ils à la disposition des experts ? A plusieurs reprises à propos des dossiers hospitaliers et des dossiers de sécurité sociale, la Cour de cassation s'est prononcée en faveur de la communication des dossiers au médecin expert régulièrement désigné. Cependant, le seul fait d'être investi d'une mission confiée par une juridiction civile ou administrative n'autorise pas la communication systématique.

     Dans cette situation, il est conseillé au médecin qui détient le dossier de remettre au patient, à sa demande, le double du dossier, à charge pour lui de le transmettre à l’expert ou de s’assurer de son accord pour la communication du dossier à l’expert.

    Les mêmes règles s'appliquent au médecin expert désigné dans le cadre d'une contestation opposant un assuré social et la Sécurité sociale, ou encore en matière de litiges consécutifs à un accident du travail.

    Ces principes doivent aussi être respectés lorsque le patient est décédé et que ses héritiers agissent en justice. Ceux-ci sont seuls compétents pour donner au praticien le droit de confier des éléments médicaux relatifs au défunt à un expert désigné par une juridiction civile ou administrative.

    Lorsqu'il y a refus de communication par le patient ou sa famille, il n'appartient qu'à la juridiction saisie d'en tirer les conséquences. Le médecin ne saurait passer outre.

    Dans tous les cas, l'expert doit prendre toutes mesures utiles pour que les documents qui ont pu lui être confiés soient protégés contre toute indiscrétion.

    En matière pénale, le dossier, saisi à la demande du juge d'instruction, a été placé sous scellés fermés. Il appartient à l'expert, après en avoir pris connaissance de refermer les enveloppes et de reconstituer les scellés, en mentionnant son intervention, attestée par sa signature et la date.


    ([1]) Chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des médecins, 6 mai 2011, n°10721 : « Il résulte des dispositions des articles R.4127-4, R.4127-108 et L.1110-4 du code de la santé publique que le secret médical couvre non seulement les faits de nature médicale mais l’ensemble des faits qu’a pu connaître le médecin dans l’exercice de sa profession ; que lorsque, pour être présent auprès d’une personne, le médecin n’a d’autre motif que sa fonction médicale, tous les éléments venus à sa connaissance sont couverts par le secret médical ; que, ni la volonté d’éclairer le public, ni le caractère déjà public de certaines informations ne sont de nature à légitimer les révélations faites par un médecin en violation du secret médical ; que ces dispositions s’appliquent intégralement aux experts médicaux, alors même que les personnes expertisées ne sont pas des « patients », sous la seule réserve des éléments devant être livrés au juge qui a décidé l’expertise. »

  • Dispositions diverses (art 109 à 112)

  • Article 109 - Engagement du médecin de respecter le code de déontologie

    Article 109 (article R.4127-109 du code de la santé publique)

    Tout médecin, lors de son inscription au tableau, doit affirmer devant le conseil départemental de l'ordre qu'il a eu connaissance du présent code et s'engager sous serment et par écrit à le respecter.

    En France, le code de déontologie médicale est publié sous forme de décret en Conseil d’Etat, conformément à l'article L.4127-1 du code de la santé publique. Ce code indique aux médecins leurs obligations, et sert de référence à la juridiction professionnelle. Les dispositions du code s'imposent à tous les médecins inscrits au tableau (article1).

    Le nouveau médecin prête serment, lors de la soutenance de sa thèse de doctorat ou au cours d'une cérémonie collective organisée par l'Ordre. La prestation orale se double d'un engagement écrit lors de son inscription au tableau de l'Ordre.

  • Article 110 - Fausse déclaration

    Article 110 (article R.4127-110 du code de la santé publique)

    Toute déclaration volontairement inexacte ou incomplète faite au Conseil de l'Ordre par un médecin peut donner lieu à des poursuites disciplinaires.

    Il va de soi que les médecins doivent fournir à leurs conseils les renseignements qui leur sont demandés avec une entière loyauté, que ce soit à l’occasion d’une demande d'inscription, de qualification ou de la communication d'un contrat.

    Une déclaration mensongère ou volontairement incomplète en vue de l’inscription peut justifier un refus d’inscription au tableau de l’Ordre ; en outre, l’article L.4163-8 du code de la santé publique rend le médecin passible d’une amende de 3 750 euros et d’un emprisonnement de trois mois.

  • Article 111 - Modification d'exercice

    Article 111 (article R.4127-111 du code de la santé publique)

    Tout médecin qui modifie ses conditions d'exercice ou cesse d'exercer est tenu d'en avertir le Conseil départemental. Celui-ci prend acte de ces modifications et en informe le Conseil national.

    C'est là une formalité indispensable, car le tableau de l'Ordre doit être tenu avec exactitude.

    En cas de changement de résidence, le médecin doit en avertir le conseil du département qu'il quitte et demander son inscription au tableau du conseil départemental de sa nouvelle résidence professionnelle.

    Il en va de même s’il met fin à son activité sur un site d’exercice distinct de sa résidence professionnelle.

    Un médecin qui n'exerce pas ou cesse d'exercer peut demander à rester inscrit au tableau de l'Ordre : il continue à faire partie de la communauté médicale

  • Article 112 - Motivation des décisions, recours

    Article 112 (article R.4127-112 du code de la santé publique)

    Toutes les décisions prises par l'ordre des médecins en application du présent code doivent être motivées.
    Celles de ces décisions qui sont prises par les conseils départementaux peuvent être réformées ou annulées par le Conseil national soit d'office, soit à la demande des intéressés ; celle-ci doit être présentée dans les deux mois de la notification de la décision.

    Les décisions prises par l'Ordre des médecins sont susceptibles de recours.

    1. En matière d’inscription, la décision prise par le Conseil départemental de l’Ordre des médecins est susceptible d’appel devant le Conseil régional de l’Ordre des médecins (article L.4112-4 du code de la santé publique) puis devant le Conseil national de l’Ordre des médecins. Les décisions administratives de suspension temporaire du droit d’exercer, en cas d’infirmité ou d’état pathologique rendant dangereux l’exercice de la profession, prises par le Conseil régional de l’Ordre des médecins font le cas échéant l’objet d’un recours devant le Conseil national de l’Ordre des médecins (voir note [1]). Les décisions du Conseil national de l’Ordre des médecins peuvent être déférées au Conseil d’Etat par un recours en excès de pouvoir.

    Les autres décisions administratives prises par les Conseils départementaux de l’Ordre des médecins en application du code de déontologie médicale (par exemple : autorisation d’exercice sur un site distinct de la résidence professionnelle (article 85), dispense de participation à la permanence des soins, installation après remplacement …) peuvent faire l’objet d’un appel devant le Conseil national de l’Ordre des médecins. Depuis la modification de l’article R. 311-1 du code de justice administrative (voir note [2]), ces décisions du Conseil national relèvent de la compétence des tribunaux administratifs (voir note [3]).

    Il faut souligner l'obligation générale qui est faite aux conseils de l'Ordre de motiver avec précision leurs décisions, que celles-ci soient favorables ou défavorables au médecin qui en est l'objet.

    1. En matière disciplinaire, il existe deux échelons, qui sont constitués par la chambre régionale disciplinaire de 1ère instance et la chambre disciplinaire nationale, juridiction d'appel. Les décisions prises par la chambre nationale peuvent être déférées au Conseil d'Etat par la voie du pourvoi en cassation.

    ([1]) Article R.4124-3-2 et suivants du code de la santé publique

    ([2]) modifié par le décret n° 2010-164 du 22 février 2010

    ([3] ) Article R. 312-10 du code de justice administrative : « Les litiges relatifs aux législations régissant les activités professionnelles, notamment les professions libérales, les activités agricoles, commerciales et industrielles, la réglementation des prix, la réglementation du travail, ainsi que la protection ou la représentation des salariés, ceux concernant les sanctions administratives intervenues en application de ces législations relèvent, lorsque la décision attaquée n'a pas un caractère réglementaire, de la compétence du tribunal administratif dans le ressort duquel se trouve soit l'établissement ou l'exploitation dont l'activité est à l'origine du litige, soit le lieu d'exercice de la profession.

    Si, pour ces mêmes catégories de litiges, la décision contestée a un caractère réglementaire et ne s'applique que dans le ressort d'un seul tribunal administratif, ce tribunal administratif est compétent pour connaître du litige ».